La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/09/2020 | FRANCE | N°18-26.332

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 23 septembre 2020, 18-26.332


COMM.

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 septembre 2020




Rejet non spécialement motivé


M. RÉMERY, président



Décision n° 10215 F

Pourvoi n° U 18-26.332




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020

La société Gifra, société civile immobi

lière, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° U 18-26.332 contre l'arrêt rendu le 13 septembre 2018 par la cour d'appel de Metz (1re chambre), dans le litige l'opposant à l...

COMM.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 septembre 2020

Rejet non spécialement motivé

M. RÉMERY, président

Décision n° 10215 F

Pourvoi n° U 18-26.332

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020

La société Gifra, société civile immobilière, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° U 18-26.332 contre l'arrêt rendu le 13 septembre 2018 par la cour d'appel de Metz (1re chambre), dans le litige l'opposant à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Guerlot, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Carbonnier, avocat de la société Gifra, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 juin 2020 où étaient présents M. Rémery, président, M. Guerlot, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Gifra aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Gifra et la condamne à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour la société Gifra.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande formulée par la SCI GIFRA à l'encontre de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine tendant à la déchéance du droit aux intérêts et d'avoir débouté la SCI GIFRA de l'ensemble de ses prétentions ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « L'action en déchéance du droit aux intérêts prévue par l'article L. 312-33 du code de la consommation se distingue de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels. Elle est régie par l'article L. 110-4 du Code de commerce. Selon l'article L. 110-4 du code de commerce les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes. Le délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels prévue par l'article L. 312-33 du Code de la consommation court du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant, dans l'offre de crédit immobilier, le taux effectif global. Ainsi le point de départ est la date du contrat lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de l'erreur à l'emprunteur. La SCI GIFRA soutient que le taux effectif global est erroné au motif que les frais de notaire, le coût d'information annuelle de la caution, le coût de l'hypothèque conventionnelle, et les frais relatifs à la mise en gage, auraient dû être intégrés dans le calcul du taux effectif global. Le contrat indique en page 2 que le taux d'intérêt annuel représente 3,82 % l'an et que le TEG de 3,8938 % inclut les frais de dossier d'un montant de 2.000,00 euros ainsi que les "frais de prise de garantie" d'un montant de 20.350 euros. La SCI GIFRA ne démontre pas avoir payé en outre, après la conclusion du prêt en date du 19 septembre 2008, d'autres frais supplémentaires non inclus dans la somme de 20.350 euros, au titre de l'information annuelle de la caution, de la prise d'hypothèque et/ou au titre de la mise en gage, de sorte qu'elle ne démontre la révélation d'aucune erreur affectant le TEG qui soit postérieure à la signature de l'acte sous seing privé. Par ailleurs la SCI GIFRA a eu connaissance au plus tard au jour de la signature de l'acte notarié du 26.09.2008 du montant des frais de notaire, de sorte que le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts doit être fixé u plus tard à cette date. L'action engagée plus de cinq ans après est prescrite. La demande en déchéance du droit aux intérêts est irrecevable » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « La SCI GIFRA soutient que la banque se trouve déchue de son droit à intérêts et au remboursement des intérêts conventionnels indûment perçus à ce jour, en soulevant le caractère erroné du taux effectif global (ci-après, le TEG) stipulé dans le contrat de prêt. À cet égard, il convient de relever que tout comme l'action en responsabilité contractuelle exercée à l'encontre de la banque, l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel relatif à un prêt bancaire se prescrit par cinq ans à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le TEG. En l'espèce, la SCI GIFRA, dont le gérant, Monsieur B... I..., est expert-comptable, n'établit pas qu'il n'aurait pas eu connaissance du caractère prétendument erroné du TEG lors de la souscription du prêt. En conséquence, le délai de prescription a commencé à courir à compter de la souscription du prêt, soit à compter du 19 septembre 2008. Or, la SCI GIFRA n'a fait assigner la Caisse régionale de Crédit Agricole de Lorraine que par acte d'huissier signifié le 14 décembre 2014, soit plus de 5 ans après la souscription du prêt. En conséquence, force est de constater que la demande formulée par la SCI GIFRA se trouve irrecevable comme prescrite. En conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur le fond sur le caractère prétendument erroné du TEG, étant précisé que les demandes aux fins d'expertise comptable se trouvent également frappées de prescription. Au surplus, et en toute hypothèse, il convient d'observer qu'il résulte des éléments versés aux débats que l'erreur affectant le TEG - à supposer que doivent y être intégrés les éléments invoqués par la demanderesse - se trouve inférieure à la quatrième décimale, de sorte qu'elle n'est aucunement de nature à entraîner la nullité dudit taux » ;

ALORS QU'une juridiction excède ses pouvoirs en déclarant une demande irrecevable tout en la rejetant comme mal fondée ;

Qu'en l'espèce, la cour d'appel a confirmé le jugement entrepris ayant déclaré irrecevable la demande de la SCI GIFRA tendant à la déchéance du droit aux intérêts pour ensuite débouter la SCI GIFRA de l'ensemble de ses prétentions ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile, ensemble les principes qui régissent l'excès de pouvoir.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de dommages-intérêts formulée par la SCI GIFRA pour manquement par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine à son devoir d'information et de mise en garde et d'avoir débouté la SCI GIFRA de l'ensemble de ses prétentions ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « La SCI GIFRA soutient que le crédit agricole a manqué à une obligation d'information et de mise en garde ou de conseil dès l'octroi du crédit, mais également en cours d'exécution du contrat en ne l'avisant pas de la nécessité de sortir de cette situation lorsque le cours de l'euro par rapport au franc suisse a évolué violemment. [
] Le délai de prescription quinquennal d'une action en responsabilité contractuelle court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance. Le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde d'information et de conseil consistant en la perte de la chance de ne pas contracter ou d'éviter le risque qui s'est réalisé se manifeste dès l'octroi du crédit, à moins que l'emprunteur ne démontre qu'il pouvait, à cette date, légitimement ignorer ce dommage. Le contrat de prêt du 19 septembre 2008 prévoit expressément le remboursement du capital par 14 échéances de la contre-valeur en francs suisses (CHF) de la somme de 103.140 euros et 1 échéance de la contre-valeur en francs suisses (CHF) de la somme de 2.803.140 euros (CHF), et précise également que le risque de change sera supporté en totalité par l'emprunteur. En outre la SCI GIFRA représentée par son gérant a signé une notice d'information le même jour, dont la teneur a été rappelée par le tribunal, qui comporte des explications claires et compréhensibles pour un consommateur moyen sur les risques pour l'emprunteur liés à ce type de crédit dans l'hypothèse où le franc suisse prendrait de la valeur par rapport à l'euro, et qui comporte en outre des exemples chiffrés de risque de change et de risque lié à l'évolution du taux, également clairs et compréhensibles pour un consommateur moyen. De plus, il est constant que M. I..., gérant de la SCI Gifra, exerçait autrefois la profession d'expert-comptable au Luxembourg. La déclaration pour l'impôt sur le revenu de l'année 2007 qu'il a établi et transmise au Grand-Duché de Luxembourg indique qu'il était alors "employé Fiduciaire Sofinter". Il n'est en outre pas contesté que, ainsi que le crédit agricole le fait valoir, M. I... avait déjà négocié et conclu auparavant plusieurs crédits immobiliers en franc suisse pour le compte d'autres sociétés civiles, la SCI Framath et la SCI Gilfrathe. M. I..., ayant travaillé comme-expert-comptable ainsi que dans le domaine de la gestion de patrimoines, et qui était gérant de sociétés civiles depuis plusieurs années, était donc un professionnel du chiffre, en mesure de comprendre les indications relatives aux modalités de remboursement du crédit in fine en francs suisses litigieux figurant dam l'acte et dans la notice du 19 septembre 2008, et de comprendre les risques liés à un tel crédit. Il résulte en outre des statuts de la SCI GIFRA qu'elle a notamment pour objet l'acquisition, la vente, la location et la gestion de tous immeubles et bien mobiliers, et l'obtention de toutes ouvertures de crédit et facilités de caisse avec ou sans garantie hypothécaire. Il ressort de tout ce qui précède que la SCI GIFRA était un emprunteur averti tout comme M. I... son gérant. En conséquence elle avait pleinement conscience et ne pouvait pas ignorer les risques du crédit in fine en francs suisses litigieux qui avaient de surcroît été révélés et soulignés par la banque dans la notice explicative, de sorte que le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité pour éventuel manquement à un devoir d'information et de mise en garde doit être fixé à la date du prêt du 19 septembre 2008. L'assignation du 12 décembre 2014 est postérieure â l'expiration du délai de prescription qui date du 19 septembre 2013. S'agissant de la mise en garde contre un éventuel surendettement les motifs du jugement sont adoptés. La demande en dommages-intérêts pour manquement allégué à un devoir d'information et de mise en garde de la banque est irrecevable » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU'« En application de 11 article 2224 du code civil, issu de la réforme opérée par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, "les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer". Aux termes de l'article 26-II de la loi précitée, cette courte prescription s'applique aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, soit le 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. En l'espèce, il est constant que selon contrat de prêt signé le 19 septembre 2008, la Caisse de crédit agricole de Lorraine a consenti un prêt en devise à la SCI GIFRA aux fins d'acquisition d'un immeuble sis [...] . Monsieur B... I..., gérant de la SCI, s'est porté caution solidaire de ce prêt par acte du même jour, le consentement exprès du conjoint ayant été recueilli. La SCI GIFRA fait grief au prêteur d'avoir manqué à son obligation pré-contractuelle d'information et de mise en garde lors de la souscription de l'offre de prêt, d'une part, en ce qui concerne le risque de surendettement auquel elle s'exposait, et d'autre part, relativement aux risques engendrés par le prêt, résultant de la variation du taux de change entre le franc suisse et l'euro. La demande de la SCI GIFRA action s'analyse ainsi en une action en responsabilité contractuelle, soumise au délai de prescription quinquennal prévu à l'article 2224 du code civil. Il convient à ce stade de préciser que le délai quinquennal issu de la réforme du 17 juin 2008 a seul vocation à s'appliquer au présent litige, dans la mesure où le prêt litigieux a été souscrit le 19 septembre 2008, soit après la date d'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, à savoir le 19 juin 2008. Il résulte de l'offre de crédit acceptée le 19 septembre 2008 que la SCI GIFRA a désiré bénéficier d'un prêt en devise d'un montant initial en contre-valeur en francs suisses de la somme de 2.700.000 euros, "soit à titre indicatif, 4.257.090,42 francs suisses selon le cours de l'Eurodevise à la date du 16 septembre 2008". La SCI GIFRA a parallèlement signé, le 19 septembre 2008, soit au jour de la conclusion du contrat de prêt, une notice spécifique accompagnant celui-ci. La signature de la notice emportait expressément, comme le soulignait la mention en gras et au bas de celle-ci, l'acceptation des particularités du prêt en devises telles que figurant au sein de cette notice. Cette notice stipule expressément que : "Le prêt en devises bénéficie d'un taux d'intérêt variable, fixé pour une période définie, et pour la première fois le jour de la réalisation du prêt, et révisé à chaque échéance, en fonction de l'évolution du taux de l'Eurodevise sur le marché des changes à Paris (
), selon la périodicité des échéances choisie, plus une marge, conformément aux modalités précisées dans le contrat de prêt. Selon que, au moment du paiement des intérêts et du capital, le cours de la devise empruntée a monté ou baissé sur le marché des changes par rapport à l'euro, la perte ou le gain éventuels sont intégralement à la charge ou au profit de l'emprunteur. En effet, si vous ne disposez pas de revenus dans la devise concernée, le prêteur devra à chaque échéance et pour votre compte, emprunter des devises à un cours pouvant fluctuer". La notice poursuivait ainsi : "Deux cas peuvent se présenter : la devise concernée est dépréciée par rapport à l'euro ; l'emprunteur enregistre alors un gain de change qui lui revient intégralement ; la devise concernée s'est dépréciée par rapport à l'euro ; l'emprunteur subit alors une perte de change intégralement à sa charge." "L'emprunteur a la possibilité, s'il l'estime opportun et si la réglementation des changes en vigueur l'y autorise, de demander une couverture du risque de change par achat à terme des devises nécessaires au remboursement des échéances du prêt. Le coût de cette couverture du risque de change est à ajouter au coût du prêt. L'emprunteur peut contacter son conseiller à tout moment s'il estime qu'une couverture de risque de change peut être opportune afin d'envisager ses conditions et modalités de réalisation. Des informations sont également disponibles sur le site www.e-banking.caylon.comlca-change/ À partir de ces informations et de vos propres anticipations sur les taux ou l'évolution des devises, il vous sera possible d'opter pour la conversion de l'emprunt en euros exclusivement, à condition d'en informer le prêteur dans un délai minimum de 60 jours avant l'application de cette transformation (
)". Il en résulte que l'emprunteur, à savoir la SCI GIFRA, était informée que le crédit litigieux était financé par un emprunt souscrit en francs suisses par le prêteur sur les marchés monétaires internationaux de devises. La notice comportait enfin un exemple du risque de change et du risque de taux, libellé de la façon suivante : "Un client ayant un projet d'acquisition d'un appartement de 230.000 euros décide d'emprunter 130.000 euros en francs suisses sur 10 ans, soit 205.205 CHF. Au moment de l'emprunt, le cours est de 1 € = 1,5785 CHF, et le taux de 3,40% (2,20% + une marge de 1,20%) pour les trois premiers mois, avec amortissement du capital. Trois mois plus tard, à la première échéance, le taux d'intérêt du CHF à 3 mois pour le trimestre suivant est de 3%, l'emprunteur paiera donc des intérêts sur le trimestre considéré, au taux de 4,20% (3% + 1,20%). À la même date, le cours du CHF s'est envolé. Il n'est plus de 1 € = 1,5785 CHF, mais de 1 € = 1,4310 CHF. Le capital restant dû converti en euros après paiement de la première échéance est valorisé à 140.374,63 euros, soit 10.374,63 euros de plus à rembourser par rapport au capital initialement emprunté: 205.205 - 4.328,90 (capital remboursé à la première échéance) = 200.876,10 CHF/1,4310 = 140.374,63 euros, soit + 10.374,63 euros. La variation du cours entraîne un surcoût du capital emprunté de 10.374,63 euros." Il résulte de ce qui précède que par l'exemple chiffré ci-dessus, la banque a spécialement attiré l'attention de sa cliente sur les conséquences des variations éventuelles du taux de change euros-francs suisses au cours de la vie du crédit souscrit, cet exemple permettant d'illustrer l'incidence d'une variation du taux de change sur le montant du capital à rembourser. Ainsi, au vu des informations portées sur le contrat de prêt et la notice précitée, il est manifeste que la SCI GIFRA a pu, dès la signature de l'offre de prêt, avoir parfaitement conscience, sans aucune ambiguïté possible, du fait qu'elle souscrivait un prêt en devises, susceptible de présenter le risque lié aux variations du taux de change entre les monnaies. La SCI GIFRA, dont il convient en outre de rappeler que le gérant, Monsieur B... I..., était expert-comptable et avait déjà souscrit des prêts en francs suisses dans le cadre de précédentes opérations immobilières menées par des SCI distinctes, était ainsi pleinement avisée dès la souscription du contrat des risques découlant de l'économie-même du crédit. Le risque de change avait ainsi été révélé par la banque dès la souscription du contrat, sans que la SCI GIFRA ne puisse sérieusement soutenir qu'elle n'en avait pas eu connaissance. Le dommage résultant du manquement allégué à l'obligation d'information et de mise en garde, qui consiste en une perte de chance de ne pas contracter dans des conditions qui présentaient un risque élevé, s'est ainsi manifesté dès l'octroi du crédit. Il en résulte que la prescription a commencé à courir dès la conclusion du prêt, soit dès le 19 septembre 2008, pour s'achever le 19 septembre 2013. Dès lors, la demande de la SCI GIFRA formulée pour défaut de mise en garde et d'information quant aux risques du prêt, présentée par assignation du 12 décembre 2014, doit être déclarée prescrite. De même, les demandes formulées par la SCI GIFRA pour défaut de mise en garde quant à un éventuel surendettement doivent être déclarées prescrites, la SCI GIFRA ayant été mise en mesure dès l'octroi du prêt d'apprécier l'endettement engendré par la souscription de celui-ci. Il convient en conséquence, en application des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, de déclarer irrecevables comme prescrites les demandes formulées par la SCI GIFRA » ;

1°) ALORS QU'une juridiction excède ses pouvoirs en déclarant une demande irrecevable tout en la rejetant comme mal fondée ;

Qu'en l'espèce, la cour d'appel a confirmé le jugement entrepris ayant déclaré irrecevable la demande de dommages-intérêts formulée par la SCI GIFRA pour manquement par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine à son devoir d'information et de mise en garde pour ensuite débouter la SCI GIFRA de l'ensemble de ses prétentions ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a, de nouveau, violé l'article 122 du code de procédure civile, ensemble les principes qui régissent l'excès de pouvoir ;

2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ;

Qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable la demande de dommages-intérêts formulée par la SCI GIFRA pour manquement par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine à son devoir d'information et de mise en garde, la cour d'appel a, en substance, considéré que la SCI GIFRA avait, lors de la conclusion du contrat de prêt, pleinement conscience des risques du crédit in fine en francs suisses du fait de la notice informative qui lui avait été fournie, de l'ancienne qualité d'expert-comptable de son gérant et de son objet social incluant notamment l'obtention d'ouvertures de crédit et facilités de caisse, que le point de départ de la prescription quinquennale de l'action en responsabilité engagée par la SCI GIFRA devait donc être fixé au 19 septembre 2008 et que, par conséquent, cette action, initiée par acte d'huissier du 12 décembre 2014, était prescrite, sans répondre au moyen de la SCI GIFRA tiré du fait que M. I... n'a pu appréhender la situation désastreuse dans laquelle la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Lorraine avait placé la SCI GIFRA que courant juin 2014 lorsqu'il a mandaté les sociétés Confiance et patrimoine et Humania consultants afin d'obtenir une analyse juridique et financière des prêts souscrits (conclusions d'appel, p. 23) ;

Qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire de la SCI GIFRA, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-26.332
Date de la décision : 23/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, arrêt n°18-26.332 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 23 sep. 2020, pourvoi n°18-26.332, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.26.332
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award