CIV. 1
JT
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 septembre 2020
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10374 F
Pourvoi n° T 19-21.206
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 SEPTEMBRE 2020
1°/ M. H... D...,
2°/ Mme J... F..., épouse D...,
domiciliés tous deux [...],
ont formé le pourvoi n° T 19-21.206 contre l'arrêt rendu le 18 juin 2019 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige les opposant :
1°/ à M. S... A...,
2°/ à Mme X... I..., épouse A...,
domiciliés tous deux [...],
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Canas, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de M. et Mme D..., de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. et Mme A..., après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Canas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme D... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour M. et Mme D...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement, sauf en ses dispositions relatives aux remblais et à la mesure de consultation, déboutant ainsi M. et Mme D... de leurs demandes tendant à voir juger infondée la démolition sollicitée et obtenue par les époux A... par ordonnance de référé du 15 mai 2015, exécutoire de droit, ordonner la remise en état initiale de la clôture démolie telle qu'elle était et le remboursement des frais de démolition, aux frais des époux A..., et condamner les époux A... à leur verser diverses sommes en réparation des préjudices subis en raison de ces démolitions ;
AUX MOTIFS QUE Sur les demandes relatives à la démolition de la clôture décidée par l'ordonnance de référé du 15 mai 2015, que l'ordonnance du 15 mai 2015 n'a pas autorité de chose jugée sur le fond ; qu'il résulte d'un constat dressé le 27 juillet 2015 par Maître E..., huissier de justice mandaté par les époux D..., qu'il n'existe plus de clôture en plaques de béton séparant leur propriété de celle des intimés et qu'à proximité de la route, il n'existe plus de séparation entre ces propriétés ; que l'ordonnance de référé ayant condamné les époux D... à procéder à la démolition de leur clôture était exécutoire de droit par provision et assortie d'une astreinte ; que l'exécution par les époux D... de cette décision ne vaut donc pas acquiescement de leur part et ne leur interdit pas de demander au fond que la démolition ordonnée soit déclarée infondée et que soit ordonnée la remise en état de la clôture initiale aux frais des époux A... ; qu'il sera observé que l'ordonnance du 15 mai 2015 a été prononcée dans le cadre d'une procédure diligentée également par les consorts P... et la commune ; que, dans le cadre de la présente procédure, seule la clôture ayant séparé le terrain des époux D... de celui des époux A... est en cause que l'arrêté de péril pris le 18 juillet 2012 est définitif ; que les contestations émises par les appelants sur son bien-fondé ou sa régularité sont sans emport ; que la configuration des lieux est particulière avec notamment une importante dénivellation du terrain des appelants ; que les murs de clôture litigieux avaient plusieurs aspects ainsi que l'a relevé M. M... dans son pré-rapport que celui-ci a visité les lieux le 24 janvier 2014 alors que le chantier était en cours ; qu'il a estimé qu'en ce qui concernait les prestations réalisées, il n'existait pas de risque particulier mais qu'un risque pouvait exister selon les prestations ultérieures ; qu'il a souligné les incertitudes existantes ; que, dans son pré rapport en date du 10 juillet 2014, il a, toutefois, conclu que les murs de clôture étaient trop hauts par rapport aux usages locaux et qu'il existait un risque de désordre en cas de poursuite des travaux et de réalisation d'une « surhauteur » importante ; qu'il a ajouté qu'il existait un désordre au droit du petit bâtiment, propriété des époux A..., avec des tuiles engravées dans le mur construit au droit du futur bâtiment ; que les conclusions de M. M... sont étayées par ses constatations et ont été soumises à la libre contradiction des parties ; qu'il avait accordé un délai pour permettre aux parties de faire valoir leurs observations ; qu'il sera observé que M. D... lui a adressé directement des notes sans que les autres parties en soient avisées et qu'il a même sollicité, seul et non contradictoirement, une reprise des opérations d'expertise en juin 2015 ; que les époux ont fait procéder à un constat d'huissier décrivant les lieux peu avant la démolition des clôtures ; que ce constat ne permet pas toutefois de remettre en cause les constatations et conclusions de M. M... ; que M. et Mme D... ne versent aux débats aucun document technique postérieur à ce rapport de nature à remettre en cause les constatations et conclusions du technicien ainsi justifiées ; que celles-ci seront donc retenues ; que la qualification d'une partie de la clôture de mur de soutènement est sans incidence sur l'existence des risques que présentait cette clôture ; que leurs demandes tendant à ordonner la remise en état de la clôture- incluant le mur de soutènement- seront donc rejetées ; qu'il en sera de même de celles tendant à condamner les époux A... à prendre en charge le coût de la démolition et de la reconstruction ou à les indemniser du préjudice subi en raison de ces démolitions ; que le jugement sera donc confirmé de ces chefs ;
1) ALORS QUE le principe de séparation des autorités interdit au juge judiciaire de méconnaître l'autorité de chose jugée attachée aux décisions de la juridiction administrative, laquelle s'attache tant au dispositif qu'aux motifs qui en sont le soutien nécessaire ; qu'en refusant de prendre en considération les décisions du Tribunal administratif d'Orléans du 22 mai 2018 et de la cour administrative d'appel de Nantes du 14 septembre 2018 constatant que les époux D... étaient titulaires depuis l'année 2008 d'un certificat de non-opposition à déclaration préalable de travaux concernant la clôture litigieuse, mais également l'inexistence d'usages locaux par rapport auxquels les murs de la clôture légalement autorisée auraient été trop hauts et la légalité du permis de construire contesté par les époux A..., ainsi que le certificat de non-opposition à déclaration préalable lui-même, pour décider de rejeter la demande des époux D... tendant à la remise en état de la clôture, à la condamnation des époux A... à en supporter le prix et à les indemniser du préjudice subi du fait de la démolition, la Cour d'appel a violé l'article 1351 ancien devenu 1355 du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
2) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, les époux D... invoquaient expressément et produisaient aux débats pour la première fois devant la cour d'appel, un jugement du tribunal administratif d'Orléans du 22 mai 2018, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 14 septembre 2018, constatant qu'ils étaient titulaires depuis l'année 2008 d'un certificat de non-opposition à déclaration préalable de travaux concernant la clôture litigieuse, l'inexistence d'usages locaux par rapport auxquels les murs de la clôture légalement autorisée auraient été trop hauts et la légalité du permis de construire contesté par les époux A..., ainsi que le certificat de non-opposition à déclaration préalable lui-même ; que dès lors, en se fondant exclusivement sur les conclusions du pré-rapport d'expertise de M. M... du 10 juillet 2014, selon lesquelles « les murs de clôture étaient trop hauts par rapport aux usages locaux et qu'il existait un risque de désordre en cas de poursuite des travaux et de réalisation d'une « surhauteur » importante », sans examiner, même succinctement, les décisions susvisées des juridictions administratives et le certificat de non-opposition du 12 février 2008, nouveaux éléments de preuve produits pour la première fois devant elle de nature à contredire les affirmations de l'expert judiciaire et à démontrer le caractère infondé de la décision de démolition ordonnée en référés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE dans leurs conclusions d'appel, les époux D... soutenaient qu'en raison de l'absence totale de prescription figurant au POS communal sur les hauteurs de clôture autorisées, ils étaient seulement tenus de respecter les dispositions de l'article 663 du code civil prescrivant une hauteur minimum de 2,60 mètres, ce qu'ils avaient fait ; que les exposants se prévalaient expressément, à cet égard, d'un courrier de la Direction départementale des territoires de l'Eure et Loir du 29 mai 2012, produit aux débats, qui, répondant à l'interrogation du maire sur la légalité de la hauteur de la clôture alors en cours d'édification par les époux D..., indiquait « la commune de Ver-les-Chartres qui dispose d'un Plan Local d'Urbanisme, lequel ne précise pas dans son règlement les hauteurs de clôtures autorisées ne peut opposer aucune règle d'urbanisme concernant ces travaux. (
) Il faut respecter le code civil qui intervient à défaut d'usages locaux qui sont propres à chaque département. » ; que dès lors, en ne répondant pas à ce moyen, tiré, pièce à l'appui, de l'absence de réglementation et usages locaux et de la conformité de la clôture litigieuse aux prescriptions de l'article 663 du code civil, la cour d'appel a, de nouveau, violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4) ALORS, ENCORE SUBSIDIAIREMENT, QU'en statuant par la simple affirmation, reprise du pré-rapport d'expertise de M. M... du 10 juillet 2014, que « les murs de clôture étaient trop hauts par rapport aux usages locaux », sans mentionner les éléments de preuve de l'existence - contestée par les exposants - des usages locaux d'urbanisme sur lesquels elle fondait sa décision, ni les analyser, fût-ce sommairement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir constaté que la cour n'est pas saisie de demandes portant sur le toit et l'enduit de l'appentis ;
AUX MOTIFS QUE sur l'enduit et le toit de l'appentis qu'aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; que, dans celui-ci, les appelants sollicitent l'infirmation du jugement notamment en ses dispositions relatives au toit de l'appentis et au mur en bauge mais ne formulent aucune demande à ce titre ; que la seule demande d'infirmation du jugement ne peut suppléer l'absence d'une demande précise portant sur les chefs dont l'infirmation est sollicitée ; que la cour n'est donc pas saisie d'une demande portant sur le toit et sur l'appentis (arrêt, p. 13) ;
ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, les époux D... ont formulé dans le dispositif de leurs conclusions d'appel, une demande d'infirmation du jugement entrepris en ses chefs de dispositif les ayant débouté de leur demande de destruction de l'enduit de l'appentis appartenant aux époux A... et les ayant condamné à payer à ceux-ci la somme de 18,30 € au titre des dégâts causés au toit de cet appentis ; que dès lors, en retenant, pour refuser de statuer sur lesdites demandes, que les appelants ne formulaient aucune demande à ce titre dans le dispositif de leurs conclusions, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble l'article 4 du code de procédure civile.