CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 juin 2020
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10230 F
Pourvoi n° E 19-15.582
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme I....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 9 août 2019.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 24 JUIN 2020
M. E... S..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° E 19-15.582 contre l'arrêt rendu le 15 janvier 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-2), dans le litige l'opposant à Mme F... I..., épouse S..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
Mme I... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations écrites de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. S..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme I..., après débats en l'audience publique du 12 mai 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation du pourvoi principal et celui du pourvoi incident, annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. S... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille vingt.
Le conseiller rapporteur le president
Le greffier de chambre
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. S... (demandeur au pourvoi principal).
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir prononcé en application des articles 242 et suivants du code civil, le divorce des époux, Mme F... I... et M. E... S..., aux torts exclusifs de M. E... S... ;
aux motifs propres que « sur le prononcé du divorce : que l'article 242 du code civil dispose que le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérables le maintien de la vie commune ; que selon l'article 245 du code civil les fautes de l'époux qui a pris l'initiative du divorce n'empêchent pas d'examiner la demande ; qu'elles peuvent cependant enlever aux faits qu'il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause de divorce ; que ces fautes peuvent aussi être invoquées par l'autre époux à l'appui d'une demande reconventionnelle en divorce ; que même en l'absence de demande reconventionnelle, le divorce peut être prononcée aux torts partagés des deux époux si les débats dont apparaître des torts à la charge de l'un et de l'autre ; qu'en vertu de l'article 246 du code civil, si une demande pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute ; que s'il rejette celle-ci, il statue sur la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal ; qu'en l'espèce les deux parties sollicitent le prononcé du divorce aux torts exclusifs du conjoint ; qu'il ressort par contre des éléments produits par l'intimée que des faits d'infidélité répétés peuvent être retenus à l'encontre de M. S... ; que plusieurs attestations circonstanciées font état du comportement irrespectueux de l'intéressé à l'égard de son épouse, et ce au vu et au su des proches, ainsi que de son attitude volage et infidèle ; que de nombreuses personnes qui n'appartiennent pas exclusivement au cercle familial, en attestent de façon précise : M. Q... M..., Mme N... B..., M. Y... X..., Mme L... U..., Mme P... C..., Mme A... T... née I..., M. V... I..., Mme G... W... épouse I... (pièces 14-1, 15, 17, 18, 19, 20, 22 et 23 de l'intimée), le procès-verbal de constat de Me J... D... en date du 26 juillet 2016 démontrant de façon indiscutable et non contestée que M. S... vit à l'ancien domicile conjugal avec sa concubine Mme R... (pièce 96 de l'intimée) ; que ce dernier élément est à rapprocher de la page facebook de M. S... en date de septembre-octobre 2014, époque à laquelle la relation entretenue par M. S... avec Mme R... existe déjà puisque cette dernière l'appelle « mon chéri » (pièce 25 de l'intimée) ; que pour réfuter ce faisceau d'indices concordants l'appelant fait simplement valoir que les différentes attestations seraient de complaisance sans pour autant le démontrer ; que la cour relève par contre que M. S... a attendu le 14 mars 2018 pour déposer plainte pour fausses attestations (pièce 145 de l'appelant) alors que celles-ci ont été établies pour la plupart à la fin de l'année 2014 et versées dès la procédure de première instance ; qu'en outre, il n'est donné aucune indication sur les suites réservées à ce dépôt de plainte ; qu'au bénéfice de ces observations, il sera retenu à l'encontre de M. S... des faits répétés d'adultère qui ont nécessairement rendu intolérable le maintien de la vie commune ; que l'appelant allègue quant à lui le délaissement dont il aurait fait l'objet de la part de son épouse ; qu'au soutien de ses dires il verse essentiellement des attestations le plus souvent générales et qui sont établies par des membres de sa famille ou des amis qui, de fait, étaient assez éloignés du quotidien du couple ; qu'il allègue un état dépressif réactionnel au moment de la séparation sans démontrer qu'il serait en lien avec des actes positifs imputables à son épouse ; qu'il reproche à cette dernière des dépenses de voyage et de chirurgie esthétique alors que l'intimée démontre que son époux ne s'y est pas opposé et verse aux débats des documents médicaux attestant d'une intervention de chirurgie réparatrice à visée fonctionnelle et non purement esthétique (pièces 78 et 116-1 de l'intimée) ; que M. S... sera donc débouté de sa demande de divorce pour faute et de sa demande subsidiaire qui est sans objet puisque le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'époux » ;
et aux motifs adoptés que « sur la cause du divorce : que Mme F... I... sollicite le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son époux sur le fondement de l'article 242 du code civil ; que M. E... S... sollicite le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son épouse sur le fondement de l'article 242 du code civil ; qu'aux termes de l'article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérables le maintien de la vie commune ; que cette preuve peut être rapportée par tous moyens ; que l'article 9 du code de procédure civile rappelle qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi des faits nécessaires au succès de sa prétention ; qu'il sera rappelé qu'en application de l'article 252-4 du code civil, ce qui a été dit ou écrit à l'occasion d'une tentative de conciliation, sous quelque forme qu'elle ait eu lieu, ne pourra être invoqué pour ou contre un époux ou un tiers dans la suite de la procédure ; qu'en conséquence, il appartient à l'époux qui se prévaut du prononcé du divorce aux torts exclusifs de l'autre époux de rapporter judiciairement la preuve d'une violation grave ou renouvelée des devoirs du mariage ayant rendu intolérable le maintien de la vie commune ; qu'en ayant modulé les cas de divorce, le législateur a entendu réserver le divorce pour faute aux seules procédures dans lesquelles la faute, présentant les critères de l'article 242 du code civil était prouvée ; que le juge doit donc se montrer rigoureux dans l'administration de la preuve et la caractérisation de la faute ; que l'article 212 du code civil dispose que les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours assistance ; qu'ainsi, le manquement à l'une de ces obligations au cours de la vie commune peut constituer une violation grave ou renouvelée des devoirs du mariage si elle rend intolérable le maintien de la vie commune ; sur le moyen tiré de l'infidélité de M. E... S... : que Mme I... produit aux débats un procès-verbal de constat d'huissier en date du 26 juillet 2016 qui conclut à l'infidélité de M. S..., ce qui n'est pas contesté par l'époux ; qu'en outre, les attestations émanant de l'entourage proche du couple (Mme U... L..., Mme C... épouse S..., M. I... V... , Mme T... A...) ainsi que les factures d'hôtel corroborent l'existence d'infidélités antérieures à la procédure de divorce introduite par Mme F... I... ; qu'il ressort de l'ensemble des éléments précités que le comportement infidèle de M. E... S... constitue une violation grave des obligations découlant du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune au sens de l'article 242 du code civil ; que M. S... évoque pour sa part une faute de la part de Mme F... I... ;sur l'existence d'une faute imputable à Mme F... I... : que l'époux soutient que les accusations de coups et blessures et d'adultère formulées par Mme I... alors que son état de santé se trouvait dégradé et qu'il se trouvait dans des circonstances dramatiques, constituent une faute grave portant atteinte à son honneur, à sa santé, et à son intégrité ; qu'en l'espèce, au regard des attestation produites, M. S... est décrit comme un époux dévoué au bien-être matériel de sa famille ; qu'en outre, si ces attestations corroborent l'état dépressif dans lequel l'époux a pu se trouver et qui ressort du reste du certificat médical établi par le docteur H... le 12 mai 2015 pour un examen pratiqué le 2 avril 2013, elles ne permettent pas d'établir un lien de causalité entre cet état dépressif décrit et le fait que Mme F... I... ait formulé des allégations de violences conjugales, de sorte que M. E... S... n'apporte pas la preuve d'une faute constitutive d'un manquement grave et renouvelé aux obligations du mariage commise par son épouse ; que ne rapportant pas la preuve des faits nécessaires au succès de ses prétentions, M. E... S... sera débouté de sa demande ; que les griefs articulés par l'époux ne peuvent constituer une cause de divorce ; qu'en revanche, la demande en divorce pour faute présentée par l'épouse répondant à la double condition posée par l'article 242 du code civil, le divorce sera prononcé aux torts exclusifs de M. E... S...» ;
alors que M. S... soutenait dans ses conclusions que Mme I... s'était publiquement moqué, durant la vie commune de sa dyslexie, le traitant même d'illettré devant leurs enfants (conclusions, p. 17) ; que pour prononcer le divorce aux torts exclusifs de M. S..., la cour d'appel s'est totalement abstenue de répondre à ce chef déterminant des conclusions de l'exposant, de nature à établir un manquement grave de l'épouse au devoir de respect, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir condamné M. E... S... à payer à Mme F... I... une prestation compensatoire d'un montant de 85 000 euros ;
aux motifs propres que « en vertu de l'article 270 du code civil, le divorce met fin au devoir de secours prévu par la loi entre les époux, mais que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; que cette prestation a un caractère forfaitaire ; qu'elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ; qu'en application de ce texte c'est donc au moment de la dissolution du mariage que doivent être appréciées les conditions d'attribution éventuelle d'une prestation compensatoire ; qu'en l'espèce c'est au jour où la cour statue qu'il convient de se placer pour apprécier l'existence d'une éventuelle disparité dans les conditions de vie respective des parties puisque M. S... a formé un appel général à l'encontre du jugement déféré ; que selon le dernier alinéa de l'article 270 du code civil, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture ; que l'article 271 du code civil précise que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que doivent notamment être pris en considération la durée du mariage ; - l'âge et l'état de santé des époux ; - leur qualification et leur situation professionnelles ; - les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ; - leurs droits existants et prévisibles ; - leur situation respective en matière de pensions de retraite ; - leur patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ; que conformément à l'article 274 du code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital parmi les formes suivantes : 1° Versement d'une somme d'argent, le prononcé du divorce pouvant être subordonné à la constitution des garanties prévues à l'article 277 ; 2° Attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit ; qu'en application des dispositions de l'article 275 du code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital, des versements périodiques indexés dans la limite de huit années pouvant être autorisés lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital en une seule fois : 1/ Sur la situation des parties : Pour Mme I... : qu'aujourd'hui âgée de 55 ans, Mme I... souffre de graves problèmes de santé multiples et conséquents, notamment au niveau des genoux et des chevilles, dont il est justifié (pièces 79, 99, 133 à 155-3, 190 et 190-2 de l'intimée) ; qu'elle bénéficie depuis le 25 janvier 2018 d'une décision de reconnaissance de travailleur handicapé (pièce 190 de l'intimée) et n'a pu reprendre son travail dans une station-service qu'au mois d'octobre 2018, et ce à temps partiel ; que Mme I... n'a aucun patrimoine personnel ; qu'elle produit son relevé de carrière professionnelle (pièce 195 de l'intimée) ; qu'elle totalise à la fin de l'année 2017, 104 trimestres de cotisation et justifie d'une retraite brute prévisible de 590 euros par mois pour un départ à l'âge de 62 ans (pièce 196 de l'intimée) ; qu'il est acquis aux débats qu'elle a été employée du 31 janvier 2003 au 1er juillet 2014 dans l'entreprise de nettoyage exploitée par son mari, tout d'abord en qualité d'agent d'entretien puis en qualité d'employée de bureau à compter du 1er mars 2012 (pièces 31 à 32 et 84 à 84-3 de l'intimée) ; que les parties s'opposent sur la réalité du travail fourni par Mme I... et versent aux débats des attestations d'employés et de clients en sens contraire ; qu'en conséquence, il sera considéré que M. S... ne rapporte pas la preuve de l'assertion selon laquelle l'emploi en question était fictif et uniquement destiné à faire valoir des droits à la retraite ; que par suite de la rupture conventionnelle du 1er juillet 2014, que Mme I... a subie du fait de la procédure de divorce en cours (pièce 84 de l'intimée), l'intéressée s'est retrouvée au chômage avant de bénéficier d'un contrat unique d'insertion (pièces 34, 38 et 75 de l'intimée) puis de retrouver un emploi dans une station-service ; que les revenus de Mme I... ont toujours été durant le temps de la vie commune largement inférieurs à ceux de son époux : - année 2011 : 79 789 euros pour M. et 13 226 euros pour Mme, année 2012 : 60 700 euros pour M. et 12 138 euros pour Mme, - année 2013 : 68 044 euros pour M. et 13 726 euros pour Mme ; qu'en 2016, Mme I... a déclaré, en dehors des pensions alimentaires, des salaires à hauteur de 12 939 euros, soit un équivalent mensuel de 1 078,25 euros (pièce 192 de l'intimée) ; qu'en 2017, elle a perçu, en dehors des pensions alimentaires, des revenus imposables pour un montant total de 14 807 euros, soit une moyenne mensuelle de 1 233,91 euros (pièce 193-1 de l'intimée) ; que son bulletin de salaire de septembre 2018 mentionne un salaire net de 544,51 euros et un net mensuel imposable égal à la somme de 564,87 euros (pièce 190-3 de l'intimée) ; qu'elle indique dans sa déclaration sur l'honneur que son salaire mensuel sera de 900 euros à compter du mois de novembre 2018 (pièce 197 de l'intimée) ; qu'il est justifié par Mme I..., en dehors des dépenses de la vie courante, des charges mensuelles fixes suivantes : - impôt sur le revenu :154 euros, soit une somme de 12,83 euros par mois, - taxe d'habitation et contribution à l'audiovisuel public : 341 euros en 2017, soit une somme de 28,41 euros par mois (pièce 160 de l'intimée), remboursement d'un prêt automobile à hauteur de 88,56 euros par mois (pièce 162 de l'intimée) ou de 52 euros par mois selon sa déclaration sur l'honneur (pièce 197 de l'intimée), loyer d'un meuble : 780 euros par mois (pièce 39, 40 et 71 de l'intimée) ; que l'enfant O..., aujourd'hui âgée de 22 ans, est toujours à la charge de sa mère ; qu'il travaille à la mairie de Bandol dans le cadre d'un contrat civique ; que les parties ont convenu depuis juillet 2018 de décharger M. S... du paiement de la contribution à l'entretien et l'éducation de cet enfant qui était fixée à la somme mensuelle de 300 euros ; pour M. S... : qu'aujourd'hui âgée de 54 ans, M. S... expose également avoir des problèmes de santé qui, d'après ses explications, s'aggravent ; que selon le certificat médical établi le 16 janvier 2018 par son médecin traitant (pièce 105 de l'appelant) il souffre d'une dépression, d'une hernie et de douleurs à l'épaule gauche ; que le même médecin a constaté le 13 septembre 2018 un malaise d'allure vagal et une petite hernie de la ligne blanche (pièce 106 de l'appelant) : qu'il n'est pas démontré que ces difficultés l'empêcheraient d'exercer son activité professionnelle ; que M. S... a toujours travaillé et percevra selon l'estimation réalisée le 3 octobre 2017 (pièce 100 de l'appelant) une retraite mensuelle brute égale à 2 186 euros pour un départ à l'âge de 62 ans ; que d'un point de vue patrimonial, M S... ne mentionne dans sa déclaration en date du 18 septembre 2018 (pièce 149 de l'appelant) aucun patrimoine personnel ; qu'il ressort pourtant des actes de donation versées aux débats par Mme I... (pièces 45 et 46 de l'intimée) que M. S... est nu-propriétaire à hauteur d'un quart d'un immeuble sis [...] (lot évalué à 320 000 francs) et à raison d'un tiers d'un second immeuble sis [...] (lot évalué à 140 000 euros) ; qu'au regard des évaluations figurant dans les actes de donation, de la situation géographique desdits immeubles et de l'évolution du marché immobilier depuis 2001, ces biens constituent un patrimoine conséquent ; que l'appelant a une entreprise de nettoyage qu'il a exploitée sous différentes formes et dans le cadre d'une société par actions simplifiée à associé unique (SASU) avec gérance salariée depuis le 1er juillet 2014 ; que le changement de forme juridique est contemporain de la séparation du couple ; qu'à la création de la SAS SE.BE.NET il a été apporté par M. S... un fonds artisanal valorisé à 45 000 euros (pièce 95 de l'intimée) ; que curieusement, les revenus de M. S... ont baissé de façon notable à compter de la procédure de divorce et de la création de la SASU SE.BE.NET ; qu'antérieurement, ainsi que cela a déjà été relevé, M. S... avait des revenus plus de cinq fois supérieurs à ceux de son épouse ; qu'il allègue avoir perdu des clients, des syndics de copropriété, qui n'ont pas renouvelé les contrats en cours ; qu'il est renvoyé pour l'analyse des bilans de la société SE BE NET à ce qui a été relevé par le conseiller de la mise en état dans son ordonnance rendue le 25 juin 2018 : « Il ressort des bilans des exercices 2015 à 2017 (pièce 16 et 27 de l'appelant) les éléments suivants : * les produits d'exploitation ont baissé lors du dernier exercice : 225 437 euros en 2015, 224 873 euros en 2016, et 213 581 euros en 2017. * Le résultat d'exploitation a baissé : 27 861 euros en 2015, 18 667 euros en 2016, et 5 019 euros en 2017. * Les bénéfices sont passés de 23 584 euros en 2015 à 15 854 euros en 2016 et à 4 413 euros en 2017. Les bénéfices de l'année 2016 ont été entièrement affectés aux réserves (pièce 15 de l'appelant). * Les réserves ont augmenté puisque les réserves légales sont passées de la somme de 132 euros en 2015 à celle de 2 116 euros en 2017, et les autres réserves de la somme de 2 513 euros en 2015 à celle de 39 968 euros en 2017* les disponibilités ont varié comme suit : 31 551 euros en 2015, 58 522 euros en 2016 et 37 498 euros en 2017.* le compte 62510000 intitulé voyage et déplacements puis commissions et frais divers reste à un niveau important : 15 717 euros en 2015, 20 833 euros en 2016 et 21 170 euros en 2017, soit une moyenne mensuelle de 1 764,16 euros. * le compte courant d'associé est passé de la somme de 32 442 euros en 2016 à celle de 14 430 euros en 2017 » ; que M. S... qui n'est pas imposable justifie déclarer des revenus uniquement constitués de salaires à hauteur de 25 807 euros en 2015, soit une moyenne de 2 150,58 euros (pièce 39 de l'appelant), à raison de 25 766 euros en 2016, soit une somme mensuelle de 2 147,16 euros (pièce 73 de l'appelant) et pour un montant de 25 715 euros en 2017, soit une moyenne mensuelle de 2 142,91 euros (pièce 161 de l'appelant) ; que son bulletin de salaire du mois d'août 2018 mentionne un cumul net imposable égal à la somme de 16 916,24 euros, soit une moyenne mensuelle de 2 114,53 euros ; que M. S... partage ses charges avec sa compagne dont le salaire mensuel net est de 1 270,70 euros en février 2018 (pièce 130 de l'appelant) ; qu'à ce jour, il est justifié par M. S... des seules charges suivantes : taxe d'habitation, soit une somme de 84 euros par mois (pièce 122 de l'appelant), et taxe foncière, une somme de 118,75 euros (pièce 123 de l'appelant) ; que les crédits immobiliers et automobiles sont maintenant soldés ; 2/ Discussion : qu'il importe de rappeler que le mariage a duré 28 ans, que les époux sont mariés sous le régime de la communauté, qu'ils ont deux enfants aujourd'hui majeurs et qu'ils sont propriétaires indivis d'une villa sise à la Cadière d'Azur dont l'évaluation oscille entre 600 000 euros selon M. S... (pièce 51 à 149 de l'appelant) et 700 000 à 900 000 euros selon Mme I... (pièces 56 et 56-1 de l'intimée) ; qu'au regard des développements qui précèdent concernant les situation financières des parties, il y a lieu de considérer que la rupture du lien conjugal est à l'origine d'une disparité au détriment de Mme I... au niveau des situations patrimoines personnelles, des revenus et des droits à retraite ; que c'est de façon pertinente que le premier juge a également retenu que Mme I... avait contribué à l'activité professionnelle de son mari durant treize années sans pour autant elle-même connaître une évolution de carrière ni être en mesure de faire valoir une qualification supérieure ; qu'il s'ensuit que le premier juge a fait une appréciation exacte de la situation en accordant à l'épouse une prestation compensatoire justement évaluée à la somme de 85 000 euros ; que l'appelant, dont la situation n'est pas des plus transparentes, ne justifie pas de l'impossibilité de payer cette somme en un seul versement ; qu'il sera donc débouté de sa demande subsidiaire tendant à échelonner le paiement de la prestation compensatoire due sur huit ans » ;
et aux motifs adoptés que « sur la prestation compensatoire : qu'aux termes de l'article 270 du code civil, « l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge. Toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture » ; qu'aux termes de l'article 274 du code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital soit par le versement d'une somme d'argent, soit par l'attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit ; qu'aux termes des articles 271 et 272 du code civil, son montant doit être déterminé, selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que l'article 271 du code civil précise que pour fixer la prestation compensatoire, le juge prend en considération notamment : « - la durée du mariage ; - l'âge et l'état de santé des époux ; - leur qualification et leur situation professionnelles ; - les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ; - le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ; - leurs droits existants et prévisibles ; - leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa ; que la prestation compensatoire a pour objet d'assurer un rééquilibrage entre deux situations patrimoniales dont la disparité avait été jusque-là masquée par la communauté de vie, c'est-à-dire compenser la répartition des rôles de chacun pendant la vie commune ainsi que les choix de vie opérés en commun qui se révèlent parfois préjudiciables pour l'un d'eux ; que toutefois, la prestation compensatoire n'a pas vocation à assurer une parité des fortunes ou à maintenir indéfiniment le statut social de l'époux créancier au niveau qui était le sien pendant le mariage, le divorce ayant précisément pour conséquence de mettre un terme aux devoirs financiers des époux ; qu'en l'espèce, il convient de relever que les époux sont mariés depuis 26 ans ; qu'ils se sont mariés sous le régime de la communauté de biens ; que le mari est âgé de 54 ans tandis que son épouse est âgée de 52 ans ; qu'ils ont eu deux enfants ensemble ; qu'avant la séparation du couple, Mme I... était salariée de l'entreprise de son époux et justifiait percevoir au jour de l'audience de conciliation une rémunération de 1 102 euros par mois ; qu'aujourd'hui, elle justifie exercer un emploi d'aide à domicile en contrat à durée déterminée pour une période d'un an à compter du 4 janvier 2016 et pour lequel elle est rémunérée 832,90 euros (brut) ; qu'en complément de sa rémunération, elle perçoit depuis l'ordonnance de non-conciliation en date du 9 décembre 2013, la somme de 800 euros par mois à titre de pension alimentaire ; qu'étant mariée sous un régime de communauté, l'épouse aura droit à une partie des biens communs et notamment de l'immeuble commun ; que M. S... est artisan dans le nettoyage ; que le magistrat conciliateur avait retenu la somme moyenne mensuelle de 6 649 euros pour l'année 2011 ; qu'il ressort de l'avis d'imposition 2014 sur les revenus 2013 que M. S... a perçu en moyenne 5 670 euros par mois ; que la situation déclarative à l'impôt sur le revenu 2016 fait apparaître un cumul net imposable de 25 807 euros pour M. S... soit un revenu mensuel moyen de 2 150,58 euros ; que l'époux justifie la chute de ses revenus par suite de nombreuses résiliations de contrats dans le cadre de son activité professionnelle en produisant des lettres de résiliation de ses clients intervenues au cours de l'année 2015 ;
qu'au regard des situations économiques actuelles et à venir des parties, la comparaison de leurs ressources respectives déclarées et de leurs patrimoines traduit une différence au détriment de l'épouse dès lors que Mme I... a des revenus moins importants que M. S..., que bien qu'elle ait été rémunérée, elle a consacré 13 années à travailler pour l'entreprise de son époux, qu'il est constaté que dans le cadre de cette activité, elle n'a pas connu d'évolution de carrière, ni n'a pu faire valoir de qualification supérieure à l'issue de cette expérience professionnelle soldée par une rupture conventionnelle ; qu'elle bénéficiera de droits à retraite inférieurs à M. S... ; que dès lors, la disparité s'appréciant au jour du prononcé du divorce au regard de l'âge de l'épouse, de la durée effective du mariage et de l'avenir professionnel prévisible de chacun des époux, il convient de fixer le montant du capital que devra verser M. E... S... à Mme I... à titre de prestation compensatoire à la somme de 85 000 euros » ;
alors 1/ que l'un des époux ne peut être tenu de verser à l'autre une prestation compensatoire que si la disparité dans leurs conditions de vie respectives est créée par la rupture du mariage ; qu'en conséquence, l'un des époux ne peut être condamné à payer à l'autre une prestation compensatoire, lorsque c'est en raison de choix personnels que l'un des époux a peu travaillé durant sa vie professionnelle, avant comme après l'union, amenuisant ainsi ses droits prévisibles à retraite ; qu'en l'espèce, M. S... soutenait expressément dans ses écritures que Mme I... avait fait le choix avant comme après le mariage de ne suivre aucune étude et de travailler très peu (conclusions, p. 33) ; qu'en allouant pourtant une prestation compensatoire d'un montant de 85 000 euros à Mme I... au regard, notamment des disparités entre les revenus et les droits à retraite des époux, sans rechercher si cette disparité n'était pas la conséquence des choix personnels oisifs de Mme I..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 270 du code civil ;
alors 2/ que pour fixer le montant de la prestation compensatoire, le juge doit tenir compte des revenus prévisibles des époux; que dans ses conclusions, M. S... soutenait que la pérennité même de ses revenus professionnels n'était aucunement assurée, l'expert-comptable de la société SE.BE.NET qui le salarie lui ayant indiqué que la pérennité de l'entreprise était en danger (conclusions, p. 29 et s.) ; que la cour d'appel s'est pourtant totalement abstenue de rechercher si les revenus prévisibles de M. S... ne risquaient pas de disparaître, se bornant à estimer qu'il serait « curieux » que ses revenus aient baissé depuis l'introduction de la procédure en divorce ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 270 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée, infirmative de ce chef, d'avoir condamné M. E... S... à payer à Mme F... I... à titre d'avance sur sa part de communauté ou de bien indivis une somme de 100 000 euros ;
aux motifs que « sur les demandes en rapport avec la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux [
] : qu'au regard de la situation financière actuelle de Mme I... qui se trouve être des plus précaires, il échet de faire droit à sa demande d'avance sur sa part de communauté ou de biens indivis, et ce à hauteur de la somme de 100 000 euros ; qu'en effet ses droits dans le bien indivis ne sont pas sérieusement contestables et seront conséquents puisque la valeur de la villa dont le caractère commun n'est pas remis en cause excède la somme de 600 000 euros, que le prêt immobilier y afférent est définitivement soldé et qu'une indemnité d'occupation est due par M. S... depuis le 9 décembre 2013 » ;
alors que l'avance à valoir sur sa part de communauté que le juge du divorce peut allouer à l'un ou l'autre des époux est payée par prélèvement anticipé sur la masse commune à partager ; qu'en condamnant M. S... à payer à son épouse une somme de 100 000 euros à titre d'avance sur sa part de communauté, quand l'exposant, qui ne s'était pas approprié la totalité de l'actif indivis, n'était aucunement débiteur de cette somme, la cour d'appel a violé l'article 267 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004, applicable en la cause.
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocats aux Conseils, pour Mme I..., (demanderesse au pourvoi incident).
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, D'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable les demandes de l'épouse tendant à la nullité de l'aliénation par son époux du fonds artisanal de nettoyage au profit de la SASU SE BE NET intervenue le 1er juillet 2014 sur le fondement de l'article 262-2 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE « à ce stade de la procédure, et sous l'empire de l'ancien article 267 du code civil, il n'y a pas lieu de statuer sur le différend opposant les parties quant à la nature propre ou commune du fonds artisanal apporté en nature lors de la constitution de la société SE BE NET ni par voie de conséquence sur la validité de cette aliénation ou sur la valeur dudit fonds artisanal » ;
ALORS QUE le juge qui statue sur le divorce est compétent en vertu de l'article 262-2 du code civil pour se prononcer sur la fraude commise par l'un des époux aux droits de l'autre conjoint en cas d'aliénation par lui d'un bien commun postérieurement à la requête initiale en divorce ; qu'en refusant de se prononcer sur le caractère frauduleux de la cession par l'époux du fonds de commerce constituant un bien commun, et en renvoyant les parties devant le juge de la liquidation pour statuer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 262-2 du code civil.