SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 juin 2020
Rejet non spécialement motivé
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10392 F
Pourvoi n° U 18-15.269
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
DU 3 JUIN 2020
La société B2G Consulting, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° U 18-15.269 contre l'arrêt rendu le 15 février 2018 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à M. G... P..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations écrites de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société B2G Consulting, après débats en l'audience publique du 4 mars 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société B2G Consulting aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société B2G Consulting ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société B2G Consulting
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société B2G consulting à verser à monsieur P... 6 517,76 € bruts au titre des heures supplémentaires pour l'année 2010 outre 651,78 € de congés payés, 5 413,54 € bruts au titre des heures supplémentaires pour l'année 2011 outre 541,35 € de congés payés, 1 437,51 € bruts au titre des heures supplémentaires pour l'année 2012 outre 143,75 € de congés payés, 910,69 € bruts au titre des heures supplémentaires pour l'année 2013 outre 91,10 € de congés payés, déduction faite de 2 925,57 €, d'avoir condamné la société B2G consulting à payer à monsieur P... 1 000 € de dommages-intérêts, d'avoir condamné la société B2G consulting à verser à monsieur P... 4 093,86 € au titre du repos compensateur dont il n'a pu bénéficier, et d'avoir condamné la société B2G à délivrer à monsieur P... une attestation chômage rectifiée et un bulletin de paye unique par année comportant l'ensemble des condamnations ;
aux motifs propres que « A/ Au titre des heures supplémentaires [
] 1. Sur leur principe et leur décompte. En l'espèce il convient de constater avec les premiers juges que les éléments concordants et très précis fournis par le salarié pour les années 2010, 2011 2012 et 2013 (agendas journaliers ou carnets, feuilles de route mis en place par l'employeur en 2013, tableaux récapitulatifs depuis 2010, fiches de paye et attestations diverses) ne sont pas contredits par ceux insuffisants et non probants rapportés par l'employeur s'agissant uniquement en sus du contrat de travail et d'attestations peu crédibles, d'un tableau de décompte du temps de travail et de relevé informatique d'utilisation des péages. En effet le salarié n'était pas sensé les utiliser dés qu'il prenait un véhicule, et ce alors que en qualité de câbleur, il intervenait pour sa société spécialisée en système et logiciel informatique, dans toute la France avec son véhicule de service. Ces mêmes éléments probants, produits notamment par la SARL SICOMOR B2G (attestations artisans sous- traitant et carnets mais aussi photos) démontrent suffisamment que les salariés, qui outre leur équipement habituel, devaient récupérer du matériel volumineux voire onéreux, ainsi que des provisions de pièces d'usage dans le petit atelier jouxtant les bureaux de la société, mais aussi recueillir des consignes, prendre leur binôme ou des sous-traitant ; étaient tenus de partir ou revenir très souvent au siège social de la société pour se rendre sur les chantiers, et ce nonobstant le fait qu'aucun lieu de travail ne soit mentionné dans leur contrat ou que des directives précises ne soient données expressément par l'employeur en ce sens. Ainsi, les temps de route société - chantier, soit, entre deux lieux de travail, correspondent bien à du travail effectif et non à du simple temps de trajet indemnisé au taux minimum conventionnel ; et ce d'autant plus que M. P... n'avait en tout état de cause pas de lieu de travail fixe ou habituel alors qu'il devait néanmoins obligatoirement et quotidiennement se rendre sur le site des différents chantiers où il était affecté. Il convient donc de considérer qu'il n'était pas libre de son temps, qu'ainsi ces temps de route doivent être réintégrés dans le temps de travail, comptabilisés si nécessaires en heures supplémentaires et donner lieu à rémunération à ce titre. A cet égard l'attestation de la secrétaire administrative encore en place et tenue envers son employeur dans des liens de subordination, ne sera pas retenue et ce d'autant plus qu'elle contient des déclarations contradictoires en ce qu'elle mentionne d'une part la nécessité de s'approvisionner et d'anticiper et d'autre part l'absence d'obligation de passer au siège de la société. La réalité des heures supplémentaires y incluant des temps de route et correspondant à du travail effectif est suffisamment établie et ouvre droit pour le salarié à un paiement supplémentaire majoré. Le salarié produit en sus des éléments déjà évoqués, un tableau récapitulatif détaillé au jour le jour dressé par lui-même faisant mention des heures supplémentaires effectuées en sus de ses horaires habituels de travail et notamment des heures atelier + route. A cet égard les calculs effectués par l'employeur ne peuvent être retenus dans la mesure notamment ou les fractions d'heure tels que retenues par l'employeur ne sont effectivement pas corrects (1,3 heure au lieu de 1,5), les pauses de deux heures à midi ne sont pas établies, des heures de récupération ont été déduites par l'employeur notamment pour 2013 alors même qu'il n'en rapporte pas la preuve, que le salarié en a déjà déduit et qu'aucun système officiel régulier de récupération n'était mis en place. Au vu de ces éléments précis et concordants la Cour estime souverainement rapportée la preuve qu'G... P... a effectué un total d'heures de travail supplémentaires en dehors des heures légales de travail de : - 632,6 heures en 2010 ; - 531,91 heures en 2011 ; - 394,18 heures en 2012 ; - 120,49 heures en 2013. 2 Sur leur rémunération et les montants dus. Ces heures doivent être rémunérées sur la base non du salaire minimal hiérarchique conventionnel mais bien sur le salaire réel effectif payé au salarié et donc au vu du taux horaire figurant sur le bulletin de salaire, en y incluant si nécessaire les primes liées à la nature du travail (danger, insalubrité, froid), donc sans tenir compte des primes de panier, outillage, déplacement prime d'ancienneté. A cet égard la prime d'assiduité n'y est incluse que dans la mesure ou en raison de sa généralité, de sa constance et de sa fixité, elle a le caractère d'un complément de salaire. En outre il convient de déduire tant les sommes déjà versées à ce titre par l'employeur avec le salaire y incluant les 4 premières heures supplémentaires journalières payées régulièrement par l'employeur pour atteindre la durée de 39 heures, que celles versées postérieurement. A cet égard les calculs détaillés et argumentés réalisés par le salarié et retenus par les premiers juges paraissent tout à fait corrects et il convient de les confirmer. Il convient donc de constater en se basant en l'espèce sur le taux horaire et en appliquant les majorations légales, que M. P... G... a réalisé auprès de la SARL B2G CONSULTING SICOMOR de nombreuses heures supplémentaires, y incluant des heures de route qui n'ont pas donné lieu à payement et de condamner cette société à lui verser à ce titre : - 6 517,76 € brut à titre de rappel d'heures supplémentaires pour l'année 2010 outre 651,78 € brut au titre des congés payés afférents ; - 5 413,54 € brut à titre de rappel d'heures supplémentaires pour l'année 2011 outre 541,35 € brut au titre des congés payés afférents ; - 1 437,51 € brut à titre de rappel d'heures supplémentaires pour l'année 2012 outre 143,75 € brut au titre des congés payés afférents ; - 910,69 € brut à titre de rappel d'heures supplémentaires pour l'année 2013 outre 91,10 € brut au titre des congés payés afférents avec intérêts de droit à compter du 23 septembre 2014 et dont il convient de déduire la somme de 2925,57 € brut versée à la barre ; 3. Sur le repos compensateur. Au vu des décomptes et éléments produits le salarié est de même en droit de recevoir une somme de 4 093,86 € brut au titre du repos compensateur dont il n'a pu bénéficier. B. Les dommages intérêts. 1. Du fait d'une exécution fautive du contrat. Monsieur G... P... se plaint d'avoir subi un rythme de travail usant imposé par son employeur en contravention avec ses droits élémentaires notamment à sa santé, ayant conduit à une dégradation de ses conditions de travail avec turnover important du personnel et à la rupture de son contrat de travail. Le relevé de ses heures démontre qu'il a effectivement réalisé 26 fois en 2010, 24 en 2011 ainsi que 16 fois en 2012 et 3 fois 2013 des semaines dépassant la durée légale de 48 heures de travail, le maximum atteint étant de 63 heures. L'exécution fautive du contrat de travail qui doit être régi par la loyauté des rapports des parties avec une obligation de sécurité pesant sur l'employeur est donc suffisamment attestée. Une somme de 1000 € de dommages-intérêts sera allouée à ce titre au salarié » ;
et aux motifs réputés adoptés que « selon la jurisprudence (Cass. Soc. 24.11.2010 n° 09-40.928 FP-PBR), en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la preuve contraire ; que Monsieur G... P... remet au Conseil, pour les années 2010, 2011, 2012 et 2013 :- des agendas journaliers récapitulant ses heures de travail, remplis au fil des jours, - des feuilles de route mises en place par la SARL B2G CONSULTING, - des tableaux récapitulatifs semaine par semaine des heures supplémentaires hebdomadaires qu'il a réalisées depuis mai 2010 jusqu'au 30 avril 2013 ; que la société B2G CONSULTING, qui a l'obligation du pointage des horaires de Monsieur P..., a été mise en mesure d'apporter une réponse au décompte effectué semaine par semaine sur la base des agendas journaliers ; que la SARL B2G CONSULTING remet au Conseil, pour les années 2010, 2011, 2012 un tableau de décompte du temps de travail, les relevés de badge AREA indiquant les heures d'entrée et de sortie d'autoroute pour les années 2011 et 2012 ; que ces éléments ne sont pas suffisants pour le Conseil pour justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, que l'employeur est tenu de fournir en application de l'article L. 3171-4 du Code du travail et selon la jurisprudence (Cass. Soc. 03.07.1996 n° 93-41.645) ; qu'en conséquence, le Conseil valide le calcul du nombre d'heures supplémentaires effectué par Monsieur P... à partir de 2010 ; - que sur le rappel de salaire afférent aux heures supplémentaires, pour calculer le taux horaire de base des heures supplémentaires, l'employeur doit intégrer toutes les primes qui constituent la contrepartie directe du travail fourni, par exemple, salaire de base propre au salarié + prime d'ancienneté, et non se baser sur le salaire minima hiérarchique conventionnel, comme le fait la SARL B2G CONSULTING pour effectuer sa régularisation ; qu'en conséquence, le Conseil retient les sommes suivantes : pour l'année 2010: - 898,88 € au titre des heures majorées à 25 %, - 89,90 € au titre des congés payés afférents, - 5 618,78 € au titre des heures majorées à 50 %, - 561,89 € au titre des congés payés afférents, soit un total de 7 169,55 €, pour l'année 2011 : - 1033,02 € au titre des heures majorées à 25 %, - 103,30 € au titre des congés payés afférents, 4380,52 € au titre des heures majorées à 50 %, 438,05 € au titre des congés payés afférents, soit un total de 5 954,89 €, pour l'année 2012 : - 726,30 € au titre des heures majorées à 25 %, 72,63 € au titre des congés payés afférents, 711,21 € au titre des heures majorées à 50 %, 71,12 € au titre des congés payés afférents, soit un total de 1 581,26 €, pour l'année 2013 : 132,89 € au titre des heures majorées à 25 %, 13,29 € au titre des congés payés afférents, 777,80 € au titre des heures majorées à 50 %, 77,78 € au titre des congés payés afférents, soit un total de 1001,76 € ; qu'il conviendra de déduire du total de 15707,46 € brut dû la somme de 2 925,57 € brut versée à la barre ; qu'il reste donc due la somme de 12781,89 € brut ; [
] sur l'exécution fautive du contrat de travail, selon l'article L. 1222-1 du Code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, la SARL B2G CONSULTING n'ayant pas, sur les années 2010 à 2013, payé la totalité des heures supplémentaires dues ; qu'en conséquence, le Conseil alloue à Monsieur P... la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts » ;
alors 1°/ qu'en jugeant que le temps de parcours entre le siège de la société B2G et les différents chantiers où travaillait monsieur P... constituait du temps de travail effectif à prendre en compte dans le calcul des heures supplémentaires, quand il résultait de ses constatations que la société B2G n'ordonnait pas à ses salariés de venir au siège social avant de se rendre sur les chantiers ou en revenant de ceux-ci, ce dont il suivait que le temps de trajet entre le siège social et les chantiers n'était pas du temps de travail effectif, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-4 du code du travail en sa rédaction applicable en l'espèce ;
alors 2°/ qu'en défense à la demande de rappel d'heures supplémentaires de monsieur P..., la société B2G produisait les attestations de messieurs S..., V... D... et F... relatives à la modicité des horaires de travail, de la présence, de l'implication de monsieur P... sur les chantiers ; qu'en se contentant d'affirmer que ces attestations étaient peu crédibles sans en faire la moindre analyse, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
alors 3°/ qu'en condamnant la société B2G à payer certaines sommes au titre des heures supplémentaires de 2010 à 2013 en se bornant à énoncer que les calculs détaillés et argumentés réalisés par le salarié et retenus par les premiers juges paraissent tout à fait corrects et qu'il convenait de les confirmer, sans déterminer elle-même les sommes dues, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-22 du code du travail en sa rédaction applicable en l'espèce.