CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 mai 2020
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10193 F
Pourvoi n° M 19-11.195
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 MAI 2020
M. Y... P..., domicilié [...] ), a formé le pourvoi n° M 19-11.195 contre l'arrêt rendu le 25 septembre 2018 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant à la société Lyonnaise de banque (CIC Lyonnaise de banque), société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations écrites de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de M. P..., de Me Le Prado, avocat de la société Lyonnaise de banque (CIC Lyonnaise de banque), après débats en l'audience publique du 3 mars 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. P... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. P... et le condamne à payer à la société Lyonnaise de banque (CIC Lyonnaise de banque) la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour M. P...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré le tribunal de grande instance de Lyon compétent ;
AUX MOTIFS QUE l'assignation a été délivrée à M. Y... P... à une adresse en Suisse. Selon l'article 23 du code civil suisse, le domicile est le lieu où la personne réside avec l'intention de s'y établir de sorte que M. Y... P... doit être considéré comme étant domicilié en Suisse à la date de l'introduction de l'instance et que la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale dite convention de Lugano signée le 30 octobre 2007 est applicable au litige, s'agissant d'un litige en matière civile. Le changement de domicile du défendeur en cours de procédure ne remet pas en cause la détermination de la compétence selon les règles édictées par ladite Convention, la situation à prendre en compte étant celle au jour de la délivrance de l'assignation. Si l'article 2 de la Convention pose le principe de la compétence des juridictions de l'Etat lié par la convention sur le territoire duquel la personne attraite a son domicile, l'article 5 y déroge et dispose qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat lié par ladite convention peut être attraite devant un autre Etat lié par la convention. Il prévoit ainsi qu'en matière contractuelle, cette personne peut être attraite devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée. Selon l'article 5 I b), le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est [...] pour la fourniture de services, le lieu d'un Etat lié par la présente Convention où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis. La notion de services implique que la partie qui les fournit effectue une activité déterminée en contrepartie d'une rémunération. Dans un contrat de crédit conclu entre un établissement de crédit et un emprunteur, la prestation de services réside dans la remise au second d'une somme d'argent par le premier en échange d'une rémunération payée par l'emprunteur, en principe, sous forme d'intérêts. Un tel contrat doit donc être qualifié de contrat de fourniture de services au sens de l'article 5 de la Convention. Dans le cadre d'un contrat de crédit, l'obligation caractéristique est l'octroi même de la somme prêtée, alors que l'obligation de l'emprunteur de rembourser ladite somme n'est que la conséquence de l'exécution de la prestation du prêteur. Il y a donc lieu de considérer que le lieu où les services ont été fournis au sens de l'article 5 I b) est, en cas d'octroi d'un crédit par un établissement de crédit, le lieu où le siège de cet établissement est situé de sorte que le juge compétent pour connaître d'une action en paiement dirigée par une banque contre un emprunteur est celui de l'état membre où se situe le siège de cet établissement de crédit, en tant que lieu de l'exécution de l'obligation servant de base à l'action. Cette interprétation est conforme à celle faite par la cour de justice de l'union européenne des dispositions de l'article 7.1 du règlement (UE) n° 1215/2012, libellé dans des termes identiques à ceux de l'article 5 de la Convention. En l'espèce, le contrat de crédit est conclu avec une banque ayant son siège social en France de sorte que le juge français doit être déclaré compétent. Il convient en conséquence d'infirmer l'ordonnance déférée, de déclarer le tribunal de grande instance de LYON compétent (arrêt, p. 3 et 4) ;
1) ALORS QU'une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat lié par la convention de Lugano du 30 octobre 2007 peut être attraite, dans un autre Etat lié par la convention, en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée ; que s'agissant de la demande de la banque dirigée contre l'emprunteur à raison du remboursement du prêt octroyé, l'obligation qui sert de base à la demande s'entend de l'obligation de l'emprunteur de remboursement du prêt et de rémunération de la banque par le versement d'intérêts ; qu'en affirmant, pour décider que les juridictions françaises étaient compétentes, que les dispositions de l'article 5 1 b) de la convention de Lugano du 30 octobre 2007 étaient applicables et que seule l'obligation caractéristique du contrat de fourniture de services, soit l'octroi de la somme prêtée, devait être prise en considération pour déterminer la compétence juridictionnelle, la Cour d'appel a violé les article 5-1 a), par refus d'application, et l'article 5-1 b), par fausse application, de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 ;
2) ALORS QUE, subsidiairement, une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat lié par la convention de Lugano du 30 octobre 2007 peut être attraite, dans un autre Etat lié par la convention, en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée ; que la détermination du lieu d'exécution de l'obligation servant de base à la demande est opérée suivant la loi applicable au contrat, qui peut être la loi librement choisie par les parties selon l'article 3 du règlement n° 593/2008 du 17 juin 2008, dit Rome I ; que les contrats de prêt étant expressément soumis à la loi française, le lieu d'exécution de l'obligation de paiement des échéances du prêt devait être fixé, au regard des dispositions de l'article 1247 du code civil, au domicile du débiteur, en Suisse, si bien que les tribunaux suisses étaient seuls compétents pour connaître de l'action dirigée par le CIC Lyonnaise de Banque contre M. P... ; qu'en décidant que les juridictions françaises, et plus spécialement le tribunal de grande instance de Lyon, étaient compétentes, sans rechercher quelle était la loi applicable au contrat de crédit et partant le lieu d'exécution de l'obligation servant de base à la demande, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 5-1 a) de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 et 3 du règlement (CE) n° 593/2008 du parlement européen et du conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), ensemble l'article 1247 du code civil.