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26/03/2020 | FRANCE | N°19-13.224

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 26 mars 2020, 19-13.224


CIV. 3

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 mars 2020




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10207 F

Pourvoi n° S 19-13.224




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 MARS 2020

1°/ M. X... C...,

2°/ Mme K... Y...,

tous deux domiciliés

[...] ,

ont formé le pourvoi n° S 19-13.224 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2018 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme Q... ...

CIV. 3

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 mars 2020

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVIN, président

Décision n° 10207 F

Pourvoi n° S 19-13.224

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 MARS 2020

1°/ M. X... C...,

2°/ Mme K... Y...,

tous deux domiciliés [...] ,

ont formé le pourvoi n° S 19-13.224 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2018 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme Q... R...,

2°/ à M. G... E...,

tous deux domiciliés [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller, les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. C... et de Mme Y..., de Me Isabelle Galy, avocat de Mme R... et de M. E..., et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 février 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Andrich, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. C... et Mme Y... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. C... et de Mme Y... et les condamne à payer à Mme R... et M. E... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. C... et Mme Y...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que M. et Mme E... avaient acquis par possession une servitude de vue sur le fonds de M. C... et de Mme Y... et d'avoir condamné ceux-ci, sous astreinte de 100 € par jour de retard, à démolir le mur obstruant les vues, ainsi qu'à payer à M. et Mme E... la somme de 4 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de leur préjudice de jouissance ;

AUX MOTIFS QU'en droit, les vues sur la propriété de son voisin, régies par les articles 675 à 680 du code civil, constituent des servitudes établies par la loi ; QUE les articles 676 et 677 n'autorisent le propriétaire d'un mur non mitoyen, joignant immédiatement l'héritage d'autrui, à pratiquer dans ce mur que des jours ou fenêtres à fer maillé et verre dormant, ce à vingt-six décimètres au-dessus du plancher ou sol pour le rez-de-chaussée et à dix-neuf décimètres au-dessus du plancher pour les étages supérieurs, tandis que les articles 678 et 679 interdisent les vues droites s'il n'y a dix-neuf décimètres de distance entre le mur où on les pratique et l'héritage clos ou non clos de son voisin et les vues obliques sur le même héritage s'il n'y a six décimètres de distance, à moins que le fonds ou la partie du fonds sur lequel s'exerce la vue ne soit déjà grevé, au profit du fonds qui en bénéficie, d'une servitude de passage faisant obstacle à l'édification de constructions ; QUE par ailleurs, en matière de servitudes établies par le fait de l'homme, l'article 690 du même code ne dispose que les servitudes continues et apparentes, dont font partie les servitudes de vue, s'acquièrent par titre ou par la possession de trente ans ; QUE le droit d'établir des vues non conformes aux articles 676 et suivants peut donc résulter d'une servitude de vue acquise par prescription trentenaire du fait de la présence d'ouvertures donnant sur le fonds d'autrui et dont la possession n'a pas été matériellement contredite ; QU'en revanche, le fait de pratiquer un jour, c'est-à-dire une ouverture laissant passer uniquement la lumière, et non l'air, et ne permettant aucune vue, dans un mur joignant immédiatement le fonds d'autrui n'est pas susceptible de possession utile pour prescrire et ne peut donc faire naître une servitude à la charge de ce fonds ni entraîner de restriction au droit de propriété de son propriétaire ; QU'en l'espèce, il est désormais acquis que les trois ouvertures qui ont été obstruées par le rehaussement de mur litigieux sont pratiquées, non dans un mur mitoyen, mais dans le mur privatif latéral de la partie arrière de l'immeuble d'habitation des consorts E... R... situé [...] , mur joignant immédiatement le jardin aménagé à l'arrière de l'immeuble d'habitation des consorts C... Y... situé au [...] ; QU'il n'est pas davantage contesté que toutes sont équipées de vitres translucides et placées à la même hauteur, à environ 1,60 mètre du sol intérieur de l'immeuble du [...] , lui-même situé plus bas que le jardin du [...] , que deux d'entre elles, qui éclairent la buanderie-cellier des consorts E... R..., sont des ouvertures anciennes sur châssis métalliques, déjà présentes lorsque ceux-ci ont acquis leur immeuble en juin 1995, l'une, dite ouverture n° 3 sur les photographies annotées par les intimés, à l'extrémité du bâtiment côté [...], étant de forme triangulaire et composée de trois panneaux et l'autre, dite ouverture n° 2, au milieu du bâtiment, étant de forme trapézoïdale et composée de trois panneaux, et que la dernière, qui éclaire leur salle de bains, dite ouverture n° 1, à l'angle avec la façade arrière du bâtiment des consorts C... Y... , correspond à une fenêtre rectangulaire en PVC avec double vitrage à trois vantaux dont deux ouvrants à la française et un fixe, substituée en juin 2007 à une ancienne ouverture rectangulaire sur châssis métallique composée de cinq panneaux vitrés également translucides ; QUE l'ouverture n°3, de petites dimensions et entièrement fixe, constitue un simple jour non susceptible de possession utile pour prescrire ; QU'en revanche, l'ouverture n° 2, de dimensions plus importantes et dont le panneau central équipé de charnières est ouvrant, et l'ouverture n° 1 actuelle, de dimensions encore plus importantes (1,88 mètre de large sur 1,04 mètre de haut selon le descriptif du fabricant joint à la commande de la fenêtre) et disposant de deux vantaux ouvrants, permettent de voir, ne serait-ce qu'en partie, le fonds voisin, ce malgré l'aspect granité des vitrages qui masque les détails lorsqu'elles sont fermées, comme le confirment les photographies versées aux débats ; QUE comme telles, elles constituent des vues ;

QU'il ressort des attestations produites de part et d'autre, notamment de celles de M. B... D..., habitant [...] depuis 1962, de M. S... N..., né en [...], et de sa mère Mme W... H... épouse N..., née en [...], de M. A... F..., vendeur de l'immeuble des consorts E... R..., et de sa mère Mme O... P..., dont il avait reçu le bien en donation-partage et qui a vécu toute son enfance dans cette maison, que l'ouverture n° 2 et l'ouverture n° 1 d'origine étaient déjà présentes dans les années 1960 et au plus tard en 1969, soit plus de quarante ans avant le rehaussement de mur litigieux ; QU'en outre, les consorts C... Y... ne justifient pas de leur allégation selon laquelle le panneau central de l'ouverture n° 2 s'ouvrait par le passé de manière moins complète qu'actuellement et leur allégation selon laquelle le dispositif n°1 ne s'ouvrait pas avant sa transformation en juin 2007 est contredite par les photographies prises par les appelants à l'occasion de ces travaux, avant la dépose de l'ancienne ouverture n°1, qui montrent que, si trois de ses panneaux étaient fixes, ses deux panneaux centraux étaient ouvrants et équipés des chaînettes permettant de manoeuvrer à distance le système d'ouverture situé à mi-hauteur de la baie qui n'était pas moins grande que l'actuelle ouverture ; QUE tout au plus, est-il précisé par Mme O... P... que cette ouverture était autrefois fermée par un grillage, grillage dont les points d'accroche demeurent, d'ailleurs, visibles sur la façade arrière du bâtiment des consorts C... Y... ; QU'enfin, si M. L... J..., qui a nettoyé le jardin des consorts C... Y..., et M. V... M..., qui a réalisé un diagnostic immobilier préalable à leur achat de mars 2010 puis des études d'aménagement de leur logement, attestent que ce jardin était, à l'époque de cet achat, encombré de divers gravats et d'une végétation dense laissant à penser qu'il n'était plus entretenu depuis longtemps et rendant son accès difficile, ce qui est cohérent avec le fait que la maison était, dès février 2006, vacante de tout occupant et inhabitable aux dires du président de l'association La Garonnaise qui leur a vendu l'immeuble, et si M. L... J... ajoute qu'il était impossible de distinguer aussi bien les portes et fenêtres de leur immeuble que "la" fenêtre du voisin qui était cachée par deux vieux lilas couverts de lierre et de ronces, il ne peut en être déduit que cette végétation était telle qu'elle privait les consorts E... R... de toute vue sur le fonds voisin au travers des ouvertures n° 1 et 2, a fortiori depuis plus de trente ans, ce que démentent, au demeurant, les photographies aériennes de 2006 et 2009 qui permettent de visualiser les deux lilas, non pas au droit de l'ouverture n°1, mais entre les ouvertures n°2 et 3, à l'emplacement des souches visibles sur les photographies prises après nettoyage du jardin depuis le premier étage de l'immeuble ; QUE du tout, il résulte que, conformément à l'article 690 du code civil et contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, les consorts E... R..., joignant leur possession à celle de leurs auteurs, ont acquis par possession trentenaire une servitude de vue par les ouvertures n°1 et 2, qui ne s'est pas éteinte par impossibilité absolue d'exercice au sens de l'article 703 du même code ni par non-usage pendant trente ans au sens de l'article 706 ; QUE cette servitude interdit aux consorts C... Y... de faire supprimer ces deux ouvertures sur leur fonds pour les remplacer par des dispositifs à verre dormant, quand bien même elles auraient été pratiquées à l'origine de manière irrégulière ; QU'elle leur interdit également d'obstruer la vue en construisant dans un rayon de dix-neuf décimètres à partir du parement extérieur du mur où ces deux ouvertures sont faites ; Or QUE le rehaussement de leur mur latéral de clôture, réalisé en août 2010, contrevient à cette interdiction en ce qu'il est édifié à moins de trois décimètres du parement extérieur du mur de l'immeuble voisin, occulte totalement l'ouverture n°2 et ne laisse plus passer que la lumière au travers de pavés de verre ne couvrant qu'une petite partie de la surface de l'ouverture n°1 ; QU'il importe peu, à cet égard, que la surélévation du mur et l'obturation subséquente de l'ouverture du mur voisin figurent sur les plans annexés à la déclaration préalable de travaux qu'ils ont déposée a posteriori le 23 novembre 2010, ni qu'il n'y ait pas été fait opposition par le maire ; QUE les consorts C... Y... ne pourront donc qu'être condamnés à démolir cet ouvrage, ce dans la totalité de sa hauteur jusqu'à celle de leur mur de clôture initial et dans partie de sa longueur allant de la façade arrière de leur bâtiment jusqu'à six décimètres de l'angle externe de l'ouverture n°2, sans qu'il soit besoin de caractériser un trouble anormal du voisinage ; QUE pour le surplus de sa longueur, l'ouvrage occultant l'ouverture n°3 en nature de simple jour pourra rester en place, d'autant qu'il n'est justifié d'aucun déficit d'ensoleillement ni d'aération causé par cette seule portion de mur dont, au surplus, l'aspect peu esthétique en briques non enduites ne fait pas injure à l'aspect du mur des consorts E... R..., construit en matériaux hétéroclites non enduits ; QUE cette condamnation sera assortie d'une astreinte provisoire dans les termes précisés au dispositif du présent arrêt, en vue d'assurer son exécution effective ; QU'en outre, le trouble de jouissance subi par les consorts E... R... depuis août 2010 en termes de perte d'ensoleillement et d'aération de leur salle-de-bains et, dans une moindre mesure, de leur buanderie-cellier justifie l'allocation d'une indemnité de 4 000 euros à la charge des consorts C... Y... ;

ALORS QU'une servitude de vue, continue et apparente, peut s'acquérir par prescription ; qu'il incombe à celui qui prétend avoir prescrit des vues, de démontrer que tous les éléments de la servitude existaient depuis plus de trente ans ; qu'il appartenait donc aux époux E... de démontrer que les baies litigieuses permettaient, depuis plus de trente ans, de voir le jardin voisin, ce qui impliquait qu'elles aient été ouvrantes et n'aient pas été occultées ; que dès lors, en énonçant que les consorts C... Y... ne faisaient pas la preuve que l'ouverture de la baie n° 2 était plus petite, et qu'ils ne prouvaient pas l'absence d'ouverture antérieurement à 2007 de la baie n° 1, la cour d'appel a violé les articles 1315 devenu 1353 et 690 du code civil.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 19-13.224
Date de la décision : 26/03/2020
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Troisième chambre civile, arrêt n°19-13.224 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 26 mar. 2020, pourvoi n°19-13.224, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.13.224
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