CIV. 3
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 mars 2020
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10123 F
Pourvoi n° X 19-13.643
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 MARS 2020
La société D'Ardilla, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° X 19-13.643 contre le jugement rendu le 15 janvier 2019 par le tribunal d'instance de Mont-de-Marsan, dans le litige l'opposant à M. L... C..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations écrites de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société D'Ardilla, de la SCP Ortscheidt, avocat de M. C..., après débats en l'audience publique du 28 janvier 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société D'Ardilla aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société D'Ardilla
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir constaté que l'autorisation donnée à l'Earl D'Ardilla, prise en la personne de son gérant monsieur A... X..., d'exploiter en hiver une piste devant rester libre de toute occupation pour permettre l'entretien et le curage d'un fossé d'assainissement contrevient aux dispositions du cahier des charges de la Compagnie d'Aménagement des Landes de Gascogne et d'avoir débouté l'Earl D'Ardilla, prise en la personne de son gérant monsieur A... X..., de toutes ses demandes, tendant notamment à la réparation de ses préjudices ;
Aux motifs que « en application de l'article 1134 ancien du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ; que l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X... réclame la condamnation de monsieur L... C..., reconnu coupable par le tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan d'avoir détruit à deux reprises le maïs planté sur une bande de terre qui longe le fossé séparant, au lieudit, [...] , leurs fonds respectifs, à l'indemniser des préjudices qu'elle a corrélativement subis, ses constitutions de partie civile ayant été déclarées irrecevables par la juridiction répressive ; que l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X... se prévaut de l'autorisation que monsieur O... lui a donnée d'exploiter, hors période hivernale, cette bande de terre ; que monsieur L... C... objecte que cette autorisation ne pouvait lui être accordée parce qu'elle contrevient aux dispositions du cahier des charges de la CALG, dont il demande qu'elles soient respectées ; qu'ainsi le litige opposant les parties puise son origine dans l'application du cahier des charges de la SA CALG établi, èsqualité de directeur général, par monsieur M... U..., et que monsieur L... C... verse aux débats ; que d'une part, le cahier des charges mentionne, contrairement à ce que prétend l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X..., la présence de la piste litigieuse puisqu'il y est indiqué, au paragraphe de la page 3 dédié au lot n°2, que le contour de l'exploitation est défini, au sud, par « les points L.O, le collecteur 2, partie amont et la piste latérale le longeant étant sur le lot », et que cette piste figure sur le croquis annexé sous la légende « chemin de desserte » ; que, d'autre part, il n'est pas contesté que le cahier des charges, qui fixe les obligations et responsabilités des attributaires des trois lots est opposable sur le plan contractuel aux colotis, la Cour de cassation ayant récemment jugé, dans un arrêt du 14 septembre 2017, que le cahier des charges d'un lotissement, quelle que soit sa date, approuvé ou non, constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues ; qu'ainsi, les clauses du cahier des charges de la CALG restent applicables dans les rapports entre les attributaires des trois lots et donc entre monsieur C... et monsieur O... ; qu'il est loisible de constater que ce document n'en recèle aucune, contrairement à ce que soutient l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X..., qui autoriserait la culture, à quelque période de l'année que ce soit, de la piste logeant le fossé jouxtant la limite méridionale des lots n°1 et 2 et dont monsieur L... C... assure qu'elle a vocation à permettre la libre circulation des engins d'entretien du fossé ainsi qu'à recevoir les terres curées ; qu'en revanche, le cahier des charges impose aux attributaires, en dépit des dénégations de l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X..., un certain nombre d'obligations dont celle, objet du paragraphe A du chapitre II intitulé « charges particulières d'entretien », d'entretenir le réseau d'assainissement ; que ce réseau est composé, selon sa description donnée au chapitre I, des rigoles et des fossés de ceinture situés à l'intérieur de chaque lot, des fossés de protection et des collecteurs ; que le fossé jouxtant la piste litigieuse, dès lors, en fait partie ; que selon le même paragraphe A les différents éléments du réseau d'assainissement doivent être « soigneusement curés et nettoyés aussi souvent qu'il sera nécessaire, afin que l'eau puisse s'écouler librement sur tout le profil » ; que le chapitre III impose aux attributaires d'assurer « la libre circulation des agents ou riverains et matériels assurant le contrôle et l'entretien des réseau d'assainissement et de voirie » ; qu'il se déduit de l'absence, dans ces prescriptions, de référence à la période ou aux périodes d'entretien du réseau d'assainissement que la piste litigieuse devait en permanence rester libre de toute occupation ; que la vocation de cette piste dont le procès-verbal établi le 20 mai 2015 par maître B... N..., huissier de justice à Mont-de-Marsan, démontre la matérialité mais également que seule sa partie jouxtant les terres de l'Earl D'Ardilla est plantée ou semée, est bien celle alléguée par monsieur L... C... ; que par voie de conséquence, monsieur O... a contrevenu aux dispositions du cahier des charges en autorisant l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X... à l'exploiter en période hivernale ; que l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X... sera donc déboutée de toutes ses demandes » (jugement, pp. 2-4) ;
1°) Alors que l'autorité de la chose jugée au pénal s'impose au juge civil relativement aux faits constatés qui constituent le soutien nécessaire de la condamnation ; qu'en l'espèce, le tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan a, par deux jugements définitifs, en date du 14 avril 2016, reconnu monsieur L... C... coupable de destruction volontaire des plants de maïs de l'Earl D'Ardilla, en écartant l'existence, alléguée par le prévenu, d'une servitude imposant de laisser la bande de terre litigieuse libre de toute plantation ; qu'en retenant, au contraire, que la piste litigieuse devait en permanence rester libre de toute occupation, pour débouter l'Earl D'Ardilla de sa demande d'indemnisation du préjudice résultant des faits commis par monsieur C..., le tribunal d'instance a violé le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil ;
2°) Alors que, en tout état de cause, seul le cahier des charges d'un lotissement peut être regardé comme constituant un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues, peu important sa date et l'approbation de ce cahier ; que constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis ; que ne relève pas de cette qualification la division en lots de parcelles de terre à usage agricole ; qu'en jugeant, pour statuer comme il l'a fait, le cahier des charges de la compagnie d'aménagement des Landes de Gascogne applicable dans les rapports entre les attributaires des lots à usage agricole, peu important l'absence d'approbation et de date de ce document, quand ce « cahier des charges », dont la portée était contestée par l'EARL d'Ardilla, faute de date certaine, de signature et de mention de publicité à la Conservation des hypothèques, n'était pas relatif à un lotissement au sens des articles L. 442-1 et L. 442-9 du code de l'urbanisme et ne pouvait, en conséquence, être regardé comme engageant des colotis quelle que soit sa date et son approbation, le tribunal a violé les textes susvisés, ensemble l'article 1134 du code civil, en sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné l'Earl D'Ardilla, prise en la personne de son gérant monsieur A... X..., à payer monsieur L... C... une somme de 1.200 euros fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que « monsieur O... a contrevenu aux dispositions du cahier des charges en autorisant l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X... à l'exploiter en période hivernale » (jugement, p. 3 dernier §) ;
Et aux motifs que « sur la demande reconventionnelle d'article 700 du code de procédure civile, les circonstances de la cause démontrent que son entière endosse doit être jetée sur l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X... qui a exploité sans droit ni titre l'emprise d'une piste destinée à permettre l'entretien et le curage d'un fossé d'assainissement la longeant ; que dès lors il serait inéquitable de laisser à la charge de monsieur L... C... les frais, non compris dans les dépens, qu'il a dû engager pour ester en justice ; que l'Earl D'Ardilla prise en la personne de son gérant monsieur A... X... sera donc condamnée à lui payer une somme de 1200 euros » (jugement, p. 3 dernier §) ;
1°) Alors que la cassation, à intervenir sur le premier moyen, des dispositions rejetant la demande d'indemnisation de l'Earl D'Ardilla, emportera, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la censure de celle condamnant l'Earl D'Ardilla au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en raison du lien de dépendance nécessaire qui les unit ;
2°) Alors que, en tout état de cause, la contradiction de motif équivaut à une absence de motif ; qu'en relevant, pour condamner l'Earl D'Ardilla à payer à monsieur C... une certaine somme au titre des frais irrépétibles, que celle-ci avait exploité sans droit ni titre l'emprise d'une piste destinée à permettre l'entretien d'un fossé, de sorte que l'entière responsabilité de la procédure lui incombait (jugement, p. 4 § 2), tout en relevant que l'Earl D'Ardilla avait été autorisée, par monsieur O..., à exploiter la piste litigieuse en période hivernale (jugement, p. 3 dernier §), le tribunal d'instance, qui s'est contredit a violé l'article 455 du code de procédure civile.