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12/02/2020 | FRANCE | N°18-26.714

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 12 février 2020, 18-26.714


CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 février 2020




Rejet non spécialement motivé


Mme BATUT, président



Décision n° 10102 F

Pourvoi n° J 18-26.714




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 FÉVRIER 2020

La société Cheminées Philippe, société par actions simplifiée,

dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 18-26.714 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 3), dans le litige l'opposant :...

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 février 2020

Rejet non spécialement motivé

Mme BATUT, président

Décision n° 10102 F

Pourvoi n° J 18-26.714

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 FÉVRIER 2020

La société Cheminées Philippe, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 18-26.714 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 3), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société U...-T... (U... T... Oe), société de droit grec, dont le siège est [...],

2°/ à M. U...,

3°/ à M. T...,

tous deux domiciliés [...], pris en qualité de liquidateurs amiables de la société U...-T...,

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Hascher, conseiller, les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Cheminées Philippe, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société U...-T..., de MM. U... et T..., ès qualités de liquidateurs amiables de la société U...-T..., après débats en l'audience publique du 14 janvier 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Hascher, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cheminées Philippe aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cheminées Philippe et la condamne à payer à la société U...-T... et à MM. U... et T..., ès qualités de liquidateurs amiables de la société U...-T..., la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Cheminées Philippe.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société Cheminées Philippe de l'ensemble de ses demandes, d'AVOIR dit que la décision du 8 septembre 2017 dans le dossier 16/3700 de la directrice des services de greffe judiciaires du tribunal de grande instance de Béthune reconnaissant la force exécutoire sur le territoire français de la République Française du jugement n°3729/2006 du 31 janvier 2006 du tribunal de première instance de Thessalonique est régulière et bien fondée, et d'AVOIR condamné la société Cheminées Philippe à payer à la société U... T... la somme de 4000 € d'indemnité d'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

AUX MOTIFS QUE « Il résulte certes de l'annexe III visée à l'article 43 du règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000 que le recours contre une décision constatant la force exécutoire d'une décision rendue par un pays de l'Union en matière civile ou commerciale est porté devant la cour d'appel, précision faite que l'annexe II prévoyait que la décision initiale devait être prise par le président du tribunal de grande instance, ces annexes présentant les juridictions ou autorités alors compétentes dans chaque pays de l'Union Européenne. Toutefois en application de l'article 509-2 du code de procédure civile et ce depuis le décret n° 2004-836 du 20 août 2004 applicable au 1° janvier 2005, cette compétence a été confiée au greffier en chef du tribunal de grande instance, désormais appelé directeur des services de greffe judiciaires cette compétence étant maintenue malgré les nombreuses modifications de ce texte apportées par les décrets 2005-460 du 13 mai 2005, 2010-1165 du 1° octobre 2010, 2011-1043 du 1° septembre 2011, 2015-1395 du 2015 2 novembre 2015 et 2017-892 du 6 mai 2017, la seule différence étant l'appellation du greffier en chef » ;

QUE « Sur le droit à agir de la société U...- T... : Conformément aux dispositions de l'article 777 du code civil grec et des articles 7 et 14 des statuts de la société U...- T..., tels que repris dans l'attestation du cabinet d'avocats Malisagou Anastasiou et Associés, avocats auprès de la cour de cassation, cette société bien qu'en liquidation amiable est fondée par l'intermédiaire de l'un et/ou l'autre de ces deux gérants associés à poursuivre l'exécution de décisions de justice leur reconnaissant une créance. Sera rejetée en conséquence le moyen tiré du défaut de droit à agir de l'intimée » ;

ET QUE « Le bien fondé du recours : La société Cheminées Philippe ne peut légitimement prétendre qu'il ne pouvait être accordé la reconnaissance de la force exécutoire sur le territoire français de la décision n° 3729/2006 du 31 janvier 2006 au motif que le caractère exécutoire n'était pas établi en Grèce, alors même que ce caractère résulte du certificat établi le 17 mars 2016 par le président du tribunal de première instance de Thessalonique, conformément à l'article 54 du règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000. Certes, la preuve n'est pas rapportée que ce jugement rendu contradictoirement à l'égard de la société Cheminées Philippe lui ait été signifié. Toutefois, il est constant qu'elle en a eu connaissance dès lors qu'elle était représentée par avocat dans la procédure d'appel contre ce jugement qui s'est déroulée devant la cour d'appel de Thessalonique et qui a donné lieu à décision prononcée le 29 janvier 2010. Elle ne peut donc légitimement alléguer que ce défaut de signification à partie d'un jugement rendu contradictoirement à son égard est manifestement contraire à l'ordre public de l'État membre requis. Le fait qu'il existe une seconde décision du 8 septembre 2017 de la directrice de greffe du tribunal de grande instance de Béthune reconnaissant la force exécutoire sur le territoire de la République française d'un jugement rendu par le tribunal de Thessalonique à l'encontre de la SA Cheminées Philippe pourtant lui aussi le même n°3729/2006 alors qu'il a été rendu non le 31 janvier 2006 mais le 25 juin 2014, n'est pas susceptible d'entacher la régularité de la décision frappée d'appel dans le cadre de la présente procédure, les références du jugement grec du 31 janvier 2006 étant exactes. La société Cheminées Philippe n'apparaît plus recevable dans le cadre de la présente instance à soulever la règle « non bis idem » au motif qu'un précédent jugement du tribunal de Thessalonique avait le 27 mai 2004 débouté la société U...- T... de toutes ses demandes, alors qu'elle ne l'avait pas soulevé ce moyen dans le cadre de la procédure qui a conduit au jugement du 31 janvier 2006. Elle ne peut prendre prétexte de la formulation de la décision n° 178/2010 de la cour d'appel de Thessalonique du 29 janvier 2010, qui rejette l'appel formé par la société U...- T... sans confirmer le jugement, pour en conclure que la décision de la directrice des services de greffe judiciaires n'est pas fondée, alors qu'il résulte de la lecture de cet arrêt que seule la U...- T... avait fait appel en ce que ses demandes n'avaient pas été acceptées entièrement par le tribunal de première instance et que le rejet de cet appel n'a pas d'incidence sur les condamnations prononcées par le premier juge. La preuve du caractère définitif de cette dernière décision d'appel est par ailleurs apportée, dès lors qu'est versé aux débats le certificat de non recours contre la décision du 29 janvier 2010 n° 178/2010 établi par le greffier de la cour d'appel de Thessalonique. Enfin la société Cheminées Philippe est mal fondée à soutenir que la société U...- T... ne peut plus poursuivre l'exécution de la décision du 31 janvier 2006, en application de l'article L 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, alors même que cette décision n'est devenue définitive que postérieurement à la décision de la cour d'appel de Thessalonique du 29 janvier 2010 » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Vu les articles 38 et suivants du Règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 et les articles 509-2 et suivants du Code de Procédure Civile ; Vu la requête en date du 20 septembre 2016 de la SNCTH.U...-A.T... représentée par la SCP B...-R...-C..., Huissiers de justice associés, visant à constater la force exécutoire sur le territoire de la République française du jugement rendu le 31 janvier 2006 par le Tribunal d'instance de THESSALONIQUE (GRECE) ; Vu le certificat visé à l'article 54 du Règlement CE n° 44/2001 établi le 17 mars 2016 » ;

1) ALORS QU'il est interdit au juge de dénaturer la loi étrangère ; que l'article 777 du code civil grec précise que la société continue son existence, une fois qu'elle est dissoute, lorsque les besoins et le but de la liquidation l'exigent et que dès que la société est dissoute le pouvoir des gérants-associés expire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que conformément aux dispositions de l'article 777 du code civil grec et des articles 7 et 14 des statuts de la société U... T..., tels que repris dans l'attestation du cabinet d'Avocats Malisgou Anastasiou et Associés, cette société, bien qu'en liquidation amiable, était fondée à agir par l'intermédiaire de l'un ou l'autre de ces deux gérants associés pour poursuivre l'exécution de décisions de justice leur reconnaissant une créance ; qu'en statuant ainsi, sans faire état d'aucune autre source de droit positif grec donnant à l'article 777 du code civil grec le sens qu'elle lui attribue, étant précisé que les statuts de la société ne sont quant à eux pas une source de droit positif, la cour d'appel a dénaturé la loi étrangère et violé l'article 3 du code civil.

2) ALORS subsidiairement QU'il incombe au juge français, qui reconnaît applicable un droit étranger, d'en rechercher la teneur, soit d'office, soit à la demande d'une partie qui l'invoque, avec le concours des parties et personnellement s'il y a lieu, et de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif étranger ; que le juge ne peut pas se contenter d'un extrait d'un texte de la loi étrangère pour en déduire que celui-ci est applicable de manière générale ; qu'en l'espèce, pour admettre le droit à agir de la société U... T..., bien que celle-ci soit en liquidation amiable, pour poursuivre l'exécution de décisions de justice lui reconnaissant une créance, la cour d'appel s'est bornée à énoncer qu'elle se référait aux dispositions de l'article 777 du code civil grec et des articles 7 et 14 des statuts de la société U... T..., tels que repris dans l'attestation du cabinet d'avocats Malisagou Anastasiou et Associés, avocats auprès de la Cour de cassation grecque ; que cette attestation ne mentionnait pourtant qu'un extrait de l'article 777 du code civil grec ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher la teneur exacte et complète de la loi grecque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du code civil.

3) ALORS QU'à compter de l'entrée en vigueur du décret n° 2014-1633 du 26 décembre 2014 modifiant l'article 509-2 du code de procédure civile, la requête en déclaration du caractère exécutoire en France d'une décision rendue dans un autre Etat membre de l'Union européenne, entrant dans le champ du règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000, doit être présentée au président du tribunal de grande instance ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué que la société U... T... a présenté sa requête à la directrice des services de greffe judiciaires le 20 septembre 2016 ; qu'en affirmant qu'en application de l'article 509-2 du code de procédure civile la compétence avait été confiée au directeur des services de greffe judiciaires et maintenue par les décrets n° 2015-1395 du 2 novembre 2015 et n°2017-892 du 6 mai 2017, et en refusant en conséquence d'annuler la décision du 8 septembre 2017 dans le dossier 16/3700 de la directrice des services de greffe judiciaires du tribunal de grande instance de Béthune, la cour d'appel a violé l'article 39 et l'annexe II du règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000, dit Bruxelles I, et l'article 509-2 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige.

4) ALORS QU'une décision rendue dans un autre Etat membre de l'Union européenne n'est pas reconnue exécutoire si la reconnaissance est manifestement contraire à l'ordre public de l'État membre requis ; qu'en France, la nécessité de notifier un jugement du 31 janvier 2006 avant de le faire exécuter est une norme d'ordre public ; qu'en l'espèce, en affirmant que le défaut de signification à partie à l'égard de la société Cheminées Philippe du jugement du 31 janvier 2006 dont il était demandé l'exécution n'était pas manifestement contraire à l'ordre public de l'État membre requis, la cour d'appel a violé l'article 34, 1) du règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000, dit Bruxelles I.

5) ALORS QU'une décision rendue dans un Etat membre de l'Union européenne n'est pas reconnue exécutoire dans l'État membre requis si elle est inconciliable avec une décision rendue antérieurement dans un autre État membre ou dans un État tiers entre les mêmes parties dans un litige ayant le même objet et la même cause, lorsque la décision rendue antérieurement réunit les conditions nécessaires à sa reconnaissance dans l'État membre requis, sans que ce moyen de contestation de la reconnaissance du caractère exécutoire d'une décision soit conditionné à la nécessité d'avoir soulevé, lors de la procédure ayant conduit à ladite décision, le moyen pris de l'autorité de chose jugée ; qu'en l'espèce, pour affirmer que la société Cheminées Philippe n'était pas recevable à soulever la règle « non bis in idem » sur la base d'un précédent jugement du tribunal de Thessalonique qui avait, le 27 mai 2004, débouté la société U... T... de toutes ses demandes, la cour d'appel a retenu que la société Cheminées Philippe n'avait pas soulevé ce moyen dans le cadre de la procédure qui a conduit au jugement du 31 janvier 2006 ; qu'en niant ainsi, par un motif impropre, la recevabilité du moyen de la société Cheminées Philippe contestant la reconnaissance en France du caractère exécutoire du jugement n°3729/2006 du 31 janvier 2006 à raison d'une autre décision inconciliable rendue antérieurement, la cour d'appel a violé l'article 34, 4) du règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000, dit Bruxelles I.

6) ALORS QU'il incombe au juge français, qui reconnaît applicable un droit étranger, d'en rechercher la teneur, soit d'office, soit à la demande d'une partie qui l'invoque, avec le concours des parties et personnellement s'il y a lieu, et de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif étranger ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'arrêt de la cour d'appel de Thessalonique du 29 janvier 2010 avait rejeté l'appel formé par la société U... T... contre le jugement du 31 janvier 2006 sans confirmer ce jugement ; qu'en affirmant que le rejet de cet appel n'avait pas d'incidence sur les condamnations prononcées par le premier juge, sans rechercher la teneur de la loi grecque et en particulier si, en droit grec, le rejet de l'appel d'une partie sans confirmation du jugement remettait ou non en cause les condamnations prononcées au profit de cette même partie par le premier juge, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du code civil.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-26.714
Date de la décision : 12/02/2020
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Première chambre civile, arrêt n°18-26.714 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai 83


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 12 fév. 2020, pourvoi n°18-26.714, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.26.714
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