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12/02/2020 | FRANCE | N°18-19.544

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 12 février 2020, 18-19.544


SOC.

JT



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 février 2020




Rejet non spécialement motivé


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10192 F

Pourvoi n° R 18-19.544




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 FÉVRIER 2020

La société Laboratoire science et na

ture (aussi dénommée Beauty Nature), société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° R 18-19.544 contre les arrêts rendus les 27 février et 27 avril ...

SOC.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 février 2020

Rejet non spécialement motivé

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10192 F

Pourvoi n° R 18-19.544

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 FÉVRIER 2020

La société Laboratoire science et nature (aussi dénommée Beauty Nature), société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° R 18-19.544 contre les arrêts rendus les 27 février et 27 avril 2018 par la cour d'appel de Besançon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme O... V..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Laboratoire science et nature, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme V..., après débats en l'audience publique du 15 janvier 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre des décisions attaquées, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Laboratoire science et nature aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Laboratoire science et nature et la condamne à payer à Mme V... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Laboratoire science et nature

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR requalifié le contrat de travail liant Mme V... à la SAS Laboratoire Science et Nature en contrat à temps plein et condamnait cette dernière à payer à la salariée les sommes de 46 507,55 € bruts à titre des rappels de salaire du 1er février 2007 au 8 juillet 2011, 4 650,75 € au titre des congés payés afférents, 2 872,62 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 287,26 € bruts au titre des congés payés afférents, 1 268,74 € bruts au titre de l'indemnité légale de licenciement, 9 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné l'employeur aux entiers dépens ainsi qu'à verser à la salariée une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu que la Cour de cassation, dans son arrêt du 25 janvier 2017, a saisi la cour de renvoi :
- d'une part de la requalification du contrat en contrat de travail à temps complet, et des demandes de rappels de salaire et de congés payés en découlant,
- d'autre part des conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse à savoir :
- les dommages et intérêts,
- l'indemnité de préavis,
- les congés payés afférents,
- l'indemnité légale de licenciement ;
1. Sur la qualification du contrat en contrat de travail à temps complet, et ses conséquences
1.1 Sur la requalification
Attendu que l'article L 3123-14 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent contrat dispose que le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne notamment :
1º la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile, et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;
2º les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification
3º les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié'
4º les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixé par le contrat ;
Attendu que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail, et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet, et que tel est le cas en l'espèce ;
Qu'il incombe dès lors, selon une jurisprudence désormais constante, à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;
Que les deux conditions sont cumulatives ;
Or Attendu que la société Laboratoire Science et Nature ne rapporte pas la preuve de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail ;
Attendu que c'est en vain qu'elle soutient que la demande de requalification est irrecevable au motif que la salariée a délibérément, et de mauvaise foi refusé de signer le contrat qu'il lui proposait ;
Qu'en effet il ne peut être reproché à la salariée de refuser de signer un contrat de travail à hauteur de 21 heures par mois dès lors qu'elle conteste précisément l'amplitude horaire retenue par l'employeur, et que l'inspection du travail avait exigé la rémunération exacte de la durée du travail de chaque salarié, de sorte qu'aucune irrecevabilité ne peut être tirée de ce refus ;
Attendu que l'employeur retient ce chiffre de 21 heures par mois sur une base de quatre réunions mensuelles de cinq heures en moyenne ;
Qu'il convient en premier lieu de relever qu'il ne s'agit, selon ses propres termes, que d'une évaluation alors qu'il lui appartient, pour renverser la présomption de temps complet, de rapporter la preuve du nombre exact d'heures de travail réalisé hebdomadairement ou mensuellement, et qu'il ne produit en l'espèce aucun relevé du nombre d'heures de travail ;
Que par ailleurs les 21 heures concédées sont très inférieures aux relevés établis par Mme V... d'avril à juillet 2011 mentionnant des durées de 62,25 heures, 91,95 heures, 84,20 heures et 39,75, et notant expressément « uniquement pour les démos », la salariée expliquant que ces décomptes ne comportent pas les heures de travail effectuées en administratif, en préparation, ou suivi des démonstrations, ni le temps consacré à informer les conseillères postulantes, ainsi que les clients potentiels sur la méthode précise et les produits de la marque ;
Que par conséquent ni l'évaluation de 21 heures, ni les 4 relevés incomplets, qui au demeurant varient du simple au double, ne permettent à l'employeur d'établir un nombre d'heures de travail par semaine ou par mois ;
Attendu que la société Laboratoire Science et Nature souligne encore que la durée de 21 heures proposée est en lien avec le chiffre d'affaires réalisé par MME V... ; mais qu'il n'existe aucune corrélation mathématique entre le chiffre d'affaires et le nombre d'heures de travail dès lors que malgré un investissement certain en temps de préparation et tenue de la réunion, puis de suivi des commandes, les ventes réalisées peuvent ne pas se situer à la hauteur de l'investissement en temps de travail ;
Que le temps de travail de l'emploi qu'il soit à temps complet, ou à temps partiel ne peut être analysé à l'aune du chiffre d'affaires ;
Attendu que la société Laboratoire Science et Nature met en avant la liberté de MME V... d'organiser son emploi du temps ; mais que cette liberté ne démontre pas pour autant la durée du travail ;
Attendu que la société Laboratoire Science et Nature soutient encore que Mme V... n'avait pas à se tenir à la disposition permanente de son employeur qu'elle organisait librement son rythme de travail ce qui lui permettait en parallèle d'exercer une seconde activité de vendeuse à domicile indépendante, excluant ainsi un temps plein ;
Que cependant l'exercice d'une activité secondaire de vendeuse à domicile n'est pas exclusive d'un emploi principal à temps plein, et que là encore l'exercice de cette activité secondaire n'est pas de nature à établir le nombre d'heures de travail effectué pour le compte de la société intimée ;
Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Laboratoire Science et Nature ne rapporte pas la preuve de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, de sorte qu'elle ne renverse pas la présomption simple de travail à temps complet ; et qu'il n'est dans ces conditions pas nécessaire d'examiner le second critère relatif à la disposition permanente de la salariée ;
Que le jugement déféré ayant débouté MME V... de sa demande de requalification du contrat de travail en contrat à temps plein est par conséquent infirmé ;
1.2 Sur les conséquences financières
Attendu que la requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plein entraîne l'obligation pour l'employeur de rémunérer la salariée sur la base d'un temps de travail complet ;
Qu'il est à cet égard souligné que la requalification se fait bien entendu pour toute la période contractuelle et ne peut aboutir à un temps partiel pour les quatre mois d'avril à juillet 2011 objet des décomptes partiels précités de Mme V... ;
Attendu que Mme V... détaille justement en page 15 de ses conclusions le calcul exact du rattrapage de salaires pour les années 2007 à 2010 ;
Qu'il convient de valider les bases de calcul qu'elle a retenu soit un nombre d'heures mensuelles de 151,67 heures et un taux horaire du SMIC variant chaque année en juillet et partant de 8,27 € en février 2007 pour atteindre 9,47 € en 2011 ;
Qu'elle a pris soin de déduire les montants d'ores et déjà versés par son employeur, de sorte qu'il y a lieu de faire droit à sa demande de paiement d'une somme de 46.507,55 € bruts, outre 4.650,75 € au titre des congés payés afférents ;
Attendu que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande ;
2. Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse
Attendu que MME V... a été embauchée le 1er février 2007, et a pris acte de la rupture du contrat de travail le 8 juillet 2011 dont il est acquis, depuis l'arrêt de renvoi de la Cour de cassation, qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Que son salaire moyen des six derniers mois, sur la base du contrat de travail à temps plein, s'élève à 1.436,31 € bruts ;
Que les contestations de la société Laboratoire Science et Nature fondées sur le montant du salaire de base sont en l'espèce sans emport puisqu'il a ci-dessus été jugé que MME V... bénéficie d'un contrat de travail à temps plein, et par conséquent du salaire correspondant ;
Attendu que MME V... comptait lors de la rupture plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant de manière habituelle au moins 11 salariés de sorte qu'elle relève du régime d'indemnisation de l'article L 1235-3 du code du travail ;
Qu'il résulte des dispositions précitées que l'indemnité allouée ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois d'activité soit 8.617,86 € ;
Attendu que MME V... réclame une somme de 17.235,72 € correspondant à 12 mois de salaire en invoquant son âge, son ancienneté, les nombreuses irrégularités qui ont affecté la relation de travail, et sa situation de salariée précaire ;
Mais attendu que les irrégularités affectant la relation de travail ne sont pas de nature à justifier un préjudice résultant de la rupture du contrat ;
Que cependant qu'au-delà de l'indemnité minimale MME V... justifie d'un léger préjudice supplémentaire dans la mesure où âgée de 52 ans au moment de la rupture, et titulaire d'une ancienneté de 4 ans et 5 mois dont elle a perdu le bénéfice, elle justifie avoir été prise en charge par pôle emploi jusqu'au 18 mars 2013, puis avoir enchaîné des contrats à durée déterminée jusqu'au 1er mars 2014, avant de bénéficier d'un CDI ;
Que par conséquent l'allocation d'une somme de 9.000 € indemnisera justement le préjudice subi ;
Attendu que MME V... est bien fondée à réclamer au titre de l'indemnité compensatrice de préavis une somme de 2.872,62 € représentant 2 mois de salaire, outre 287,26 € au titre des congés payés afférents ;
Attendu que l'indemnité de licenciement eu égard au salaire brut mensuel de 1.436,31 € et à une ancienneté de 4 ans et 5 mois, s'élève à 1.268,74 € que la société Laboratoire Science et Nature est condamnée à lui verser ;
Attendu que le jugement déféré a qualifié la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en démission, et par voie de conséquence a rejeté toutes les demandes indemnitaires découlant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Qu'il doit être infirmé sur ce point ;
3. Sur les dépens et l'article 700 du CPC
Attendu que le jugement déféré est confirmé s'agissant des frais irrépétibles et des frais et dépens;
Attendu que la SAS Laboratoire Science et Nature qui succombe doit être condamnée aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel ;
Attendu que l'équité commande de condamner la SAS Laboratoire Science et Nature à payer à MME V... une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du CPC ;
Qu'en revanche l'équité ne commande pas de faire application de ce même texte au profit de la SAS Laboratoire Science et Nature » ;

ALORS QUE l'employeur peut renverser la présomption d'un emploi à temps complet en rapportant la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, pour démontrer que la durée du travail de Mme V... était convenue entre les parties, l'exposante faisait valoir que Mme V... avait été engagée dans le cadre d'un contrat de travail à temps partiel choisi aux termes duquel il était expressément convenu que « la représentante déterminera elle-même le temps de travail consacré aux démonstrations et à leur organisation » et qu'elle « n'exerce pas à titre exclusif et constante cette activité », de sorte que c'était en réalité la salariée et elle-seule, en fonction de ses souhaits, qui définissait ses propres plannings ; que dès lors, en se bornant à affirmer, pour dire que la société Laboratoire Science et Nature ne rapportait pas la preuve de la durée exacte de travail, mensuelle ou hebdomadaire convenue avec la salariée, que ni l'évaluation de 21 heures, ni les 4 relevés incomplets ne faisaient la preuve de la durée exacte convenue, sans s'expliquer sur la portée du contrat de travail, de nature à démontrer que la durée du travail était choisie par la salariée et, partant, avait été convenue entre les parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3123-14 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-19.544
Date de la décision : 12/02/2020
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre sociale, arrêt n°18-19.544 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon 03


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 12 fév. 2020, pourvoi n°18-19.544, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.19.544
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