CIV. 1
JT
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 29 janvier 2020
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10057 F
Pourvoi n° U 18-20.398
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme A....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 20 mars 2019.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 29 JANVIER 2020
M. L... V..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° U 18-20.398 contre l'arrêt rendu le 29 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 1), dans le litige l'opposant à Mme O... A..., épouse V..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Azar, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. V..., de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de Mme A..., et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 décembre 2019 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Azar, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, M. Sassoust, avocat général, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. V... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. V...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de Monsieur V... en nullité du mariage et de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi ;
AUX PROPRES MOTIFS Qu'il résulte de la règle tirée de l'article 3 du Code civil que les conditions de fond du mariage sont déterminées distributivement par la loi personnelle de chacun des époux, en l'espèce, la loi française pour Monsieur V... et la loi coréenne pour Madame A... ; qu'aux termes de l'article 180 du Code civil, « s'il y a erreur dans la personne ou sur des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage » ; que, si une telle cause de nullité n'existe pas en droit coréen, elle doit, en revanche, être examiné au regard du consentement de Monsieur V... ; qu'il résulte de l'attestation d'une amie du demandeur, Madame G... K... (pièce demandeur n° 13), que Monsieur V... suivait des cours de coréen dispensés par Madame A... et que celle-ci lui avait confié, d'une part, que l'homme avec lequel elle était pacsée la trompait mais qu'elle ne pouvait le quitter de crainte de perdre son titre de séjour temporaire en France, d'autre part, que les cours qu'elle donnait ne lui permettaient pas de subvenir à ses besoins, de se loger, ni de payer les soins qu'exigeaient ses problèmes de santé et pour lesquels elle ne bénéficiait d'aucune couverture sociale ; que Monsieur V... a déclaré au témoin « qu'il ferait de son mieux pour sortir [Madame A... de là » ; que, dès lors, à supposer que Madame A... ne se soit pas mariée pour des motifs exclusivement sentimentaux, Monsieur V... ne pouvait ignorer qu'il offrait pas le mariage ce que l'épouse souhaitait y trouver, à savoir, la sécurité matérielle et un titre de séjour sur le territoire français pour lesquels elle avait précédemment accepté de se pacser et de continuer à vivre en harmonie avec un homme dont elle disait qu'il la trompait ; qu'il n'est donc pas démontré d'erreur sur les qualités essentielles de l'épouse ; qu'en outre, au regard des circonstances dans lesquelles le mariage a été célébré, en présence des deux familles, et du fait que les époux ont mené une véritable vie de couple pendant un an avant que les relations se détériorent, il n'est pas démontré d'absence d'intention matrimoniale ; qu'il conviendra de débouter Monsieur V... de sa demande d'annulation du mariage ainsi que de sa demande de dommages-intérêts et de celle formée en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE L... V... fonde sa demande en nullité du mariage sur le défaut d'intention matrimoniale de O... A... qui ne l'aurait épouse que dans un but intéressé à savoir l'obtention de papiers lui permettant de demeurer sur le territoire national et celui de se voir offrir de nombreux cadeaux, tels des voyages, vêtements, bijoux et appartements ; qu'L... V... a versé au soutien de sa demande plusieurs documents dont une convocation de O... A... le 21 juin 2010, veille de son départ du domicile conjugal, pour l'obtention d'un visa long séjour, attestant selon lui que O... A... avait effectué tout ce qui était nécessaire pour profiter de son statut marital avant de quitter le domicile ; qu'il affirme également que O... A... aurait intentionnellement fait durer la procédure en divorce qu'il a introduite le 18 février 2011 pour obtenir des papiers lui permettant de rester en France ; qu'L... V... a, en outre, produit plusieurs documents attestant de ses démarches pour l'acquisition d'un bien immobilier à partir de janvier 2010 et des demandes d'achats de divers effets personnels de son épouse ; qu'enfin, il soutient qu'à compter de son hospitalisation, suite à leur retour de voyage ne Egypte, le 30 mai 2010, le comportement de O... A... aurait radicalement changé à son égard notamment parce qu'elle aurait pris conscience que l'acquisition d'un bien immobilier était incompatible avec l'état de santé de son époux ; qu'elle ne lui aurait jamais rendu visite lors de cette hospitalisation puis serait partie vivre avec le témoin de mariage de celle-ci et ensuite avec deux autres hommes successifs ; que O... A... reconnaît pour sa part qu'un divorce devrait mettre terme à leur mariage mais soutient qu'il ne saurait y avoir nullité du mariage ; qu'elle estime que L... V... a multiplié les actes vexatoires à son encontre allant même par courrier du 17 avril 2011, versé au dossier par le demandeur, informer les préfectures et sous-préfectures des Hauts-de-Seine que O... A... semblai retarder la procédure de divorce pour obtenir un titre de séjour français ; que, suite à ces dénonciations, une enquête pour « mariage blanc » a d'ailleurs été diligentée et confiée aux services de police de Rambouillet ; qu'entendue, O... A... expliquait avoir proposé le mariage à L... V... dans l'espoir que ce dernier prenne soin d'elle ; qu'elle expliquait également que le couple avait déménagé chez la mère de L... V... et que leur relation s'était détériorée à ce moment ; qu'enfin, elle ajoutait qu'elle n'était pas opposée au divorce et qu'elle souhaitait retourner vivre en Corée ; que l'article 146 du Code civil dispose qu'il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement ; que le Code civil coréen prévoit dans la section 3 du chapitre 3 relatif au mariage : un mariage est nul et non avenu (
) quand il n'y a aucun accord de se marier entre les parties ; qu'en l'espèce, il ressort des éléments versés par les parties que le mariage de L... V... et de O... A... s'est détérioré, comme le demandeur l'exprime d'ailleurs lui-même, à leur retour de voyage d'Egypte et lors de son hospitalisation le 30 mai 2010 ; que leur déménagement pour habiter chez la mère de L... V... suite à la résiliation de leur bail le 19 mai 2010 apparaît également avoir été un facteur aggravant de la situation comme le souligne O... A... et en atteste Monsieur T... W..., un ami de celle-ci ; que la situation maritale s'est donc dégradée alors que les époux étaient déjà mariés depuis plus d'une année ; qu'en outre, la famille coréenne de O... A... était présente lors du mariage ce qui atteste à l'évidence de l'importance pour O... A..., comme pour sa famille, de cette cérémonie ; qu'enfin, O... A... a déclaré elle-même aux services de police qu'elle souhaitait retourner vivre en Corée et n'a à ce jour entamé aucune démarche afin d'acquérir la nationalité française autre que par le mariage ; qu'à cet égard, il convient de noter qu'elle a elle-même introduit une nouvelle demande en divorce le 2 février 2012 après celle introduite par L... V... s'étant conclue par une ordonnance de radiation du 6 septembre 2011 en raison des renvois sollicités par celui-ci, perdant ainsi toute chance d'obtenir la nationalité française ; que, dès lors, les divers éléments produits par L... V... attestant selon lui d'éventuelles velléités financières de la part de son épouse de voir régulariser sa situation administratives ne permettent pas de conclure que O... A... se serait mariée avec lui sans son accord ou en vue d'atteindre un but étranger à l'union matrimonial ; qu'en conséquence, il conviendra de rejeter la demande de L... V... en annulation de son mariage ;
ALORS, D'UNE PART, Qu'en énonçant que, « à supposer que Madame A... ne se soit pas mariée pour des motifs exclusivement sentimentaux », la Cour d'appel, qui était saisie de la question de savoir si Madame A... ne s'était pas mariée dans le seul but de rechercher des effets secondaires au mariage, exclusifs de toute intention matrimoniale, à savoir l'acquisition d'un titre de séjour sur le territoire français et un intérêt purement patrimonial, ce qui justifiait le prononcé de la nullité absolue du mariage, a fondé sa décision sur une supputation, et a, dès lors, violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la nullité du mariage pour défaut d'intention conjugal est une nullité absolue qui n'est pas susceptible de confirmation ; que, pour écarter la demande en nullité du mariage, la Cour d'appel a énoncé que « dès lors, à supposer que Madame A... ne se soit pas mariée pour des motifs exclusivement sentimentaux, Monsieur V... ne pouvait ignorer qu'il offrait par le mariage ce que l'épouse souhaitait y trouver, à savoir, la sécurité matérielle et un titre de séjour sur le territoire français pour lesquels elle avait précédemment accepté de se pacser et de continuer à vivre en harmonie avec un homme dont elle disait qu'il la trompait » ; qu'en rejetant ainsi l'action en nullité du mariage, au motif que l'époux avait accepté de donner à son épouse ce qu'elle souhaitait y trouver, la Cour d'appel a violé les articles 146 et 180 du Code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE Monsieur V... avait fait valoir que Madame A... ne s'était mariée que dans le seul but de rechercher des effets secondaires au mariage, exclusifs de toute intention matrimoniale, à savoir l'acquisition d'un titre de séjour sur le territoire français et un intérêt purement patrimonial ; que, pour la réalisation de ces effets secondaire, il était nécessaire que le mariage se poursuive dans une certaine durée ; qu'en se fondant sur la circonstance totalement inopérante que « le mariage a été célébré, en présence des deux famille », et « que les époux ont mené une véritable vie de couple pendant un an avant que les relations se détériorent » pour juger que l'absence d'intention matrimoniale n'était pas démontrée, la Cour d'appel a encore violé les articles 146 et 180 du Code civil.
ALORS, ENFIN, QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 5), Monsieur V... avait fait valoir qu'il « est inexact d'alléguer que Madame A... n'aurait pas sollicité le divorce, lequel l'empêcherait d'avoir un titre de séjour ; car elle avait déjà préparé un autre conjoint, ou plutôt deux candidats au mariage qui attendaient son divorce impatiemment pour un nouveau mariage, lui assurant les papiers administratifs recherchés » et qu'il résultait des éléments de la cause que, lors de la procédure devant la Cour d'appel de renvoi, soit près de 5 ans après, Madame A... était toujours résidente en France ; qu'en énonçant par motifs adoptés des premiers juges, que « O... A... a déclaré elle-même aux services de police qu'elle souhaitait retourner vivre en Corée et n'a à ce jour entamé aucune démarche afin d'acquérir la nationalité française autre que par le mariage », pour juger que l'absence d'intention matrimoniale n'était pas démontrée, sans constater que Madame A... résidait toujours en France au jour où elle statuait, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 146 et 180 du Code civil.