CIV. 2
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 janvier 2020
Rejet non spécialement motivé
Mme BROUARD-GALLET, conseiller doyen faisant fonction de président
Décision n° 10004 F
Pourvoi n° M 18-22.185
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JANVIER 2020
1°/ M. X... A...,
2°/ Mme V... R..., épouse A...,
domiciliés tous deux [...],
ont formé le pourvoi n° M 18-22.185 contre l'arrêt rendu le 20 avril 2018 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre civile), dans le litige les opposant à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de La Réunion (CRCAMR), dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Maunand, conseiller, les observations écrites de Me Haas, avocat de M. et Mme A..., de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de La Réunion, après débats en l'audience publique du 27 novembre 2019 où étaient présentes Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Maunand, conseiller rapporteur, Mme Kermina, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme A... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme A... ; les condamne à payer à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de La Réunion la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé en l'audience publique du neuf janvier deux mille vingt par Mme Kermina, conseiller, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. et Mme A...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR constaté que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion s'est acquittée de l'obligation, mise à sa charge par l'arrêt du 4 mai 2015, de produire un décompte de créance non compensée, le 8 octobre 2015, D'AVOIR débouté les époux A... de leur demande de production d'un décompte certifié et D'AVOIR rappelé que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion est tenue du paiement de ce solde, arrêté à 128 303,96 euros en vertu de l'arrêt du 4 mai 2015 ;
AUX MOTIFS QUE, sur le caractère probant du décompte de créance produit par la banque, les époux A... contestent, sans rapporter la moindre preuve, le caractère sincère du décompte de créance produit par la banque ; qu'il n'y a pas lieu de faire droit à leur demande « de produire un extrait certifié du compte de la créance et d'intérêts dus à M. A... », qui n'est justifié par aucune circonstance de l'espèce, étant observé que la créance d'astreinte née de l'arrêt de la cour d'appel du 12 septembre 1995, confirmant le jugement du conseil de prud'hommes du 11 octobre 1994, arrêtée au 30 décembre 2016, faute d'avoir été liquidée judiciairement, ne saurait figurer dans ledit décompte, contrairement à ce que soutiennent les époux A... ;
ALORS, 1°), QUE, dans leurs conclusions d'appel (p. 13), les époux A... faisaient valoir que le décompte produit par la banque était erroné en ce qu'il avait fait courir les intérêts moratoires sur l'indemnité de licenciement à compter du jugement du conseil de prud'hommes du 11 octobre 1994 et non, comme l'article 1153 du code civil l'imposait, à compter de l'introduction de la demande ; qu'en validant le décompte établi par la banque et le quantum de la créance y figurant sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°), QUE, dans leurs conclusions d'appel (p. 13), les époux A... faisaient valoir que le décompte produit par la banque était erroné en ce qu'il avait fait arrêté le cours des intérêts à la date du 21 juillet 2000 cependant qu'à compter de cette date, la partie de la créance prud'homale de M. A... qui n'avait pas été compensée par la créance de la banque devait continuer à produire intérêts ; qu'en validant le décompte établi par la banque et le quantum de la créance y figurant sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande de M. A... en paiement de la somme de 268 800 euros en réparation du préjudice que lui avait causé la résistance abusive de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion à son obligation d'exécuter le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion du 11 octobre 1994 ;
AUX MOTIFS QUE la décision du conseil de prud'hommes ayant été réformée, la résistance de la banque ne saurait être qualifiée d'abusive, étant précisé que la liquidation prononcée par le tribunal n'ayant jamais été sollicitée avant le jugement du 1er décembre 2016, la banque n'avait pas lieu de s'en acquitter ;
ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, dans son arrêt du 12 septembre 1995, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion a confirmé les dispositions du jugement du conseil de prud'hommes du 11 octobre 1994 qui avaient mis à la charge de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'en considérant, pour écarter toute résistance abusive de l'employeur dans le paiement de ces condamnations, dont elle constatait qu'elles n'avaient pas été soldées avant le mois de décembre 2015, soit 21 années après leur prononcé, que le jugement du conseil de prud'hommes du 11 octobre 1994 avait été « réformé », la cour d'appel a dénaturé l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion du 12 septembre 1995 en violation du principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion à payer aux époux A... la somme de 32 624,02 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion du 11 octobre 1994 ;
AUX MOTIFS QUE, sur l'astreinte fixée par le conseil de prud'hommes dans le jugement du 11 octobre 1994, ce jugement a statué en ces termes : « dit qu'il y a lieu à exécution provisoire d'une somme de 315.468,00 francs sous astreinte de 1000 francs par jour de retard » ; que l'article 516-37 dernier alinéa, dans la rédaction en vigueur à l'époque du prononcé du jugement disposait : « Les jugements qui ordonnent le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées à l'article R. 516-18, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement » ; qu'il résulte des motifs de la décision du conseil de prud'hommes que c'est sur ce fondement qu'a été arrêtée la somme de 315 468 francs au paiement de laquelle la banque a été condamnée, cette condamnation, et elle seule, étant susceptible d'être assortie de l'exécution provisoire ; que c'est donc à tort que le premier juge a retenu que le conseil de prud'hommes allouait aux époux A... neuf mois de salaires ; qu'en effet, il s'agit en réalité du montant maximum des condamnations prononcées qui peut être assorti de l'exécution provisoire et non l'allocation de neuf mois de salaires qui viendrait s'ajouter aux autres sommes arrêtées par le jugement ; que l'astreinte décidée par le tribunal de prud'hommes est destinée à sanctionner le défaut d'exécution provisoire, période qui s'étend de la notification du jugement, le 17 février 1995 à la notification l'arrêt de la cour d'appel le 19 septembre 1995, soit 214 jours ; qu'il est constant que la banque ne s'est pas acquittée du montant qui était assorti de l'exécution provisoire et n'a pas sollicité le sursis à exécution provisoire ; qu'elle n'argue par ailleurs d'aucune difficulté particulière l'ayant empêchée d'exécuter la condamnation mise à sa charge par le conseil de prud'hommes, en sorte qu'il convient de liquider l'astreinte conformément aux termes de la décision, soit 214 jours x 1 000 francs = 214 000 francs, soit convertie en euro la somme de 32 624,02 euros ;
ALORS QUE le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution ; que, dans son arrêt du 12 septembre 1995, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion avait, en confirmant la décision déférée « pour le surplus », notamment confirmé le prononcé de l'astreinte assortissant les condamnations au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'en considérant, pour liquider l'astreinte à la seule somme de 32 624,02 euros, que l'astreinte prononcée par le conseil de prud'hommes était uniquement destinée à sanctionner le défaut d'exécution provisoire au cours de la période séparant la notification du jugement de première instance et celle de l'arrêt d'appel, quand cette astreinte, qui n'était pas limitée dans le temps, devait continuer à courir jusqu'à la complète exécution des condamnations prononcées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la cour d'appel a violé les articles R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution et 1351, devenu 1355, du code civil.