CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 décembre 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10722 F
Pourvoi n° B 18-12.907
Aide juridictionnelle partielle en demande
au profit de Mme M....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 19 décembre 2018.
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme S... G....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 29 mai 2018.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme W... M..., veuve V..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2017 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à Mme P... S... G..., domiciliée [...] , prise en qualité de représentante légale de B... S...-G...,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 novembre 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Azar, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Berthomier, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme M..., veuve V..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme S... G... ;
Sur le rapport de Mme Azar, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme M..., veuve V... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme M..., veuve V....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir constaté que l'enfant B... S...-G... avait la possession d'état d'enfant à l'égard de A... V..., d'avoir dit que la filiation paternelle entre eux était en conséquence établie, que l'enfant porterait le nom de V... et d'avoir condamné Mme M..., veuve V..., à payer à la mère la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « l'absence d'expertise génétique ne fait pas obstacle à l'action de Mme S...-G... dirigée à l'encontre de Mme V... fondée principalement sur la possession d'état et, subsidiairement, sur les dispositions des article 327 et 328 du code civil, le tribunal ayant fait droit à la demande sur le premier fondement et admis que B... a la possession d'état d'enfant à l'égard de A... V... ; que Mme V... qui était non comparante en première instance invoque devant la cour le fait qu'il n'existe pas de preuve certaine de relations intimes entre Mme S...-G... et A... V... pendant la période de la conception, alors qu'elle n'a pas déféré aux convocations adressées en vue de l'expertise génétique précédemment ordonnée ; qu'elle ne fait valoir aucun motif sérieux justifiant l'absence de suite donnée à l'expertise génétique précédemment ordonnée et se contente de se réfugier derrière les dispositions de l'article 16-11 du code civil alors que, si ce texte exclut la recherche génétique sur une personne décédée, sauf accord de son vivant, il n'exclut pas la possibilité d'un examen génétique avec un ascendant de la personne décédée, sous réserve de son accord, la cour pouvant tirer toutes conséquences du refus de la personne de se soumettre à cet examen ; dans ce contexte, il appartient à la cour de rechercher les éléments qui tendent à établir ou à exclure la possession d'état, fondement de la demande principale de Mme S...-G... qui se déduit des éléments prévus à l'article 311-1 du code civil dont le caractère cumulatif n'est pas exigé ; qu'il suffit qu'il y ait une réunion suffisante de faits qui prouvent le rapport de filiation et de parenté ; qu'il ressort des pièces produites qu'à la suite de la naissance de l'enfant en date du 30 septembre 2007, alors que Mme V... (lire Mme S...-G...) résidait avec B... en foyer maternel à Nantes, A... V... a financé l'achat de meubles et d'appareils électro-ménagers pour installer la mère et l'enfant et qu'il s'est domicilié à la même adresse où il recevait des courriers personnels, tels que relevés de compte ou assurance-vie, la situation ayant duré au moins jusqu'au mois de juillet 2009, ainsi qu'il ressort des relevés de comptes bancaires au nom de A... V... faisant figurer la même adresse que celle de Mme S...-G..., A... V... étant décédé brutalement le [...] ; que les attestations produites par Mme V... pour contredire l'existence d'éléments établissant cette possession d'état évoquent la relation stable entretenue par A... V... avec sa concubine de longue date, Mme H... ; que toute fois, ces témoignages ne permettent pas d'exclure la possession d'état par ailleurs établie par les attestations de proches de Mme S...-G..., la continuité de la possession d'état n'impliquant ni une communauté de vie, ni des relations constantes ; qu'ainsi Mme S...-G... verse aux débats des témoignages dont il ressort que A... V... se comportait avec B... comme son père ; que particulièrement Mme R..., assistance maternelle, indique que A... V... est venu chercher l'enfant à deux ou trois reprises à son domicile, qu'il venait le récupérer pour l'emmener chez le médecin lorsqu'il était malade et prenait de ses nouvelles par téléphone, ayant le souci de s'impliquer pour son fils ; qu'enfin, plusieurs photographies sont versées aux débats faisant apparaître A... V... avec Mme S...-G... et avec B... à plusieurs âges depuis la naissance, A... V... étant décédé avant les trois ans de l'enfant, ce qui rend peu probant l'argument de l'appelante selon lequel aucun des témoins n'indique que B... appelait A... V... d'un vocable évoquant sa paternité ; que l'ensemble de ces éléments permet de retenir que B... a la possession d'état d'enfant de A... V... » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Mme S...-G... soutient qu'elle a entretenu une liaison avec A... V... pendant la période légale de la conception de l'enfant B... né le 30 septembre 2007 et que A... V... s'est toujours comporté comme le père de l'enfant dès sa naissance ; qu'elle produit des attestations d'amis et voisins qui affirment que A... V... qu'ils considèrent être le père de l'enfant s'occupait régulièrement de B... ; qu'elle communique également un témoignage de Mme R..., assistante maternelle de l'enfant, qui atteste avoir vu A... V... accompagner B... à deux ou trois reprises ou avoir discuté avec lui au sujet de sa santé et sa croissance ; que par ailleurs, elle produit de nombreux documents (relevés bancaires, factures,
) desquels il ressort que A... V... était bien domicilié avec elle à compter de novembre 2007 jusqu'en [...], année de son décès ; que ces documents sont étayés par de nombreuses photographies où l'on voit A... V... avec l'enfant lui-même ; qu'il ressort de ces éléments que non seulement l'enfant B... a vécu avec A... V... à compter de sa naissance mais que celui-ci s'est comporté comme son père à son égard et vis-à-vis de l'entourage ; que le fait que Mme V... n'ait jamais eu connaissance de l'enfant B... n'est pas de nature à remettre en cause l'ensemble des éléments concordants versés aux débats par Mme S...-G..., lesquels constituent une réunion suffisante de faits indiquant un rapport de filiation ; que par ailleurs il y a lieu de tirer toutes les conséquences de la carence de Mme V... qui ne s'est pas présentée aux opérations d'expertise ; qu'en conséquence, au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient donc de constater la possession d'état d'enfant de B... S...-G... à l'égard de A... V... et de le déclarer comme étant le père de l'enfant avec toutes les suites et conséquences ;
1°/ ALORS QUE les conséquences d'un refus du défendeur à une action en établissement de la filiation de se soumettre à une expertise biologique ne peuvent être tirées qu'au plan de la preuve du lien biologique ; qu'en affirmant qu'elle pouvait tirer toutes les conséquences du refus de Mme V... de se soumettre à une expertise qui avait préalablement été ordonnée aux fins de prouver la paternité biologique de son fils à l'égard de l'enfant, pour se prononcer sur l'action en constatation de la possession d'état dont elle était désormais saisie, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé les articles 310-3 et 330 du code civil ;
2°/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que Mme S...-G..., qui prétendait seulement avoir « occupé » l'appartement loué par A... V... entre les mois de décembre 2006 et avril 2007, puis avoir « demeuré (
) dans un logement loué à son nom » de décembre 2007 au mois d'août 2009, convenait n'avoir « jamais eu de vie commune » avec lui ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que « A... V... était bien domicilié avec elle à compter de novembre 2007 jusqu'en [...], année de son décès » et qu'il ressortait des éléments de la cause que « l'enfant B... a(vait) vécu avec A... V... à compter de sa naissance », la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code civil ;
3°/ ALORS QUE la possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir ; qu'en se fondant, pour retenir l'existence d'une possession d'état, sur les circonstances selon lesquelles A... V... était allé chercher ou aurait accompagné l'enfant chez son assistante maternelle à « deux ou trois reprises », s'occupait parfois de lui et apparaissait sur plusieurs photographies aux côtés de l'enfant et de sa mère, ce qui ne saurait caractériser une réunion suffisante de faits indiquant un rapport de filiation certain et précis, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 311-1 du code civil ;
4°/ ALORS QUE la possession d'état doit être continue, paisible, publique et non équivoque ; qu'en déduisant de ses constatations que B... S...-G... avait la possession d'état à l'égard de A... V..., sans caractériser, en particulier, sa continuité et sa publicité, comme l'y invitaient pourtant les circonstances invoquées par les parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 311-2 du code civil.
Le greffier de chambre