CIV.3
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 décembre 2019
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10415 F
Pourvoi n° Y 18-24.749
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. X... U...,
2°/ Mme M... U...,
domiciliés tous deux [...],
contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige les opposant à Mme K... B..., domiciliée [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 novembre 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. et Mme U..., de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de Mme B... ;
Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme U... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme U... ; les condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à Mme B... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. et Mme U...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le mur séparatif des parcelles [...] de Mme B... et [...] et [...] des époux U... est implanté sur la propriété de Madame B... et appartient privativement à Mme B... ; d'AVOIR, en conséquence, débouté M. U... X... et Mme U... M... de leur demande ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, Sur la propriété du mur séparatif, un mur sépare la parcelle [...] propriété de Madame B... et les parcelles [...] et [...] propriété des époux U... ; que les appelants soutiennent que ce mur est leur propriété exclusive en faisant référence à l'article 666 du code civil qui stipule que toute clôture qui sépare des héritages est réputée mitoyenne à moins qu'il n'y ait qu'un seul des héritages en état de clôture ; que, cependant la présomption de mitoyenneté édictée par cet article est une présomption simple qui peut être combattue par une prescription ou une marque contraire valant présomption de non mitoyenneté ; qu'ainsi la présomption de l'article 666 du code civil peut être écartée quand l'état et la disposition des lieux font apparaître des marques de non mitoyenneté ; que, même si au moment de sa construction le mur avait pour objet de clôturer les parcelles à usage de potager ou de jardin, il existe une marque de non mitoyenneté relevée par l'expert judiciaire ; qu'en effet celui-ci a bien constaté que le mur est bâti à l'intérieur de la limite séparative, côté propriété B..., ce qui est parfaitement visible sur les photographies versées aux débats par les parties et même sur celles annexées au procès-verbal de constat d'huissier du 22 décembre 2016 produit par les appelants ; que la disposition des lieux fait donc apparaître une marque de non-mitoyenneté et combat la présomption simple édictée par l'article 666 du code civil ; que cette disposition des lieux démontre le caractère privatif du mur séparatif implanté à l'intérieur de la propriété de Madame B... ; que, contrairement à ce que soutiennent les époux U..., l'expert, pour conclure au caractère privatif du mur, ne s'est pas appuyé sur le cadastre puisque le mur litigieux n'y figure pas ainsi qu'il est indiqué en page 8 de son rapport ; que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit que ce mur séparatif appartient privativement à K... B... ; que, Sur l'ouverture litigieuse, les époux U... concluent à la suppression de l'ouverture pratiquée par K... B... sur le mur de sa remise, laquelle engendre une vue illégale sur leur propriété ; qu'aux termes de l'article 678 du code civil on ne peut avoir de vue droite sur l'héritage clos ou non clos du voisin s'il n'y a 1,90 m de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage ; que tenant la propriété exclusive de K... B... sur le mur séparatif, l'expert a mesuré une distance de 2,10 m entre l'ouverture litigieuse et l'héritage des époux U... ; qu'en conséquence la demande de suppression de cette ouverture doit être rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, Sur la propriété du mur séparatif, force est de constater que les parties s'opposent sur la propriété du mur séparatif figurant notamment sur les photographies numéro 1,2, 3,8 et 9 du procès-verbal de transport sur les lieux en date du 12 avril 2013 ; qu'il est généralement considéré que le régime de la preuve du droit de propriété est dominé par la relativité ; qu'ainsi il n'existe pas de système légal de preuve ; que les juges du fond apprécient souverainement les divers indices de la propriété que s'opposent les parties, leur tâche étant de rechercher, selon la formule célèbre d'Aubry et Rau, le « droit meilleur ou plus probable » ; qu'ainsi le droit de propriété en litige est rendu probable par différents indices (au rang desquels on peut citer la possession, les mentions cadastrales, la publicité foncière mais également les titres) ayant seulement la valeur de présomptions de fait ; que l'examen du plan cadastral permet de constater que la limite séparative entre la parcelle [...] propriété de Mme B... et les parcelles [...] et [...] propriété des époux U... se trouve dans l'alignement du nu extérieur du mur de la grange des époux U... édifiée sur la parcelle [...] ; qu'il peut en être déduit conformément à l'analyse de l'expert judiciaire en page 8 de son rapport que le mur litigieux est bien implanté sur la propriété de Mme B... ; que, s'il est vrai que le plan cadastral ne constitue qu'une présomption il appartient à Monsieur U... X... et Madame U... M... de rapporter des éléments de preuve au soutien de leur revendication de propriété ; qu'ils invoquent à ce titre dans leurs conclusions le bénéfice de l'article 666 alinéa 1er du code civil qui dispose : « Toute clôture qui sépare des héritages est réputée mitoyenne, à moins qu'il n'y ait qu'un seul des héritages en état de clôture (.) » ; que, s'il est vrai qu'il existe sur le fondement de ce texte une présomption de propriété privative il paraît utile de rappeler que cette présomption s'applique dans l'hypothèse suivante : « un terrain est entièrement clos au milieu d'autres non clos. Le mur qui ceint entièrement un terrain situé au milieu d'autres qui ne sont pas clos est présumé appartenir exclusivement au propriétaire de l'enclos »
qu'en l'espèce il convient d'observer que le mur a été édifié dans une partie du village de Marsa qui comprend plusieurs constructions immédiatement voisines des parcelles litigieuses et notamment un chemin public bordé des deux côtés par des murs de clôture (photographies numéro 12 du transport sur les lieux) ; que les époux U... admettent au demeurant dans leurs conclusions que « ce mur a pour objet de clôturer tous les jardins situés sur les parcelles [...], [...],[...], [...], [...], [...] et [...] » ; qu'il peut raisonnablement en être déduit que le mur litigieux n'avait pas pour objet de ceindre les parcelles n° [...] et [...] propriété des époux U... mais bien de matérialiser la séparation entre la parcelle [...] propriété de Mme B... et les parcelles [...] et [...] propriété des époux U... puis dans son prolongement de matérialiser la séparation entre les parcelles [...],[...],[...] et le chemin public ; que cette analyse est confirmée par l'existence de plusieurs passages dans le mur litigieux dont l'objet était manifestement de permettre un accès au chemin public ; qu'elle n'est pas contredite par la preuve de l'existence d'un mur en bordure de rivière sur les parcelles [...],[...],[...] et [...] ; que, dans ces conditions la présomption de propriété privative de l'article 666 alinéa 1er du code civil ne peut être retenue ; que l'examen des titres de propriété ne permet pas plus de retenir une présomption contraire à celle résultant du plan cadastral étant précisé que l'existence du mur n'y est pas mentionnée et qu'il n'existe aucune servitude de passage ; que l'existence de murets du côté de la propriété U... qui pourrait le cas échéant être considérée comme une marque de non mitoyenneté n'est pas incompatible avec le caractère privatif du mur tel que résultant des documents cadastraux ; que, dans ces conditions, il convient de considérer que le mur séparatif se trouve bien sur la propriété de Madame K... B... ; que, Sur la fenêtre d'où s'exerce la vue, il résulte de l'expertise judiciaire que si le mur séparatif dont la largeur est de 37 cm se trouve sur la propriété de Mme B... , la distance séparant l'ouverture de la limite de propriété et de 2 m 10 soit une distance supérieure à la distance légale de 1,90 m ; que, dans ces conditions il convient de débouter Monsieur U..., X... et Madame U... M... de leur demande tendant à voir supprimer cette ouverture ;
1) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, dans son rapport, l'expert judiciaire a relevé que « les limites cadastrales présentent un alignement de la propriété B... et du mur U... qui permet de supposer que le mur de clôture est bien implanté chez Mme B... » (rapport, p. 8), que « le plan cadastral indique un alignement net du mur de la maison des époux U... ([...]) et de la parcelle de Mme B... ([...]) ce qui laisse supposer que le mur séparatif n'est pas la propriété des époux U..., n'est pas mitoyen mais qu'il est bien implanté à l'intérieur de la limite de Madame B... » (rapport, p. 9) et a ensuite rappelé qu'il avait « établi [ses] conclusions d'après le plan cadastral (annexe 6) qui [lui] avait été remis et qui a servi de base à l'élaboration du permis de construire » (rapport, p. 10) ; que, pour écarter la présomption de non-mitoyenneté résultant de l'article 666 du code civil, la cour d'appel a retenu que « contrairement à ce que [soutenaient] les époux U..., l'expert pour conclure au caractère privatif du mur, ne s'[était] pas appuyé sur le cadastre puisque le mur litigieux n'y figur[ait] pas ainsi qu'il est indiqué en page 8 de son rapport » ; qu'en statuant ainsi tandis que l'expert judiciaire indiquait expressément s'être fondé sur les indications du cadastre pour déterminer l'emplacement de la ligne divisoire entre les fonds B... et U... et en conclure que le mur litigieux était situé sur le fonds B..., la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise judiciaire et a violé l'article 1134, devenu 1103 du code civil ;
2) ALORS QUE toute clôture qui sépare des héritages est réputée mitoyenne, à moins qu'il n'y ait qu'un seul des héritages en état de clôture ; qu'il en résulte que si l'un seulement des fonds est clos, la clôture dans son ensemble est présumée appartenir privativement au propriétaire de ce fonds ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations des juges du fond que les parcelles [...] et [...], appartenant aux époux U... étaient closes et que la parcelle [...], propriété de Mme B..., ne l'était pas ; qu'en jugeant néanmoins que le mur séparant les parcelles [...] et [...], d'une part, et [...], d'autre part, appartenait privativement à Mme B..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 666 du code civil ;
3) ALORS QUE toute clôture qui sépare des héritages est réputée mitoyenne, à moins qu'il n'y ait qu'un seul des héritages en état de clôture ; qu'il en résulte que si l'un seulement des fonds est clos, la clôture dans son ensemble est présumée appartenir privativement au propriétaire de ce fonds ; qu'en l'espèce, en considérant, par motifs éventuellement adoptés, que cette présomption ne vaudrait que dans l'hypothèse d'un terrain entièrement clos au milieu de terrains non clos, excluant ainsi le terrain clos longé pour partie par un chemin public ou une rivière, la cour d'appel, qui a ajouté une condition que ce texte ne prévoit pas, a violé l'article 666 du code civil.