CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 décembre 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10703 F
Pourvoi n° N 18-20.875
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme X... N..., épouse Q..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 7 juin 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme O... H..., épouse F..., domiciliée [...] ,
2°/ à M. W... F..., domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 novembre 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Dazzan, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de Mme N..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. et Mme F... ;
Sur le rapport de Mme Dazzan, conseiller référendaire, l'avis de M. Lavigne, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme N... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. et Mme F... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour Mme N..., épouse Q...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté madame Q... de toutes ses demandes ;
aux motifs que « M. et Mme F... soutiennent, dans le cadre de l'action fondée sur l'enrichissement sans cause, que Mme Q... n'a agi que dans son seul intérêt en faisant réaliser des travaux supplémentaires par rapport aux aménagements nécessaires (création d'une cuisine), notamment en faisant aménager le premier étage pour accueillir la famille de l'une de ses filles installée à Hong-Kong, qu'il n'a jamais été convenu entre les parties que Mme Q... resterait dans les lieux à titre viager, que sur ce point, l'attestation régulièrement établie par Mme J... est éloquente, corroborée par ailleurs par d'autres attestations de M. Q... et de Mme H.... Ils font aussi valoir que malgré les travaux, leur bien immobilier n'a pris aucune valeur, que la valorisation arrêtée par le notaire lorsqu'ils ont acheté l'ensemble immobilier comportant deux lots était fixée pour le seul bâtiment à usage de bureau à 130 000 euros qui est la valeur retenue par les agences immobilières en 2014 et 2015 de sorte que le jugement déféré doit être réformé, Mme Q... étant mal fondée à solliciter l'indemnisation de son appauvrissement alors qu'ils ne se sont pas enrichis. En dernier lieu, ils contestent la somme réclamée par Mme Q... au titre des travaux, soulignent que cette dernière ne forme plus de demande indemnitaire au titre de son préjudice moral et sollicitent la confirmation du jugement déféré ayant condamné l'intimée à leur verser une indemnité d'occupation et à payer ses consommations d'eau et d'électricité. Mme Q... expose que lorsque, après l'avoir hébergée pendant 16 mois dans l'attente d'une décision à prendre sur son lieu de vie, les époux F... lui ont proposé d'habiter un local attenant à leur maison d'habitation, il a été convenu qu'elle financerait les travaux de réhabilitation, que les époux F... choisiraient les entreprises en bâtiment, que Mme F... superviserait les travaux, en échange de quoi un bail notarié serait établi à son profit à titre gratuit et viager, de sorte que la proposition qui lui a été faite par courrier de leur avocat de lui verser la somme de 20 000 euros pour une libération des lieux au 1er mai 2014 n'était pas conforme au projet initial. Elle s'estime bien fondée, en application de l'article 1371 ancien du code civil, en son action de in rem verso en raison de son appauvrissement et de l'enrichissement correspondant des époux F.... Contestant l'écriture d'une attestation faussement présentée comme émanant de Mme J..., tante de M. F..., elle considère comme acquis que pour le moins, il existait un accord pour qu'elle soit logée à titre gratuit pendant 10 ans et constate que les époux F... n'ont pas tenu leur engagement en l'assignant en expulsion, raison pour laquelle elle a été contrainte de quitter les lieux le 9 mars 2015 et de solliciter le remboursement des travaux engagés qui constituent des impenses utiles ayant permis à l'évidence de valoriser le bien immobilier. Il résulte avec certitude des pièces produites aux débats que Mme Q... a habité dans un bien immobilier appartenant à M. et Mme F... du 1er mai 2013 au 9 mars 2015, que cette occupation lui était accordée à titre gratuit et que Mme Q... a financé des travaux d'aménagement de ce bien pour une somme s'élevant à plus de 80 000 euros. Ces faits certains, ainsi que les éléments de la cause, notamment le lien familial existant entre Mme Q... et Mme F... et leur cohabitation pendant 16 mois, permettent d'établir l'existence d'un contrat verbal conclu entre Mme Q... d'une part et les époux F... d'autre part et que ce contrat répondait en tous points à la définition du prêt à usage, dit commodat, telle qu'elle ressort des articles 1875 à 1878 du code civil, l'accomplissement de travaux par la bénéficiaire de la jouissance de l'immeuble constituant non la contrepartie mais la condition de l'usage personnalisé des lieux tel que convenu. Il en résulte que Mme Q... est mal fondée à agir au titre de l'enrichissement sans cause dont les règles ne peuvent être invoquées lorsque l'appauvrissement et l'enrichissement allégués trouvent leur cause dans l'exécution ou la cessation d'une convention conclue entre les parties. Les parties s'opposent sur le terme du contrat, Mme Q... affirmant qu'elle devait avoir l'usage du bien immobilier sa vie durant, les époux F... limitant le prêt à 10 ans. Toutefois, dès lors qu'il a été mis un terme au contrat du fait de l'expulsion prononcée judiciairement sur l'initiative des époux F... et de la libération des lieux par Mme Q... le 9 mars 2015 et que cette dernière ne demande pas réparation d'un préjudice résultant pour elle de cette rupture anticipée, la détermination du terme contractuel est sans objet. Selon l'article 1890 du code civil, seules peuvent être répétées les dépenses pour la conservation de la chose, extraordinaires, nécessaires et tellement urgentes que l'emprunteur n'a pu en prévenir le prêteur, tandis que, selon l'article 1886 du même code, toutes autres dépenses que ferait l'emprunteur, y compris pour user de la chose, ne sont pas soumises à répétition. Ainsi, Mme Q... qui a fait réaliser des travaux qui n'étaient au regard de la conservation de la chose, ni extraordinaires, ni nécessaires, ni urgents, ne peut en réclamer le remboursement à M. et Mme F.... Elle doit être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 87 134,44 euros » ;
alors 1°/ que dans ses conclusions d'appel du 26 février 2018 madame Q... se fondait sur l'enrichissement dans cause pour justifier sa créance de remboursement par les époux Q... des travaux qu'elle a payés, tandis que dans leurs conclusions du 7 mars 2018 les époux F... soutenaient que cette demande était mal fondée au regard des règles de l'enrichissement sans cause ; qu'en rejetant ladite demande par application des règles du commodat, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
alors 2°/ qu'en rejetant la demande de remboursement du coût des travaux en application des articles 1886 et 1890 du code civil et au motif qu'il s'agissait de travaux d'amélioration mais non pas de travaux de conservation extraordinaires, nécessaires et urgents dont les prêteurs auraient dû le remboursement, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen soulevé d'office, la cour d'appel a violé le principe de la contradiction et l'article 16 du code de procédure civile.