La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/11/2019 | FRANCE | N°18-18128

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2019, 18-18128


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 10 avril 2018), qu'engagé le 1er décembre 2002 en qualité de directeur par l'association Argile, M. A... a été licencié le 21 juillet 2014 pour faute lourde ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

S

ur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 10 avril 2018), qu'engagé le 1er décembre 2002 en qualité de directeur par l'association Argile, M. A... a été licencié le 21 juillet 2014 pour faute lourde ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une certaine somme au titre du compte épargne temps, alors, selon le moyen, que le juge doit en toute circonstance respecter le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel le droit au paiement de sommes au titre d'un compte épargne-temps résulte d'un accord de branche du 1er avril 1999 dans son avenant du 19 mars 2007 qui prévoit le tout sans limite pour les cadres non soumis à un horaire, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en l'absence de précision dans les écritures du salarié sur le fondement de sa demande, les juges du fond n'ont relevé aucun moyen d'office en donnant à leur décision le fondement juridique qui découlait des faits allégués ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association Argile aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Argile à payer à M. A... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour l'association Argile

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR infirmé le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement du salarié fondé sur une faute lourde et, par conséquent, d'AVOIR condamné l'employeur à lui payer diverses sommes au titre de la mise à pied conservatoire et de congés payés y afférents, d'indemnité de préavis et de congés payés y afférents, de congés payés conventionnels, d'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné l'employeur à rembourser à l'organisme intéressé, dans la limite de six mois, les indemnités chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement à celui de la présente décision.

AUX MOTIFS QUE M. A... né le [...] , a été engagé le [...] en qualité de Directeur par l'Association et en dernier lieu il percevait un salaire brut mensuel de 9 302,00 € ; que le 21 juillet 2014 lui a été notifié son licenciement pour faute lourde, avec les motifs ainsi énoncés : « Ainsi que nous vous l'avons exposé lors de notre entretien, vous êtes rendu coupable des faits suivants : 1) Au préalable, nous vous rappelons que vous occupiez en dernier les fonctions de Directeur de l'Association Argile en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu en date du 1er décembre 2002. Ce contrat était complété par une fiche de poste faisant partie intégrante du contrat de travail contresigné par les parties en date du 1er décembre 2002. Cette fiche de poste détaillait vos tâches et vos missions. Parmi les tâches qui vous étaient dévolues, vous étiez notamment tenu : « de participer activement à la rédaction du rapport d'activité annuel, notamment en remettant trimestriellement un rapport intermédiaire justifiant l'activité professionnelle exercée », « référer de toute initiative sortant du cadre habituel des missions, le cas échéant solliciter un accord ». Parmi les missions que vous deviez assumer, vous étiez tenu notamment : « d'élaborer le budget des services de l'Argile et d'ordonnancer les dépenses dans le cadre du budget alloué pour l'exploitation dont (vous êtes) responsable » ; « mettre en place les procédures nécessaires au bon fonctionnement des services et du dispositif salarié ». 2) Vous bénéficiez également d'une délégation de pouvoirs et de signature consentie en date du 16 octobre 2007, à effet du 1er avril 2008. Celle-ci venait compléter le contrat de travail précité ainsi que la fiche de poste annexé audit contrat. Dans le cadre de cette délégation, vous vous étiez engagé à accomplir la mission qui résultait de cette délégation en vous « conformant aux lois applicables et aux procédures internes existantes » (page 7). De même, vous aviez déclaré « avoir pris connaissance du fait qu'en cas de non respect de la règlementation en vigueur (par vous-même ou le personnel placé sous vos ordres), ou en cas de non application des obligations et des dispositions nées de la délégation, votre responsabilité personnelle, en lieu et place du délégant pourra être engagée et notamment votre responsabilité pénale ». Le champ de votre délégation couvrait notamment la gestion budgétaire financière et comptable (page 13) ; en particulier : « La préparation et la soumission au conseil d'administration, transmission aux autorités de tutelle, négociation, mise en oeuvre des comptes financiers » et « l'engagement de toutes les dépenses fixées dans le budget exécutoire des établissements et des services ». 3) En date du 19 juin 2014, nous avons pris connaissance des analyses des comptes administratifs pour l'exercice 2012, datées du 17juin 2014 et adressées par l'Agence Régionale de la Santé (ARS), notre organisme de tutelle et principal financeur. Nous avons été effarés du contenu de ces analyses qui apportent un éclairage nouveau dans notre compréhension des comptes administratifs des deux dispositifs « CSAPA » (Centre de soins, d'Accueil et de prévention en Addictologie) et « CAARUD » (Centre d'Accueil et d'Accompagnement à la Réduction des Risques pour Usagers de Drogues) dont vous aviez la responsabilité : S'agissant du dispositif « CSAPA » : L'ARS a relevé que les dépenses du personnel avaient augmenté de + 29 % à effectif constant par rapport à l'exercice précédent et a déclaré : « ces dépenses ne sont pas maîtrisées et n'ont pas été adaptées au volume disponible du budget de l'établissement ». L'ARS a conclu notamment que : « les dépenses de personnel ne sont pas maîtrisées, qu'elles comprennent des dépenses non conformes à la réglementation en vigueur et/ou extérieures au CSAPA, qu'elles présentent un défaut de visibilité lié au montage en vigueur entre les différents dispositifs gérés par l'Association ». (Rapport compte CSAPA page 4). L'ARS a relevé un déficit de 47.293 euros. L'ARS nous a adressé ses observations en précisant : « la situation financière du « CSAPA » se dégrade d'année en année
. Il est impératif que l'établissement prenne les mesures qui s'imposent afin d'adapter ses dépenses aux moyens accordés pour son fonctionnement. (...) Cette situation ne peut pas perdurer. Ce compte administratif n'est pas le résultat sincère de la consommation de la dotation accordée au CSAPA puisqu'une partie de cette dotation sert à financer le dispositif TIPI, qui lui-même reverse en transfert de charges vers le CSAPA une partie de ses ressources ». S'agissant du dispositif « CAARUD » : L'ARS a relevé des irrégularités dans le remplissage du tableau 5.3.5. Elle a considéré que « ces dépenses manifestement irrégulières ne sont pas écartées du compte administratif ». Tout en relevant un déficit de près de 33.600 euros, l'ARS a conclu « que la situation financière du CAARUD se caractérise par un déficit qui s'accroît d'année en année ». De plus, en date du 19 mars 2014, nous vous rappelons que les membres du conseil d'administration ont été informés que les comptes financiers (« CSAPA » et « CAARUD ») accusaient encore un déficit de près de 54.545 euros pour l'exercice 2013. Nous vous rappelons que nous vous avions fait part de notre émoi et de notre surprise quant à l'étendue de ce déficit dans le cadre de notre correspondance motivée datée du 5 juin 2014. Dans cette correspondance, nous vous faisions part d'ores et déjà qu'il était indispensable pour les membres du conseil d'administration de mener une inspection sur le fonctionnement et les comptes de notre Association dans le but de déterminer et clarifier les mesures à prendre dans l'objectif d'un retour à l'équilibre de nos comptes. Nous vous précisions également qu'une demande était en cours en ce sens, auprès du Directeur Général de l'ARS, diligentée par Mme D... (ARS). Aujourd'hui, la réception des rapports de l'ARS au sujet des comptes administratifs 2012 met en évidence vos agissements inacceptables. En outre, l'ARS nous a confirmé que notre Association a pu bénéficier d'une dotation exceptionnelle d'un montant de 50.000 euros non reconductible en compensation du déficit accumulé (cf. lettre du 12 novembre 2013 réceptionnée par nos soins le 2 juillet 2014 à notre demande). Sans cette dotation, le déficit pour l'exercice 2013 se serait élevé à près de 104 545 euros ! C'est pourquoi, de ce qui précède, nous comprenons mieux aujourd'hui votre empressement : - à voir notre Conseil d'Administration se positionner urgemment sur vos propositions de scénarii de « retour à l'équilibre », développées le 29 janvier 2014, rappelées à nouveau dans votre correspondance du 7 avril 2014 ainsi que dans votre note datée du 9 avril 2014, - à contester vainement le contenu de nos procès-verbaux des réunions de notre conseil d'administration depuis le début de l'année 2014 (cf. les allégations contenues dans votre courrier du 5 juin 2014 que nous contestons naturellement) pour tenter de vous dédouaner manifestement de toute responsabilité, - à chercher à vous victimiser par tous moyens, dans les différentes correspondances adressées au Président depuis le début de l'année 2014. Aujourd'hui, le commissaire aux comptes nous a également alerté de la situation d'urgence dans laquelle nous nous trouvions, par courrier que vous-même nous avez transmis (courriel en date du 27 juin 2014). De ce qui précède, nous avons abouti à la conclusion que vous vous êtes adonné sciemment à une gestion catastrophique de nos comptes financiers et plus particulièrement de l'ordonnancement de nos dépenses sur l'ensemble des dispositifs que gère notre Association. Les dépenses engagées sont non seulement contraires à la réglementation en vigueur (cf. rapports de l'ARS) mais ne répondent ni aux obligations contractuelles qui vous sont imposées (rappelées ci-dessus), ni aux obligations découlant de la délégation de pouvoirs qui vous a été consentie. Cette gestion inconséquente de nos dépenses n'a reposé sur aucune visibilité anticipatrice et a fortiori sur une opacité de la dépense tout au long de l'année. Aucune procédure de contrôle (ou d'alerte) des dépassements des dépenses n'a été mise en place en 2012 (et a fortiori en 2013) par vos soins à l'attention des membres du conseil d'administration, contrairement aux obligations contractuelles qui pesaient sur vous, notamment à travers la transmission d'un rapport trimestriel de votre activité (qui a fait cruellement défaut). Votre gestion des dépenses a révélé de lourdes carences techniques et réglementaires. A ce sujet, vous avez été totalement absent dans la remontée d'information à notre endroit visant plus particulièrement les conséquences juridiques (civiles et pénales) auxquelles notre Association s'exposait notamment sur le non respect des dispositions légales en matière du dépassement conséquent du contingent d'heures supplémentaires (et du paiement des heures supplémentaires afférentes en 2012 et 2013), dont vous avez profité personnellement. Ces faits témoignent encore une fois d'une irresponsabilité chronique et inquiétante dans les dépenses que vous avez décidées et ce, en méconnaissance des budgets alloués par l'ARS, au mépris des intérêts de notre Association. Aujourd'hui, votre comportement professionnel porte gravement préjudice à notre Association (et à son personnel) mais aussi à l'égard des tiers (et notamment son principal financeur l'ARS). Il met en cause la pérennité même de notre Association. Celle-ci est grandement menacée aujourd'hui sur le plan financier comme l'ont rappelé l'ARS et notre commissaire aux comptes. 4) De plus, après une enquête minutieuse menée auprès notamment de notre prestataire « Alsace Micro Services », vous avez cherché à détruire sciemment des fichiers informatiques professionnels appartenant à notre Association. Or, votre contrat de travail ne vous conférait aucun droit sur la programmation et l'informatisation des données techniques ou leur archivage ; bien au contraire si l'on se réfère au contenu même de votre délégation de pouvoirs. Cette dernière vous astreignait notamment à vous conformer aux lois applicables et aux procédures internes existantes. Cette obligation pesait davantage sur votre contrat de travail compte tenu de votre niveau de responsabilité, c'est-à-dire le plus haut dans notre organigramme « salariés ». Par ailleurs, aucun membre du conseil d'administration ne vous a formulé une demande en ce sens. Par cette opération (extrêmement choquante) menée, de surcroît, en « catimini » le 9 juin 2014 dans les locaux de notre Association, (c'est-à-dire pendant un jour férié – en l'absence d'un quelconque membre du personnel) vous avez manifesté une intention évidente de nuire à votre employeur, pour satisfaire encore une fois un intérêt personnel au mépris des intérêts de notre Association. Sachez que ce n'est que par hasard que nous avons découvert ces faits à l'occasion d'une recherche de documents importants en vue de la tenue de notre Assemblée Générale du mois de juin 2014, alors que vous étiez en congés maladie. Lors de notre entretien du 9 juillet 2014, vous avez reconnu les faits relatés ci-dessus tout en travestissant les motivations de vos agissements pour chercher, une fois encore, à minimiser ces faits. Il s'agit d'une violation extrêmement grave de vos obligations professionnelles et des liens de confiance et de loyauté sur lesquels reposait notre socle contractuel. Nous ne pouvons tolérer plus longtemps un tel comportement professionnel, totalement contraire aux intérêts de notre Association et à ses valeurs, d'autant plus que de lourdes tensions sont apparues au sein de l'équipe que vous dirigiez. 5) Par ces agissements relatés ci-dessus, d'une gravité exceptionnelle, vous avez volontairement tenté de nuire à l'entreprise. C'est pourquoi, nous considérons donc que ces faits constituent une faute lourde rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise » ; que M A... qui avait le 24 novembre 2014 introduit une action aux fins de contestation de la légitimité de son licenciement se trouve fondé à faire grief aux premiers juges de l'avoir à cet égard débouté de ses prétentions ; que doit d'abord être rappelé que l'Association qui a entendu se prévaloir d'une faute lourde, supporte exclusivement la charge de prouver - dans les termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige - la réalité et l'imputabilité à M. A... de celle-là et que commise avec la volonté délibérée de nuire à l'entreprise, elle faisait immédiatement obstacle à la poursuite d'exécution du contrat de travail, fût-ce pendant la durée limitée du préavis, et si un doute demeure il doit profiter au salarié ; (
) ; que s'agissant de la constitution de la faute lourde, c'est en méconnaissant les principes régissant la matière mais aussi l'organisation du respect du contradictoire dans le cadre d'une procédure sans représentation et orale, que les premiers juges se sont déterminés ; que, déjà, c'est à tort que les premiers juges ont écarté sans l'examiner le moyen tiré de la prescription édictée par l'article L 1332-4 du Code du Travail, au motif qu'il n'avait été soulevé qu'au cours de l'audience par M. A..., ce qu'il était encore recevable à faire et c'était à la juridiction de prendre les mesures pour permettre à l'Association d'y répondre dans le respect du contradictoire ; que la même observation s'impose sur les moyens de preuve qui ont été rejetés des débats pour un semblable motif ; que, par ailleurs, la motivation du jugement ne fait nullement ressortir la réunion des éléments constitutifs de la faute lourde telle qu'elle a été précédemment définie, notamment s'agissant de l'intention de nuire à l'entreprise ; qu'enfin, la motivation du jugement n'est pas exempte de caractère dubitatif, notamment en retenant que les griefs émis contre le salarié laissent « songeur » ; que M. A... critique donc le tout à bon droit, et il y a lieu à examen de l'entier litige ; qu'à cet égard - et désormais l'Association a eu les délais largement nécessaires pour répondre contradictoirement à ce moyen – il échet, comme le fait valoir M. A..., de constater que celle-là s'avère défaillante, alors qu'elle en supporte seule la charge, à prouver qu'elle n'aurait découvert les dérives budgétaires et financières qu'elle impute à faute lourde à celui-ci dans toute leur étendue qu'à l'intérieur du délai visé par l'article L. 1332-4 déjà cité ; que le rapport de l'ARS produit aux débats vise des entretiens menés en août 2014, donc postérieurs au licenciement mais ce constat ne conduit pas à exclure cette pièce des débats, alors qu'elle demeure un moyen de preuve dont la valeur probante doit être appréciée, dans la mesure où elle contient la synthèse d'une procédure d'inspection antérieure et notamment elle vise elle-même un rapport initial du 19 janvier 2014 ; que la réalité de la situation budgétaire et financière dégradée est avérée et détaillée par l'ARS dans ses analyses successives mais ainsi que le fait valoir M. A..., il apparaît aussi que cette situation concernant aux termes de la lettre de licenciement l'exercice 2012, était connue du Conseil d'Administration - étant souligné que c'est lui qui est l'employeur - sans que les changements de présidence et de composition n'aient de conséquences sur l'étendue de ses pouvoirs et de ses devoirs - au moins depuis 2013, ce qui d'abord rend prescrits les reproches formés de ces chefs contre l'appelant et, par ailleurs, contredit les allégations de réticences dolosives formées contre ce dernier en sorte que la faute lourde n'est pas constituée avec certitude ; que les constatations qui précèdent apparaissent du procès verbal de l'Assemblée Générale de l'Association - du reste présidée et tenue en présence des signataires de la lettre de licenciement - tenue le 15 mai 2013 avec la participation de l'expert comptable et du commissaire aux comptes dont l'ordre du jour était la validation des comptes de l'exercice 2012, ce qui a été le cas avec une discussion sur l'affectation du résultat déficitaire ; que l'expert comptable et le commissaire aux comptes ont certifié la sincérité des comptes - ce qui exclut la dissimulation imputée à M. A... - et ils rappellent ces constats ainsi que la connaissance par le Conseil d'Administration en 2013 dans des mails versés aux débats par l'appelant ; que l'affirmation de l'intimée selon laquelle - aux termes mêmes de la lettre de licenciement - les faits auraient été découverts par hasard, est inexacte ; qu'au surplus, les reproches formés contre M. A... sur l'exécution de sa mission de Directeur et sa gestion tant financière que du personnel ressortissent éventuellement seulement à de l'insuffisance professionnelle qui ne peut être sanctionnée comme une faute qu'à la condition qu'elle procède d'une mauvaise volonté délibérée, en l'espèce non prouvée avec certitude ; qu'en effet rien de tel ne peut être retenu alors qu'ainsi que l'observe exactement M. A..., l'Association elle-même défaillante dans l'exercice de toutes les prérogatives tenues de son pouvoir de direction, a contribué en toute connaissance de cause à laisser perdurer la situation - elle a, par le truchement de son Conseil d'Administration, approuvé les comptes, le salaire du Directeur, et il lui incombait de veiller aux horaires de ce dernier ainsi qu'aux amplitudes des temps de travail et de repos - ce qui la rend mal fondée à mettre en oeuvre sur ces fondements son pouvoir disciplinaire : que, du reste, l'ARS, en constatant les irrégularités de procédure comptable, la gestion financière critiquable, sans toutefois imputer de fraude au Directeur, stigmatise l'inaction du Conseil d'Administration qui malgré des signalements de salariés depuis 2011 a validé toutes les mesures proposées sans exiger de comptes rendus, ni prendre ses responsabilités, et en ayant consenti au Directeur des délégations de pouvoirs trop vastes et imprécises ; que d'ailleurs cette inexécution par le Conseil d'Administration des obligations tenues de son pouvoir de direction envers son subordonné qu'était M. A... résulte des termes mêmes de la lettre de licenciement dont il appert que ce n'est qu'en 2014 que celui-là a prétendu s'intéresser aux comptes 2012 approuvés en 2013, et que ce n'est pas sans inverser les rôles qu'il fait grief à celui-ci de ne pas avoir mis en place des procédures de contrôle à l'intention du Conseil d'Administration, ce dernier ne s'étant jamais formalisé de la non remise des rapports trimestriels d'activité ; qu'au rang des motifs de licenciement ne reste donc que la destruction des fichiers dont M. A... ne nie pas la réalité mais sans que là encore ne soit caractérisée une volonté de nuire alors qu'il argue d'une erreur de manipulation et que ceux-ci ont pu être restaurés, ce que confirme dans son attestation M. L... technicien informatique ; que cette analyse suffit à commander, en infirmant le jugement querellé, et sans que la cour ne soit tenue de répondre du surplus des détails de l'argumentation des parties, de dire que la faute lourde, ni même grave ou réelle et sérieuse, n'est de manière certaine établie, ce qui prive le licenciement de légitimité.

1° ALORS QUE le délai de deux mois institué par l'article L 1332-4 du code du travail court à compter du jour où l'employeur a eu connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits fautifs reprochés au salarié ; que l'employeur faisait valoir que si les membres du conseil d'administration avaient été informés que les comptes financiers accusaient un déficit pour les exercices 2012 et 2013, ils ignoraient l'origine de ce déficit, que c'est pour cette raison qu'ils avaient demandé à l'ARS de faire un audit et qu'ils n'ont pris connaissance de premières analyses du compte administratif de 2012 présenté par le directeur de l'association que le 19 juin 2014, (soit six jours avant la convocation de ce dernier à un entretien préalable à un licenciement), et du rapport final que fin 2014, l'ARS y soulignant notamment que ledit compte administratif ne permettait pas d'avoir une vision claire et sincère de l'activité de l'association, que les dépenses n'étaient ni maîtrisées ni conformes à la réglementation et présentaient un défaut de visibilité et que le compte administratif n'était pas le résultat sincère de la consommation de la dotation accordée ; qu'en retenant, pour dire prescrits les faits fautifs reprochés au directeur de l'association, que la réalité de la situation budgétaire et financière dégradée est avérée mais que cette situation, concernant aux termes de la lettre de licenciement l'exercice 2012, était connue du conseil d'administration au moins depuis 2013, la cour d'appel, qui a fixé ainsi le point de départ du délai de prescription à la date à laquelle l'association avait seulement pris connaissance de la dégradation de sa situation financière et non à la date à laquelle elle avait eu connaissance de l'origine de cette dégradation et, par conséquent, de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits fautifs reprochés, a violé l'article L 1332-4 du code du travail, ensemble les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 3141-26 du même code alors applicable.

2° ALORS QUE le défaut de vigilance de l'employeur n'ôte pas aux faits commis par le salarié leur caractère fautif sauf à traduire une tolérance de la part de l'employeur laquelle suppose une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits commis par le salarié ; qu'en retenant, pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, que l'association a contribué en toute connaissance de cause à laisser perdurer la situation en approuvant, par le truchement de son conseil d'administration, les comptes et le salaire du directeur, la cour d'appel, qui n'a pas précisé, ainsi qu'elle y était invitée, comment l'association avait pu avoir pleinement connaissance des agissements reprochés au directeur au seul vu des documents comptables présentés lors de l'approbation des comptes ne renseignant que le montant global des charges d'exploitation et ne permettant pas, ainsi qu'il a été souligné par l'ARS, d'avoir une vision claire et sincère de l'activité de l'association, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 3141-26 du code du travail alors applicable.

3° ALORS QUE la bonne foi est présumée et que l'employeur n'est légalement tenu à aucune obligation permanente de vérification de l'activité des salariés placés sous son autorité ; qu'en reprochant à l'association de ne pas veiller aux horaires du directeur ainsi qu'aux amplitudes des temps de travail et de repos, d'avoir validé toutes les mesures proposées sans exiger de comptes rendus, d'avoir consenti au directeur des délégations de pouvoirs trop vastes et imprécises et de ne s'être jamais formalisée de la non remise des rapports trimestriels d'activité, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a violé les articles L.1221- 1, L.1222-1, L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 3141-26 du code du travail alors applicable.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné l'employeur à payer au salarié une somme au titre du compte épargne temps.

AUX MOTIFS QUE M. A... réclame justement le paiement du compte épargne temps sous déduction de ce que l'Association lui a déjà payé à ce titre ; que vainement l'intimée prétend que le droit au paiement du CET ne résulterait d'aucun texte alors que pour la branche considérée l'accord du 1er avril 1999 dans son avenant du 19 mars 2007 prévoit le tout sans limite pour les cadres non soumis à un horaire ; que tel était le cas de M. A... qui étaye suffisamment par son décompte la durée de travail et de temps de repos sans que l'employeur ne justifie des horaires et du contrôle fiable de ceux-ci ; que l'Association - par infirmation du jugement dont la motivation tirée de l'absence d'accord collectif n'est pas pertinente étant rappelé que le juge doit rechercher celui-ci - sera condamnée à payer la somme de 6.831,03 €.

ALORS QUE le juge doit en toute circonstance respecter le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel le droit au paiement de sommes au titre d'un compte épargne temps résulte d'un accord de branche du 1er avril 1999 dans son avenant du 19 mars 2007 qui prévoit le tout sans limite pour les cadres non soumis à un horaire, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'employeur à payer au salarié des dommages et intérêts pour perte du droit au DIF.

AUX MOTIFS QUE la perte du droit au DIF sera totalement réparée par la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts

ALORS QU'une condamnation à des dommages-intérêts implique que le juge caractérise l'existence d'un préjudice réellement subi par la victime ; qu'en se bornant à retenir que la perte du droit au DIF sera totalement réparée par la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts, sans caractériser l'existence d'un quelconque préjudice subi par le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 devenu 1231-1 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-18128
Date de la décision : 27/11/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 10 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2019, pourvoi n°18-18128


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.18128
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award