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27/11/2019 | FRANCE | N°17-27933

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2019, 17-27933


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 19 septembre 2017), que M. K... a été engagé le 1er janvier 1996 par la société Seba dynatronic, son contrat de travail étant transféré le 1er janvier 2003 à la société Sebakmt international, aux droits de laquelle vient la société Megger, avec les fonctions de responsable de zone commerciale ; que par lettre du 30 juin 2014 il a informé son employeur de sa démission ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que so

n comportement durant l'exercice de son contrat de travail est constitutif d'une faute ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 19 septembre 2017), que M. K... a été engagé le 1er janvier 1996 par la société Seba dynatronic, son contrat de travail étant transféré le 1er janvier 2003 à la société Sebakmt international, aux droits de laquelle vient la société Megger, avec les fonctions de responsable de zone commerciale ; que par lettre du 30 juin 2014 il a informé son employeur de sa démission ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son comportement durant l'exercice de son contrat de travail est constitutif d'une faute lourde et de le condamner à payer à l'employeur une certaine somme à titre d'indemnité en réparation du préjudice moral et d'image alors, selon le moyen :

1°/ que les moyens de preuve illicite doivent être écartés des débats; que constitue un moyen de preuve illicite le texte d'un courrier électronique n'ayant pas date certaine; qu'en l'espèce, pour décider que M. K... avait commis une faute lourde, la cour d'appel a notamment énoncé d'une part que l'ordinateur professionnel de M. K... contenait un courriel non daté destiné au client ERDF-GRDF dans lequel il évoquait son passé au sein de la « Sebakmt International » et son embauche par la société Baur France, vantant son engagement constant via cette entreprise et faisant figurer l'ensemble des coordonnées de la société Baur France, et d'autre part qu'à une date non-précisée mais à laquelle M. K... avait la disposition de son ordinateur professionnel fourni par son employeur, il l'a utilisé pour préparer un courriel non daté destiné au client ERDF-GRDF dans lequel il évoquait son passé au sein de la société « Sebakmt International », son « soulagement de quitter Megger France » et critiquait explicitement l'entreprise; qu'en se fondant ainsi sur un prétendu courrier électronique qui, non daté, constituait un moyen de preuve illicite et devait être écarté des débats, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ;

2°/ que la faute lourde, seule susceptible d'engager la responsabilité du salarié envers son employeur, est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise ; qu'en l'espèce, pour dire que M. K... avait commis une faute lourde, la cour d'appel a relevé que le salarié avait méconnu les obligations de fidélité, de loyauté et de secret professionnel fixées par son contrat de travail, et commis des actes de concurrence déloyale, notamment par une tentative de détournement de clientèle ; qu'en l'état de ces énonciations, qui n'établissent pas la volonté du salarié de porter préjudice à l'employeur dans la commission du fait fautif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3141-26 du code du travail ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des pièces de la procédure que le salarié avait soutenu devant la cour d'appel que le courriel non daté constituait un moyen de preuve illicite ; que la première branche est donc nouvelle, mélangée de fait et de droit ;

Et attendu qu'ayant notamment constaté que le salarié avait adressé un courriel au directeur général d'un concurrent direct en lui transférant des échanges entre son employeur et une société cliente sur un marché en cours et avait incité la société concurrente à présenter une contre-proposition par un contact direct avec un membre de la société cliente, et ce dans le but affirmé de faire perdre le marché à son employeur, la cour d'appel a pu en déduire que les agissements du salarié procédaient d'une intention de nuire caractérisant une faute lourde ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. K... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. K... à payer à la société Megger la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. K...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le comportement de M. T... K... durant l'exercice de son contrat de travail est constitutif d'une faute lourde et d'AVOIR, en conséquence, condamné le salarié à payer à l'employeur une indemnité de 10 000 € en réparation du préjudice moral et d'image ;

AUX MOTIFS QUE dans le contexte d'une rupture acquise du contrat de travail, l'employeur peut engager la responsabilité pécuniaire de l'ancien salarié par une action en dommages et intérêts subordonnée à la démonstration d'une faute lourde commise par ledit salarié. La charge de la preuve repose sur celui qui l'invoque. Il convient de constater que M. T... K... ne conteste ni être l'auteur des courriers électroniques incriminés ni à quels destinataires ils étaient adressés ; En l'état du fondement de la demande sur une faute lourde et de l'absence de toute contestation du salarié sur la réalité des transmissions d'information et transfert de document, la question relative à la présence ou non de M. T... K... dans le Comité de Direction de la société «Sebakmt International» ou dans d'autres entités du groupe est sans intérêt. Il ressort des pièces produites et des débats que: le 29 avril 2014 à 13h09 M. K... a transféré à M. A. W..., directeur général «Baur France», à son adresse électronique personnelle un échange en langue anglaise du 28 avril 2014 entre messieurs C... U... et R... J... intitulé «Tedner» ; ce message concernait une demande d'équipement émise par le CNRS à Gif-sur-Yvette dont la date limite de réception des offres était fixée au 02 juin 2014 à 16h et sur lequel la société «Sebakmt International» se positionnait ; nonobstant le fait qu'aucune traduction de ce message en langue française n'est fournie, les parties n'en contestent pas le contenu. le 05 mai 2014, M. K... a transféré M. A. W... à son adresse électronique personnelle, un échange des courriels intitulé «BEC Groupe GDF Suez - demande de quotation» entre le Directeur de la logistique du Groupe GDF Suez et Mme I... X..., assistante commerciale au Service Export de la société Megger - «Sebakmt International» concernant une demande d'offre technique et commerciale pour la fourniture de matériels en Nouvelle-Calédonie ; le 14 juin 2014, M. K... a transféré M. A. W... à son adresse électronique personnelle, un courriel échangé le 13 juin 2014 entre M. N... B..., Président de la société «Sebakmt International», M. R... J..., Directeur général et lui-même, message accompagnant un fichier en langue allemande agrémenté de photographies, textes, graphiques et données techniques d'un système de diagnostic «TDS NT Serien» ; le 30 juin 2014 M. K... adressait à M. D... V..., Adjoint du Chef Maintenance Exploitation ERDF-GRDF de Lyon, un courriel annonçant sa démission et espérant le revoir bientôt ; le 1er juillet 2014, il a transféré M. A. W... à son adresse électronique personnelle les échanges de courriels entre lui et M. D... V... ; l'ordinateur professionnel de M. K... contenait un courriel non daté destiné au client ERDF-GRDF dans lequel il évoquait son passé au sein de la «Sebakmt international» et son embauche par la société Baur France, vantant son engagement constant via cette entreprise et faisant figurer l'ensemble des coordonnées de la société BAUR France ; De la lecture et l'examen de ces pièces il se déduit que : le 29 avril 2014 le salarié dévoilait au Directeur général d'un concurrent direct, le marché potentiel de son employeur auprès du CNRS ; contrairement à ce que soutient M. K... l'objet de ce courriel n'était pas « d'indiquer avoir remporté un marché sur un appel d'offres sur un appel déposé deux mois auparavant » mais de transmettre au dirigeant d'une société concurrente des informations échangées par des membres de sa hiérarchie sur une offre en cours dont la clôture était fixée au 02 juin 2014 et ainsi permettre au concurrent de se positionner éventuellement. Le 05 avril 2014 le salarié transférait au Directeur général d'un concurrent direct, des échanges de courriels entre le service Export de sa société et le client GDF SUEZ concernant une demande d'offre technique et commerciale pour une importante fourniture de matériels avec le commentaire suivant : «Contacte les. Il y a un coup à faire. SW essaie clairement de les plumer. Je n'ai d'ailleurs pas reçu l'offre finale qu'on me cache. N'hésite pas à faire référence à cette correspondance et à nous. Contacte directement O...» ; se faisant M. K... transmettait des informations confidentielles sur un marché en cours afin d'inciter la société concurrente à présenter une contre-proposition par un contact direct avec un membre de la société-cliente et ce dans le but affirmé de faire perdre le marché à son employeur, la formule « contacte les. Il y a un coup à faire » étant non équivoque de l'intention de son auteur outre la recommandation « N'hésite pas à faire référence à cette correspondance et à nous » qui accentuait la volonté de participer au détournement ; le samedi 14 juin 2014 à minuit le salarié transmettait sans commentaire au Directeur général d'un concurrent direct les échanges confidentiels du Président de la société «Sebakmt International» avec son Directeur général accompagnant un fichier de présentation d'un système de diagnostic «TDS NT Serien» ; ce faisant M. K... adressait à la concurrence des éléments de la présentation technique et commerciale d'un nouveau produit qui n'avait pas encore été livré à des clients ainsi que des informations relatives aux avancées technologiques de son employeur avant que les produits ne soient officiellement mis en vente. Il est démontré par la société que ce document avait été transmis le 13 juin 2014 à 11h47 à messieurs J... et K... par M. N... B..., Président de la société avec le message suivant : «pour votre information voici une excellente présentation de notre nouvelle solution TDS NT que vous pouvez conserver à portée de main pour une utilisation future même si c'est en allemand pour le moment »; que cette précision contredit formellement l'affirmation du salarié selon laquelle à cette date « toute société intéressée par ce matériel peut avoir accès à cette présentation ». La lecture de la pièce montre que contrairement à l'affirmation du salarié, ce document ne constitue en rien une « présentation commerciale comme un dépliant» (pièce 20 Appelante). Le 1er juillet 2014 le salarié transmettait au Directeur général d'un concurrent direct les échanges qu'il avait eu avec un responsable du Groupe ERDF-GRDF concernant sa démission en réponse à une demande d'aide-terrain auprès de la société «Sebakmt International» ; les commentaires font directement allusion à des carences de l'employeur quant à son investissement dans « le marché de la recherche des défauts et du diagnostic » qui « nécessite qu'on y consacre les moyens, les hommes et le temps nécessaire » alors que le client ERDF-GRDF formulait une demande dans ce domaine précisément ; implicitement l'échange évoque la société Baur et le salarié incite son correspondant à faire le choix de cette entreprise au détriment de son employeur, le contrat de travail n'étant pas rompu à cette date. à une date non-précisée mais à laquelle M. K... avait la disposition de son ordinateur professionnel fourni par son employeur, il l'a utilisé pour préparer un courriel non daté destiné au client ERDF-GRDF dans lequel il évoquait son passé au sein de la société «Sebakmt International», son « soulagement de quitter Megger France » et critiquait explicitement l'entreprise : «si le dynamisme , la réactivité, la souplesse et l'efficacité de Sebakmt n'étaient jusqu'alors plus à prouver, les deux dernières années ont montré que dans notre domaine de prédilection, la maintenance des réseaux électriques de transport et de distribution, les priorités de Megger France semblaient s'écarter de mes axes privilégiés de travail et de développement»; en bas de page il faisait figurer ses fonctions de Directeur technique au sein de la société Baur ( son futur employeur) son numéro de téléphone mobile et l'ensemble des coordonnées de la société Baur France, avec l'indication : «je vous laisse mes coordonnées et serai ravi de répondre à toute demande d'information technique et à tout besoin de conseil», ce alors q il était toujours considéré comme employé de la société Sebakmt International» le contrat de travail n'étant pas rompu à cette période. Il s'en déduit que: les éléments produits mettent en évidence que dans les mois précédant sa démission avant de rejoindre une entreprise directement concurrente de la société «Sebakmt International», M. K... a transmis au Directeur général France de son futur employeur et sous l'adresse électronique personnelle de celui-ci, des documents et des informations qui tous possédaient un caractère de confidentialité comme intéressant des marchés en cours, du matériel innovant non-encore mis à la disposition du public et à la vente; qu'il a également transmis des échanges écrits de sa hiérarchie sur un marché en cours dans le but avoué de faire perdre le marché à son employeur et voir la société Baur capter le marché et le client. Nonobstant ces communications de toutes natures M. K... a, préalablement à son départ de l'entreprise, justifié sa démission en argumentant auprès de clients sur les actuelles contre-performances techniques dans son domaine de prédilection au contraire de l'excellence des années précédentes. il a utilisé le matériel fourni par son employeur pour rédiger au moins un courriel d'information au Groupe ERDF-GRDF, client de «Sebakmt International» en se présentant comme Directeur technique de Baur France, en transmettant ses coordonnées et invitant son correspondant à le contacter dans ce nouveau contexte professionnel ; le contrat de travail de M. K... stipulait : au paragraphe 9 «Fidélité et loyauté» : «pendant toute la durée du présent contrat M. T... K... s'interdit de s'intéresser directement ou indirectement à la vente ou à la promotion de produits concurrents de la société Seba Réseaux et de collaborer sous quelque forme que ce soit à une entreprise concurrente de la société» ; au paragraphe 10 «secret professionnel» : «M. T... K... reconnaît qu'il est tenu, indépendamment d'une obligation de réserve générale, à une obligation impérative de secret professionnel sur tous les faits dont il peut avoir connaissance, du fait ou à l'occasion de ses fonctions ou du seul fait de son appartenance à la société notamment se rapportant à l'organisation, les méthodes, le réseau commercial ainsi que des spécificités techniques des matériels ou produits. Les documents ou rapports quel qu'en soit la nature qu'il établira ou dont il lui sera donné communication sont la propriété de la société et il ne pourra ni en conserver copie, ni en donner communication à des tiers sans l'accord exprès et écrit de la Direction » ; le contrat de travail doit être l'objet d'une exécution loyale et cette obligation générale de loyauté et de fidélité interdit au salarié de se livrer à des actes susceptibles de causer un préjudice à son l'employeur ainsi par exemple de relations étroites avec une entreprise concurrente. Au visa des documents produits par la société appelante et de l'analyse de ceux-ci il est constant que M. T... K... a violé les stipulations de fidélité, de loyauté et de secret professionnel fixées par son contrat de travail. Il convient de remarquer qu'à aucun endroit de ses écritures M. T... K... n'explique les raisons ou les nécessités pour lesquelles il correspondait étroitement avec M. M., directeur général de la société Baur, ni quelle justification personnelle ou professionnelle sous-tendait les communications régulières qu'il assurait à cette personne en utilisant l'adresse électronique personnelle de son correspondant qui allait devenir son nouvel employeur. Il s'en déduit que ces comportements survenus pendant la durée du contrat de travail constituent une faute imputable à M. T... K... : en conséquence il convient d'infirmer le jugement entrepris de ce chef. La faute lourde implique une intention de nuire du salarié à l'égard de son employeur ou de son entreprise : il s'agit d'une faute équipollente au dol ; elle est établie par la preuve de manoeuvres de concurrence déloyale qui constituent par leur nature même, des actes destinés à nuire aux intérêts de l'entreprise. L'intention doit être dirigée contre l'employeur ou l'entreprise, principe valant tant en ce qui concerne le licenciement que pour la mise en cause de la responsabilité pécuniaire du salarié a posteriori. La commission d'actes assimilables à de graves manquements aux obligations générales de bonne foi et de loyauté ainsi qu'aux obligations contractuelles de fidélité et de secret professionnel caractérisent également une intention de nuire. En l'espèce sont caractérisés: les manquements du salarié aux obligations de bonne foi, de fidélité ou de loyauté et encore au secret professionnel contractuellement défini, caractérisés par un contact fréquent avec le dirigeant d'une société directement concurrente à celle à qui il appartient en l'incitant à oeuvrer contre l'employeur ou encore la communication à cette même personne de documents et informations confidentielles sur des marchés en cours ou un produit non encore commercialisé ; le fait d'inciter la société concurrente à présenter une contre-proposition sur un marché en cours en lui transmettant les éléments d'informations détenus par sa hiérarchie et en indiquant « («Contacte les. Il y a un coup à faire. SW essaie clairement de les plumer. Je n'ai d'ailleurs pas reçu l'offre finale qu'on me cache. N'hésite pas à faire référence à cette correspondance et à nous. Contacte directement O...». La communication, dès le lendemain de sa réception, d'un document interne à l'entreprise sur un produit technique non-encore commercialisé, document contenant un très grand nombre de spécificités techniques, graphiques de performances et autres éléments demeurant confidentiels jusqu'à la commercialisation. Le fait que ce transfert d'information sans commentaire ait été effectué un samedi à minuit comme l'atteste le courriel du 14 juin et avec les échanges confidentiels des supérieurs hiérarchiques en langue anglaise et allemande. le dénigrement de la société-employeur auprès de l'un des responsables régionaux du Groupe ERDF-GRDF en la présentant comme désormais peu capable d'assurer son «domaine de prédilection, la maintenance des réseaux électriques de transport et de distribution» ; l'utilisation de l'ordinateur professionnel mis à sa disposition pour faire part de sa démission à des clients en se présentant comme Directeur technique de la société Baur France, en communiquant ses coordonnées et en invitant lesdits clients à le contacter « pour toute demande d'information technique et à tout besoin de conseil « ce alors qu'il était toujours en relation de contrat de travail avec son employeur constitue une tentative de détournement de clientèle au profit du futur employeur. Il s'en déduit que pris dans leur ensemble ces éléments caractérisent l'intention de nuire de M. T... K... à l'encontre de son employeur «Sebakmt International». En conséquence la faute identifiée à l'encontre de M. T... K... est caractérisée comme étant une faute lourde ouvrant droit à l'indemnisation de l'employeur la «Sebakmt International» : il convient d'infirmer le jugement entrepris de ce chef ; sur l'indemnisation du préjudice, il n'est pas contestable que les agissements fautifs de M. T... K... sont préjudiciables à la société «Sebakmt International» en ce qu'ils ont permis à la société Baur France, par le truchement de son Directeur général, de bénéficier d'informations confidentielles sur des marchés et des produits acquérant ainsi un avantage dans le contexte de recherche de clients potentiels sur un marché très spécifique. Les actes de dénigrement de M. T... K... ont, par leur nature désobligeante et incitatrice à passer à la concurrence, jeté un discrédit sur la réputation, le professionnalisme et l'image de la société «Sebakmt International» ; S'il en résulte un préjudice moral et d'image évident, il ne découle ni de l'argumentation ni des pièces produites par la société «Sebakmt International» qu'elle aurait subi un préjudice commercial comme elle le soutient, aucune pièce ne démontrant des pertes de marchés ou des retraits de commandes en lien direct avec les agissements fautifs du salarié. Il n'est pas contestable que le préjudice moral et d'image subi par la société «Sebakmt International» est en lien direct avec la faute lourde caractérisée à l'encontre de M. T... K.... En l'état il convient d'évaluer l'indemnité réparatrice à la somme de 10.000€ (arrêt, pages 4 à 9) ;

1°/ Alors que les moyens de preuve illicite doivent être écartés des débats ;

Que constitue un moyen de preuve illicite le texte d'un courrier électronique n'ayant pas date certaine ;

Qu'en l'espèce, pour décider que M. K... avait commis une faute lourde, la cour d'appel a notamment énoncé d'une part que l'ordinateur professionnel de M. K... contenait un courriel non daté destiné au client ERDFGRDF dans lequel il évoquait son passé au sein de la «Sebakmt International» et son embauche par la société Baur France, vantant son engagement constant via cette entreprise et faisant figurer l'ensemble des coordonnées de la société Baur France, et d'autre part qu'à une date non-précisée mais à laquelle M. K... avait la disposition de son ordinateur professionnel fourni par son employeur, il l'a utilisé pour préparer un courriel non daté destiné au client ERDF-GRDF dans lequel il évoquait son passé au sein de la société «Sebakmt International», son «soulagement de quitter Megger France» et critiquait explicitement l'entreprise ;

Qu'en se fondant ainsi sur un prétendu courrier électronique qui, non daté, constituait un moyen de preuve illicite et devait être écarté des débats, la cour d'appel a violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ;

2°/ Alors que la faute lourde, seule susceptible d'engager la responsabilité du salarié envers son employeur, est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise ;

Qu'en l'espèce, pour dire que M. K... avait commis une faute lourde, la cour d'appel a relevé que le salarié avait méconnu les obligations de fidélité, de loyauté et de secret professionnel fixées par son contrat de travail, et commis des actes de concurrence déloyale, notamment par une tentative de détournement de clientèle ;

Qu'en l'état de ces énonciations, qui n'établissent pas la volonté du salarié de porter préjudice à l'employeur dans la commission du fait fautif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 3141-26 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-27933
Date de la décision : 27/11/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 19 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2019, pourvoi n°17-27933


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.27933
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