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06/11/2019 | FRANCE | N°18-20.197

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 06 novembre 2019, 18-20.197


CIV. 1

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 novembre 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme BATUT, président



Décision n° 10595 F

Pourvois n° A 18-20.197
N 18-20.277 JONCTION

Aides juridictionnelles totales en défense Aides juridictionnelles totales en défense
au profit de Mme R... P.... au profit de Mme M... P....
Admissions du bureau d'aide juridictionnelle Admissions du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation près la Cour de cassa

tion
en date des 20 septembre 2018 et en date des 17 décembre 2018 et
22 novembre 2018. 24 janvier 2019.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
...

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 novembre 2019

Rejet non spécialement motivé

Mme BATUT, président

Décision n° 10595 F

Pourvois n° A 18-20.197
N 18-20.277 JONCTION

Aides juridictionnelles totales en défense Aides juridictionnelles totales en défense
au profit de Mme R... P.... au profit de Mme M... P....
Admissions du bureau d'aide juridictionnelle Admissions du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation près la Cour de cassation
en date des 20 septembre 2018 et en date des 17 décembre 2018 et
22 novembre 2018. 24 janvier 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

I - Statuant sur le pourvoi n° A 18-20.197 formé par :

1°/ M. N... P..., domicilié [...] ,

2°/ M. V... P...,

3°/ M. D... P...,

4°/ M. W... P...,

5°/ Mme U... P...,

domiciliés tous quatre [...],

contre un arrêt rendu le 14 juin 2018 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre, section B), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme D... P..., domiciliée [...] ,

2°/ à Mme Y... P...,

3°/ à Mme K... P...,

domiciliées toutes deux [...],

4°/ à Mme A... P..., domiciliée [...] ,

5°/ à Mme Z... P..., domiciliée [...] ,

6°/ à Mme R... P..., domiciliée [...] ,

7°/ à Mme M... P..., domiciliée [...] ,

8°/ à Mme G... P..., domiciliée [...] ,

9°/ à M. J... P..., domicilié [...] ,

10°/ à Mme S... P..., domiciliée [...] ,

11°/ à M. O... P..., domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation ;

II - Statuant sur le pourvoi n° N 18-20.277 formé par M. D... P..., domicilié [...] ,

contre le même arrêt rendu dans le litige l'opposant :

1°/ à M. W... P...,

2°/ à Mme U... P...,

3°/ à M. O... P...,

4°/ à Mme D... P...,

5°/ à Mme Y... P...,

6°/ à Mme K... P...,

7°/ à Mme A... P...,

8°/ à Mme Z... P...,

9°/ à Mme R... P...,

10°/ à Mme M... P...,

11°/ à Mme G... P...,

12°/ à M. J... P...,

13°/ à Mme S... P...,

14°/ à M. N... P...,

15°/ à M. V... P...,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 1er octobre 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Berthomier, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de MM. N..., V..., W... P... et de Mme U... P..., de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. D... P..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mmes D..., Y..., A..., Z..., G... P... et de M. J... P..., de Me Le Prado, avocat de Mmes R... et M... P..., de la SCP Lesourd, avocat de M. O... P... ;

Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

I - Sur le pourvoi n° A 18-20.197 en ce qu'il est formé par MM. N..., V... et W... P... et Mme U... P... :

Donne acte à M. V... P... du désistement de son pourvoi ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

II - Sur les pourvois n° A 18-20.197 en ce qu'il est formé par M. D... P... et N 18-20.277 :

Attendu que le moyen de cassation annexé, identique aux deux pourvois, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyen produit au pourvoi n° A 18-20.197 par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour MM. N..., V..., W... P... et Mme U... P...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que les primes versées par O... P... sur les contrats d'assurance-vie litigieux sont manifestement excessives et qu'elles doivent être rapportées à la succession, et en conséquence d'avoir condamné les demandeurs au pourvoi à rapporter à la succession diverses sommes correspondant aux primes versées ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE selon l'article L. 132-13 du code des assurances, les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur. Un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge, des situations patrimoniale et familiale du souscripteur et de l'utilité de ce contrat pour ce dernier. La charge de la preuve du caractère manifestement exagéré des primes versées, lors du paiement de chaque prime en cas de primes successives, incombe à celui qui demande la réintégration des primes versées dans l'actif successoral conformément à l'article 1305 al. 1er du code civil. Dans le cas présent, il résulte des pièces versées aux débats que M. O... P... père a souscrit 14 contrats d'assurance-vie entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011 auprès de CNP Prévoyance, Prédica et Assurances Crédit Mutuelle. [
] Au rappel des règles énoncées ci-dessus, l'appréciation souveraine du caractère manifestement exagéré des primes versées qui fonde l'action engagée dans le cadre de la succession de feu O... P..., laquelle est de fait limitée aux seuls contrats souscrits par celui-ci, doit nécessairement porter non sur le capital versé ou restant à verser mais sur le montant des primes versées par le souscripteur. Elle implique également de se situer non à la date du décès de M. O... P... père mais bien au moment du versement des dites primes. Par ailleurs, si M. P... père a effectué divers rachats en cours d'exécution – essentiellement de manière ponctuelle sur quatre des supports en assurance-vie et de manière périodique à compter du 1er janvier 2012 pour celui souscrit auprès du Crédit Mutuel Assurances le 10 février 2011 -, ces rachats se sont imputés sur les intérêts des primes et donc sur leurs revenus. De la sorte, il n'y a pas lieu de déduire le montant de ces rachats (113.09,64 €) pour apprécier le caractère excessif des primes elles-mêmes qui seules sont rapportables, comme le soutiennent à tort MM. N... et V... P.... Il s'en infère que l'ensemble des critiques émises par les appelants quant au montant des primes retenu par le premier juge n'est pas fondé puisqu'il s'élève bien, pour la seule succession de M. P... père, à un total de 2.021.765,60 € pour la période comprise entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011, soit 885.889,36 € sur dix contrats CNP Assurances, 651.423,94 € sur un contrat Prédica et 484.452 € sur trois contrats Assurance du Crédit Mutuel. S'agissant de la répartition des bénéficiaires, l'examen de documents afférents à chaque contrat révèle que M. P... a désigné majoritairement son épouse, R... Q..., seule ou plus rarement en association avec certains des enfants communs tandis qu'ont été régularisés divers avenants de bénéficiaires après le décès de R... particulièrement en 2003, les 4 février 2004, 2 février 2006, 11 janvier 2007, 25 janvier 2011 et, en dernier lieu pour les quatre premiers contrats, le 3 février 2014 -. Les arguments et moyens invoqués devant la cour par certains intimés en lien notamment avec la répartition inégalitaire des bénéficiaires du fait du contexte familial, l'intention libérale ou frauduleuse prêtée à M. O... P... père ou encore l'amoindrissement supposé de ses capacités de discernement sont sans pertinence dans l'appréciation du caractère manifestement exagéré des primes posée à l'article L. 132-13 précité. Les héritiers qui se prétendent lésés ne demandent pas la nullité des contrats ni leur requalification en donation déguisée. Il n'est en outre pas allégué que M. P... père présentait des problèmes de santé particuliers au cours des années concernées. S'il a bien séjournée à l'hôpital du 11 mars 2014 au 30 mars 2014 où il est décédé le [...] , le certificat médical produit aux débats en date du 1er avril 2015 révèle qu'il « était bien conscient et bien orienté » lors de ce séjour. Sur ces bases, il importe d'apprécier le caractère excessif des primes versées au regard des critères définis en application du texte qui fonde la demande de rapport à la succession tenant à l'âge, à l'utilité du contrat pour M. O... P... père mais surtout à la situation familiale et patrimoniale de celui-ci, qui est au coeur du litige. À ce titre, l'examen des pièces produites établit qu'un certain nombre de primes a été versé à partir du 10 mars 1988 alors que le souscripteur était marié à R... Q... mais que des versements ont été réalisés également après le décès de celle-ci. Il est acquis que M. O... P... père, né le [...] , a eu avec sa femme, qui ne travaillait pas, seize enfants, nés entre le 28 mai 1970 et le 29 septembre 1991, lesquels ont ouvert droit au versement de prestations familiales. Il est constant par ailleurs, qu'au jour du premier versement le 10 mars 1988, le souscripteur, alors âgé de 38 ans, était en invalidité depuis plusieurs années. Il ne percevait à ce titre qu'une pension que chacun s'accorde à qualifier de modeste. Sur le certificat d'adhésion afférent à ce premier contrat, M. O... P... a indiqué ne pas avoir d'activité professionnelle, ce qui a été également le cas lors de l'ouverture des contrats les 14 avril 1989, 5 février 1991, 5 mars 1992, 19 septembre 1995 et 10 juin 1995. Il est simplement mentionné lors de l'ouverture de certains autres contrats une profession de chiffonnier (26 janvier 1989 et 13 mars 1990), de récupérateur (6 novembre 2000) ou de commerçant (10 février 2011) voire la situation de « chiffonnier-sans profession » (19 septembre 1995). Selon les avis d'imposition de l'année 2005 puis ceux des années 2010 à 2013 qui sont versés aux débats, les revenus déclarés de M. P... père se sont élevés à 1.978 € pour l'année 2004, 3.571 € pour l'année 2009, 3.939 € pour l'année 2010 et 0 € pour les années 2011 et 2012. À cela s'est ajoutée, à compter du 1er janvier 2012, la perception par M. P... père d'une somme mensuelle d'environ 1.460 € par le biais de rachats partiels périodiques mis en place sur le contrat souscrit le 10 juin 1997 auprès du Crédit mutuel Assurances. En parallèle et sur la période considérée, M. O... P... père a dû pourvoir à l'entretien et à l'éducation de sa nombreuse famille sachant que son épouse ne travaillait pas. L'actif de sa succession, hors contrats d'assurance-vie et liquidités d'environ 60.000 €, se compose exclusivement d'un bien immobilier, lequel constituait le logement familial au moment des versements et a été valorisé entre 250.000 € et 340.000 € selon la dernière évaluation de septembre 2015. Ces éléments relatifs à la situation familiale et patrimoniale de M. P... père notamment au regard des revenus déclarés établissent sans contestation sérieuse l'exagération des primes d'assurance-vie au moment de leurs versement qui ont été opérés de manière régulière sur les quatorze contrats en cause du 10 mars 1988 au 10 février 2011 pour une moyenne annuelle d'un peu plus de 93.000€. Devant la cour, les appelants reprochent au tribunal d'avoir inversé la charge de la preuve en retenant qu'il leur appartenait de rapporter la preuve de l'existence des revenus occultes qu'ils invoquaient dès lors que les demandeurs ne pouvaient rapporter la preuve de la situation transparente de M. P... père. Pour contester le caractère excessif des primes versées, les appelants considèrent au cas présent en ce compris les ressources officieuses dont leur père aurait disposé au moment du versement des primes. À cette fin et comme en première instance, ils produisent le jugement du tribunal correctionnel de Laval du 18 mai 2006 ainsi que l'arrêt de la cour d'appel d'Angers intervenu le 16 janvier 2007 pour confirmer la culpabilité de M. O... P... père ainsi que sa condamnation du chef d'exécution d'un travail dissimulé avec d'autres membres de sa famille dont certains de ses enfants, pièces auxquelles s'ajoute l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et de non-lieu partiel rendue le 7 mars 2006. Il ressort de la lecture de ces décisions que les faits, objet de cette condamnation, concernent l'exercice par M. O... P... père d'une activité de revente de tomettes en se soustrayant à l'obligation de requérir son immatriculation au registre du commerce. Ces faits portent sur des encaissements en concours avec sa femme pour un montant cumulé de 490.297,38 € couvrant la période de mai 2000 à septembre 2003. Il importe de rappeler que le montant total des primes versées par M. P... père s'élève à 2.021.765,60 € sur une période comprise entre le 10 Mars 1988 et le 10 février 2011. Il sera observé surtout que le total des primes versées par le souscripteur sur les contrats d'assurance-vie du 3 mars 2000 au 16 janvier 2004, période englobant la période de prévention, avoisine le montant des seuls encaissements tandis que doit nécessairement en être déduit le montant déboursé pour l'acquisition de la marchandise revendue. Ce faisant, il est donc démontré que l'ensemble des revenus illicites de M. P... père a été investi en assurance-vie et que le montant des primes par lui versées apparaît ainsi manifestement excessif compte tenu de la situation familiale du souscripteur qui avait encore des enfants à charge, en dépit du fait que certains d'entre eux ont déclaré exercer une activité professionnelle, ainsi qu'il en est justifié s'agissant T..., A..., D..., S..., Y... et W... P... pour des période limitées et alors qu'au moins la cadette, U... P..., dépourvue de revenus, vivait au domicile de son père lors de son décès. Enfin, il ne peut être tiré valablement argument des professions que M. P... père a portées sur certains des certificats d'adhésion au constat de ce que celui-ci s'est dit sans profession lors de la souscription du premier contrat de 1988 puis dans ceux du 14 avril 1989, 5 février 1991, 5 mars 1992 et 10 Juin 1995 alors que, dans le même temps et particulièrement lors de la souscription du 19 septembre 1995, chiffonnier-sans profession. L'ensemble de ces élément tirés de la situation familiale et patrimoniale de M. O... P... père, notamment ses revenus déclarés ou occultes, et sans qu'il puisse être valablement fait reproche au premier juge d'avoir inversé la charge de la preuve, suffit à considérer que les différentes primes versées sur les quatorze contrats d'assurance-vie, cumulant un total de plus de 2.000.000 €, ont été manifestement exagérées au regard des facultés du souscripteur au moment de leurs versements au sens de l'article L. 132-13 du code des assurances. Enfin, il sera constaté, comme l'a fait à raison le premier juge, que, si la souscription d'un contrat d'assurance-vie pouvait présenter une utilité pour M. P... dans la perspective de sa retraite ainsi qu'en témoignent du reste les rachats qu'il a effectivement opérés, le fait que la quasi-totalité de ses revenus réels ait été investie sur un nombre aussi important de contrats d'assurance-vie différents, au moyen de versements réguliers et conséquents et sur la période concernée a manifestement eu pour objectif premier d'échapper au fisc et aux organismes sociaux (arrêt attaqué p.13 à 20) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il résulte de l'article L. 132-13 du code des assurances que les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur et qu'un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge, des situations patrimoniale et familiale du souscripteur, ainsi que de l'utilité du contrat pour celui-ci. Il résulte également de cet article que le capital payé aux bénéficiaires n'est pas rapportable à la succession mais que ce sont uniquement les primes versées par le contractant qui peuvent être rapportables à la succession. Le total des primes versées par M. O... P... et son épouse sur des contrats d'assurance-vie pour la période comprise entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011 s'élève à 2.155.463,30 €. C'est donc ce montant qui peut être rapportable à la succession et plus précisément celle de 2.021.765,60 € pour la seule succession de M. O... P... et non le montant du capital versé aux bénéficiaires. Il convient d'apprécier si le montant total de ces primes présente un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés de M. O... P..., cette appréciation relevant du pouvoir souverain des juges du fond. Il résulte des pièces produites que M. O... P... était marié avec Mme R... Q... qui est décédée en 2003 et qu'ensemble ils ont eu 16 enfants entre 1971 et 1991, son épouse s'étant consacrée à l'éducation des enfants. Il est constant que M. et Mme P... ont perçu les prestations familiales pour leurs enfants et que M. O... P... était en invalidité depuis 1983, percevant une faible pension d'invalidité. Ainsi, M. O... P... a déclaré à l'administration fiscale des revenus pour l'année 164,83 € par mois, pour l'année 2009, 297,66 € par mois, pour l'année 2010, 328,25 € par mois et pour les années 2011 et 2012, aucun revenu. Il percevait mensuellement à compter du 1er janvier 2012 et par prélèvement libératoire la somme de 1479€ obtenue par la mise en place de rachats partiels programmés depuis le contrat d'assurance [...] ouvert au crédit mutuel. Il est constant que également que M. O... P... n'avait pas d'activité professionnelle déclarée. D'ailleurs lors de l'ouverture des contrats d'assurance-vie, M. P... a indiqué le 14 avril 1989, le 10 Juin 1995 et le 23 janvier 2004 qu'il était sans profession. M. O... P... a effectué des versements réguliers sur les contrats d'assurance-vie de 1989 à 2008 pour un montant total de 2.155.463,38 € alors qu'il était père de nombreux enfants, que son épouse ne travaillait pas, qu'il percevait une faible pension d'invalidité et que la famille vivait des prestations familiales, étant remarqué que pour la période de 1988 à 2011 dernière date à laquelle a été effectué un versement sur les contrats d'assurance vie par M. O... P..., la moyenne des versements annuels sur 23 ans est de 93.715 € soit environ 7.800€ par mois ce qui apparaît manifestement exagéré au regard des facultés rappelées ci-dessus. Messieurs N..., D..., V..., W... P... et Mme U... P... soutiennent que leur père avait d'autres ressources et qu'il appartient aux demandeurs de rapporter la preuve de la situation financière exacte de leur père au moment des versements de primes. Toutefois, les demandeurs ne peuvent rapporter la preuve que de la situation transparente de M. O... P... c'est-à-dire déclarée et il appartient en conséquence à ceux qui soutiennent qu'il existait d'autres revenus occultes d'en rapporter la preuve. À cet égard, ils soutiennent que leur père exerçait une activité de chiffonnier ou de récupérateur comme il a pu l'indiquer sur les contrats d'assurance-vie du 13 mars 1990, du 16 novembre 2000 et du 26 janvier 1989. Il convient de remarquer que pour cette dernière date M. O... P... a indiqué sur un contrat du 14 avril 1989 qu'il était sans profession. En outre, ils produisent un jugement du tribunal correctionnel de Laval en date du 18 mai 2006 confirmé par un arrêt de la cour d'appel d'Angers en date du 16 janvier 2007 duquel il résulte que M. O... P... a été condamné pour avoir exercé de façon dissimulée un commerce de revente de tomettes pour la période comprise entre mai 2000 et septembre 2003. La cour d'appel précise que pour la période de prévention, M. O... P... a perçu la somme de 490.297,38 € mais le tribunal correctionnel de Laval précise que cette somme ne doit pas être confondu avec le bénéfice réalisé puisque les tomettes avaient dû être achetées. M. O... P... a subi un redressement fiscal pour cette période. Le bénéfice n'est donc pas connu pour cette période. Il apparaît toutefois que pour la période allant du 3 mars 2000 au 16 janvier 2004 qui englobe la période vidée par la condamnation précitée M. O... P... a versé sur le seul contrat d'assurance vie Prédica le 3 mars 2000 : 10.671,43 €, le 16 août 2001 : 15.244,90 €, le 1er octobre 2001 : 34.301,03 €, le 12 septembre 2002 : 33.700 €, le 20 décembre 2002 : 10.500 €, le 9 janvier 2003 : 10.000 €, le 4 février 2003 : 15.500 € et le 16 janvier 2004 : 346.800 € soit un total de 476.717,36 €. Un autre versement libre de 14.482,66 € a été fait le 26 Juillet 2000 sur le contrat d'assurance-vie Postavenir numéro [...]. Il y a lieu d'observer que le total des primes versées à cette période avoisine le chiffre d'affaire retenu par le tribunal correctionnel de Laval et la cour d'appel d'Angers. Ainsi, si les revenus pour cette période permettaient les versements rappelés ci-dessus, force est de constater que tous les revenus occultes étaient investis en assurance-vie et que le montant total des primes ainsi versées apparaît manifestement excessif au regard de la situation familiale de M. O... P... qui avait 16 enfants à élever et à nourrir. Messieurs N..., D..., V..., W... P... et Mme U... P... ne rapportent pas la preuve d'autres revenus occultes et de leur montant. En outre, ils ne peuvent se prévaloir de fonds perçus illégalement pour faire échec aux règles de droit concernant les successions. Il convient d'ajouter que le montant des primes de plus de 2 millions d'euros apparaît également manifestement exagéré au regard du patrimoine de M. O... P... qui n'est constitué que d'une maison évaluée entre 250.000 et 350.000 € et de liquidités de l'ordre de 60.000 € dans lesquelles est intégrée la moitié du compte bancaire joint couvert au nom de M. O... P... et de Madame U... P... soit 57.262 € et qui fait l'objet d'une demande à part de rapport à succession pour son intégralité. Le montant des primes à lui seul représentant 8 fois le montant du patrimoine de M. O... P... apparaît aussi pour cette raison manifestement exagéré par rapport aux facultés de M. P... au moment des versements. Par ailleurs, si un contrat d'assurance-vie pouvait présenter pour monsieur P... une utilité pour sa retraite, force est de constater qu'une telle multitude de contrats d'assurance vie avec des versements aussi importants ne pouvait avoir comme but que d'échapper à l'administration fiscale et aux divers organismes sociaux. Il y a donc lieu de dire que les primes versées sur les contrats d'assurance vie souscrits par M. O... P... apparaissent manifestement excessives au regard des facultés de M. O... P... et il convient donc d'ordonner le rapport à la succession des primes ainsi versées. À cet égard les demandeurs confondent le montant des primes versées et le capital versé aux bénéficiaires de sorte que la rectification du montant des sommes à rapporter sera effectuée dans le dispositif du présent jugement (jugement p.4 à 7) ;

1- ALORS QUE les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur ; que la preuve du caractère manifestement exagéré des primes pèse sur celui qui en demande le rapport à la succession ; qu'en énonçant par motifs adoptés, que les demandeurs à l'action ne pouvaient rapporter la preuve que de la situation transparente de O... P..., c'est-à-dire déclarée, et qu'il appartenait en conséquence à ceux qui soutiennent qu'il existait d'autres revenus occultes d'en rapporter la preuve, quand c'est sur les demandeurs qui sollicitaient le rapport que pesait la charge de prouver la situation patrimoniale de leur père au moment du versement des primes, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre les revenus déclarés et les revenus occultes, la Cour d'appel a violé l'article L.132-13 du code des assurances, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;

2- ALORS QUE les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur ; que le caractère s'apprécie in concreto, au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniales et familiales du souscripteur ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que les versements ont été opérés sur les contrats d'assurance-vie entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011, d'importance très variable selon les années, et que ces versements n'ont été analysés qu'au regard, d'une part, des seuls avis d'imposition de O... P... des années 2005, 2010 à 2013, d'autre part, de décisions pénales établissant la perception des revenus occultes de mai 2000 à septembre 2003 ; qu'en déduisant ainsi le caractère manifestement exagéré des primes versées par O... P... de 1988 à 2011 sans avoir comparé ces primes au moment de leurs versements, à la situation patrimoniale et au train de vie de O... P... lors de chacune de ces années, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.132-13 du code des assurances ;

3- ALORS QUE seules sont sujets à rapport les primes d'assurance-vie dont le montant est manifestement exagéré eu égard aux facultés de l'assuré ; que pour affirmer que les primes d'assurance-vie avaient un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés de M. P..., qui exerçait une activité occulte de chiffonnier, la cour d'appel a retenu que le total des primes versées avoisinait sur la période analysée le montant des encaissements tandis que devait en être nécessairement déduit le montant déboursé pour l'acquisition de la marchandise revendue ; qu'en statuant par de tels motifs sans déterminer les revenus tirés par O... P... de son activité et sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'acquisition de la marchandise, qui provenait pour l'essentiel de la récupération, avait effectivement pu diminuer les revenus que M. O... P... avait tirés de son activité et convertis en primes d'assurance-vie et si donc ces primes étaient manifestement exagérées eu égard aux facultés de ce dernier, la cour d'appel a violé l'article L. 132-13 du code des assurances ;

4- ALORS QU'ensuite, seules sont sujets à rapport les primes d'assurance-vie ne présentant aucune utilité pour leur souscripteur ; que la cour d'appel a relevé que la souscription auprès du Crédit Mutuel Assurances du contrat d'assurance-vie daté du 10 juin 1997 avait permis le versement à M. P... père d'une somme mensuelle d'environ 1460 € ; qu'en décidant cependant que la souscription des divers contrats d'assurance-vie avait eu pour objectif premier d'échapper au fisc et aux organismes sociaux sans tirer les conséquences légales de ses propres constatations, la cour d'appel a violé l'article L. 132-13 du code des assurances.

Moyen identique produit aux pourvois n° A 18-20.197 et N 18-20.277 par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. D... P...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les primes versées par feu O... P... sur les 14 contrats d'assurance-vie litigieux sont manifestement excessives et qu'elles doivent être rapportées à la succession, et, en conséquence, d'avoir condamné M. D... P... à rapporter à la succession les sommes correspondant aux primes versées au titre de certains des contrats ;

AUX MOTIFS QUE

« selon l'article L. 132-13 du code des assurances, les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur.
Un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge, des situations patrimoniale et familiale du souscripteur et de l'utilité de ce contrat pour ce dernier.
La charge de la preuve du caractère manifestement exagéré des primes versées, lors du paiement de chaque prime en cas de primes successives, incombe à celui qui demande la réintégration des primes versées dans l'actif successoral conformément à l'article 1305 al. 1er du code civil.
Dans le cas présent, il résulte des pièces versées aux débats que M. O... P... père a souscrit 14 contrats d'assurance-vie entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011 auprès de CNP Prévoyance, Prédica et Assurances Crédit Mutuel, selon le détail suivant :
Date de souscription : 10 mars 1988
- contrat ASSURDIX [...] CNP PREVOYANCE
- versement initial : 11 433,68 €
Date de souscription : 26 janvier 1989
- contrat ASSURDIX [...] CNP PREVOYANCE
- versement initial 22 867,35 €
Date de souscription 14 avril 1989
- contrat ASSURDIX [...] CNP PREVOYANCE
- versement initial : 11 433,68 €
Date de souscription : 13 mars 1990
- contrat ASSURDIX [...] CNP PREVOYANCE
- versement initial : 30 489,80 €

Date de souscription : 5 février 1991
- contrat ASSURDIX [...] CNP PREVOYANCE
- versement initial : 22 867,35 €

Date de souscription : 5 mars 1992
- contrat ASSURDIX [...] CNP PREVOYANCE
- versement initial : 45 734,71 €

Date de souscription : 9 août 1993
- contrat POSTAVENIR [...] CNP PREVOYANCE
- montant total des primes : 303 260,93 €
* versement initial : 22 867,35 €
* versements libres : 280 393,58 €
- 31793,24 € le 26 janvier 1995
- 22 867,35 € le 2 octobre 1996
- 27 440,82 € le 28 janvier 1997
- 15 244,90 € le 24 juin 1998
- 14 482,66 € le 26 juillet 2000
- 15 245,05 € le 12 janvier 2001,
- 15239,02 € le 10 janvier 2002
- 17 531,64 € le 6 février 2002
- 15 243 € le 13 mars 2002
- 14 310 € le 24 avril 2002
- 15 244 € le 15 avril 2003
- 15 244,90 € le 10 juin 2003
- 42 880 € le 5 novembre 2003
- 15 621 € le 23 décembre 2003
- 2006 € le 24 décembre 2003
* rachat partiel : 111 890,88 € le 27 octobre 2003

Date de souscription : 10 juin 1995
- contrat PREDIGE n°[...] PREDICA
- montant total des primes : 651 423,94 €
* versement initial : 19 056,13 €
* versements libres : 632 367,81 €
- 7 622,45 € le 28 juin 1995
- 4 573,47 € le 3 août 195
- 6 097,96 € le 2 septembre 1995
- 13 720,41€ le 1er décembre 1995
- 5 335,72 € le 21 mai 1997
- 7 774,90 € le 15 janvier 1997
- 9 146,94 € le 3 avril 1997
- 16 769,39 € le 21 mai 1997
- 22 867,35 € le 4 février 1998
- 22 105,11 € le 1er avril 1998
- 25 154,09 € le 17 septembre 1998
- 14 482,66 € le 16 décembre 1998
- 10 671,43 € le 3 mars 2000
- 15 244,90 € le 16 août 2001
- 34 301,03 € le 1er octobre 2001
- 33 700 € le 12 septembre 2002
- 10 500 € le 20 décembre 2002
- 10 000 € le 9 janvier 2003
- 15 500 € le 4 février 2003
- 346 800 € le 16 janvier 2004
* rachats partiels : 37 500 €
- 7 500 € le 11 mai 2010
- 30 000 € le 28 octobre 2010

Date de souscription : 19 septembre 1995
- contrat POSTAVENIR [...] CNP PREVOYANCE
- montant total des primes : 288 466,65 €
* versement initial : 37 726,56 €
* versements libres : 250 790,09 €
- 15 244,90 € le 23 juin 1998
- 106 714,31 € le 28 janvier 2000
- 111 890,88 € le 27 octobre 2003
- 16 890 € le 20 février 2004
* rachat partiel : 106 714,31 € le 21 janvier 2000

Date de souscription : 10 juin 1997
- contrat n°[...] CREDIT MUTUEL assurances
- montant total des primes : 221 045,11 €
* versement initial : 35 063,27 €
* versements libres : 185 081,84 €
- 84 864,58 € le 15 décembre 2003
- 43 447,26 € le 15 décembre 2003
- 32 000 € le 8 février 2007
- 10 670 € le 15 mai 2007
- 15 000 € le 22 janvier 2008
*rachats partiels :
- 9 000 € le 11 août 2004
- 762 € le 26 avril 2005
- 1 000 € le 17 mai 2005
- 4 380 € le 15 décembre 2011
* rachats périodiques : 27 740 €
- 1460 € / mois sur 19 mois du 1er janvier 2012 au 1er juillet 2013

Date de souscription : 16 novembre 2000
- Contrat : n°[...] HEREDIAL+ CREDIT MUTUEL assurances
- montant total des primes : 195 407,18 €
* versement initial : 99 091,86 €
* autres versements : 96 315,32 €
- 51 070,42 € le 19 janvier 2001
- 15 244,90 € le 30 octobre 2001
- 30 000 € le 30 septembre 2003

Date de souscription : 23 janvier 2004
- contrat : GMO [...] CNP PREVOYANCE
- montant total des primes : 132 435,21 €
* versement initial : 23 729 €
* autres versements : 108 706,21 €
- 15 122 € le 25 mars 2004
- 9 150 € le 28 avril 2004
- 15 200 € le 10 novembre 2004
- 9 148 € le 6 janvier 2005
- 4 500 € le 15 février 2005
- 12 000 € le 6 juin 2005
- 22 839,21 € le 14 octobre 2005
- 6 759 € le 2 juin 2006
- 13 988 € le 27 juin 2006

Date de souscription : 14 novembre 2005
- contrat : GMO [...] CNP PREVOYANCE
- versement initial : 16 900 €

Date de souscription : 10 février 2011
- contrat Avantage n°[...] PAV CREDIT MUTUEL assurances
- montant total des primes : 68 000 €
* versement initial : 53 000 €
* autre versement : 15 000 € le 18 février 2011

Au rappel des règles énoncées ci-dessus, l'appréciation souveraine du caractère manifestement exagéré des primes versées qui fonde l'action engagée dans le cadre de la succession de feu O... P..., laquelle est de fait limitée aux seuls contrats souscrits par celui-ci, doit nécessairement porter non sur le capital versé ou restant à verser mais sur le montant des primes versées par le souscripteur. Elle implique également de se situer non à la date du décès de M. O... P... père mais bien au moment du versement des dites primes.
Par ailleurs, si M. P... père a effectué divers rachats en cours d'exécution – essentiellement de manière ponctuelle sur quatre des supports en assurance-vie et de manière périodique à compter du 1er janvier 2012 pour celui souscrit auprès du Crédit Mutuel Assurances le 10 février 2011 -, ces rachats se sont imputés sur les intérêts des primes et donc sur leurs revenus. De la sorte, il n'y a pas lieu de déduire le montant de ces rachats (113.09,64 €) pour apprécier le caractère excessif des primes elles-mêmes qui seules sont rapportables, comme le soutiennent à tort MM. N... et V... P....
Il s'en infère que l'ensemble des critiques émises par les appelants quant au montant des primes retenu par le premier juge n'est pas fondé puisqu'il s'élève bien, pour la seule succession de M. P... père, à un total de 2.021.765,60 € pour la période comprise entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011, soit 885.889,36 € sur dix contrats CNP Assurances, 651.423,94 € sur un contrat Prédica et 484.452 € sur trois contrats Assurance du Crédit Mutuel.
S'agissant de la répartition des bénéficiaires, l'examen de documents afférents à chaque contrat révèle que M. P... a désigné majoritairement son épouse, R... Q..., seule ou plus rarement en association avec certains des enfants communs tandis qu'ont été régularisés divers avenants de bénéficiaires après le décès de R... particulièrement en 2003, les 4 février 2004, 2 février 2006, 11 janvier 2007, 25 janvier 2011 et, en dernier lieu pour les quatre premiers contrats, le 3 février 2014 -.
Les arguments et moyens invoqués devant la cour par certains intimés en lien notamment avec la répartition inégalitaire des bénéficiaires du fait du contexte familial, l'intention libérale ou frauduleuse prêtée à M. O... P... père ou encore l'amoindrissement supposé de ses capacités de discernement sont sans pertinence dans l'appréciation du caractère manifestement exagéré des primes posée à l'article L. 132-13 précité.
Les héritiers qui se prétendent lésés ne demandent pas la nullité des contrats ni leur requalification en donation déguisée. Il n'est en outre pas allégué que M. P... père présentait des problèmes de santé particuliers au cours des années concernées. S'il a bien séjournée à l'hôpital du 11 mars 2014 au 30 mars 2014 où il est décédé le [...] , le certificat médical produit aux débats en date du 1er avril 2015 révèle qu'il « était bien conscient et bien orienté » lors de ce séjour.
Sur ces bases, il importe d'apprécier le caractère excessif des primes versées au regard des critères définis en application du texte qui fonde la demande de rapport à la succession tenant à l'âge, à l'utilité du contrat pour M. O... P... père mais surtout à la situation familiale et patrimoniale de celui-ci, qui est au coeur du litige.
À ce titre, l'examen des pièces produites établit qu'un certain nombre de primes a été versé à partir du 10 mars 1988 alors que le souscripteur était marié à R... Q... mais que des versements ont été réalisés également après le décès de celle-ci ([...] et le 10 février 2011 notamment).
Il est acquis que M. O... P... père, né le [...] , a eu avec sa femme, qui ne travaillait pas, seize enfants, nés entre le 28 mai 1970 et le 29 septembre 1991, lesquels ont ouvert droit au versement de prestations familiales.
Il est constant par ailleurs, qu'au jour du premier versement le 10 mars 1988, le souscripteur, alors âgé de 38 ans, était en invalidité depuis plusieurs années. Il ne percevait à ce titre qu'une pension que chacun s'accorde à qualifier de modeste.
Sur le certificat d'adhésion afférent à ce premier contrat, M. O... P... a indiqué ne pas avoir d'activité professionnelle, ce qui a été également le cas lors de l'ouverture des contrats les 14 avril 1989, 5 février 1991, 5 mars 1992, 19 septembre 1995 et 10 juin 1995. Il est simplement mentionné lors de l'ouverture de certains autres contrats une profession de chiffonnier (26 janvier 1989 et 13 mars 1990), de récupérateur (6 novembre 2000) ou de commerçant (10 février 2011) voire la situation de « chiffonnier-sans profession » (19 septembre 1995).
Selon les avis d'imposition de l'année 2005 puis ceux des années 2010 à 2013 qui sont versés aux débats, les revenus déclarés de M. P... père se sont élevés à 1.978 € pour l'année 2004, 3.571 € pour l'année 2009, 3.939 € pour l'année 2010 et 0 € pour les années 2011 et 2012.
À cela s'est ajoutée, à compter du 1er janvier 2012, la perception par M. P... père d'une somme mensuelle d'environ 1.460 € par le biais de rachats partiels périodiques mis en place sur le contrat souscrit le 10 juin 1997 auprès du Crédit mutuel Assurances.
En parallèle et sur la période considérée, M. O... P... père a dû pourvoir à l'entretien et à l'éducation de sa nombreuse famille sachant que son épouse ne travaillait pas.
L'actif de sa succession, hors contrats d'assurance-vie et liquidités d'environ 60.000 €, se compose exclusivement d'un bien immobilier, lequel constituait le logement familial au moment des versements et a été valorisé entre 250.000 € et 340.000 € selon la dernière évaluation de septembre 2015.
Ces éléments relatifs à la situation familiale et patrimoniale de M. P... père notamment au regard des revenus déclarés établissent sans contestation sérieuse l'exagération des primes d'assurance-vie au moment de leurs versement qui ont été opérés de manière régulière sur les quatorze contrats en cause du 10 mars 1988 au 10 février 2011 pour une moyenne annuelle d'un peu plus de 93.000 €.
Devant la cour, les appelants reprochent au tribunal d'avoir inversé la charge de la preuve en retenant qu'il leur appartenait de rapporter la preuve de l'existence des revenus occultes qu'ils invoquaient dès lors que les demandeurs ne pouvaient rapporter la preuve de la situation transparente de M. P... père. Pour contester le caractère excessif des primes versées, les appelants considèrent au cas présent en ce compris les ressources officieuses dont leur père aurait disposé au moment du versement des primes.
À cette fin et comme en première instance, ils produisent le jugement du tribunal correctionnel de Laval du 18 mai 2006 ainsi que l'arrêt de la cour d'appel d'Angers intervenu le 16 janvier 2007 pour confirmer la culpabilité de M. O... P... père ainsi que sa condamnation du chef d'exécution d'un travail dissimulé avec d'autres membres de sa famille dont certains de ses enfants, pièces auxquelles s'ajoute l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et de non-lieu partiel rendue le 7 mars 2006.
Il ressort de la lecture de ces décisions que les faits, objet de cette condamnation, concernent l'exercice par M. O... P... père d'une activité de revente de tomettes en se soustrayant à l'obligation de requérir son immatriculation au registre du commerce. Ces faits portent sur des encaissements en concours avec sa femme pour un montant cumulé de 490.297,38 € couvrant la période de mai 2000 à septembre 2003.
Il importe de rappeler que le montant total des primes versées par M. P... père s'élève à 2.021.765,60 € sur une période comprise entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011.
Il sera observé surtout que le total des primes versées par le souscripteur sur les contrats d'assurance-vie du 3 mars 2000 au 16 janvier 2004, période englobant la période de prévention, avoisine le montant des seuls encaissements tandis que doit nécessairement en être déduit le montant déboursé pour l'acquisition de la marchandise revendue.
Ce faisant, il est donc démontré que l'ensemble des revenus illicites de M. P... père a été investi en assurance-vie et que le montant des primes par lui versées apparaît ainsi manifestement excessif compte tenu de la situation familiale du souscripteur qui avait encore des enfants à charge, en dépit du fait que certains d'entre eux ont déclaré exercer une activité professionnelle, ainsi qu'il en est justifié s'agissant T..., A..., D..., S..., Y... et W... P... pour des période limitées et alors qu'au moins la cadette, U... P..., dépourvue de revenus, vivait au domicile de son père lors de son décès.
Enfin, il ne peut être tiré valablement argument des professions que M. P... père a portées sur certains des certificats d'adhésion au constat de ce que celui-ci s'est dit sans profession lors de la souscription du premier contrat de 1988 puis dans ceux du 14 avril 1989, 5 février 1991, 5 mars 1992 et 10 Juin 1995 alors que, dans le même temps et particulièrement lors de la souscription du 26 janvier 1989, il se disait chiffonnier et, lors de l souscription du 19 septembre 1995, chiffonnier-sans profession.
L'ensemble de ces élément tirés de la situation familiale et patrimoniale de M. O... P... père, notamment ses revenus déclarés ou occultes, et sans qu'il puisse être valablement fait reproche au premier juge d'avoir inversé la charge de la preuve, suffit à considérer que les différentes primes versées sur les quatorze contrats d'assurance-vie, cumulant un total de plus de 2.000.000 €, ont été manifestement exagérées au regard des facultés du souscripteur au moment de leurs versements au sens de l'article L. 132-13 du code des assurances.
Enfin, il sera constaté, comme l'a fait à raison le premier juge, que, si la souscription d'un contrat d'assurance-vie pouvait présenter une utilité pour M. P... dans la perspective de sa retraite ainsi qu'en témoignent du reste les rachats qu'il a effectivement opérés, le fait que la quasi-totalité de ses revenus réels ait été investie sur un nombre aussi important de contrats d'assurance-vie différents, au moyen de versements réguliers et conséquents et sur la période concernée a manifestement eu pour objectif premier d'échapper au fisc et aux organismes sociaux » (arrêt attaqué p.13 à 20) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'

« il résulte de cet article [l'article L. 132-13 du code des assurances] que les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur et qu'un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge, des situations patrimoniale et familiale du souscripteur, ainsi que de l'utilité du contrat pour celui-ci.
Il résulte également de cet article que le capital payé aux bénéficiaires n'est pas rapportable à la succession mais que ce sont uniquement les primes versées par le contractant qui peuvent être rapportables à la succession.
En l'espèce, M. O... P... a souscrit plusieurs contrats d'assurance-vie:

-auprès de CNP assurances:
- le 10 mars 1988 (contrat ASSURDIX numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 11 433,68 euros,
- le 26 janvier 1989 (contrat ASSURDIX numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 22 867,35 euros)
- le 14 avril 1989 (contrat ASSURDIX numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 11 433,68 euros
- le 13 mars 1990 (contrat ASSURDIX numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 30 489,80 euros,
- le 5 février 1991 (contrat ASSURDIX numéro [...] sur lequel les versements effectués s'élèvent à 22 867,35 euros
- le 5 mars 1992 (contrat ASSURDIX numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 45 734,71 euros
- le 9 août 1993 (contrat POSTAVENIR numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 303 260,93 euros
- le 19 septembre 1995 (contrat POSTAVENIR numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 288 466,65 euros,
- le 23 janvier 2004 (contrat GMO numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 132 435,21 euros,
- le 14 novembre 2005 (contrat GMO numéro [...] ) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 6 900 euros,
Soit un total de 885 889,36 euros ;

- auprès de Prédica :
- le 10 juin 1995 (contrat numéro 26[...]) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 651 423,94 euros ;
- auprès des assurances du Crédit mutuel :
- le 10 juin 1997 (contrat numéro RI 203 201LAR) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 221 045,11 euros ;
- le 16 novembre 2000 (contrat numéro [...] HEREDIAL +) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 195 407,18 euros,
- le 10 février 2011 (contrat numéro [...] PAV) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 68 000 euros,
Il y a lieu de remarquer que Madame R... P..., épouse de M. O... P... a également souscrit auprès des assurances du Crédit mutuel deux contrats d'assurance-vie:

- le 15 février 1997 (contrat numéro [...] HEREDIAL+) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 53 052,26 euros,
- le 2 mai 1997 (contrat numéro 5D 236 495 30 HEREDIAL) sur lequel les versements effectués s'élèvent à 80 645,53 euros,
Soit un total de 918 150,08 euros.

Le total des primes versées par M. O... P... et son épouse sur des contrats d'assurance-vie pour la période comprise entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011 s'élève à 2.155.463,30 €. C'est donc ce montant qui peut être rapportable à la succession et plus précisément celle de 2.021.765,60 € pour la seule succession de M. O... P... et non le montant du capital versé aux bénéficiaires.
Il convient d'apprécier si le montant total de ces primes présente un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés de M. O... P..., cette appréciation relevant du pouvoir souverain des juges du fond.
Il résulte des pièces produites que M. O... P... était marié avec Mme R... Q... qui est décédée en 2003 et qu'ensemble ils ont eu 16 enfants entre 1971 et 1991, son épouse s'étant consacrée à l'éducation des enfants.
Il est constant que M. et Mme P... ont perçu les prestations familiales pour leurs enfants et que M. O... P... était en invalidité depuis 1983, percevant une faible pension d'invalidité.
Ainsi, M. O... P... a déclaré à l'administration fiscale
- pour l'année 2004, des pensions pour un montant de 1978 € soit 164,83 € par mois,
- pour l'année 2009, des pensions pour un montant de 3 571 €, soit 297,66 € par mois,
- pour l'année 2010, des pensions pour un montant de 3 939 € soit 328,25 € par mois,
- pour l'année 2011, aucun revenu,
- pour l'année 2012, aucun revenu.
Il percevait mensuellement à compter du 1er janvier 2012 et par prélèvement libératoire la somme de 1479€ obtenue par la mise en place de rachats partiels programmés depuis le contrat d'assurance [...] ouvert au crédit mutuel.
Il est constant que également que M. O... P... n'avait pas d'activité professionnelle déclarée. D'ailleurs lors de l'ouverture des contrats d'assurance-vie, M. P... a indiqué le 14 avril 1989, le 10 juin 1995 et le 23 janvier 2004 qu'il était sans profession.
M. O... P... a effectué des versements réguliers sur les contrats d'assurance-vie de 1989 à 2008 pour un montant total de 2.155.463,38 € alors qu'il était père de nombreux enfants, que son épouse ne travaillait pas, qu'il percevait une faible pension d'invalidité et que la famille vivait des prestations familiales, étant remarqué que pour la période de 1988 à 2011 dernière date à laquelle a été effectué un versement sur les contrats d'assurance vie par M. O... P..., la moyenne des versements annuels sur 23 ans est de 93.715 € soit environ 7.800€ par mois ce qui apparaît manifestement exagéré au regard des facultés rappelées ci-dessus.
Messieurs N..., D..., V..., W... P... et Mme U... P... soutiennent que leur père avait d'autres ressources et qu'il appartient aux demandeurs de rapporter la preuve de la situation financière exacte de leur père au moment des versements de primes.
Toutefois, les demandeurs ne peuvent rapporter la preuve que de la situation transparente de M. O... P... c'est-à-dire déclarée et il appartient en conséquence à ceux qui soutiennent qu'il existait d'autres revenus occultes d'en rapporter la preuve.
À cet égard, ils soutiennent que leur père exerçait une activité de chiffonnier ou de récupérateur comme il a pu l'indiquer sur les contrats d'assurance-vie du 13 mars 1990, du 16 novembre 2000 et du 26 janvier 1989. Il convient de remarquer que pour cette dernière date M. O... P... a indiqué sur un contrat du 14 avril 1989 qu'il était sans profession.
En outre, ils produisent un jugement du tribunal correctionnel de Laval en date du 18 mai 2006 confirmé par un arrêt de la cour d'appel d'Angers en date du 16 janvier 2007 duquel il résulte que M. O... P... a été condamné pour avoir exercé de façon dissimulée un commerce de revente de tomettes pour la période comprise entre mai 2000 et septembre 2003. La cour d'appel précise que pour la période de prévention, M. O... P... a perçu la somme de 490.297,38 € mais le tribunal correctionnel de Laval précise que cette somme ne doit pas être confondue avec le bénéfice réalisé puisque les tomettes avaient dû être achetées.
M. O... P... a subi un redressement fiscal pour cette période. Le bénéfice n'est donc pas connu pour cette période.
Il apparaît toutefois que pour la période allant du 3 mars 2000 au 16 janvier 2004 qui englobe la période visée par la condamnation précitée M. O... P... a versé sur le seul contrat d'assurance vie Prédica le 3 mars 2000 : 10.671,43 €, le 16 août 2001 : 15.244,90 €, le 1er octobre 2001 : 34.301,03 €, le 12 septembre 2002 : 33.700 €, le 20 décembre 2002 : 10.500 €, le 9 janvier 2003 : 10.000 €, le 4 15 18N0493/OFD février 2003 : 15.500 € et le 16 janvier 2004 : 346.800 € soit un total de 476.717,36 €.
Un autre versement libre de 14.482,66 € a été fait le 26 juillet 2000 sur le contrat d'assurance-vie Postavenir numéro [...].
Il y a lieu d'observer que le total des primes versées à cette période avoisine le chiffre d'affaire retenu par le tribunal correctionnel de Laval et la cour d'appel d'Angers. Ainsi, si les revenus pour cette période permettaient les versements rappelés ci-dessus, force est de constater que tous les revenus occultes étaient investis en assurance-vie et que le montant total des primes ainsi versées apparaît manifestement excessif au regard de la situation familiale de M. O... P... qui avait 16 enfants à élever et à nourrir.
Messieurs N..., D..., V..., W... P... et Mme U... P... ne rapportent pas la preuve d'autres revenus occultes et de leur montant.
En outre, ils ne peuvent se prévaloir de fonds perçus illégalement pour faire échec aux règles de droit concernant les successions.
Il convient d'ajouter que le montant des primes de plus de 2 millions d'euros apparaît également manifestement exagéré au regard du patrimoine de M. O... P... qui n'est constitué que d'un maison évaluée entre 250.000 et 350.000 € et de liquidités de l'ordre de 60.000 € dans lesquelles est intégrée la moitié du compte bancaire joint couvert au nom de M. O... P... et de Madame U... P... soit 57.262 € et qui fait l'objet d'une demande à part de rapport à succession pour son intégralité. Le montant des primes à lui seul représentant 8 fois le montant du patrimoine de M. O... P... apparaît aussi pour cette raison manifestement exagéré par rapport aux facultés de M. P... au moment des versements.
Par ailleurs, si un contrat d'assurance-vie pouvait présenter pour monsieur P... une utilité pour sa retraite, force est de constater qu'une telle multitude de contrats d'assurance vie avec des versements aussi importants ne pouvait avoir comme but que d'échapper à l'administration fiscale et aux divers organismes sociaux.
Il y a donc lieu de dire que les primes versées sur les contrats d'assurance vie souscrits par M. O... P... apparaissent manifestement excessives au regard des facultés de M. O... P... et il convient donc d'ordonner le rapport à la succession des primes ainsi versées. À cet égard les demandeurs confondent le montant des primes versées et le capital versé aux bénéficiaires de sorte que la rectification du montant des sommes à rapporter sera effectuée dans le dispositif du présent jugement » (jugement p.4 à 7) ;

1) ALORS QUE les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur ; que la preuve du caractère manifestement exagéré des primes pèse sur celui qui en demande le rapport à la succession ; qu'en énonçant, par motifs adoptés, que les demandeurs à l'action ne pouvaient rapporter la preuve que de la situation transparente de O... P..., c'est-à-dire déclarée, et qu'il appartenait en conséquence à ceux qui soutiennent qu'il existait d'autres revenus occultes d'en rapporter la preuve, quand c'est sur les demandeurs qui sollicitaient le rapport que pesait la charge de prouver la situation patrimoniale de leur père au moment du versement des primes, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre les revenus déclarés et les revenus occultes, la cour d'appel a violé l'article L 132-13 du code des assurances, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;

2) ALORS QUE les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur ; que ce caractère s'apprécie in concreto, au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que les versements ont été opérés sur les contrats d'assurance-vie entre le 10 mars 1988 et le 10 février 2011, d'importance très variable selon les années, et que ces versements n'ont été analysés qu'au regard, d'une part, des seuls avis d'imposition de O... P... des années 2005, 2010 à 2013, d'autre part, de décisions pénales établissant la perception de revenus occultes de mai 2000 à septembre 2003 ; qu'en déduisant ainsi le caractère manifestement exagéré des primes versées par O... P... de 1988 à 2011 sans avoir comparé ces primes, au moment de leurs versements, à la situation patrimoniale et au train de vie de O... P... lors de chacune de ces années, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 132-13 du code des assurances ;

3) ALORS QUE les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur ; que ce caractère s'apprécie in concreto, au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur ; qu'en retenant que sur la période comprise entre le 3 mars 2000 et le 16 janvier 2004, O... P... avait versé des primes sur des contrats d'assurance-vie pour un montant avoisinant celui des encaissements perçus de mai 2000 à septembre 2003 d'une activité occulte de revente de tomettes, tels qu'établis par les décisions pénales produites, ce dont elle a déduit le caractère manifestement exagéré des primes versées dès lors que devait être déduit des encaissements le montant déboursé pour l'acquisition de la marchandise revendue (arrêt p.19 et 20), sans rechercher, ainsi qu'il était soutenu, si l'acquisition de la marchandise ne représentait pas une part infime - moins de 7% - des revenus tirés par O... P... pour l'essentiel de produits de récupération (concl. p. 8), de sorte que les primes n'étaient pas disproportionnées par rapport aux revenus de O... P..., la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 132-13 du code des assurances ;

4) ALORS QUE seules sont rapportables à la succession les primes d'assurance-vie ne présentant aucune utilité pour leur souscripteur ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que O... P... avait effectué des rachats partiels sur quatre contrats, en 2000 pour 106 714,31 euros (contrat Postavenir du 19 septembre 1995), en 2003 pour 111 890,88 euros (contrat Postavenir du 9 août 1993), en 2010 pour 37 500 euros (contrat Predige du 10 juin 1995), en 2004, 2005, 2011, et un rachat périodique pour des versements mensuels de 1 460 euros du 1er janvier 2012 au 1er juillet 2013 (contrat Crédit Mutuel du 10 juin 1997) ; que tout en concédant que ces rachats pouvaient témoigner de l'utilité des contrats d'assurance vie pour O... P..., la cour d'appel a néanmoins décidé que la souscription des divers contrats d'assurance-vie avait eu pour objectif premier d'échapper au fisc et aux organismes sociaux, de sorte qu'elle a ordonné le rapport à la succession des primes versées ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 132-13 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-20.197
Date de la décision : 06/11/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 06 nov. 2019, pourvoi n°18-20.197, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.20.197
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