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06/11/2019 | FRANCE | N°18-20.191

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 06 novembre 2019, 18-20.191


SOC.

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 novembre 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 11123 F

Pourvoi n° U 18-20.191










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le p

ourvoi formé par la société La Terrasse, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 25 mai 2018 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale C), dans le ...

SOC.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 novembre 2019

Rejet non spécialement motivé

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 11123 F

Pourvoi n° U 18-20.191

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société La Terrasse, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 25 mai 2018 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale C), dans le litige l'opposant à M. G... Q..., domicilié [...] ,

défendeur à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 1er octobre 2019, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société La Terrasse, de la SARL Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, avocat de M. Q... ;

Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société La Terrasse aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société La Terrasse à payer à M. Q... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société La Terrasse.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du conseil de prud'hommes de Villefranche sur Saône du 3 février 2017 en ce qu'il a condamné la société La Terrasse à verser à M. Q... les sommes de 24 152,12 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires sur 2011 outre, 2 415,21 euros au titre des congés payés afférents, 1 030,40 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires sur 2012, outre 103,04 euros au titre des congés payés afférents, d'AVOIR condamné la société La Terrasse à remettre sans délai au salarié les bulletins de paie sur toute la période travail de celui-ci rectifiés en prenant en considération le nombre d'heures travaillées mentionnées au sein des conclusions de celui-ci, l'attestation Pôle Emploi rectifiée en tenant compte du nombre d'heures travaillées mentionnées au sein des conclusions du salarié, d'AVOIR fixé le salaire mensuel moyen du salarié à 3 120, 41 euros, d'AVOIR condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 18 722,46 euros à titre de dommages et intérêts, d'AVOIR condamné l'employeur aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser au salarié la somme de 3 000 euros (1 500 euros en première instance et 1 500 euros en cause d'appel) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur les demandes au titre des heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Pour étayer sa demande le salarié doit produire des éléments factuels suffisamment précis quant au volume de travail effectué en heures supplémentaires pour mettre l'employeur en mesure de répondre en fournissant ses propres éléments.

Il est de principe constant d'une part que le fait que le salarié n'a pas fait valoir ses droits pendant l'exécution du contrat de travail n'éteint pas la créance de salaire au titre des heures supplémentaires, et d'autre part que la qualité de cadre ayant pour corollaire une liberté d'organisation dans le travail ne prive pas le salarié de son droit au paiement des heures supplémentaires, sauf convention de forfait régulière.

La SARL LA TERRASSE fait valoir qu'en raison de l'appartenance de M. Q... à une équipe de travail, elle estime qu'elle n'était pas tenue d'effectuer un décompte quotidien et hebdomadaire des heures de travail, en application de l'article D 3171-8 du code du travail.

Elle ajoute que les heures supplémentaires ont été régularisées et payées à M. Q... selon les documents mensuels « horaires mensuels cuisine » et que ce dernier ne rapporte pas la preuve que son employeur lui aurait proposé, par chèque, le versement de la somme de 325€ en rémunération d'heures supplémentaires accomplies en 2012.

Elle précise que lors de la remise par l'employeur de son solde de tout compte, M. Q... n'a pas contesté l'absence des heures supplémentaires qu'il prétend non rémunérées.

La SARL LA TERRASSE conteste le nombre quotidien de couverts à assurer que M. Q... avance et estime que les agendas qu'il verse aux débats sont fantaisistes.

M. Q... fait valoir que :

- le prétendu horaire collectif de « l'équipe cuisine » n'est pas prouvé et il n'a jamais été soumis à un tel horaire collectif.

- Il effectuait des services pour 200 couverts environ, les affirmations contraires de la société SARL LA TERRASSE sur ce point ne sont pas sérieuses et se réfèrent à une attestation et au site internet de l'établissement.

- Il effectuait régulièrement des heures supplémentaires,

- Il produit sur ce point des relevés d'heures de travail qu'il a tenu régulièrement de Février 2011 à Mars 2012. Il verse également aux débats des attestations d'anciens salariés tendant à démontrer que la SARL TERRASSE a pour pratique de faire effectuer des heures supplémentaires à son personnel et de ne pas les payer.

L'employeur, ne pouvant ignorer les heures supplémentaires que son salarié effectuait compte tenu de la récurrence de celles-ci et de leur importance sur toute la relation contractuelle, avait pleinement conscience de la situation, ce qui caractérise l'élément intentionnel de l'infraction de travail dissimulé et justifie sa demande de dommages et intérêts incidente de ce chef.

En l'espèce, la SARL TERRASSE affirme que l'ensemble de l'équipe de restauration effectuait son travail selon le même horaire de 8h30 à 14h15 et de 19h00 à 21h30 (23h30 les samedis) et que les heures supplémentaires que M. Q... a été tenu d'effectuer lui ont été intégralement payées.

Or, si elle produit des relevés d'horaires mensuels cuisine dont la plupart émargés par M. Q..., force est de constater que ces éléments ne permettent pas de déterminer ni l'horaire allégué ni la durée de travail effectuée par le salarié puisque n'ont pas été ainsi réalisés un relevé quotidien et un récapitulatif hebdomadaire démontrant clairement le temps de travail accompli en sus des 39 heures hebdomadaires prévues.

Par ailleurs, la SARL TERRASSE ne produit aucun élément de nature à établir que l'horaire collectif qu'elle allègue avait été affiché et porté à la connaissance des salariés et notamment de M. Q.... Ainsi, l'employeur ne vient pas contredire les éléments versés par le salarié consistant en la production de fiches horaires de février 2011 à mars 2012 démontrant l'accomplissement par lui d'heures supplémentaires.

Par ailleurs, les attestations émanant de M. N..., Mme R... et M. A... mettent en évidence que M. Q... travaillait régulièrement de 8 h à 9 h du matin jusqu'à 23 h ou minuit et que les repos hebdomadaires n'étaient souvent pas respectés.

Il est au surplus établi que l'employeur a payé à M. Q... 174,37 heures supplémentaires pour la période de février 2011 à décembre 2011 et 36,44 heures de janvier à février 2012, alors que ce dernier démontre par les relevés qu'il produit qu'il a effectué 1084 heures supplémentaires de février 2011 à décembre 2011 et 70,50 heures de janvier 2012 à fin février 2012 (précisément au 4 mars 2012), de sorte qu'il justifie, après compensation avec les sommes payées , du paiement de la somme de 24 152,12 euros et de 1 030,40 euros outre congés payés afférents sur ces deux sommes, telles que justement retenues par le conseil des prud'hommes.

Sur l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

L'article L. 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L. 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L. 8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié.

Aux termes de l'article L. 8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 du même code relatif au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L'article L. 8221-5, 2º, du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

L'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé est due quelle que soit la qualification de la rupture.

La demande en paiement d'heures supplémentaires n'a pas pour effet de rendre irrecevable la demande en paiement de l'indemnité forfaitaire.

Le montant de l'indemnité forfaitaire doit être calculé en tenant compte des heures supplémentaires accomplies par le salarié au cours des 6 derniers mois précédant la rupture du contrat de travail.

En l'espèce, il apparaît que l'employeur en ne contrôlant pas la durée de travail de son chef de cuisine et cela quel que soit le type d 'horaire applicable dans l'entreprise et notamment en n'enregistrant pas conformément à l'article D 3171-8 du code du travail les heures de début et de fin de chaque période de travail et le relevé des heures accomplies, a intentionnellement mentionné sur les bulletins de paie de M. Q... un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, de sorte que contrairement à ce qu'a retenu le conseil des prud'hommes, il convient de le condamner au paiement d'une indemnité au titre du travail dissimulé.

Cette indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire, peut être fixée à la somme de 18 722,46 euros sur la base d'un salaire mensuel brut de 3 120,41 euros et ce par réformation de la décision déférée.

(...)

Sur la remise des bulletins de salaire et attestations Pôle Emploi.

Il convient de confirmer la décision déférée de ce chef, sans qu'il apparaisse nécessaire d'affecter la remise des dits documents d'une astreinte.

Sur les demandes annexes.

Il convient de débouter la SARL LA TERRASSE qui succombe en son appel de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner de ce chef à payer à M. Q... la somme de 1 500 euros.

Il convient également de la condamner aux entiers dépens » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur les heures supplémentaires

Arguments des parties

Monsieur G... Q... expose qu'il a effectué 1 084 heures supplémentaires sur l'année 2011 et 70,50 heures sur 2012.

Une partie seulement de celles-ci lui a été payée, soit 209,03 heures.

Il n'existait aucun horaire collectif de travail.

Le personnel de cuisine était en sous-effectif et le rythme de travail était très important Il indique déposer ses relevés d'heures d'activité.

La société LA TERRASSE répond que Monsieur G... Q..., es qualité de chef de cuisine, faisait partie intégrante de « l'équipe cuisine » avec pour l'aider dans sa tâche :

-un second de cuisine,

-deux apprentis.

En raison de l'appartenance du demandeur à une équipe de travail, en l'occurrence « l'équipe cuisine », l'employeur n'était pas tenu d'effectuer un décompte quotidien et hebdomadaire des heures de travail de chacun des membres de l'équipe.

Enfin, « l'équipe cuisine » fonctionnait selon un horaire collectif déterminé comme suit : 8h30-14h15 / 19h00-21h30 (23h30 les samedis).

Monsieur G... Q... a été tenu, au cours de l'exécution de son contrat de travail, d'accomplir des heures supplémentaires qui lui ont été régulièrement payées.

A aucun moment au cours de l'exécution de son contrat de travail. Monsieur G... Q... n'a fait part, à son employeur, d'une telle demande de régularisation des heures supplémentaires qu'il aurait prétendument accomplies.

Au surplus, lors de la remise par l'employeur de son solde de tout compte. Monsieur G... Q... ne s'est pas non plus ému de l'absence d'heures supplémentaires non rémunérées.

La demande de ce chef est, au surplus, exorbitante.

Le Conseil de Prud'hommes constatera que contrairement à ce qu'indique le demandeur, les agendas qu'il verse aux débats n'ont pas été établis au fil de la relation de travail, mais entre les mois de mars et août 2012, soit en vue de sa saisine de la juridiction du Conseil de Prud'hommes.

Dès lors, le Conseil de Prud'hommes ne pourra que les considérer comme établis pour les besoins de la cause.

Plus grave encore, les mentions qui sont portées dans lesdits agendas sont contredites par le document intitulé « heures mensuelles cuisine » cosigné par les salariés et l'employeur et seule preuve des heures de travail accomplies

Il doit être précisé à la juridiction prud'homale que tous les salariés attestant pour le compte de Monsieur G... Q... (Monsieur F... N... en qualité de second de cuisine. Monsieur I... U..., en qualité de serveur et Madame H... R..., en qualité d'apprentie) ont tous quitté la SARL LA TERRASSE

Sur ce

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail :

"En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable".

La charge de la preuve des heures supplémentaires n'incombe à aucune des parties en particulier.

Il appartient au salarié demandeur de fournir des indices, des éléments de nature à étayer sa prétention (Soc 25/02/2004, Bull Civ 5, n 62).

Mais, ces indices réunis, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

A ce titre, il sera rappelé que l'article D 3171-8 du même code énonce que :

"Lorsque les salariés d'un atelier, d'un service ou d'une équipe, au sens de l'article D 3171-7, ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, la durée du travail de chaque salarié concerné est décomptée selon les modalités suivantes :

1° Quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d'heures de travail accomplies ;

2° Chaque semaine, par récapitulation selon tous moyens du nombre d'heures de travail accomplies par chaque salarié".

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction.

A défaut pour l'employeur d'avoir produit des éléments probants justifiant des horaires réalisés par le salarié, le juge se prononce au vu des seuls éléments produits par ce dernier (Soc 13/10/1998, n°96-42373).

L'étaiement par le salarié de sa demande constitue la première phase du mécanisme de la preuve partagée. Il lui appartient d'ouvrir le débat, sans avoir à le mener seul puisque chacune des parties est supposée détenir des éléments de preuve.

Les modalités de l'étaiement de la demande ont été précisées. Il s'agit pour le salarié de présenter des éléments factuels, le cas échéant établis par ses soins, et revêtant un minimum de précision. Le but est de permettre l'établissement d'un débat contradictoire autour de ces éléments.

La chambre sociale de la Cour de Cassation a posé le principe selon lequel les éléments fournis par le salarié doivent être suffisamment précis, faute de quoi il ne s'agit que d'allégations auxquelles l'employeur peut être en mesure de répondre : « Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments » (Soc., 24 novembre 2010, pourvoi n° 09-40.928, Bull. 2010, V, n 266).

En l'espèce. Monsieur G... Q... dépose à la procédure plusieurs attestations établies par d'anciens salariés de la société LA TERRASSE, lesquels indiquent que le demandeur exécutait de très nombreuses heures de travail, très au-delà du temps de travail contractualisé.

Ces témoignages sont convergents.

Il sera ajouté que Monsieur I... M... précise que l'employeur "faisait signer un compte rendu des jours de repos, sans les heures effectuées".

Monsieur G... Q... dépose également aux débats des relevés quotidiens de ses horaires qu'il a établi de façon manuscrite sur la durée de sa présence dans cette entreprise.

Ce document est parfaitement précis en ce qu'il indique pour chaque jour les horaires précis de son travail et les temps d'interruption.

Les conditions de sa rédaction importent peu, dès lors que l'employeur est ainsi parfaitement informé des horaires de travail revendiqués, ce qui permet un débat contradictoire loyal.

Il sera jugé que Monsieur G... Q... produit des indices étayant sa demande.

Il revient ainsi à la société LA TERRASSE de produire des éléments probants justifiant des horaires réalisés par ce salarié.

Or, il ne justifie pas d'un horaire collectif du personnel de cuisine, étant observé que des heures supplémentaires ont été rémunérées, ce qui induit que si ceux-ci existaient, ils n'étaient pas toujours respectés.

Les fiches d'horaires mensuels déposées ne sont pas toujours signées des salariés. Ces relevés ne sont pas précis, étant un simple récapitulatif au surplus mensuel quand le temps de travail est hebdomadaire.

Le témoignage précité de Monsieur M... prive, au surplus, ces pièces de réelle force probante.

Enfin, les témoignages produits en défense concernent des périodes durant lesquelles Monsieur G... Q... n'était pas le seul chef de cuisine ou avait quitté l'entreprise.

La société LA TERRASSE est ainsi défaillante dans la preuve requise et le présent Conseil se prononcera au vu des seuls éléments produits par Monsieur G... Q..., ses tableaux.

Il sera fait droit à son entière demande de ce chef.

La société LA TERRASSE devra remettre à Monsieur G... Q... des fiches de paie rectifiées établies sur la base du relevé figurant dans les conclusions que Monsieur G... Q... a déposées et une attestation POLE EMPLOI rectifiée.

A ce stade, il n'y a pas lieu au prononcé d'une astreinte.

(
)

Sur les frais irrépétibles

En équité et par application de l'article 700 du code de procédure civile. Monsieur G... Q... recevra la somme de 1 500 euros.

« La société LA TERRASSE succombant ne peut être accueillie en sa demande de ce chef.

Sur l'exécution provisoire

La créance salariale découlant de la reconnaissance d'heures impayées est difficilement contestable ; dès lors l'exécution provisoire prévoie à l'article 515 du code de procédure civile sera prononcée.

Sur les dépens

La société LA TERRASSE succombant supportera les dépens » ;

1°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'examiner l'ensemble des éléments de preuve soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, pour établir que M. Q... était soumis à un horaire collectif de travail, de sorte qu'elle n'était pas tenue de procéder à un relevé hebdomadaire de ses horaires de travail, la société La Terrasse produisait aux débats les panneaux d'affichage de l'entreprise sur lesquels figuraient les horaires de l'équipe « cuisine » à laquelle appartenait le salarié ; qu'en jugeant que l'employeur ne justifiait pas de l'horaire collectif qu'il alléguait ni du fait que cet horaire avait été porté à la connaissance des salariés, sans avoir pris le soin d'examiner, serait-ce sommairement, l'élément de preuve produit en ce sens par l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la société La Terrasse faisait valoir que contrairement aux allégations du salarié, les plannings que ce dernier produisait aux débats n'avaient pas été établis au fil du temps mais entre mars et août 2012 pour le seuls besoins de la cause en vue de la saisine du conseil de prud'hommes (conclusions de l'exposante p. 12) ; que, pour dire que le salarié avait suffisamment étayé sa demande d'heures supplémentaires, la cour d'appel s'est bornée à relever que le salarié versait aux débats des relevés quotidiens de ses horaires établis de façon manuscrite sur la durée de sa présence et que les conditions de leur rédaction importait peu ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si les relevés d'horaires litigieux, en ce qu'ils avaient tous été rédigés entre mars 2012 et août 2012, n'avaient pas été établis pour les seuls besoins de la cause et n'étaient donc pas, de ce seul fait, dépourvus de toute force probante et ne pouvaient donc pas utilement étayer la demande du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

3°) ALORS QUE en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, outre la circonstance que les relevés d'heures produits par le salarié avaient été pour la plupart établis après son licenciement pour les seuls besoins de la cause, la société La Terrasse relevait que lesdits relevés d'heures contredisaient les relevés mensuels cosignés par celui-ci, qu'ils tenaient compte du fait que le salarié assurait en moyenne 200 couverts par service lorsque tous les éléments comptables démontraient qu'en réalité, le nombre moyen de couverts assurés par le restaurant par service ne dépassait pas 58 ; que l'employeur soulignait encore, s'agissant des attestations versées aux débats par le salarié, que les attestants en sa faveur avaient tous quitté l'entreprise, que M. M... indiquait qu'ils étaient fréquemment amenés à réaliser des heures supplémentaires non payées sans pour autant n'en avoir jamais réclamé le paiement à son employeur ni avoir saisi la justice de cette prétendue difficulté, de sorte qu'aucun des témoignages produits par le salarié ne présentait les garanties d'objectivité suffisantes (conclusions de l'exposante p.18-19) ; qu'en se fondant sur ces éléments pour faire droit à la demande du salarié au titre des heures supplémentaires, sans s'expliquer sur l'ensemble des vices affectant les pièces du salarié, pointés par l'employeur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

4°) ALORS en tout état de cause QU'un salarié n'a droit au paiement que des heures supplémentaires qui ont été accomplies avec l'accord de l'employeur ; qu'en jugeant que la demande du salarié était fondée, sans constater que les heures qu'il invoquait, à les supposer admises, avaient été sollicitées par l'employeur ou qu'elles avaient à tout le moins été accomplies avec son accord, la cour d'appel a donc privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du Code du travail ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 18 722,46 euros à titre de dommages et intérêts, d'AVOIR condamné l'employeur aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser au salarié la somme de 3 000 euros (1 500 euros en première instance et 1 500 euros en cause d'appel) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Sur l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

L'article L. 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L. 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L. 8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié.

Aux termes de l'article L. 8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 du même code relatif au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L'article L. 8221-5, 2º, du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

L'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé est due quelle que soit la qualification de la rupture.

La demande en paiement d'heures supplémentaires n'a pas pour effet de rendre irrecevable la demande en paiement de l'indemnité forfaitaire.

Le montant de l'indemnité forfaitaire doit être calculé en tenant compte des heures supplémentaires accomplies par le salarié au cours des 6 derniers mois précédant la rupture du contrat de travail.

En l'espèce, il apparaît que l'employeur en ne contrôlant pas la durée de travail de son chef de cuisine et cela quel que soit le type d 'horaire applicable dans l'entreprise et notamment en n'enregistrant pas conformément à l'article D 3171-8 du code du travail les heures de début et de fin de chaque période de travail et le relevé des heures accomplies, a intentionnellement mentionné sur les bulletins de paie de M. Q... un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, de sorte que contrairement à ce qu'a retenu le conseil des prud'hommes, il convient de le condamner au paiement d'une indemnité au titre du travail dissimulé.

Cette indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire, peut être fixée à la somme de 18 722,46 euros sur la base d'un salaire mensuel brut de 3 120,41 euros et ce par réformation de la décision déférée.

(...)

Sur la remise des bulletins de salaire et attestations Pôle Emploi.

Il convient de confirmer la décision déférée de ce chef, sans qu'il apparaisse nécessaire d'affecter la remise des dits documents d'une astreinte.

Sur les demandes annexes.

Il convient de débouter la SARL LA TERRASSE qui succombe en son appel de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner de ce chef à payer à M. Q... la somme de 1 500 euros.

Il convient également de la condamner aux entiers dépens » ;

1°) ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen, relatif aux heures supplémentaires entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt du chef de l'indemnité pour travail dissimulé, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS en tout état de cause QUE la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 du code du travail suppose que l'employeur ait, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que les juges doivent caractériser l'élément intentionnel du travail dissimulé ; qu'en se bornant à relever que l'employeur n'avait pas contrôlé la durée de travail de son salarié contrairement à ses obligations, la Cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser le caractère intentionnel du défaut de mention des heures effectuées sur les bulletins de paie, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-20.191
Date de la décision : 06/11/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre sociale, arrêt n°18-20.191 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon SC


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Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 06 nov. 2019, pourvoi n°18-20.191, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.20.191
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