CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 octobre 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10570 F
Pourvoi n° V 18-18.053
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Batterie California, société civile immobilière, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 3 avril 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre A), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. T... L..., domicilié [...],
2°/ à la société K... A..., N... M... et S... R..., société civile professionnelle, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société L...-A...,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 septembre 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Canas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me Balat, avocat de la société Batterie California, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. L... et de la société K... A..., N... M... et S... R... ;
Sur le rapport de Mme Canas, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Batterie California aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. L... et à la société K... A..., N... M... et S... R... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Batterie California
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit prescrite l'action en responsabilité civile introduite par la SCI Batterie California contre Maître T... L... et la SCP H... L..., C... L... et K... A..., condamné la SCI Batterie California à payer à Maître T... L... la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts et au même ainsi qu'à la SCP H... L..., C... L... et K... A... diverses sommes en application de l'article 700 du code de procédure civile, et débouté enfin la SCI Batterie California des fins de son recours ;
AUX MOTIFS QUE par acte administratif du 21 septembre 1977, la société Aérospatiale a acheté de l'Etat trois parcelles de terrain situées à [...] pour un prix de 1.100.000 francs ; que par acte sous seing privé du 12 juillet 1985, la société Aérospatiale promettait de vendre lesdits biens immobilier à M. X... moyennant le prix de 12 millions de francs hors taxes ; que M. X... constituait avec deux autres personnes, le 6 août 1987, une société Eden loisirs ayant pour objet toute opération d'acquisition en vue de la revente de biens immobiliers ; que le 6 août 1987, M. X... substituait la société Eden Loisirs dans le bénéfice de la promesse de vente et notifiait cette substitution à la société Aérospatiale ; que le 2 septembre 1987, la société Aérospatiale sommait M. X... et la société Eden loisirs de signer l'acte en l'étude de Maître L... et qu'un procès-verbal de difficultés était dressé le 9 septembre 1987 ; qu'une instance était engagée par la société Aérospatiale contre les bénéficiaires afin de voir déclarer la vente caduque mais que les parties se désistaient de leurs demandes réciproques pour finalement signer l'acte le 20 novembre 1989, acte dressé par Maître L... au terme duquel la société Aérospatiale vendait les trois parcelles de terrain à la société Eden Loisirs au prix de 16 millions de francs, payé comptant ; que dans cet acte, M. X... faisait observer qu'il avait obtenu sur la propriété un permis de construire du maire de [...] du 27 octobre 1987, que l'ouverture du chantier avait été effectuée le 6 octobre 1989 ; que par ailleurs, la société Eden loisirs se réservait de déclarer command et qu'elle effectuait cette déclaration le même jour au bénéfice de la société Batterie California dans les termes suivants : « M. X...
usant de la faculté réservée à la société Eden Loisirs qu'il représente
déclare que les biens immobiliers en faisant l'objet ont été acquis par la société Eden loisirs susnommée pour le compte de la SCI Batterie California intervenante » ; qu'il y est ajouté que la vente a été payée par la société Eden loisirs à l'aide de fonds mis à disposition par la société Batterie California et que la société Eden loisirs n'a pas de répétition à exercer pour ce paiement contre la société Batterie California ; que cependant, et alors que le permis délivré prévoyait la conservation d'un vieux fort, que la société Batterie California qui avait été constituée le 16 novembre 1989 pour les besoins de l'opération, rasait la construction en ne laissant que les fondations ; qu'un arrêté d'interruption de travaux était alors pris par le maire le 19 septembre 1990 et que des poursuites pénales étaient engagées à un moment où le gros-oeuvre des bâtiments était pratiquement achevé ; que la cour d'appel, par un arrêt du 1er février 1993, condamnait les consorts I... pour défrichement non autorisé à une amende ; que les travaux ayant été poursuivis, le tribunal correctionnel condamnait ensuite M. I... qui dirigeait la société Batterie California, par un arrêt du 25 juin 1999, à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende et en qualité de bénéficiaire des travaux le condamnait également à procéder à la démolition des constructions, la cour d'appel ramenant, le 15 novembre 2001, la condamnation à une durée de 8 mois avec sursis ; qu'il est par ailleurs résulté des décisions de justice ainsi rendues que le permis de construire avait été délivré illégalement à M. X... et que la cour (administrative) d'appel de Marseille a jugé, le 26 juin 2008, que la société Batterie California avait commis une faute de nature à exonérer l'administration de sa responsabilité envers elle, car elle n'ignorait pas le caractère illégal du permis de construire, ni ses implications judiciaires, cet arrêt étant devenu définitif par suite d'une décision du Conseil d'Etat prononçant la non admission du pourvoi ; que c'est dans ces conditions que par exploit du 18 juin 2013, la société Batterie California a fait assigner Maître L... et la société de notaires leur reprochant d'avoir failli à l'obligation de conseil du notaire au regard de la régularité du permis de construire cédé, prétendant par ailleurs que le notaire avait bénéficié d'un mandat spécifique en vue du protocole d'accord du 19 octobre 1989, qu'il s'était comporté comme un monteur d'affaires en organisant le financement de la transaction par la société Batterie California sur la période 19 octobre-20 novembre 1989 et demandant, en conséquence, que le notaire l'indemnise de la perte de la valeur vénale du terrain et de la perte de la plus-value foncière résultant du gel foncier du terrain ; que le tribunal a retenu que la responsabilité du notaire ne pouvait être que délictuelle en considérant que ses obligations qui tendent à assurer l'efficacité de l'acte instrumenté ne constituent que le prolongement de sa mission de rédacteur d'actes et relèvent de sa responsabilité délictuelle ; qu'en application des dispositions de l'article 2270-1 du code civil, les actions en responsabilité civile extra contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation, que la manifestation du dommage réside bien dans la connaissance du caractère illicite du permis de construire qui résulte du jugement du tribunal correctionnel de Grasse du 25 juin 1999 et que par suite, l'action intentée le 18 juin 2013 est prescrite ; que le notaire fait valoir que le tribunal administratif de Nice avait mis en évidence le caractère frauduleux de l'autorisation de construire du 27 octobre 1987 dans son jugement du 31 janvier 1991 et que le caractère illégal du permis de construire a ensuite été constaté par le jugement du tribunal correctionnel de Grasse le 25 juin 1999 dans les termes suivants : « il convient également en application de l'article L. 111-5 du code pénal de constater l'illégalité qui affecte l'arrêté du 27 octobre 1987 ayant accordé le permis de construire », cette décision prenant le soin de rappeler que ce caractère frauduleux avait été mis en évidence par le tribunal administratif dans une décision du 31 janvier 1991, et cette illégalité ayant été confirmée par l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 19 décembre 2000 ; que le tribunal administratif de Nice considérait par ailleurs dans un jugement du 10 novembre 2005 que la société Batterie California avait une parfaite connaissance du dossier du permis de construire lors de l'achat des terrains le 20 novembre 1989 et qu'elle ne pouvait ignorer l'illégalité de celui-ci, ce jugement ayant été aussi confirmé par la cour administrative d'appel de Marseille dont la décision est définitive depuis l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 février 2009 ; que pour apprécier le problème de la prescription, il convient au préalable de déterminer la nature de la responsabilité recherchée contre le notaire dans la mesure où avant la réforme de la loi du 17 juin 2008 qui est entrée en vigueur le 19 juin 2008, la prescription de l'action en responsabilité contractuelle était de trente ans (ancien article 2261 du code civil), où la prescription de l'action en responsabilité extra contractuelle était de dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation et que la loi nouvelle a ramené les deux délais de prescription à cinq années, en précisant, pour ses dispositions transitoires au titre des prescriptions en cours au jour de son application, que la durée totale du délai de prescription ne peut excéder la durée prévue par la loi antérieure (article 2222 du code civil) ; que la société Batterie California reproche au notaire d'avoir commis une faute en n'émettant aucune réserve quant à la licéité du permis de construire et quant à son caractère définitif ; qu'elle lui fait grief d'un manquement à son obligation d'information tendant à assurer l'efficacité de l'acte de vente, l'annulation du permis étant de nature à compromettre la réalisation de la construction projetée alors que l'achat est effectué en vue de cette réalisation ; que ce premier grief relève de la responsabilité délictuelle ; que le point de départ du délai de prescription étant la manifestation du dommage ou la date à laquelle il a été révélé à la victime si elle établit qu'elle n'en a pas eu précédemment connaissance, la prescription doit, en l'espèce, être considérée comme ayant commencé à courir du jour où la société Batterie California a eu connaissance de l'illicite du permis de construire, cette connaissance lui permettant, en effet, d'envisager la recherche de la responsabilité du notaire, et notamment d'invoquer le caractère irrégulier du permis pour lui reprocher le défaut de conseil présentement allégué lequel est, en outre, dès ce moment, à l'origine de l'existence certaine d'une perte de chance de négocier le contrat ou de ne pas le conclure, sans qu'il soit besoin d'attendre l'issue des autres procédures, alors, en toute hypothèse, que le préjudice susceptible d'être indemnisé dans ce cadre ne peut consister dans le gel du terrain au regard du projet de construction ni dans sa perte de valeur vénale ; qu'en l'espèce, le dommage s'est manifesté pour la société Batterie California, dès la décision du tribunal correctionnel en date du 25 juin 1999 qui faisait ainsi état de ce qu' « il résulte des pièces de la procédure que l'adjoint au maire ne pouvait ignorer que le permis de construire était illégal et que l'architecte allait enfreindre les textes en vigueur en démolissant le fort », de ce que « c'est lors de l'établissement du procès-verbal d'infraction du 23 août 1990 qu'ont été révélés à la fois les infractions aux dispositions du permis de construire, mais également de manière connexe les éléments constitutifs de la fraude réalisée pour obtenir la délivrance indue du permis de construire initial en 1987 » et de ce qu' « il convient également en application de l'article 111-5 du code pénal de constater l'illégalité qui affecte l'arrêté du 14 octobre 1987 ayant accordé le permis de construire », cette illégalité étant également expressément reprise au dispositif de la décision dont la publication est par ailleurs ordonnée ; qu'il sera par ailleurs rappelé qu'étant partie à cette instance, la société Batterie California était donc parfaitement informée de l'illégalité ainsi constatée et jugée, cette décision, qui a été ensuite déféré à la cour en 2000, puis en 2001 par suite de la disjonction prononcée à l'égard de M. I..., n'ayant pas été remise en cause en ce qui concerne ses mentions relatives à l'irrégularité dudit permis ; qu'il en résulte que le point de départ du délai de prescription de dix années de l'action en responsabilité délictuelle doit être fixée au 25 juin 1999 au plus tôt et à la date des arrêts de la cour du 19 décembre 2000 ou 15 novembre 2001, de sorte que l'assignation qui a été délivrée le 18 juin 2013 est prescrite sans que puisse par ailleurs être utilement invoqué, dans le cadre de ces débats, le moyen relatif au caractère non subsidiaire de l'action en responsabilité professionnelle contre le notaire ; qu'à cet égard, il sera relevé, d'une part, que la responsabilité professionnelle du notaire n'est pas subsidiaire et que l'on ne saurait donc exiger du demandeur à l'action à son encontre qu'il justifie de l'exercice préalable d'un action contre un autre éventuel responsable et, d'autre part, que l'appelante invoque ce moyen à l'effet de voir retarder le point de départ de la prescription au motif, en l'espèce, que ce ne serait qu'à l'issue de la procédure administrative qu'elle pouvait faire valoir un dommage certain contre le notaire ; que ce faisant, elle ne se place juridiquement pas sur le terrain de la non subsidiarité mais plutôt sur celui de la certitude du préjudice ; que précisément la certitude du préjudice de la victime existe, ainsi qu'il a été déjà ci-dessus relevé, dès 1999, puisqu'à cette date, et compte tenu du jugement du tribunal correctionnel, le défaut de conseil du notaire ainsi que la perte de chance d'acquérir dans des conditions différentes ou la perte de chance de ne pas acquérir, qui est le seul dommage dont elle puisse se plaindre à l'égard du notaire, pouvait d'ores et déjà être alléguée ; que l'appelante prétend encore pouvoir rechercher le notaire sur le fondement d'une responsabilité contractuelle invoquant à ce propos l'existence d'un mandat spécifique que Maître L... se serait vu confier, et notamment, une mission de montage du financement, ce qui résulterait du protocole d'accord du 19 octobre 1987 ; qu'ainsi, elle prétend que le notaire lui aurait conseillé la charge du financement de l'opération, avec un montage complexe et déclaration de command et qu'elle lui aurait donné mandat de négocier la transaction avec la société Aérospatiale dès le 19 octobre 1989 ; que cependant, la société Batterie California ne démontre pas l'existence de ce mandat qu'elle prétend « spécifique », ce qui laisserait supposer qu'il ait été formalisé avec la définition d'une mission particulière ; qu'il ne peut être considéré au vu de l'examen des diverses clauses y contenues que celui-ci résulterait du protocole du 19 octobre 1989 ; qu'il n'est au demeurant nullement établi que cet acte aurait été signé en l'étude du notaire ou rédigé par lui ; qu'à cet égard, il résulte d'ailleurs des pièces versées que ce protocole a été rédigé grâce à l'entremise d'une société de droit suisse qui a perçu d'importants honoraires de ce chef (pièces de l'appelant n° 20) ; que le prétendu doublement des honoraires rattachés à la prétendue participation du notaire à la transaction n'est pas démontré et qu'il ne saurait en toute hypothèse se déduire de la seule confrontation de la pièce 12 de l'appelante mentionnant une somme totale de 376.487,64 € au titre des « frais notariés et formalités » avec les calculs de la société appelante, figurant en page 72 de ses conclusions, qui font état d'un total des émoluments proportionnels avec le doublement de la transaction d'un montant de 317.682,59 € ; qu'il ressort en revanche des pièces de la comptabilité notariale, également versées aux débats par l'appelante, que les honoraires perçus par celle-ci ne sont en rapport qu'avec l'acte de vente, la constitution de la société et la déclaration de command auxquels s'ajoutent les frais divers d'hypothèque d'enregistrement ; que de ce chef, il sera souligné que si M. I... a bien signé le protocole, il y est mentionné qu'il intervenait alors en qualité d'administrateur d'une société Burbank productics BV, de sorte que la société Batterie California est d'autant moins fondée à prétendre qu'elle aurait donné mandat spécifique au travers de ce protocole, puisqu'en réalité, elle-même n'y est pas partie et qu'en toute hypothèse, elle n'était pas encore constituée à cette date ; qu'il ressort également des pièces versées aux débats que d'autres conventions ont dû être passées avant la signature du 20 novembre (actes des 10 et 16 novembre 1989, produits en pièces 17 bis et 18 par l'appelante), pour lesquelles aucune intervention de Maître L... n'est démontrée ; qu'enfin, le fait que le protocole désigne le notaire comme devant recevoir les fonds destinés au financement de l'achat des parcelles et à l'apurement du passif de la société Eden loisirs ne suffit pas à démontrer le prétendu mandat, alors qu'il est d'usage pour le notaire qui reçoit un acte de vente d'être le séquestre des fonds versés en contrepartie de la transaction ; qu'aucune autre clause de ce protocole n'est utile à cet effet ; que la faute alléguée contre le notaire au titre de son devoir d'information sur le permis de construire n'a aucun rapport avec sa mission de séquestre des fonds, ni avec celle ayant consisté à rédiger les statuts de la société Batterie California ; qu'aucun élément n'établit, ainsi que l'appelante l'allègue, que le notaire aurait « organisé une évidence de fonds en son étude » qui aurait permis de transiger le 20 novembre 1989, ni qu'il aurait assuré le rôle prétendu de « monteur d'affaires » ; qu'il n'est pas plus prouvé que l'insertion d'une déclaration de command et les versements faits par le notaire M. X... ou à la société Eden (qui est l'acheteur et l'auteur de la déclaration de command), versement dont la fiche comptable précise bien qu'ils sont effectués sur autorisation et sur facture, et la réalité de ces documents étant au demeurant bien établie au vu des pièces 18 et 19 de l'appelante) participaient de ce montage alors que ces diligences s'analysent comme le prolongement de la mission du notaire de rédacteur d'acte qui à ce titre est tenu de veiller non seulement à son efficacité jusqu'à sa conclusion mais aussi à veiller à la bonne exécution des paiements consécutifs à la fois à la vente et aux actes qui y ont concouru en fonction du montage, ici particulièrement complexe voulu par les seules parties, à propos duquel aucune critique quant à sa licéité n'est par ailleurs émise ; qu'il résulte des observations ainsi faites qu'il ne peut être reproché au notaire d'avoir engagé sa responsabilité contractuelle au titre du mandat donné par la société appelante dont la réalité n'est pas prouvée ; que par suite la question de la prescription de l'action sur un tel fondement est sans objet ; que surabondamment, rien ne démontre que le notaire pouvait douter de la licéité du permis ; que celui-ci avait été accordé le 25 octobre 1987, soit plus de deux ans avant l'acte du 20 novembre 1989, qu'il était définitif à la date de la vente et qu'aucun élément extrinsèque ou intrinsèque ne pouvait, en l'état des pièces débattues, l'amener à présumer d'une telle difficulté, étant à cet égard considéré, d'une part, que tout acte administratif est présumé légal et d'autre part, que la seule référence au certificat d'urbanisme tel qu'il est visé à l'acte en permet pas de démontrer l'existence d'un élément extrinsèque, la société appelante n'ayant versé à la procédure que l'acte de vente avec la déclaration de command, à l'exclusion de ses annexes, de sorte que la cour ne dispose pas du certificat délivré à la date de la vente ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QU' en matière de responsabilité civile le point de départ du délai de prescription est la date à laquelle le dommage se manifeste au titulaire du droit ; qu'à cet égard, le fait dommageable doit être distingué du fait générateur de responsabilité ; que dans ses conclusions d'appel (p. 48, alinéa 8), la SCI Batterie California faisait valoir que « si, en suite des décisions pénales, l'illégalité frauduleuse du permis de construire a bien été consacrée, ce n'est qu'au terme des décisions administratives rejetant le droit à indemnisation attaché au permis de construire que le dommage est devenu certain à l'encontre du notaire » ; qu'en considérant pourtant que le point de départ de la prescription de l'action de la SCI Batterie California fondée sur la responsabilité délictuelle du notaire devait être fixé à la date du jugement rendu le 25 juin 1999 par le tribunal correctionnel de Grasse, qui constatait l'illicéité du permis de construire, et non à la date à laquelle les décisions émanant des juridictions administratives ont été rendues et qui refusaient d'indemniser la faute commise par l'administration dans la délivrance du permis de construire litigieux, cependant que c'est à la lecture de ces dernières décisions que la SCI Batterie California a pris connaissance du dommage causé par le notaire, la cour d'appel a méconnu le principe selon lequel la prescription court à la date de la manifestation du dommage et a violé l'article 2270-1 du code civil, applicable en l'espèce ;
ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE dans ses conclusions d'appel (p. 63, alinéas 3 à 6), la SCI Batterie California faisait valoir qu'en exécution du protocole du 19 octobre 1989, Maître L... a effectué dans sa comptabilité des mouvements de fonds du compte de la société Burbank Producties à celui de la SCI Batterie California, puis du compte de sa filiale la SCI Batterie California à celui de la société Eden Loisirs, opérations qui ne pouvaient nécessairement intervenir que dans le cadre d'un mandat qui lui avait été confié par la SCI Batterie California ; qu'en estimant que « le fait que le protocole désigne le notaire comme devant recevoir les fonds destinés au financement de l'achat des parcelles et à l'apurement du passif de la société Eden loisirs ne suffit pas à démontrer le prétendu mandat, alors qu'il est d'usage pour le notaire qui reçoit un acte de vente d'être le séquestre des fonds versés en contrepartie de la transaction » (arrêt attaqué, p. 7, 3ème attendu), sans répondre aux conclusions de la SCI Batterie Californie faisant valoir que les mouvements de fonds opérés par le notaire au bénéfice de différentes sociétés excédaient largement les limites d'une simple mission de séquestre et établissaient l'existence du mandat invoqué engageant la responsabilité contractuelle du notaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, EN TROISIEME LIEU, QU' en opérant une confusion entre la notion de « transaction » au sens de l'article 2044 du code civil et celle de « transaction immobilière », et en attribuant sur le fondement de cette confusion un rôle à une société suisse pourtant totalement étrangère à la cause, tout en exonérant Maître L... de toute intervention dans un montage complexe qui avait pourtant été mis en place par le seul notaire (arrêt attaqué, p. 6 in fine), rémunéré à cet effet sur le fondement de l'article 12 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 , et au sujet duquel la SCI Batterie California, substituée à sa société mère la société Burbank Producties, s'expliquait précisément (conclusions d'appel, notamment p. 19 et 20, p. 69 à 73 et p. 83, alinéa 5), la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1147, devenu l'article 1231-1, du code civil ;
ALORS, EN DERNIER LIEU, QUE le notaire assume un devoir d'information et de conseil relativement aux risques qui pèsent le cas échéant sur la validité du permis de construire afférent aux parcelles vendues ; que pour écarter « surabondamment » toute faute de Maître L..., la cour d'appel a considéré qu'aucun élément « extrinsèque ou intrinsèque » ne pouvait laisser penser au notaire que le permis de construire obtenu par M. X... était illicite (arrêt attaqué, p. 7, 5ème attendu) ; que cependant l'acte authentique de vente dressé le 20 novembre 1989 par Maître L... comportait (p. 9) les mentions suivantes : « Observation : A titre indicatif, la propriété considérée était inscrite en section ND, zone de protection de nature, au POS approuvé le 28.11.83 et annulé par le tribunal administratif.
Nice le 5 septembre 1989 » et « Observation : M. X... D... fait ici observer qu'à la suite de la promesse de vente qui lui a été consentie par la société Aérospatiale Société Nationale Industrielle, il a obtenu sur la propriété susdésignée un permis de construire suivant arrêté de M. le Maire de la Commune de [...] (Alpes Maritimes) en date du 27 octobre 1987 sous le numéro [...], et que l'ouverture du chantier a été effectuée le 6 octobre 1989 », que le permis de construire du 27 octobre 1987 a été délivré au visa du plan d'occupation des sols approuvé le 28 novembre 1983 et que la promesse de vente du 12 juillet 2005 relate la règlementation d'urbanisme alors applicable ; qu'en ne recherchant pas si, au regard des seules mentions figurant dans l'acte authentique de vente du 20 novembre 1989, dans la promesse de vente du 12 juillet 2005 ainsi qu'à l'arrêté de permis de construire du 27 octobre 1987 auxquels ledit acte fait référence, le notaire n'avait pas manqué à son devoir de conseil et d'information en n'avertissant pas la SCI Batterie California du risque pesant sur la légalité du permis de construire obtenu par M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382, devenu 1240, et 1147, devenu 1231-1, du code civil.