LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 13 décembre 2017), qu'engagée le 1er janvier 1990, en qualité de secrétaire comptable, par la société Meca technic, aux droits de laquelle est venue la société MTI, Mme T... a été licenciée pour motif économique le 21 janvier 2013 ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque son reclassement ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent d'assurer la permutation de tout ou partie du personnel ; que lorsque la consistance ou le périmètre du groupe de reclassement est contesté, il appartient au juge de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties sans que la preuve pèse sur le salarié auquel le doute subsistant profite ; qu'ayant constaté que le gérant de la société MTI était également le gérant de la société IPC maintenance industrielle, la cour d'appel qui a énoncé que cette circonstance était insuffisante à caractériser la permutabilité de tout ou partie du personnel entre les deux sociétés, a mis la preuve du périmètre du groupe de reclassement à la charge de l'exposante, en violation de l'article 1353 du code civil et des articles L. 1233-4 et L. 1235-1 du code du travail alors en vigueur ;
2°/ que préalablement au licenciement pour motif économique d'un salarié, l'employeur doit rechercher toutes les possibilités de le reclasser dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent d'assurer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'ayant constaté que le gérant de la société MTI était également le gérant de la société IPC maintenance industrielle, la cour d'appel qui a énoncé que cette circonstance était insuffisante à caractériser la permutabilité de tout ou partie du personnel entre les deux sociétés, sans rechercher si, ainsi que le soutenait l'exposante, une telle permutabilité n'était pas rendue possible par l'activité de la société IPC maintenance industrielle qui assurait la gestion administrative de la société MTI, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur ;
Mais attendu que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis tant par l'employeur que par la salariée, la cour d'appel, sans inverser la charge de la preuve et procédant à la recherche prétendument omise, a relevé que la circonstance tirée de ce que le gérant de la société employeur soit également gérant de la société IPC maintenance industrielle était insuffisante à caractériser la permutabilité de tout ou partie du personnel entre les deux sociétés ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme T... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour Mme T...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Mme T... fondé sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, débouté Mme T... de toutes ses demandes
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement est ainsi rédigée: "A la suite de notre entretien du 10 janvier 2013, nous vous informons que nous sommes contraints de vous licencier pour le motif économique suivant : Nous avons repris la société MT au 1er décembre 2012 dans un contexte économique défavorable. En effet, le chiffre d'affaire des 12 derniers mois au 31 octobre 2012 était de 27.5% en baisse par rapport au chiffre d'affaire inscrit au bilan du 30 juin 2012 (290k€ contre 400k€ =etgt; -27.5%,). Nous ne voyons pas d'évolution positive de la situation à court et moyen terme au vu de notre carnet de commande. Dans ce contexte, nous sommes amenés à nous réorganiser afin de conserver la pérennité de l'entreprise MTI. Cette réorganisation nous conduit à nous recentrer sur notre coeur de métier de mécanique afin de maintenir la compétitivité de l'entreprise sur le marché. Cette réorganisation a pour conséquence la suppression de votre poste administratif et comptable. A ce jour, aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée (..)" ; qu'il convient de relever tout d'abord que la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise constitue un motif économique dès lors que la réorganisation mise en oeuvre a pour objet de prévenir des difficultés économiques et leurs conséquences sur l'emploi ; que ce motif n'exige cependant pas que les difficultés économiques existent à la date du licenciement ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'indique la salariée, la cour n'a pas à rechercher si au jour du licenciement la société rencontrait des difficultés économiques mais seulement s'il existait à cette date une menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise ou, le cas échéant, celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; qu'en l'espèce, la société appelante établit par ses pièces que si les résultats comptables produits avant la signature de l'acte de cession du fonds montraient une situation comptable correcte puisque l'activité cédée avait enregistré une situation bénéficiaire d'environ 30K€ à 34K€ et que l'étude comptable prévisionnelle réalisée le 4 octobre 2012 laissait espérer pour l'avenir le maintien de ce niveau d'activité, pour autant, contrairement à ces dernières prévisions, le niveau d'activité s'était rapidement dégradé dès après la cession, la cour renvoyant à cet égard à l'étude comptable réalisée le 14 décembre 2012 (cf le document de la pièce n°5 de l'appelante) établissant bien que la compétitivité de l'entreprise était menacée ; que d'ailleurs, cette dégradation avait été confirmée par la situation comptable intermédiaire établie au 31 mars 2013 (cf 2ème document de la pièce n°5 de l'appelante) démontrant ainsi le caractère sérieux et persistant de la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise ; qu'il s'en suit que l'employeur était tenu de procéder à une réorganisation de l'entreprise s'il voulait sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; que dans le cadre de cette réorganisation, l'emploi de Mme T... a bien été supprimé, le registre des entrées et sorties du personnel montrant que seuls des emplois techniques avaient été maintenus ; que l'erreur matérielle commise sur l'intitulé de la fonction sur le bulletin de salaire de décembre 2012 dont Mme T... croit devoir s'emparer est sans conséquence sur l'effectivité de la suppression de son emploi ; qu'en réalité, Mme T... conteste le choix fait par l'employeur de supprimer son poste au motif que les tâches administratives et comptables persistaient et que la réorganisation visait d'abord les emplois techniques ; que toutefois, il sera rappelé en premier lieu que la suppression de l'emploi n'exigeait pas la suppression des tâches lesquelles pouvaient être réalisées par d'autres moyens autres que le maintien de l'emploi de Mme T... ; qu'en second lieu, dès lors qu'il a été constaté que la réorganisation de l'entreprise qui avait entraîné la suppression du poste de Mme T... était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, la cour n' a pas le pouvoir de contrôler le choix fait par l'employeur ni de rechercher si le choix de supprimer le poste de Mme T... était le plus pertinent ; que Mme T... fait encore valoir que l'employeur n'aurait pas satisfait à son obligation de reclassement ; que toutefois, la société appelante produit son registre des entrées et sorties du personnel duquel il résulte que l'entreprise était une micro structure qui n'occupait que trois salariés (un coordonnateur des travaux et deux techniciens de maintenance) après la suppression du poste de Mme T... en sorte qu'aucun poste n'était disponible ; que la circonstance tirée de ce que le gérant de la société, M. W..., était aussi le gérant d'une société IPC maintenance Industrielle n'est pas suffisante pour caractériser la permutabilité de tout ou partie du personnel entre les deux sociétés ; que le licenciement doit donc être déclaré fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que pour les motifs qui précèdent, le jugement sera réformé en toutes ses dispositions et Mme T... déboutée de toutes ses prétentions (arrêt p.5 et 6) ;
ALORS D'UNE PART QUE le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque son reclassement ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent d'assurer la permutation de tout ou partie du personnel ; que lorsque la consistance ou le périmètre du groupe de reclassement est contesté, il appartient au juge de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties sans que la preuve pèse sur le salarié auquel le doute subsistant profite ; qu'ayant constaté que le gérant de la société MTI était également le gérant de la société IPC maintenance industrielle, la cour d'appel qui a énoncé que cette circonstance était insuffisante à caractériser la permutabilité de tout ou partie du personnel entre les deux sociétés, a mis la preuve du périmètre du groupe de reclassement à la charge de l'exposante, en violation de l'article 1353 du code civil et des articles L. 1233-4 et L. 1235-1 du code du travail alors en vigueur ;
ALORS D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE préalablement au licenciement pour motif économique d'un salarié, l'employeur doit rechercher toutes les possibilités de le reclasser dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent d'assurer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'ayant constaté que le gérant de la société MTI était également le gérant de la société IPC maintenance industrielle, la cour d'appel qui a énoncé que cette circonstance était insuffisante à caractériser la permutabilité de tout ou partie du personnel entre les deux sociétés, sans rechercher si, ainsi que le soutenait l'exposante, une telle permutabilité n'était pas rendue possible par l'activité de la société IPC maintenance industrielle qui assurait la gestion administrative de la société MTI, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur.