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11/09/2019 | FRANCE | N°18-17.612

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 11 septembre 2019, 18-17.612


SOC.

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 septembre 2019




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVET, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10878 F

Pourvoi n° R 18-17.612








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formÃ

© par la société Hermant, Q..., Luciani, société civile professionnelle, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (17e chambre B)...

SOC.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 septembre 2019

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVET, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10878 F

Pourvoi n° R 18-17.612

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société Hermant, Q..., Luciani, société civile professionnelle, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (17e chambre B), dans le litige l'opposant à Mme W... U..., divorcée X..., domiciliée [...] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 25 juin 2019, où étaient présents : M. CHAUVET, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Marguerite, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat de la société Hermant, Q..., Luciani, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de Mme U... ;

Sur le rapport de Mme Marguerite, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Hermant, Q..., Luciani aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme U... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Pietton, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du président empêché, en son audience publique du onze septembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Hermant, Q..., Luciani

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme U... par la SCP Hermant-Castellan Jusbert-Luciani et de l'AVOIR condamnée en conséquence à verser à Mme U... la somme de 10.000 € bruts de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE « Au soutien de la contestation du licenciement, Madame X... soutient notamment que le motif réel du licenciement n'est pas économique, mais résulte de la volonté de l'employeur de procéder au licenciement de Madame K..., qui avait été refusé par l'inspection du travail. Madame X... soutient que l'employeur a opté pour le licenciement économique de Madame K... qu'elle a cru moins contestable et en tout cas réalisable, et qu'elle a décidé, par souci de cohérence, de procéder à un licenciement collectif visant également Madame X..., une des dernières arrivées. Elle ajoute que la fonction de comptable taxateur est inhérente à l'existence même d'une étude de notaire et que dès lors ce poste ne pouvait absolument pas être supprimé ; qu'en réalité il n'a pas été supprimé puisqu'il a été repris d'apport par Madame C... en CDD puis par Monsieur T... comptable taxateur. Madame X... conteste en outre l'existence de sérieuses difficultés économiques soutenant notamment qu'elles étaient anciennes, et qu'il ne se dégageait pas un résultat d'exploitation négatif. Elle reproche enfin à l'employeur un manquement à l'obligation de reclassement. En réponse, la SCP Hermant-M...-Luciani soutient que la suppression d'emploi ne correspond pas nécessairement à une disparition des fonctions lesquelles peuvent être reprises par le dirigeant de l'entreprise ou être externalisées ; que le registre du personnel de l'étude atteste qu'aucun comptable n'a été embauché à la suite du licenciement de Madame X... ; que la Direccte n'a noté aucune irrégularité dans la mise en oeuvre de l'obligation de reclassement ; que l'ensemble des éléments comptables justifie de la réalité de l'ampleur des difficultés économiques ; que ni les délégués du personnel ni la Direccte n'ont émis de réserves sur la légitimité de la mesure. Alors que Madame X... soulève expressément le moyen de contestation selon lequel le motif réel du licenciement ne serait pas économique, la cour constate que la SCP Hermant-M...-Luciani s'abstient de répondre utilement sur ce point. Il résulte des propres écritures de l'étude notariale que Madame X... a été engagée en urgence alors que la chef comptable de l'étude de Madame K... était en mise à pied conservatoire et que sa subordonnée venait d'être licenciée pour faute grave, après que de graves négligences aient été constatées dans le suivi de la comptabilité de l'étude, ayant conduit in fine à la mise sous curatelle de l'Office ; que "malgré la réalité des carences relevées dans les attributions qui lui étaient confiées et de son niveau de responsabilité, l'inspection a refusé d'autoriser le licenciement de Madame K..." laquelle a donc réintégré l'étude début janvier 2013. La SCP Hermant-M...-Luciani ne conteste pas les affirmations de Madame X... selon lesquelles l'étude a essuyé deux refus successifs de la part de l'inspection du travail, d'abord le 21 décembre 2012 et ensuite le 15 mai 2013. Madame X... verse aux débats le compte rendu d'entretien préalable à son licenciement établi par Madame Y..., salariée de l'étude l'ayant assistée, établi dans des termes qui ne sont pas contestés par la SCP Hermant-M...-Luciani : [...] Il résulte de ce compte rendu que l'employeur a expressément fait le lien entre la procédure de licenciement dont Madame X... faisait l'objet et sa volonté d'obtenir une rupture du contrat de Madame Bettina K.... Il résulte en outre tant du registre personnel que d'une attestation de Madame Y..., que concomitamment au licenciement de Madame X..., a été engagée en CDD à compter du 26 août 2014 Mme C... en qualité de comptable puis ensuite M. T.... La cour retient dès lors que le motif réel du licenciement résulte du fait que l'employeur n'est pas parvenu à obtenir un licenciement de Madame K... pour motif personnel ou une rupture conventionnelle. Ne pouvant mettre en oeuvre un licenciement économique concernant seulement Madame K..., qui était très ancienne dans l'étude, l'employeur a opté pour un licenciement collectif intégrant la dernière arrivée, à savoir Madame X.... Le motif économique n'étant pas le motif réel du licenciement, celui-ci est nécessairement privé de cause réelle et sérieuse. Mme X..., qui demande des dommages et intérêts à hauteur de 40.0000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ne verse toutefois aucune pièce pour justifier de sa situation financière et professionnelle à la suite de la rupture du contrat de travail. S'agissant d'une salariée ayant moins de deux ans d'ancienneté, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 1232-5 du code du travail. En considération de son âge comme étant née [...] , de son ancienneté dans l'emploi et de ces éléments, le préjudice résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse sera intégralement indemnité par l'allocation de la somme de 10.000 euros. »

1°) ALORS, D'UNE PART, QUE les juges sont tenus d'examiner les motifs invoqués par l'employeur pour justifier de la rupture du contrat de travail, y compris lorsque celle-ci résulte de l'acceptation d'un contrat de sécurisation professionnelle par la salariée ; qu'en l'espèce, tant par la lettre de proposition de reclassement du 3 juillet 2014 que dans la lettre de convocation à l'entretien préalable du 16 juillet de la même année, la SCP notariale justifiait sa décision de rompre le contrat de travail de Mme U... par l'existence, depuis 2009, de difficultés économiques et financières réelles et sérieuses marquées par une diminution des actes d'un tiers entre 2009 et 2012 et par une chute globale du chiffre d'exploitation de plus de 80% sur trois ans, difficultés qui ont continué à s'aggraver malgré la mise en oeuvre de mesures concrètes de réduction des coûts de la SCP notariale et ce jusqu'en 2014 au moment du licenciement de Mme U... ; qu'en retenant néanmoins que le motif réel du licenciement résultait du fait que l'employeur n'était pas parvenu à obtenir le départ de Madame K... de la SCP notariale ce dont elle a déduit que le motif économique n'étant pas le motif réel du licenciement, ce dernier était nécessairement privé de cause réelle et sérieuse, quand elle était tenue au préalable de vérifier le sérieux et la réalité du motif économique invoqué, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1233-16 et L. 1233-67 ensemble les articles L. 1235-1, L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

2°) ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge ne peut pas conclure à l'absence de motif économique du licenciement sans rechercher si l'employeur ne se trouvait pas effectivement dans une situation économique obérée, caractérisée par des difficultés réelles et sérieuses de nature à justifier le licenciement ; qu'en l'espèce la SCP Hermant-M...-Luciani établissait l'existence de difficultés économiques réelles et sérieuses de nature à justifier le licenciement de Mme U..., et l'absence de réserve de la DIRECCTE et des délégués du personnel, la cour d'appel devait rechercher si l'employeur ne rencontrait pas effectivement des difficultés économiques réelles et sérieuses de nature à justifier une rupture du contrat pour motif économique, résultant d'une diminution du résultat d'exploitation de 75% entre 2010 et 2013, d'une détérioration du chiffre d'affaires de 50% entre 2011 et 2013, d'une forte diminution des actes enregistrés de 20% entre 2011 et 2013, d'un premier trimestre pour l'année 2014 ne révélant aucune amélioration mais au contraire une nouvelle baisse de 20% des actes enregistrés par rapport à 2013, et une chute du bénéfice de 25 %, le commissaire aux comptes concluant lui-même, en décembre 2014, à une situation de déséquilibre bilanciel de nature à compromettre la continuité d'exploitation et la pérennité des emplois, de sorte qu'en se bornant d'emblée à énoncer que le motif réel du licenciement résulte du fait que l'employeur n'est pas parvenu à obtenir le départ de la SCP notariale de Mme K..., sans examiner le motif économique allégué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1, L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

3°) ALORS, TROISIEMEMENT, QUE l'embauche d'un salarié concomitamment à un licenciement économique ne suffit pas à écarter le caractère réel et sérieux du motif économique invoqué par l'employeur dès lors que le poste offert avait préalablement été proposé au salarié licencié au titre de l'obligation de reclassement et qu'il est différent de celui anciennement occupé par le salarié licencié ; qu'en écartant le motif économique du licenciement au prétexte que Mme C... avait été engagée en CDD en qualité de comptable à compter du 26 août 2014, concomitamment au licenciement de Mme U... tout en constatant par ailleurs que ledit poste lui avait été préalablement proposé au titre de l'obligation de reclassement et qu'elle l'avait refusé, ce dont il se déduisait d'une part que Mme C... n'avait pas été embauchée au même poste que Mme U... en qualité de comptable taxatrice, lequel avait bien été supprimé, et d'autre part, qu'il ne pouvait être reproché à la SCP d'avoir recruté une aide-comptable suite au refus de reclassement de Mme U..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 1235-1, L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

4°) ALORS ENCORE QUE le juge doit apprécier l'existence du motif économique à la date de la rupture du contrat de travail et il ne peut l'écarter au seul prétexte que l'employeur aurait, postérieurement au licenciement, procédé à une embauche sans préciser ni rechercher la date de l'embauche et sans vérifier si le poste offert n'était pas différent de celui occupé par le salarié licencié ; qu'en écartant le motif économique du licenciement de Mme U... au motif que concomitamment à son licenciement M. T... aurait été engagé sans toutefois préciser ni la date ni le poste auxquels il avait été embauché tout en indiquant que « sont seulement intervenues les embauches suivantes dans l'année du départ de Madame X... : Madame Geneviève C... [
] Madame Marion E... », la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1, L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

5°) ALORS EGALEMENT QUE le juge ne peut dénaturer les pièces qui sont soumises à son examen ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait énoncer qu'il ressortait du compte rendu d'entretien préalable au licenciement de Mme U... établi par Mme Y... que « l'employeur a expressément fait le lien entre la procédure de licenciement dont Madame X... faisait l'objet et sa volonté d'obtenir une rupture du contrat de Madame Bettina K... » quand il résultait au contraire des énonciations de ce compte rendu que Mme U... avait été embauchée dans l'optique d'un départ de Mme K..., ce dont il résultait que si un lien existait entre la situation des deux salariées, il existait seulement entre la rupture conventionnelle envisagée de la seconde et l'embauche, - et non le licenciement-, de la première ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé le compte rendu d'entretien préalable qui lui était soumis en violation de l'article 4 du code de procédure civile et du principe susvisé.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement de première instance et statuant à nouveau, d'AVOIR condamné la SCP Hermant-M...-Luciani au paiement de la somme de 31.416 € d'indemnité pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE « le témoignage de Madame V..., qui n'est pas combattu par les pièces produites par l'employeur, démontre que Madame X... a commencé à travailler en novembre et décembre 2012, l'absence de déclaration de Madame X... en qualité de salarié dès le mois de novembre 2012 et de paiement de toute rémunération pour cette période caractérisent de la part de l'employeur l'intention délibérée de se soustraire à ses obligations » ;

ALORS QUE le juge doit respecter l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions et les moyens des parties et il revient aux parties d'alléguer et de prouver les faits nécessaires au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, qu'en énonçant d'office, pour condamner la SCP Hermant-M...-Luciani au paiement d'une indemnité au titre du travail dissimulé, que « Mme X... a commencé à travailler en novembre et décembre 2012, l'absence de déclaration de Madame X... en qualité de salarié dès le mois de novembre 2012 et de paiement de toute rémunération pour cette période caractérisent de la part de l'employeur l'intention délibérée de se soustraire à ses obligations » quand la salariée s'était bornée à soutenir qu'elle avait effectué des heures supplémentaires qui n'avaient pas été rémunérées par l'employeur alors que celui-ci ne pouvait ignorer la surcharge de travail à laquelle elle était confrontée, la cour d'appel a privé l'employeur du droit à la contradiction, en violation des articles 4 et 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-17.612
Date de la décision : 11/09/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre sociale, arrêt n°18-17.612 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 11 sep. 2019, pourvoi n°18-17.612, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.17.612
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