CIV.3
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 juin 2019
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10208 F
Pourvoi n° B 18-19.692
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. S... P...,
2°/ Mme Z... J...,
domiciliés tous [...],
contre l'arrêt rendu le 5 avril 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (4e chambre civile A), dans le litige les opposant :
1°/ à M. V... D..., domicilié [...] , en qualité de tuteur de M. X... Q...,
2°/ à M. W... I...,
3°/ à Mme C... N...,
domiciliés tous deux chemin [...],
4°/ à M. Paul May, domicilié [...] ,
5°/ à la société Olvier May, Madhjouba Boukhors et Laurence Rochette, société civile professionnelle, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 21 mai 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Andrich, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Alain Bénabent, avocat des consorts P... J..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. May et de la SCP Olvier May, Madhjouba Boukhors et Laurence Rochette, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de M. D..., de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat des consorts I... N... ;
Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts P... J... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts P... J... ; les condamne à payer à M. May et à la SCP May, Boukhors et Rochette la somme globale de 2 000 euros, et à M. D... la somme de 2 000 euros et aux consorts I... N... la somme globale de 2 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Alain Bénabent , avocat aux Conseils, pour les consorts P... J....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'inscription de faux de M. P... et Mme J... à l'encontre de l'acte de vente établi par Me May, notaire, le 7 février 2014, et de les avoir condamnés in solidum à payer aux défendeurs diverses sommes pour procédure abusive, ainsi qu'à payer une amende civile ;
AUX MOTIFS QUE « pour prétendre que l'acte reçu le 7 février 2014 par Me May, notaire, contient une fausse affirmation, M. P... et Mme J... font valoir que l'ordonnance autorisant la vente du logement du majeur protégé, M. Q..., annexée à l'acte, ne comporte pas la signature du juge des tutelles, ce dont il résulte que cette ordonnance est inexistante et qu'en mentionnant que la vente avait été autorisée par le juge des tutelles, le notaire, tenu de procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer l'utilité et l'efficacité juridique de l'acte, a donc commis un faux ; que pour autant, le notaire ne mentionne pas que la copie de l'ordonnance rendue le 12 novembre (et non le 13 novembre) 2013 par le juge des tutelles autorisant la vente, qu'il annexe à son acte après en avoir fait état en page 2, au paragraphe « présence-représentation », est revêtue de la signature du magistrat et la copie de l'ordonnance ainsi annexée à l'acte constitue une expédition certifiée conforme par le greffier du tribunal d'instance de Tarascon, signée par ce dernier, qui établir en elle-même l'existence de l'autorisation donnée par le juge des tutelles à la vente du bien de M. Q..., majeur protégé, sachant que faute d'inscription de faux contre cette certification du greffier, l'ordonnance est réputée avoir été signée par le juge des tutelles ; qu'il est d'ailleurs produit aux débats une copie certifiée conforme de la minute revêtue de la signature du juge des tutelles, et il importe peu que par courrier du 24 septembre 2013 adressé à M. D..., le magistrat ait demandé une requête établie par le notaire, alors que la requête visée dans l'ordonnance, datée du 24 septembre 2013, émane du tuteur lui-même ; que le fait que sur le certificat de non-recours délivré le 8 janvier 2014 par le greffier, également annexé à l'acte notarié, une rature affecte le mention selon laquelle la décision (celle du juge des tutelles du 12 novembre 2013) a été notifiée à M. Q... et à M. D... par lettre recommandées avec avis de réception, le terme « recommandées » ayant été rayé, n'est pas de nature à caractériser une altération de la vérité imputable au rédacteur de l'acte, dès lors qu'il n'appartenait pas au notaire auquel avait été remis un certificat de non-recours de l'ordonnance autorisant la vente de vérifier que les notifications étaient régulières et avaient valablement fait courir les délais de recours ; que l'inscription de faux de M. P... et Mme J... à l'encontre de l'acte établi par Me May le 7 février 2014 doit en conséquence être rejetée ; que certes, l'incident de faux contre un acte authentique constitue, non une exception de procédure, mais une défense au fond, que les intéressés étaient recevables à soulever pour la première fois devant la cour ; que cependant, force est de constater que cet acte, en dépit des énonciations qu'il comporte, page 5, relativement à l'existence d'empiètements réciproques, ne pouvait avoir d'incidence sur le règlement du litige opposant M. P... et Mme J..., qui n'étaient pas partie à l'acte, à M. I... et Mme N... ; que l'incident de faux ainsi soulevé devant la cour revêt donc un caractère abusif, compte tenu des motifs manifestement inopérants invoqués à son appui et de l'absence manifeste d'intérêt qu'il représente pour les demandeurs relativement à l'administration de la preuve ; qu'il y a lieu en conséquence de condamner ces derniers in solidum au paiement de dommages et intérêts au profit de M. I... et Mme N... à hauteur de 1000 €, de M. D... à hauteur également de 1000 € et de Me May et de la SCP May-Boukhors-Rochette, ensemble, à hauteur de 2000 € ; qu'il convient en outre, par application de l'article 305 du code de procédure civile, de condamner M. P... et Mme J... au paiement d'une amende civile d'un montant de 5000 € » ;
ALORS QUE le notaire est tenu, en tant que rédacteur d'un acte, de procéder préalablement à la vérification des faits et conditions nécessaires pour en assurer l'utilité et l'efficacité ; qu'il doit, quand une partie est représentée par un mandataire judiciaire, vérifier l'habilitation de ce dernier à intervenir à l'acte ; que la mention d'un acte authentique selon laquelle le mandataire judiciaire est habilité à représenter une partie fait foi jusqu'à inscription de faux ; qu'en l'espèce, l'acte de vente du 7 février 2014 mentionnait expressément que « M. X... Q... est ici représenté par M. V... D... domicilié à [...], mandataire judiciaire à la protection des majeurs, nommé à cette fonction aux termes d'un jugement sus énoncé ouvrant le régime de protection. Ledit représentant spécialement autorisé à l'effet des présentes par décision du juge des tutelles du tribunal d'instance de Tarascon en date du 13 novembre 2013 (sic) prise en application des articles 426, le bien vendu constituant le logement du majeur protégé, et 505 du code civil et dont une copie délivrée par le greffier du tribunal d'instance de Tarascon est demeurée ci-annexée après mention (annexe 2) ; qu'en rejetant l'inscription de faux de M. P... et Mme J..., quand cette copie n'étant pas signée par le juge des tutelles, le notaire avait nécessairement émis une fausse affirmation en attestant que M. D... était habilité à représenter M. Q..., la Cour d'appel a violé les articles 306 et suivants du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné aux consorts P... J... de remettre en état les lieux, en supprimant tout accès permettant de pénétrer dans le rectangle 12-13-14-15 appartenant aux consorts I... N..., ainsi que de libérer ce rectangle, sous astreinte ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'acte de partage du 1er février 1960 évoqué plus haut définit les limites du lot n° 3 attribué à Mme Q... et précise en particulier que « le cabanon et la bande de terrain de 3 m au nord dont il est question ci-après, doit constituer cependant une avancée du lot de Mme Q... dans le lot de M. M... B... », l'acte ajoutant que « Mme Q... ne pourra jamais exiger le passage sur une partie quelconque des biens mis dans le lot de son père M. M... B... (
) » et que « le reste du mas et ses dépendances sont compris dans le lot de M. M... B..., à l'exception du petit cabanon, situé à l'est de la ligne CA qui sera aussi la propriété de Mme Q... et est compris dans son lot, auquel cabanon elle aura tous droits d'accès » ; qu'ainsi que l'indique l'expert, M. R..., en page 9 de son rapport du 21 avril 2016, le bornage réalisé en 2006 par la cabinet de géomètre experts Géo-missions, a été effectué dans le respect de cette disposition de l'acte de partage de 1960, dont il ressort que la limite séparative entre les lots attribués à Mme Q... et M. B... correspond à l'axe du mur mitoyen du mas, entre les points 2 et 16 à l'exception de l'avancée dans le lot de M. B..., englobant le cabanon et une bande de terrain de 3 m au nord de celui-ci, soit le rectangle matérialisé, sur le plan de bornage, par les points 12-13-14-15 ; que M. P... et Mme J... n'établissent pas en quoi ce plan établi contradictoirement entre M. B..., leur auteur, et M. Q..., et qu'ils ont d'ailleurs eux-mêmes signés, serait erroné, ni que le consentement des signataires aurait été usurpé par dol ou violence, alors qu'il respecte la délimitation des lots faite dans l'acte de partage de 1960 ; que le rectangle englobant le cabanon et la bande de terrain de 3 m au nord de celuici entre les points 12-13-14-15, d'ailleurs repris sur le plan cadastral de la commune, ne correspond donc pas à un empiètement sur la parcelle [...] , même si courant 2009, des pourparlers ont eu lieu entre M. P... et Mme J... d'une part, et M. Q... d'autre part, en vue de permettre à ce dernier de conserver le hangar correspondant à une emprise de 16 m² sur la parcelle [...] contre la cession de ce rectangle de 26 m², pourparlers conduisant à un échange de parcelles conformément au plan établi le 30 septembre 2009 par M. F..., géomètre-expert ; qu'il résulte des constatations faites par M. R... lors de ses opérations d'expertise que le cabanon et la partie de cour contiguë au nord de celuici, appartenant à M. I... et Mme N..., leur sont devenues inaccessibles depuis leur propriété à la suite de la construction d'un mur à la fin de l'année 2009 allant de la façade sud du mas à l'angle nord-ouest de ce cabanon, le cabanon et la cour étant utilisés depuis cette date par M. P... et Mme J... ; que c'est donc à bon escient que le premier juge a condamné ces derniers à restituer à M. I... et Mme N... l'espace englobant le cabanon et la bande de terrain de 3 m au nord de celui-ci, matérialisé par les points 12-13-14-15 sur le plan de bornage du 12 mai 2006 » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « s'ils reconnaissent l'empiètement de leur propriété sur celle des consorts P... J..., les consorts I... N... évoquent également l'empiètement de la propriété P... J... sur la propriété Q... qui leur a été vendue ; que les époux P... J... le réfutent ; que toutefois, un empiètement réciproque est mis en évidence dans le procès-verbal de bornage du 12 mai 2006, et confirmé par la comparaison de celui-ci avec le plan cadastral ; qu'il est d'ailleurs mentionné dans l'acte de vente du 7 février 2014 passé entre les époux I... N... et M. Q... que : « une partie du bien présentement vendu est occupée par le propriétaire de la parcelle cadastrée section [...] sans avoir la qualité du locataire, le vendeur déclarant qu'aucun loyer n'est perçu à ce titre. De son côté, M. Q..., vendeur, occupe également une partie du cabanon appartenant actuellement au propriétaire de la parcelle cadastrée section [...] , sans verser aucun loyer à ce titre » ; qu'un géomètre expert a été désigné sur requête de M. I... et de Mme N... par ordonnance de référé du 2 octobre 2014 mais M. P... et Mme J... n'ont manifestement pas collaboré aux opérations d'expertise ; qu'il sera d'ailleurs observé que les parties avaient évoqué un échange pour y remédier ; que c'est du moins ce qu'il ressort notamment du courrier adressé le 25 avril 2008, dans lequel M. P... demande à M. Q... d'échanger la parcelle du cabanon avec celle où le garage est édifié ; qu'il avait ainsi connaissance d'un empiètement réciproque ; que par conséquent, il convient de condamner in solidum les consorts P... J... à remettre en état le lieu, en supprimant tout accès permettant de pénétrer dans le rectangle 12-13-14-
15, de leur faire obligation de libérer le rectangle 12-13-14-15 et d'assurer l'exécution de la présente décision en l'assortissant d'une astreinte (
) » ;
ALORS QUE le procès-verbal de bornage ne constitue pas un acte translatif de propriété ; qu'en conséquence, l'accord des parties sur la délimitation des fonds n'implique pas, à lui-seul, leur accord sur la propriété des parcelles litigieuses ; qu'en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, qu'un empiètement réciproque était mis en évidence dans le procès-verbal de bornage du 12 mai 2006 et confirmé par la comparaison de celui-ci avec le plan cadastral, de sorte que la limite séparative entre les lots attribués à Mme Q... et M. B... correspondait à l'axe du mur mitoyen du mas, entre les points 2 et 16 à l'exception de l'avancée dans le lot de M. B..., englobant le cabanon et une bande de terrain de 3 mètres au nord de celui-ci, soit le rectangle matérialisé, sur le plan de bornage, par les points 12-13-14-15, la Cour d'appel a violé les articles 544 et 646 du code civil.