CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 15 mai 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10295 F
Pourvoi n° U 18-15.660
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. F... I..., domicilié [...] ,
2°/ Mme K... I..., épouse C..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 15 février 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (6e chambre A), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme L... X..., domiciliée [...] , prise en qualité de représentante légale de P... X...,
2°/ au procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 avril 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Azar, conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me Le Prado, avocat de M. et Mme I... ;
Sur le rapport de Mme Azar, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme I... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. et Mme I...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à l'action en recherche de paternité, dit qu'W... I... était le père de l'enfant P..., A..., U..., né le [...] à Manosque de Mademoiselle L... X... sa mère naturelle, et ordonné la transcription du jugement sur l'acte de naissance de l'enfant.
AUX MOTIFS QUE « Il résulte de l'article 310-1 du code civil que la filiation se prouve, si ce n'est par l'acte de naissance de l'enfant, par l'acte de reconnaissance ou l'acte de notoriété constatant la possession d'état, par un jugement. L'article 310-3 précise que dans le cadre d'une action en établissement de filiation, celle-ci se prouve et se conteste par tout moyen.
En l'espèce, la cour d'appel a déjà procédé à l'analyse de diverses pièces produites par Madame L... X... pour considérer la relation entre elle et Monsieur W... I... établie et ordonner une mesure d'expertise génétique.
L'arrêt du 21 Mai 2013 a en effet repris les termes de plusieurs attestations et ceux du constat d'huissier après visionnage de cassettes vidéo et considéré vraisemblable les relations intimes alléguées pendant la période légale de conception.
À ce propos, il convient de rappeler que le code civil édicte une présomption à l'article 311, en ce que l'enfant est réputé conçu dans la période qui s'étend du 300e au 180e jour précédant la naissance, avec la précision que la conception est présumée avoir eu lieu à un moment quelconque de cette période suivant ce qui est commandé par l'intérêt de l'enfant.
En l'espèce, P... étant né le [...] , la période légale de conception s'étendait du 19 septembre 2005 au 17 janvier 2006, de sorte que les attestations relatives à l'indisponibilité de Monsieur W... I... le week-end du 30 octobre 2015 [lire 2005] sont sans incidence, de même que celles à une autre relation entretenue par Madame L... X... durant l'été 2005.
En l'état, il convient d'apprécier les conséquences du procès-verbal de carence de l'expert dans la procédure en établissement de filiation paternelle.
Certes, les enfants de Monsieur W... I... rappellent que le code civil a posé le principe de l'inviolabilité du corps humain, dont l'application en cas de prélèvement salivaire est discutable, ce d'autant que l'expertise biologique est expressément prévue dans le cadre des actions en recherche de paternité.
En tout état de cause, le code de procédure civile a précisé à son article 11 que les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus.
Et si le jugement déféré a considéré que le refus de Madame K... I... épouse C... et de Monsieur F... I... de se soumettre à la mesure d'expertise ne pouvait être interprété comme un aveu, n'émanant pas du père supposé de l'enfant, il est cependant acquis que cette posture est néfaste à la certitude biologique.
Dès lors, l'action en établissement de paternité ne peut se fonder que sur des attestations, photographies, constats.
Ceux produits par Madame L... X... ont déjà été analysés par la cour en 2013, tant en ce qui concerne leur proximité avant la naissance de P... que l'attitude postérieure de Monsieur W... I.... Et les attestations produites par ses enfants légitimes ne peuvent réellement démentir la réalité de cette relation intime, ne pouvant qu'en conforter son caractère secret, ce qui ne saurait surprendre dans le cadre d'un adultère.
Dans ces conditions, les enfants légitimes de Monsieur W... I... contestant la possible paternité de celui-ci sans cependant permettre à la juridiction d'avoir la certitude biologique de leur thèse, le jugement déféré sera confirmé »
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « le refus des défendeurs d'apporter leur concours à la réalisation d'une mesure d'instruction pour un motif tiré du principe de l'inviolabilité du corps humain, en réalité par opposition à l'action engagée de manière à faire obstacle à un mode de preuve supplémentaire permettant d'établir la filiation, ne peut cependant être retenu comme un aveu dès lors qu'il n'émane pas du prétendu père de l'enfant et qu'il n'est pas soutenu que Madame K... I... épouse C... et Monsieur F... I... étaient dans la confidence des évènements de la vie privée de leur père en dehors du cercle familial et qu'ils avaient notamment connaissance qu'il entretenait une relation intime avec Mademoiselle L... X... ;
Cette relation est néanmoins établie, ainsi que l'a relevé la cour d'appel, par un certain nombre d'attestations (
).
Il est ainsi réuni un certain nombre de faits que ne parviennent pas à infirmer les éléments adverses pour dire qu'W... I... a entretenu une relation intime régulière avec Mademoiselle L... X... pendant la période légale de conception, à l'exclusion de toute autre relation connue que cette dernière aurait pu avoir avec un autre homme, et que cette relation ne s'est pas démentie après l'accouchement de Mademoiselle L... X... à laquelle il a apporté toute l'affection d'un amant et à l'enfant P... celle d'un père ;
Il convient de tirer de ces éléments la confirmation de la paternité d'W... I... et de dire qu'il est le père de l'enfant P... X..., né le [...] à Manosque de Mademoiselle L... X... sa mère nature et d'ordonner la transcription du jugement sur l'acte de naissance de l'enfant ».
ALORS, D'UNE PART, QUE celui qui réclame une filiation doit en apporter la preuve ; qu'en retenant, pour confirmer le jugement ayant reconnu la paternité de M. W... I..., que « les attestations produites par ses enfants légitimes ne peuvent réellement démentir la réalité de cette relation intime » et que dans ces conditions et en l'absence de certitude biologique, la contestation de paternité par M. F... I... et Mme K... I... épouse C... ne pouvait aboutir, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en faisant peser sur les enfants I..., intimés, la charge de la preuve de l'absence de paternité de M. W... I... à l'égard de l'enfant P..., sans avoir d'abord constaté que la preuve de la paternité était rapportée par Mme L... X..., appelante, et a ainsi violé l'article 1353 du code civil, anciennement article 1315.
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la liberté de la preuve est totale en matière de filiation et que l'absence de certitude biologique ne saurait empêcher de retenir d'autres éléments de preuve ; qu'en jugeant, pour confirmer le jugement ayant reconnu la paternité de M. W... I... et ainsi rejeter la contestation de paternité par M. F... I... et Mme K... I..., épouse C..., que le refus de ces derniers de se soumettre à l'expertise biologique empêchait la cour d'appel d'avoir la certitude biologique de la non paternité, la cour d'appel a ajouté une condition non prévue par la loi, violant ainsi l'article 310-3 du code civil.