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15/05/2019 | FRANCE | N°17-31.030

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 15 mai 2019, 17-31.030


SOC.

JT



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 mai 2019




Rejet non spécialement motivé


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10523 F

Pourvoi n° E 17-31.030







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par Mme A... K

..., domiciliée [...],

contre l'arrêt rendu le 13 octobre 2017 par la cour d'appel de Metz (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant au syndicat CFDT construction bois, don...

SOC.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 mai 2019

Rejet non spécialement motivé

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10523 F

Pourvoi n° E 17-31.030

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par Mme A... K..., domiciliée [...],

contre l'arrêt rendu le 13 octobre 2017 par la cour d'appel de Metz (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant au syndicat CFDT construction bois, dont le siège est [...] ,

défendeur à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 3 avril 2019, où étaient présents : M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Pontonnier, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme K..., de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CFDT construction bois ;

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme K... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme K...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mme K... de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice résultant de faits de harcèlement moral.

AUX MOTIFS PROPRES QUE la preuve qui incombe au premier chef à Mme K... est celle de faits, soit les agissements retenus par la définition du harcèlement moral, qui sont généralement des actes positifs mais peuvent aussi être des abstentions blâmables, ayant visé ou conduit à altérer ses conditions de travail ou à porter atteinte à ses droits ou sa dignité ; que ces faits doivent en outre être répétés et imputables à une ou plusieurs personnes en lien avec elle dans le cadre de son travail; qu'en l'espèce, l'appelante se plaint surtout selon ses écrits d'avoir été laissée seule, livrée à elle-même, avec rien à faire de ses journées, ce qui a été préjudiciable à sa santé, alors pourtant qu'elle avait avisé ses employeurs, à savoir les deux administrateurs provisoires, M. J... et M. E..., de cette situation, reprochant à l'un d'avoir gardé le silence, à l'autre de ne lui avoir quasiment pas laissé de responsabilités et donné de travaux à exécuter, après avoir établi une fiche de poste précisant ses fonctions - tous éléments dont elle justifie, au titre de la preuve préalable qui lui incombe, par quelques courriers et mails échangés avec ces derniers et un relevé des tâches accomplies entre le 2 juillet 2014 et le 29 avril 2015 qu'elle s'est établie à elle-même ; que pour apprécier si ces éléments sont suffisamment probants pour laisser présumer le harcèlement moral allégué, il est indispensable de tenir compte de la situation initiale de Mme K... et du contexte particulier dans lequel s'est trouvée l'association au moment où la salariée a commencé à se plaindre.

ET QU'il s'avère en l'occurrence que Mme K... avait deux fonctions au sein du syndicat, celle de secrétaire, pour laquelle elle était salariée selon contrat de travail du 1er janvier 1999, modifié par deux avenants du 1er janvier 2009 et du 2 janvier 2002 ayant chacun augmenté son temps de travail, et celle de trésorière, qui était une tâche pour laquelle elle n'était pas rémunérée puisqu'elle découlait de son élection en tant que militante au bureau du syndicat, au sein duquel elle s'était vue confier cette fonction en 2009 ; qu'il convient de relever que le contrat de travail de l'appelante et ses avenants ne précisaient pas l'emploi pour lequel Mme K... était embauchée, seuls ses bulletins de salaire faisant état d'un emploi de secrétaire, classé en dernier lieu au niveau F, sans précision de la convention collective applicable, et qu'il n'a jamais été établi de fiche de fonctions permettant de connaître quelles étaient les tâches précises incombant à l'intéressée dans le cadre de cet emploi salarié, nécessairement distinctes de celles de son mandat de trésorière qu'elle devait exercer hors son temps de travail ; que ces constatations rendent à elles seules difficiles une éventuelle comparaison entre la situation de la salariée avant et après l'événement déclencheur des faits avancés par elle comme laissant présumer le harcèlement moral ; qu'en l'occurrence, selon les documents produits par la partie intimée, la Commission de Gestion Fédérale Organisation établie au sein du Conseil Fédéral de la CFDT Construction et Bois avait diligenté une enquête suite à la plainte d'un adhérent du syndicat mosellan, qui n'avait pas été élu à son bureau auquel il était candidat et dont il avait ensuite été exclu, lequel avait notamment rapporté à la Fédération que la trésorière (soit a priori Mme K...) avait présenté un budget avec un déficit important ; qu'en conclusion de cette enquête (annexe 4 de l'intimé), à laquelle il est indiqué que le syndicat mosellan avait difficilement collaboré, refusant notamment de transmettre des documents comptables demandés par la commission, cette commission avait pointé de nombreuses irrégularités, notamment une exclusion non justifiée de l'adhérent en question, des pratiques de remboursement de frais hors la légalité, une absence de transparence financière et un non-respect des règles et statuts confédéraux ; que le Conseil Fédéral avait alors décidé par une délibération du 2 juillet 2014 en raison des « manquements graves aux règles statutaires de la CFDT et au principe de démocratie qui régissent ses fonctionnements » de placer le syndicat Construction et Bois de Moselle sous administration provisoire, la délibération précisant que conformément aux statuts fédéraux cette administration provisoire mettait fin au mandat des membres de l'organisme directeur du syndicat de Metz et que pendant la durée de cette mesure les administrateurs exerceront les prérogatives du Conseil et du Bureau du syndicat, notamment en matière de désignations, mandatements, démandatements et représentation, assureront la gestion financière et administrative du syndicat et rétabliront les liens entre le syndicat et l'ensemble de ses sections syndicales, ainsi que le lien entre le syndicat et les structures CFDT ; que Mme K... a été avisée de cette décision par courrier du même jour, qui précisait le nom des deux administrateurs provisoires , M. J... du syndicat CFDT Construction et Bois du Bassin de la Garonne et membre de la Commission de Gestion et M. H..., Secrétaire Général de l'Union Départementale CFDT de Metz, et leur mission, à savoir organiser une assemblée générale extraordinaire dans un délai d'un an et exercer les fonctions qui leur étaient dévolues par la délibération jointe, dont le courrier rappelait l'essentiel du contenu ; que Mme K... se trouvait ainsi privée de son mandat électif et de sa fonction de trésorière et c'est à l'évidence la mise en place de l'administration provisoire avec ses conséquences qui a été à l'origine du premier fait dont elle a eu à se plaindre, en l'espèce, elle a dès le 3 juillet 2014 adressé un mail au Secrétaire Général de la CFDT, M. U..., pour se plaindre de la suppression de ses accès internes CFDT (compte utilisateur interne CFDT et accès au logiciel GASEL qui gère les adhérents) ; qu'au vu des pièces produites par l'appelante, M. U... a retransmis ce mail à M. J... et ce dernier a alors engagé dans la semaine une discussion avec Mme K... sur ce qui relevait ou non de ses fonctions en tant que secrétaire dans le cadre de l'administration provisoire, M. J... répondant aux interrogations de la salariée, dont il y a lieu de relever que c'est elle qui a pris l'initiative de demander un « courrier officiel » lui donnant toutes les instructions après avoir pris note, suite à un entretien téléphonique avec l'intéressé, entre autres que son contrat de travail « resterait en l'état » et qu'il avait demandé que son accès à GASEL soit rétabli (son mail du 8 juillet 2014 à 11h59) ; que même si Mme K... se plaint dans ce mail d'être dans l'attente de directives « pour ce qui est de son statut de salariée », car elle est tous les jours à son poste de travail de 7h45 à 13 heures, elle ne saurait pour autant estimer que cette attente pouvait être considérée comme un fait de harcèlement, alors qu'il ressort des mêmes documents que M. J... a fait diligence pour clarifier sa situation et assurer la pérennité de son contrat de travail ; qu'en effet, dès le même jour à 20h22 il lui a envoyé par mail le courrier officiel qu'il venait d'établir à son intention pour lui préciser toutes les conséquences de la décision du Conseil Fédéral et de l'administration provisoire, notamment le fait que la gestion du ficher GASEL serait réservée aux administrateurs dans un premier temps « afin de protéger les intérêts des adhérents et du syndicat », mais aussi le fait qu'il veillera au respect de ses obligations d'employeur, pour lesquelles il lui demandait de communiquer certains éléments : copie de son contrat de travail, liste des tâches qu'elle effectuait dans le cadre de ce contrat, nom du comptable établissant les fiches de paie et désignation du compte chèques et des moyens de paiement associés pour pouvoir assurer sa rémunération ; que Mme K... se plaint dans ses écrits que M. J... n'ait pas été en mesure de lui donner immédiatement des directives sur son travail, mais elle admet aussi que ce dernier, dont il faut rappeler qu'il dirigeait une section syndicale dans la Garonne, donc loin de la Moselle, ne se trouvait pas sur place, donc ne connaissait pas le fonctionnement du syndicat mosellan, et il ne saurait alors lui être reproché d'avoir voulu connaître le contenu de son contrat de travail et de ses tâches habituelles avant de lui répondre ; que Mme K... se plaint aussi que, comme l'annonçait ce courrier, il lui ait été demandé de remettre à M. H... l'intégralité des dossiers comptables, les contrats passés par le syndicat et les moyens de paiement, qu'elle désigne comme ses « instruments de travail », et de transférer les courriers relevant de décisions politiques, les bulletins d'adhésion et les radiations à une adresse au nom de l'administration provisoire à Paris ; que ces demandes n'étaient qu'une conséquence de la mise en place de cette administration, qui devait assurer la gestion financière et administrative du syndicat et donc être en possession des moyens nécessaires, et aussi, s'agissant des comptes et des moyens de paiement, de la perte de sa qualité de trésorière, sans que cela ne puisse être considéré comme une atteinte à sa fonction salariée ; qu'il convient à cet égard de relever que, suite à la réponse de Mme K... (son mail du 9 juillet 2014), M. J... lui a fait parvenir par courrier du 12 août 2014, qui indique qu'il a été retardé par ses congés (Mme K... avait adressé le 23 juillet 2014 un autre mail à J..., avec copie à M. H..., pour se plaindre de ne pas avoir de directives et d'être livrée à elle-même, mais d'où il ressort qu'elle savait aussi que les administrateurs provisoires avaient informé les adhérents du syndicat qu'ils seraient en congés du 18 juillet au 17 août), une fiche de poste correspondant à sa classification au niveau F, l'assurant à nouveau de sa volonté de conserver et pérenniser son emploi et lui demandant de lui préciser tous les obstacles rencontrés pour l'exécution de son contrat de travail ; qu'il est constaté que cette fiche de poste reprenait pour l'essentiel et même de façon plus détaillée, les tâches énumérées par Mme K... dans son mail du 9 juillet 2014 : accueil des visiteurs/adhérents, gestion des appels téléphoniques et du courrier, gestion des fournitures de bureau, diffusion des informations salariales, édition et envoi des attestations fiscales, et en ajoutait même d'autres, telles la gestion administrative des adhérents, les convocations aux réunions, assemblées et congrès, et la gestion des entrées-sorties de la comptabilité ; que dans un courrier du 1er septembre 2014 adressé à MM. H... et J..., Mme K... a commenté cette fiche de poste, faisant notamment observer que la gestion de la comptabilité était du ressort du trésorier ou d'un comptable et que l'ensemble des tâches proposées étaient pour la plupart celles effectuées par l'ancien bureau exécutif du syndicat composé de 5 membres à qui les mandats avaient été retirés, mais qu'elle manifestait néanmoins son accord pour la plupart des fonctions dont elle précisait comment elle s'en chargerait.

ET QUE Mme K... prétend qu'ensuite il ne se serait plus rien passé, à savoir qu'elle n'aurait eu que peu de directives et surtout peu de travail, mais cette affirmation n'est aucunement étayée par elle par un moyen de preuve recevable ou sérieux ; que les mails émanant de M. J..., sensés prouver que celui-ci ne lui aurait pas donné grand chose à faire, ne sont certainement pas les seuls contacts qu'elle a pu avoir avec ce dernier et montrent a contrario qu'elle effectuait pour lui des tâches prévues par sa fiche de poste (achat de fournitures, courrier ou convocation pour un conseil syndical et une assemblée générale) et que leurs relations étaient cordiales, outre que la salariée ne s'est jamais ouverte auprès de l'administrateur de ses conditions de travail ou d'un quelconque obstacle à son exécution ; que nul ne pouvant s'établir de preuve à soi-même, la liste des tâches accomplies entre le 3 juillet 2014 et le 13 avril 2015 que Mme K... a dressé elle-même n'a par ailleurs aucune valeur probante, dès lors qu'elle n'est corroborée par aucun élément extrinsèque, outre qu'une comparaison est impossible avec les tâches similaires effectuées par la salariée durant la période antérieure à l'administration provisoire, ceci pour apprécier la baisse d'activité alléguée ; qu'il faut aussi faire observer que ce n'est sûrement pas du fait des administrateurs provisoires si notamment il y a eu peu d'adhérents accueillis ou peu d'appels téléphoniques sur la période considérée.

ET QU' en définitive aucun des éléments produits aux débats ne permet de caractériser un fait quelconque, encore moins un fait répété, susceptible de laisser présumer le harcèlement moral reproché aux deux administrateurs provisoires, que ce soit M. J..., interlocuteur direct de la salariée, ou M. H..., qui n'est intervenu que ponctuellement, lesquels n'ont jamais manifesté une quelconque velléité, même involontairement, d'attenter aux conditions de travail de Mme K... ou de porter atteinte à ses droits ou sa dignité, hors les strictes conséquences et contingences induites par l'administration provisoire décidée dans le respect des règles statutaires par la Fédération et la perte de son mandat électif ; qu'il convient de relever que c'est de cette administration provisoire avec destitution de son mandat de trésorière de manière « antidémocratique » car elle était élue, qu'elle qualifie de particulièrement injuste, dont Mme K... s'est plainte au premier chef dans un courrier qu'elle a adressé à la Confédération CFDT le 29 juillet 2014, n'évoquant que subsidiairement ses conséquences, retrait des accès internes et remise des documents comptables et moyens de paiement, absence d'instructions et de directives, pour demander l'annulation de cette mise sous administration provisoire et annoncer qu'elle envisageait de demander la résolution judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'ainsi, c'est avant tout le ressentiment de la salariée face à un acte de défiance mal vécu, qui ne remettait pas en cause en l'occurrence son contrat de travail en qualité de secrétaire, mais la privait de ses fonctions de trésorière, mises à mal par les conclusions de l'enquête diligentée par la Commission de Gestion, et la privait aussi, mais accessoirement seulement, d'une partie de ses tâches administratives du fait de la mise sous tutelle par la Fédération du syndicat mosellan dont elle était une militante active, qui a essentiellement induit le syndrome dépressif réactionnel pour lequel elle s'est trouvée en arrêt de travail ; que ce fait est confirmé par le contenu d'un courrier qu'elle a adressé le 8 juillet 2015 en réponse à M. J... qui s'inquiétait de son état de santé ou les divers certificats médicaux établis par le centre de consultation de pathologies professionnelles, qui évoquent tous en premier lieu les conséquences de la mise en place de l'administration provisoire ; que pour autant, aucun harcèlement moral n'est caractérisé, cette décision d'une administration provisoire en attendant la convocation d'une assemblée générale et l'élection d'un nouvel organisme directeur, prise conformément aux statuts de la CFDT, ayant eu une justification objective, en l'espèce le rapport de la Commission de Gestion, totalement étrangère à la relation de travail ; que le jugement entrepris sera dès lors confirmé pour avoir débouté Mme K... de sa demande de reconnaissance de l'existence d'un harcèlement moral et en paiement de dommages et intérêts à ce titre.

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la salariée n'a pas suffisamment apporté d'éléments pouvant amener le conseil des prud'hommes de Metz à conclure que le syndicat CFDT Construction Bois Moselle a retiré les missions dévolues à son contrat de travail ; qu'en l'espèce, le syndicat a répondu à la demande de Mme K... de recevoir sa fiche de poste et qu'il est apparu que les tâches qui lui ont été retirées concernaient principalement celles qui incombaient à ses fonctions électives de trésorière du Bureau ; qu'il n'est pas suffisamment motivé par la partie demanderesse que le syndicat l'ait privée volontairement et de manière répétée du contenu de son travail ; qu'en l'espèce, les échanges par mails, courriers et téléphones démontrent une volonté de la part des deux administrateurs de trouver des solutions aux problèmes que rencontre Mme K... ; que le syndicat traversait une période de difficulté financière et qu'il ne peut être imputable à la partie défenderesse, la baisse d'activité ou d'adhérent ; qu'en l'espèce, les raisons qui ont amené le syndicat à demander une mise sous administration provisoire vont justement dans le sens de sauvegarder l'emploi de Mme K... ; qu'en conséquence et au vu des éléments versés au débat, le conseil des prud'hommes de Metz n'est pas en mesure de qualifier la baisse d'activité de Mme K... comme étant intentionnelle de la part des deux administrateurs provisoires et ne reconnaît pas le harcèlement moral.

1°) ALORS QUE le salarié n'est pas tenu d'établir la preuve du harcèlement moral mais seulement de faits permettant de présumer son existence ; qu'en jugeant que « la preuve qui incomb[ait] à Mme K... é[tait] celle de faits, soit les agissements retenus par la définition du harcèlement moral, qui sont généralement des actes positifs mais peuvent aussi être des abstentions blâmables, ayant visé ou conduit à altérer ses conditions de travail ou à porter atteinte à ses droits ou sa dignité », la cour d'appel a fait peser sur la salariée la charge de la preuve du harcèlement, et a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

2°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence d'un harcèlement moral, le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer l'existence du harcèlement, et qu'il incombe alors à l'employeur de prouver que ces agissements n'en sont pas constitutifs mais que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'il n'appartient pas au juge de suppléer la carence de l'employeur dans la preuve des faits qui lui incombent ; que la cour d'appel a retenu que M. J... ne pouvait donner immédiatement des directives à la salariée dans la mesure où il dirigeait une section syndicale dans la Garonne et que n'étant pas sur place, il ne pouvait lui être reproché d'avoir voulu connaître le contenu de son contrat de travail ; qu'en apportant par elle-même une justification aux agissements reprochés à l'employeur, quand il incombait à ce dernier de démontrer que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs, la cour d'appel a méconnu le mécanisme probatoire prévu en matière de harcèlement moral et a violé l'article L. 1154-1 du code du travail pris dans sa rédaction applicable au litige.

3°) ALORS QUE le harcèlement moral se caractérise notamment par une violation de l'obligation de fournir du travail et par la mise à l'écart du salarié, et que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; qu'en retenant qu' « aucun des éléments produits aux débats ne permett[ait] de caractériser un fait quelconque, encore moins un fait répété, susceptible de laisser présumer le harcèlement reproché [
] », sans vérifier si les certificats médicaux versés aux débats faisant état d'une sous charge de travail, d'un défaut d'encadrement, d'une souffrance morale au travail, et d'un syndrome anxio dépressif justifiant une inaptitude médicale au poste de travail pour maladie professionnelle en raison de l'altération de l'état de santé de la salariée (pièces n° 7 et 8), et les neuf emails échangés entre la salariée et l'employeur sur la période courant de septembre 2014 à avril 2015 démontrant que ce dernier lui fournissait très peu de travail (8 tâches en 8 mois) et la mettait à l'écart du fonctionnement du syndicat (pièce n° 5), ne démontraient pas des agissements laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

4°) ALORS QUE les juges du fond, tenus de motiver leur décision, ne peuvent statuer par voie de motif hypothétique ; que pour débouter Mme K..., la cour d'appel a retenu que « les mails émanant de M. J... [
] n'[étaient] certainement pas les seuls contacts qu'elle [avait] pu avoir avec ce dernier » et qu' « il [fallait] aussi faire observer que ce n'[était] sûrement pas du fait des administrateurs provisoires si notamment il y [avait] peu d'adhérents accueillis ou peu d'appels téléphoniques sur la période considérée » ; qu'en statuant par de tels motifs hypothétiques, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

5°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que la cour d'appel a retenu que la salariée ne fournissait aucun élément sérieux démontrant qu'elle aurait reçu peu de directives et de travail après son courrier du 1er septembre 2014 adressé à l'employeur ; que Mme K... versait pourtant aux débats des emails échangés avec ce dernier en date des 15 septembre 2014, 16 septembre 2014, 13 janvier 2015, 4 février 2015, 26 février 2015, 5 mars 2015, 25 mars 2015, et 13 avril 2015 témoignant du faible nombre de travaux confiés et limités pour l'essentiel à des envois de documents élaborés par l'administration provisoire (pièce n° 5) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

6°) ALORS QUE l'adage « nul ne peut se constituer de preuve à soi même » n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques ; que le fait d'isoler un salarié et de lui fournir très peu de travail constitue un fait juridique ; qu'en retenant que « nul ne pouvant s'établir de preuve à soi-même, la liste des tâches accomplies entre les 3 juillet 2014 et le 13 avril 2015 que [la salariée] [avait] dressé[e] elle-même n'[avait] [
] aucune valeur probante », quand ladite liste visait à démontrer le fait juridique constitué par la démarche de l'employeur d'isolement de Mme K... et de mise en place d'une sous charge de travail contrairement à ses obligations, la cour d'appel a violé l'adage susvisé.

7°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que la cour d'appel a retenu que le retrait du mandat de trésorier de la salariée serait à l'origine de son arrêt de travail, fait que confirmaient les divers certificats médicaux établis par le centre de consultation des pathologies professionnelles dans la mesure où ils évoquaient tous en premier lieu les conséquences de la mise en place de l'administration provisoire ; qu'en statuant ainsi, quand le document médical auquel la cour faisait référence (pièce n° 7) mentionne seulement le changement de direction du syndicat pour établir le contexte professionnel dans lequel les problèmes de santé de la salariée sont survenus, indiquant « Histoire de la maladie : le 02/07/2014, la CFDT aurait été mis sous tutelle de la FNCB. Les mandats auraient été retirés et deux administrateurs bénévoles auraient été nominés. Elle travaillerait seule dans le service, depuis cette date. Le lendemain tous ses codes d'accès au site CFDT et au fichier adhérents lui auraient été retirés. Elle aurait tout de suite averti le nouvel administrateur pour lui expliquer qu'elle « n'avait plus les outils nécessaires pour travailler » (Compte rendu médical du Professeur Paris, Médecin du Centre Hospitalier Universitaire, Pôle des Spécialités Médicales, Centre de Consultations de Pathologies Professionnelles, et du Docteur V..., Psychiatre), la cour d'appel a dénaturé le certificat médical susvisé et violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les éléments de la cause.

8°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que dans son courrier du 8 juillet 2015 adressé à l'employeur (pièce n° 6), Mme K... évoquait une « situation devenue insupportable » résultant notamment du « chantage à la démission » qu'elle avait subi et du fait qu'elle avait été laissée « sans activité ni instruction » ; qu'en retenant que le retrait du mandat de trésorier de la salariée serait à l'origine de son arrêt de travail, fait que confirmait le courrier susvisé, la cour d'appel a dénaturé le courrier du 8 juillet 2015 et violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les éléments de la cause.

9°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis, fût-ce par omission ; que la cour d'appel a notamment relevé que Mme K... se plaignait en premier lieu dans son courrier du 29 juillet 2014 adressé à son employeur de la mise sous administration provisoire du syndicat, et n'évoquait que subsidiairement ses conséquences sur son contrat de travail – de sorte que le retrait du mandat de trésorier du syndicat devait être considéré comme la cause de son arrêt de travail ; qu'en statuant ainsi, quand Mme K... produisait un email du 23 juillet 2014, antérieur à celui du 29 juillet, dans lequel elle indiquait être dans l'impossibilité d'effectuer son travail et exprimait son désarroi d'être livrée à elle-même sans directives (pièce n° 3), la cour d'appel a dénaturé par omission l'email du 23 juillet 2014 susvisé et violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les éléments de la cause.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme K... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

AUX MOTIFS PROPRES QUE cette demande ne peut prospérer dès lors que Mme K... la fonde d'une part sur le harcèlement moral dont la cour a estimé qu'il n'était pas établi, d'autre part sur des manquements graves de l'employeur qui correspondent aux mêmes faits que ceux qui étaient énoncés à l'appui de ce harcèlement moral ; que ces faits, dans la mesure où ils n'ont pas porté d'atteinte à la relation de travail, qui se poursuivait aux mêmes conditions, même à supposer que la salariée ait effectivement subi une baisse d'activité - malgré que cette baisse ne soit pas formellement démontrée - ce qui n'était pas du fait volontaire du syndicat employeur lui-même, mais de la décision fédérale de mise sous tutelle, ne caractérisent pas une violation par l'intimé des obligations nées du contrat de travail, encore moins une violation d'une gravité suffisante pour en justifier la résiliation aux torts de l'employeur ; que le jugement entrepris sera donc confirmé pour avoir débouté Mme K... de cette demande et des demandes salariales ou indemnitaires correspondantes.

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le conseil des prud'hommes de Metz ne reconnait pas le manquement grave de l'employeur, ni le harcèlement moral que Mme K... dit avoir subi ; qu'en l'espèce, les fonctions contractuelles qui engagent le syndicat CFDT Construction Bois Moselle à Mme K... semblent avoir été respectées ; qu'en conséquence, le conseil des prud'hommes de Metz ne prononce pas la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme K....

1°) ALORS QUE le harcèlement moral justifie la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ; que par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de l'arrêt ayant débouté Mme K... de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice résultant du harcèlement moral invoqué entraînera par conséquent la cassation du chef de dispositif de l'arrêt attaqué ayant débouté Mme K... de sa demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur.

2°) ALORS QUE la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur peut être prononcée dès lors que ce dernier a commis des manquements d'une gravité suffisante à l'encontre du salarié; que la résiliation judiciaire peut être ordonnée indépendamment de la reconnaissance d'un cas de harcèlement ; que la cour d'appel a considéré que la demande de résiliation judiciaire était fondée sur un harcèlement moral non établi, et sur des manquements de l'employeur correspondant aux mêmes faits que ceux énoncés à l'appui du harcèlement ; qu'en statuant ainsi, quand les faits reprochés à l'employeur - consistant en une mise à l'écart de la salariée, une absence de directives, et une charge de travail quasi inexistante - constituent par principe des manquements suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 1184 ancien du code civil, remplacé par les articles 1127, 1228 et 1229 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 17-31.030
Date de la décision : 15/05/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre sociale, arrêt n°17-31.030 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 15 mai. 2019, pourvoi n°17-31.030, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.31.030
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