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17/04/2019 | FRANCE | N°18-10021

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 avril 2019, 18-10021


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 novembre 2017), que M. X... a été engagé le 17 mars 1998 par la société EURO DISNEY associés et exerçait en dernier lieu les fonctions de maître-chien anti-explosif ; que, le 24 juin 2011, il a été mis à pied à titre disciplinaire pour une durée de trois jours ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour contester cette sanction et pour obtenir la condamnation de son employeur à lui payer des dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

Sur le premier mo

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Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'annuler la mise à pied dis...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 novembre 2017), que M. X... a été engagé le 17 mars 1998 par la société EURO DISNEY associés et exerçait en dernier lieu les fonctions de maître-chien anti-explosif ; que, le 24 juin 2011, il a été mis à pied à titre disciplinaire pour une durée de trois jours ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour contester cette sanction et pour obtenir la condamnation de son employeur à lui payer des dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'annuler la mise à pied disciplinaire notifiée au salarié alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut annuler une sanction disciplinaire sans examiner l'ensemble des griefs invoqués au soutien de cette dernière ; qu'en l'espèce, la lettre de notification de la mise à pied du 24 juin 2011 reprochait au salarié, non seulement de ne pas avoir administré de traitement à son chien afin de prévenir l'apparition de tiques, mais également de ne pas avoir consulté les urgences vétérinaires dès sa prise de service le 12 avril 2011 lorsque l'état de santé de l'animal s'était dégradé ; que la cour d'appel a uniquement retenu que l'employeur était mal fondé à imputer l'apparition de la tique à un manquement du salarié ; qu'en statuant ainsi, sans examiner le grief relatif au retard pris pour présenter la chienne aux urgences vétérinaires lorsque son état de santé s'était dégradé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1331-1, L. 1333-1, L. 1333-2 du code du travail ;

2°/ que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait dans ses conclusions, oralement reprises, que le salarié, en tant que détenteur de la certification professionnelle de maître-chien délivré par la préfecture, était parfaitement formé aux règles relatives à « l'hygiène, l'habitat et l'entretien du chien, la connaissance des principales maladies, de la vaccination et de la psychologie canines » tel que l'impose le décret n° 2005-1122 du 6 septembre 2005, modifié par le décret n° 2009-214 du 23 février 2009, et qu'au regard de cette expertise professionnelle, le salarié connaissait les risques parasitaires et devait mettre en oeuvre les moyens de protection adéquats ; qu'en omettant de répondre à ce moyen des conclusions de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que le juge doit apprécier si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction ; qu'en l'espèce, pour écarter l'existence d'un manquement du salarié en relation avec la mort de sa chienne, la cour d'appel s'est fondée sur des attestations témoignant de l'attention qu'il prodiguait « habituellement » à son animal ; qu'en se fondant ainsi sur des éléments inopérants à établir qu'au moment précis des faits litigieux, le salarié avait respecté les règles d'hygiène et de sécurité permettant d'assurer le bon état de santé du chien qui lui était confié, et avait été diligent dans les soins prodigués à l'animal malade, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'avait pas à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a souverainement estimé que le salarié avait apporté les soins nécessaires à son animal et avait surveillé son état de santé, de sorte que n'étaient pas établis les manquements qui lui étaient imputés ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral alors, selon le moyen :

1°/ que la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen, relatif au bien-fondé de la sanction, emportera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a retenu que le salarié avait subi un harcèlement moral en raison notamment d'une sanction injustifiée, par application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°/ que le juge doit préciser l'origine de ses constatations ; qu'en affirmant péremptoirement que les modifications des horaires du salarié, de ses congés ainsi que de son droit d'utiliser les véhicules de la société laissaient présumer le harcèlement moral, sans à aucun moment indiquer d'où résultait la matérialité de ces faits, allégués par le salarié et contestés par l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en tout état de cause les juges doivent examiner tous les éléments de preuve soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, pour justifier que le retard pris pour fournir un nouveau chien au salarié était étranger à tout harcèlement, l'employeur faisait valoir, d'une part que la formation d'un chien de détection d'explosifs durait près de six mois, d'autre part qu'en application du décret n° 2005-1122 du 6 septembre 2005, le maître-chien devait, en cas de changement de chien, acquérir une nouvelle aptitude professionnelle d'agent cynophile pour lui et le nouveau chien avec lequel il était appelé à travailler ; que l'employeur offrait de le prouver en produisant un courrier de l'association formatrice du chien du 30 mai 2011 annonçant la livraison de l'animal en décembre 2011, et un courrier de la préfecture du 12 juillet 2011 rappelant que l'aptitude professionnelle ne valait que pour un binôme maître/chien, une nouvelle aptitude étant nécessaire en cas de changement d'animal ; qu'en affirmant que la lettre de l'inspecteur du travail du 5 octobre 2011 avait conduit à ce qu'un nouveau chien soit livré fin novembre 2011, sans à aucun moment s'expliquer sur les documents attestant des démarches de l'employeur bien antérieures au courrier de l'inspection du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ni rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve soumis à leur appréciation par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour établir que le choix de la race du nouveau chien fourni au salarié était étranger à tout harcèlement, l'employeur produisait un courrier du 30 mai 2011 de l'association Cynoteam, spécialisée en formation de chien de recherche détection explosifs, annonçant qu'une chienne de race caniche était actuellement en formation, ainsi qu'une fiche de race caniche de la société Centrale Canine exposant, parmi les caractéristiques générales du caniche, que « grâce à son flair, on l'utilise comme chien de détection d'explosif » ; qu'en relevant que le salarié était antérieurement doté d'un berger belge et que le choix d'un caniche plaçait le salarié dans une situation ridicule, sans viser ni analyser les pièces produites par l'employeur qui révélaient l'adaptation objective du choix de l'employeur aux fonctions du salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que le rejet du premier moyen rend sans objet la première branche du second moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence ;

Attendu, ensuite, que le moyen ne tend, sous le couvert de griefs non fondés de défaut de motifs, qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de preuve et de fait dont elle a, exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, déduit tant l'existence de faits précis établis par le salarié permettant de présumer un harcèlement moral que l'absence de justification par l'employeur d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société EURO DISNEY associés aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société EURO DISNEY associés à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept avril deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société EURO DISNEY associés

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé la mise à pied disciplinaire notifiée à M. C... X... le 24 juin 2011 et d'AVOIR condamné la société EURO DISNEY associés à payer une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... conclut à l'annulation de la mise à pied disciplinaire, notifiée le 24 juin 2011. En matière de contestation d'une sanction disciplinaire, conformément aux dispositions de l'article L 1333-1 du code du travail, il appartient au juge d'apprécier si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur doit fournir au juge les éléments qu'il a retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié, le juge forme sa propre conviction. Le juge peut ordonner, si besoin est, toutes les mesures d'instruction utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. En l'espèce, l'employeur reproche à Monsieur X... de ne pas avoir apporté tous les soins nécessaires à sa chienne, de ne pas avoir respecté les règles d'hygiène et de sécurité applicables et de ne pas avoir surveillé l'état de santé de l'animal. Ces carences ayant conduit à la mort de la chienne le [...] . Monsieur X... conteste les faits qui lui sont reprochés. Il produit plusieurs attestations de ses collègues de travail qui témoignent de l'attention qu'il prodiguait habituellement à sa chienne. Il verse également aux débats l'attestation de la vétérinaire, extérieure à la société, qui s'est occupée de la chienne. Celle-ci indique : « il ne saurait lui être reproché, de notre point de vue, d'avoir négligé sa chienne. Il est venu la voir matin et soir et était présent lors de la transfusion sanguine le 15 avril ». Il est acquis aux débats que la chienne est morte d'une maladie provoquée par la piqûre d'une tique. Or, l'employeur reconnaît lui même dans ses écritures que « la présence de tiques est un phénomène courant ». De plus, si l'entretien de la chienne était bien de la responsabilité de Monsieur X..., il ressort des explications fournies qu'elle passait la nuit dans un chenil avec d'autres chiens et l'employeur est, dès lors, d'autant plus mal fondé à imputer l'apparition de la tique à un manquement de Monsieur X.... Enfin, une piqûre de tique est un événement fortuit qui, en lui-même, ne peut sérieusement et nécessairement être mise à la charge de Monsieur X.... Dans ces conditions, au regard des avis portés ci-dessus sur la façon dont l'appelant traitait sa chienne, et en l'absence de tout élément communiqué par l'employeur démontrant l'existence d'un manquement de Monsieur X... en relation avec la mort de la chienne, la cour ne peut qu'annuler la mise à pied disciplinaire contestée et infirmer, sur ce premier point, le jugement entrepris » ;

1) ALORS QUE le juge ne peut annuler une sanction disciplinaire sans examiner l'ensemble des griefs invoqués au soutien de cette dernière ; qu'en l'espèce, la lettre de notification de la mise à pied du 24 juin 2011 reprochait au salarié, non seulement de ne pas avoir administré de traitement à son chien afin de prévenir l'apparition de tiques, mais également de ne pas avoir consulté les urgences vétérinaires dès sa prise de service le 12 avril 2011 lorsque l'état de santé de l'animal s'était dégradé ; que la cour d'appel a uniquement retenu que l'employeur était mal fondé à imputer l'apparition de la tique à un manquement de M. X... ; qu'en statuant ainsi, sans examiner le grief relatif au retard pris pour présenter la chienne aux urgences vétérinaires lorsque son état de santé s'était dégradé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1331-1, L.1333-1, L.1333-2 du code du travail.

2) ALORS QUE le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait dans ses conclusions, oralement reprises (cf. arrêt page 2, dernier §), que le salarié, en tant que détenteur de la certification professionnelle de maître-chien délivré par la préfecture, était parfaitement formé aux règles relatives à « l'hygiène, l'habitat et l'entretien du chien, la connaissance des principales maladies, de la vaccination et de la psychologie canines » tel que l'impose le décret n° 2005-1122 du 6 septembre 2005, modifié par le décret n° 2009-214 du 23 février 2009, et qu'au regard de cette expertise professionnelle, le salarié connaissait les risques parasitaires et devait mettre en oeuvre les moyens de protection adéquats (conclusions pages 8 et 9) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen des conclusions de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

3) ALORS QUE le juge doit apprécier si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction ; qu'en l'espèce, pour écarter l'existence d'un manquement du salarié en relation avec la mort de sa chienne, la cour d'appel s'est fondée sur des attestations témoignant de l'attention qu'il prodiguait « habituellement » à son animal ; qu'en se fondant ainsi sur des éléments inopérants à établir qu'au moment précis des faits litigieux, M. X... avait respecté les règles d'hygiène et de sécurité permettant d'assurer le bon état de santé du chien qui lui était confié, et avait été diligent dans les soins prodigués à l'animal malade, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1331-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la société EURO DISNEY associés à verser à M. C... X... les sommes de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE « Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral; dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Au titre des agissements de son employeur, Monsieur X... invoque tout d'abord, l'accusation portée contre lui, sans fondement -ainsi qu'il vient d'être jugé- d'avoir, par ses manquements, été à l'origine de la mort de sa chienne. Il soutient que cette accusation mensongère l'a particulièrement affecté et a entraîné un arrêt de travail à compter du 2 mai 2011, prolongé jusqu'au 30 octobre 2011 avec reprise à temps partiel pour raison médicale à partir du 6 septembre 2011. L'appelant fait valoir, en outre, que lors de la reprise du travail, le 6 septembre 2011 l'employeur a unilatéralement modifié ses conditions de travail : ses fonctions du fait de l'absence de chien, ses horaires, ses congés ainsi que son droit d'utiliser les véhicules de la société. Il ressort des éléments produits que l'employeur n'a en effet pas fourni de chien à Monsieur X... du 16 avril au 25 novembre 2011 malgré plusieurs relances de ce dernier et des délégués syndicaux. Enfin, le nouveau chien fourni était un chien de race caniche et ce remplacement apparaissait sinon, humiliant, comme l'indique l'appelant, à tout le moins ironique. La sanction infligée et annulée ci-dessus, le long délai pour obtenir le remplacement de sa chienne, les modifications de ses fonctions du fait de l'absence de chien, de ses horaires, de ses congés ainsi que de son droit d'utiliser les véhicules de la société et le choix, pour le moins inattendu, du chien fourni caractérisent, ainsi, des faits qui, pris dans leur ensemble, laissent présumer le harcèlement moral. L'employeur, de son côté, soutient que la sanction disciplinaire était justifiée. Or il a été démontré ci-avant que cette accusation était infondée. Elle était d'ailleurs particulièrement mal venue puisque Monsieur X... n'a pu qu'être affecté par la mort de la chienne qu'il avait en charge depuis plusieurs années. L'employeur répond, ensuite, qu'un nouveau chien n'a pas été mis immédiatement à la disposition de Monsieur X... car un chien spécialisé dans le recherche d'explosifs est rare et nécessite un certain temps de formation. La cour constate cependant que c'est la lettre de l'inspection du travail, en date du 5 octobre 2011, qui a conduit l'employeur à proposer un nouveau chien à Monsieur X... alors même que la société EURO DISNEY arguait de délais longs et imprévisibles, et qu'un nouveau chien a été livré à Monsieur X... moins de deux mois après la réception de la lettre. Quant à la race du nouveau chien fourni à Monsieur X..., l'employeur soutient, certes, que les caniches sont utilisés dans la détection des explosifs. Toutefois, le choix d'un tel chien ne correspond pas au chien que possédait antérieurement l'appelant et qui était un berger belge. Il ne correspond pas non plus au chien que s'est vu remettre un collègue de Monsieur X..., un berger allemand. La cour associe à ces anomalies inexpliquées, le caractère public de la remise faite à Monsieur X... de son nouveau chien, et ne peut que conclure au caractère volontairement humiliant de la procédure suivie par l'employeur pour remplacer le chien. Le choix du caniche ne pouvait ainsi qu'avoir pour effet, sinon pour objet, de placer Monsieur X... en situation de ridicule et portait en conséquence atteinte à sa dignité. Enfin, la société EURO DISNEY ne s'explique pas sur la durée du délai subi par Monsieur X... pour obtenir un avenant à son contrat de travail après qu'il eut formé sa demande de transfert au sein du service maintenance. Il résulte des énonciations qui précèdent que l'employeur échoue à démontrer que la sanction infligée, les délais subis, les modifications au contrat de travail et la race de chien fournie sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le harcèlement moral étant ainsi établi, il n'y a donc pas lieu d'examiner le moyen tiré par l'appelant, de l'inexécution de l'obligation de sécurité. Compte tenu des circonstances du harcèlement subi, de sa durée, et des conséquences dommageables qu'il a eu pour Monsieur X..., telles qu'elles ressortent des pièces et des explications fournies, notamment de ses arrêts de travail et du fait qu'il ait été contraint d'accepter des modifications à son contrat de travail, le préjudice en résultant pour Monsieur X... doit être réparé par l'allocation de la somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts. Le jugement est infirmé sur ce point » ;

1) ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen, relatif au bien-fondé de la sanction, emportera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a retenu que le salarié avait subi un harcèlement moral en raison notamment d'une sanction injustifiée, par application de l'article 624 du code de procédure civile.

2) ALORS QUE le juge doit préciser l'origine de ses constatations ; qu'en affirmant péremptoirement que les modifications des horaires du salarié, de ses congés ainsi que de son droit d'utiliser les véhicules de la société laissaient présumer le harcèlement moral, sans à aucun moment indiquer d'où résultait la matérialité de ces faits, allégués par le salarié et contestés par l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

3) ALORS en tout état de cause QUE les juges doivent examiner tous les éléments de preuve soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, pour justifier que le retard pris pour fournir un nouveau chien au salarié était étranger à tout harcèlement, l'employeur faisait valoir, d'une part que la formation d'un chien de détection d'explosifs durait près de six mois, d'autre part qu'en application du décret n° 2005-1122 du 6 septembre 2005, le maître-chien devait, en cas de changement de chien, acquérir une nouvelle aptitude professionnelle d'agent cynophile pour lui et le nouveau chien avec lequel il était appelé à travailler ; que l'employeur offrait de le prouver en produisant un courrier de l'association formatrice du chien du 30 mai 2011 annonçant la livraison de l'animal en décembre 2011, et un courrier de la préfecture du 12 juillet 2011 rappelant que l'aptitude professionnelle ne valait que pour un binôme maître/chien, une nouvelle aptitude étant nécessaire en cas de changement d'animal ; qu'en affirmant que la lettre de l'inspecteur du travail du 5 octobre 2011 avait conduit à ce qu'un nouveau chien soit livré fin novembre 2011, sans à aucun moment s'expliquer sur les documents attestant des démarches de l'employeur bien antérieures au courrier de l'inspection du travail, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ni rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve soumis à leur appréciation par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour établir que le choix de la race du nouveau chien fourni à M. X... était étranger à tout harcèlement, l'employeur produisait un courrier du 30 mai 2011 de l'association Cynoteam, spécialisée en formation de chien de recherche détection explosifs, annonçant qu'une chienne de race caniche était actuellement en formation, ainsi qu'une fiche de race caniche de la société Centrale Canine exposant, parmi les caractéristiques générales du caniche, que « grâce à son flair, on l'utilise comme chien de détection d'explosif » ; qu'en relevant que le salarié était antérieurement doté d'un berger belge et que le choix d'un caniche plaçait le salarié dans une situation ridicule, sans viser ni analyser les pièces produites par l'employeur qui révélaient l'adaptation objective du choix de l'employeur aux fonctions du salarié, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-10021
Date de la décision : 17/04/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 avr. 2019, pourvoi n°18-10021


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.10021
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