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17/04/2019 | FRANCE | N°17-22541

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 avril 2019, 17-22541


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé par la société Gannat ambulances le 3 avril 2003 en qualité de chauffeur, M. X... a été licencié le 24 février 2010 alors qu'il se trouvait en arrêt de travail à la suite d'un accident du travail ; que le 2 octobre 2012, la société Gannat ambulances a été mise en liquidation judiciaire, avec poursuite d'activité autorisée jusqu'au 31 décembre 2012, M. E... étant désigné liquidate

ur ; que par acte du 2 mai 2013, celui-ci a cédé des actifs corporels et incorporels de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé par la société Gannat ambulances le 3 avril 2003 en qualité de chauffeur, M. X... a été licencié le 24 février 2010 alors qu'il se trouvait en arrêt de travail à la suite d'un accident du travail ; que le 2 octobre 2012, la société Gannat ambulances a été mise en liquidation judiciaire, avec poursuite d'activité autorisée jusqu'au 31 décembre 2012, M. E... étant désigné liquidateur ; que par acte du 2 mai 2013, celui-ci a cédé des actifs corporels et incorporels de la société Gannat ambulances à la société [...] ; que le 3 février 2015, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la nullité de son licenciement et sa réintégration au sein de la société [...] ;

Attendu que pour confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la demande de réintégration irrecevable, constater l'absence de transfert d'une entité économique et débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt retient que la liquidation judiciaire de la société Gannat ambulances est intervenue le 2 octobre 2012 avec une poursuite d'activité de trois mois, laquelle cessera le 22 novembre 2012, que la société [...] , qui a été constituée le 22 mars 2013, a été autorisée à racheter des éléments d'actifs de la société liquidée ; qu'il ajoute que la requête du mandataire liquidateur exposait que : « par jugement en date du 2 octobre 2012 le redressement judiciaire de la SARL Gannat ambulances en date du 31 mai 2011 a été converti en liquidation judiciaire. Que l'activité a totalement cessé. Que le personnel a été licencié avec un préavis non travaillé. Il n'y a donc plus de clientèle attachée au fond. Que le fonds de commerce a donc disparu. Que seule une vente de gré à gré des biens mobiliers, véhicules, agréments et licences en application de l'article L. 642-19 du code de commerce est donc possible... » ; que l'acte de vente du 2 mai 2013 porte exclusivement sur les agréments avec véhicule et les agréments sans véhicule, les licences de taxi et les véhicules ; qu'il retient encore que cet acte mentionnait expressément que « Le tribunal de commerce de Cusset ayant prononcé la fin d'activité du cédant le 13 novembre 2013, le fonds de transport sanitaire et taxi a disparu à cette date. En conséquence, la cession des actifs prévue au présent contrat n'emporte pas cession de fonds de commerce. Aucun contrat de travail n'est donc transmis avec les éléments d'actif cédé. » et en déduit que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail n'avaient pas lieu à s'appliquer et que la demande de réintégration de M. X... ne peut aboutir ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la société [...] avait repris les agréments sans véhicule, les agréments avec véhicule, des licences de taxi et les véhicules de la société Gannat ambulances et sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'exploitation ne s'était pas poursuivie dans les mêmes locaux et si les licences et agréments n'emportaient pas accès à la clientèle des départements de l'Allier et du Puy-de-Dôme pour l'activité de transport au moyen de véhicule sanitaire léger, caractérisant ainsi le transfert de moyens corporels ou incorporels significatifs nécessaires à l'exploitation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription et juge que le licenciement prononcé le 24 février 2010 est nul, l'arrêt rendu le 30 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne la société Gannat ambulances aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Gannat ambulances à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept avril deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré la demande de réintégration irrecevable, en ce qu'il a constaté l'absence de transfert d'entité économique, en ce qu'il a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes et en ce qu'il l'a condamné aux dépens, d'AVOIR débouté le salarié de ses autres demandes et d'AVOIR dit que chacune des parties supporterait la charge de ses propres dépens ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la demande de réintégration
M. X... soutient que l'activité de la société Gannat Ambulances a été reprise par la société Alpha Ambulances dans le cadre d'une cession totale des actifs de la première société. Or la liquidation judiciaire de la société Gannat Ambulances est intervenue le 2 octobre 2012 avec une poursuite d'activité de trois mois, laquelle cessera le 22 novembre 2012, la société Alpha Ambulances a été constituée le 22 mars 2013, celle-ci a été autorisée à racheter des éléments d'actifs de la société liquidée.
La requête du mandataire exposait que : « par jugement en date du 2 octobre 2012 le redressement judiciaire de la SARL Gannat Ambulances en date du 31 mai 2011 a été converti en liquidation judiciaire. Que l'activité a totalement cessé. Que le personnel a été licencié avec un préavis non travaillé. Il n'y a donc plus de clientèle attachée au fond. Que le fonds de commerce a donc disparu. Que seule une vente de gré à gré des biens mobiliers, véhicules, agréments et licences en application de l'article L. 642-19 du code de commerce est donc possible¿ »
L'acte de vente du 2 mai 2013 porte exclusivement sur les éléments suivants :
- les agréments avec véhicules et les agréments sans véhicule
- les licences de taxi
- les véhicules.
Cet acte mentionnait expressément que :
« Le Tribunal de commerce de Cusset ayant prononcé la fin d'activité du Cédant le 13 novembre 2013, le fonds de transport sanitaire et taxi a disparu à cette date.
En conséquence, la cession des actifs prévue au présent contrat n'emporte pas cession de fonds de commerce.
Aucun contrat de travail n'est donc transmis avec les éléments d'actifs cédés. »
Il en résulte que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail n'avaient pas lieu à s'appliquer et la demande de réintégration de M. X... ne peut aboutir » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la demande de nullité de la procédure de licenciement
Que M. X... a été embauché par Gannat Ambulances le 3 avril 2006 jusqu'au 5 mai 2010.
Que M. X... dit avoir été victime d'un grave accident dans la nuit du 4 au 5 décembre 2009.
Que M. A..., bénéficiaire de la cession de l'entreprise Gannat Ambulances de M. B..., conteste les faits.
Qu'en première position la CPAM rejette la qualité d'accident du travail.
Qu'en date du 16 décembre 2011, la commission émet un avis négatif et maintient la position de la CPAM.
Qu'ainsi, en date du licenciement le 24 février 2010, la qualification d'accident de travail n'est pas reconnue la nullité ne peut donc être invoquée. Un licenciement économique pouvait être prononcé. Aucune précision des causes n'étant rapportée des dommages et intérêts ou préavis ne peuvent être attribués et versés.
Que la SARL Gannat Ambulances a été placée en redressement judiciaire le 31 mai 2011.
Que le redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire le 2 octobre 2012.
Que Maître E... a été nommé en tant que mandataire judiciaire en charge de la liquidation judiciaire de Gannat Ambulances, il appartenait à M. X... de faire valoir ses droits auprès du liquidateur, celui-ci étant intervenu pour le licenciement des autres salariés de l'entreprise.
Que Gannat Ambulances en liquidation ne pouvant donc être mise en cause, les demandes sur la nullité du licenciement, l'attribution de dommages et intérêts, préavis sont rejetées. Sur la demande de réintégration de S... X... au sein de l'entité économique ayant acquis le fonds de commerce ou bénéficiant du transfert de l'ensemble organisé.
Que la SARL Gannat Ambulances a été placée en liquidation judiciaire et a cessé toute activité le 13 novembre 2012 sa réintégration au sein de cette société est irrecevable.
Qu'aucun acquéreur ne s'est manifesté pour reprendre le fonds de commerce de la SARL Gannat Ambulances, que l'activité a totalement cessé, que le personnel a été licencié, que le fait de cessation d'activité induit la disparition de la clientèle attachée au fonds de commerce et par la même la disparition de tout fonds de commerce dans la société.
Que Mme le juge-commissaire à la liquidation judiciaire a admis cet état de fait et a prononcé une ordonnance en date du 15 mars 2013 autorisant en conséquence, la cession des seuls éléments d'actif subsistant au sein de la société Gannat Ambulances soit :
- des agréments avec véhicule,
- des agréments sans véhicule,
- des licences de 5 taxis,
- des véhicules,
- du matériel et mobilier d'exploitation.
Que le tribunal de commerce de Cusset ayant prononcé la fin d'activité du cédant le 13 novembre 2013, le fonds du transport sanitaire et taxi a disparu à cette date, aucun contrat de travail n'a été transmis, en conséquence il y a lieu de reconnaître que la cession des actifs n'emporte pas cession du fonds de commerce.
Que la société Alpha Ambulances s'est portée acquéreur des éléments d'actifs dont la vente a été autorisée par Mme le juge-commissaire désigné à la procédure de liquidation de Gannat Ambulances.
Qu'il apparaît qu'aucune entité économique ne subsiste, la demande de paiement au titre des salaires depuis le 2 février 2010 pour la somme de 110 627,37 euros est irrecevable, cette demande sera rejetée » ;

1°) ALORS QUE les juges ne peuvent pas dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, dans l'acte de vente du 2 mai 2013, le rachat des éléments d'actifs de la société Gannat Ambulances par la société Alpha Ambulances portait sur les agréments avec véhicules et les agréments sans véhicules, les licences de taxi, les véhicules et le matériel et mobilier d'exploitation ; qu'en affirmant que l'acte de vente du 2 mai 2013 portait exclusivement sur les agréments avec véhicules, les agréments sans véhicule, les licences de taxi et les véhicules, la cour d'appel a dénaturé l'acte de vente susvisé en méconnaissance du principe faisant interdiction aux juges de dénaturer les documents de la cause ;

2°) ALORS QUE lorsque le juge commissaire autorise la cession d'éléments d'actifs, d'une entreprise, dont la liquidation judiciaire a été prononcée et dont l'activité a cessé, il y a application de l'article L. 1224-1 du code du travail lorsque cette cession s'accompagne du transfert au cessionnaire d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est reprise, peu importe que les salariés aient été licenciés pendant la procédure de liquidation avant la cession et que l'activité ait été temporairement interrompue ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir et offrait de prouver que dès février 2013, M. B..., qui était déjà propriétaire des locaux d'exploitation, ce que reconnaissait la société Alpha Ambulances (conclusions d'appel p.5), était intéressé par « une reprise globale des autorisations de mise en circulation des ambulances et v.s.l. ainsi que des licences de taxis et du matériel correspondant », ce qui était confirmé par la société Alpha Ambulances dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience, que l'acquisition envisagée et réalisée constituait donc une acquisition globale, que l'acte de vente des éléments d'actif comportait des éléments incorporels que sont les licences et agréments, essentiels au fonds de commerce de transport VSL et taxi, ouvrant droit à la clientèle du département de l'Allier et du Puy-de-Dôme pour l'activité de transport au moyen de véhicule sanitaire léger et à 4 places de stationnement de taxi sur la commune de Gannat et une place sur la commune de Saint Gènes du Retz, et que ces autorisation et agréments n'étaient pas caduques, de sorte que la cession globale avait emporté transfert de tous les éléments incorporels et corporels nécessaires à l'activité de prestation de service de taxi et d'ambulances ; qu'il soulignait que l'activité était poursuivie dans les mêmes locaux, avec les mêmes éléments corporels et incorporels et qu'un personnel spécifiquement affecté ayant des qualifications spécifiques à cette activité était indispensable au développement de celle-ci ; que la cour d'appel a expressément constaté que l'acte de vente portait sur les agréments avec véhicules, les agréments sans véhicule, les licences de taxi, et les véhicules ; que pour dire que l'article L. 1224-1 du code du travail n'avait pas à s'appliquer, la cour d'appel s'est bornée à relever que la fin d'activité avait été prononcée le 13 novembre 2013, que l'activité avait cessé à cette date, que le personnel avait été licencié avant la cession, et que le fonds de commerce et par conséquent la clientèle avaient disparu, ce que la requête du mandataire liquidateur et l'acte de cession mentionnaient expressément, de sorte qu'il y avait seulement eu cession d'éléments d'actif ; qu'en écartant par principe l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail en cas de cession d'éléments d'actif, quand il lui appartenait de rechercher concrètement et non en opposant une pétition de principe erronée, si la cession opérée au profit de la société Alpha Ambulance n'avait pas emporté transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité avait été reprise, ce qui aurait rendu recevable la demande de réintégration du salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-22541
Date de la décision : 17/04/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 30 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 avr. 2019, pourvoi n°17-22541


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.22541
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