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10/04/2019 | FRANCE | N°18-15.973

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 10 avril 2019, 18-15.973


CIV. 1

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 avril 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme BATUT, président



Décision n° 10239 F

Pourvoi n° J 18-15.973







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ M. U... P...,

2

°/ Mme I... V..., épouse P...,

tous deux domiciliés [...] ,

contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2018 par la cour d'appel de Riom (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la sociét...

CIV. 1

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 avril 2019

Rejet non spécialement motivé

Mme BATUT, président

Décision n° 10239 F

Pourvoi n° J 18-15.973

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ M. U... P...,

2°/ Mme I... V..., épouse P...,

tous deux domiciliés [...] ,

contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2018 par la cour d'appel de Riom (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Enedis, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société ERDF,

2°/ au commissaire du gouvernement, représenté par le directeur général des finances publiques agissant poursuites et diligences du directeur départemental des finances publiques, domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 mars 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Canas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. et Mme P..., de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Enedis ;

Sur le rapport de Mme Canas, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme P... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. et Mme P...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a déclaré le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance du Puy-en-Velay incompétent au profit du tribunal administratif pour apprécier les préjudices invoqués par M. et Mme P... à raison du fonctionnement des lignes à moyenne tension exploitées par la société ENEDIS venant aux droits de la société ERDF ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE s'agissant de la ligne à moyenne tension si les époux P... soutiennent que celle-ci surplombait partiellement leur propriété avant qu'elle soit enfouie en avril 2016et produisent un constat d'huissier et un procès-verbal de bornage non contradictoire, la cour relève que ces pièces sont remises en cause par les documents produits par la société Enedis, et notamment un constat d'huissier du 23 novembre 2013 et des photographies, ainsi que le transport sur les lieux établissent pour leur part que cette ligne passait en limite de leur propriété sans la surplomber ; que lors du transport sur les lieux après enfouissement de la ligne, il a par ailleurs été constaté la présence d'un poteau situé de l'autre côté du muret bordant la propriété des époux P... sur un petit talus longeant la route départementale, dont il n'est pas établi qu'il appartienne à ces derniers ; que le commissaire du gouvernement a par ailleurs justement souligné en première instance qu'en l'absence de procès-verbal de bornage contradictoire délimitant la propriété des requérants et le domaine public, ou de tout élément établissant que le talus sur lequel est situé ce poteau serait la propriété des appelants, il convenait de constater que celui-ci se situait sur le domaine public et que la ligne moyenne tension, auparavant installée, passait en limite de propriété des époux P... mais ne la surplombait pas ; qu'en l'état de ces éléments les appelants ne démontrent pas de manière formelle que cette ligne à moyenne tension surplombait partiellement leur propriété avant qu'elle soit enfouie en avril 2016 ; qu'en l'absence de preuve d'une servitude de survol et d'allégation ou démonstration d'une voie de fait, c'est également par une juste appréciation des éléments qui lui étaient soumis que le premier juge s'est déclaré incompétent au profit du juge administratif ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU' à l'égard de la ligne moyenne et basse tension (société ENEDIS venant aux droits de la société ERDF), lors du transport sur les lieux, il a été constaté la présente d'un poteau situé de l'autre côté du muret bordant la propriété des requérants sur un petit talus longeant la route, dont la ligne moyenne tension a été enfouie en avril 2016 ; qu'il résulte de ce transport et des pièces versées aux débats par les parties, notamment du constat d'huissier du 23 novembre 2013 et des photos produites par la société ERDF, que la ligne moyenne tension passait en limite de propriété des époux P... sans la surplomber ; qu'en effet, comme l'a souligné à juste titre la Commissaire du gouvernement, en l'absence de procès-verbal de bornage délimitant la propriété des requérants et le domaine public et/ou de tout élément établissant que le talus sur lequel est situé le poteau est la propriété des requérant, il convient de constater qu'il se situe sur le domaine public et qu'en conséquence la ligne moyenne tension, auparavant installée, passait en limite de propriété des époux P... mais ne la surplombait pas ; qu'il résulte de ce qui précède, qu'en l'absence de servitude de survol, seul le juge administratif est compétent pour connaître des préjudices liés à l'existence et au fonctionnement des lignes qui sont situées à proximité de leur propriété ; qu'il convient donc de se déclarer incompétent au profit du juge administratif concernant la ligne moyenne tension ; qu'en revanche, la visite des lieux a mis en exergue le fait que deux poteaux basse tension sont situés sur la propriété des requérants et que cette ligne surplombe tant le terrain que la maison et les alimente en électricité ; qu'en conséquence, le juge judiciaire est bien compétent pour connaître des préjudices qui pourraient résulter de cette servitude ;

ALORS QUE la compétence juridictionnelle s'apprécie au regard de l'objet des demandes et de la nature des moyens invoqués à leur soutien, sans qu'il y ait à se prononcer sur leur bien-fondé ; qu'en décidant en l'espèce que les demandes indemnitaires de M. et Mme P... relevaient de la compétence administrative pour cette raison que l'empiétement et le survol invoqués n'étaient pas établis, les juges du fond ont violé l'article 49 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 323-4 et L. 323-7 du code de l'énergie.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action en indemnisation de M. et Mme P... à l'encontre de la société ENEDIS venant aux droits de la société ERDF, visant à cet égard l'action en réparation des préjudices liés à la ligne basse tension ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE s'agissant de la ligne à basse tension le transport sur les lieux a permis de constater que deux poteaux basse tension étaient situés sur la propriété des époux et que la ligne à basse tension surplombait effectivement leur propriété puisqu'elle alimentait en électricité leur maison ; que l'action des époux P... relative à cette ligne, fondée sur une servitude de survol, relève en conséquence du juge de l'expropriation ; qu'il convient toutefois de rappeler que l'instauration d'une telle servitude n'entraîne pas une privation du droit de propriété des époux P... et n'en vide ni sa substance ni son contenu ; qu'ainsi que l'a retenu le premier juge ces derniers ne sauraient en conséquence se prévaloir de la prescription de l'article 2227 du code civil d'autant que leur action ne vise pas au rétablissement d'un droit réel immobilier mais ne présente qu'un caractère purement indemnitaire ; que par ailleurs qu'aux termes de l'article L.323-8 du code de l'énergie les actions en indemnité sont prescrites dans un délai de deux ans à compter du jour de la déclaration de mise en service de l'ouvrage lorsque le paiement de l'indemnité incombe à une collectivité publique ; que la société Enedis en sa qualité de concessionnaire est investie par la puissance publique de la mission de distributeur de l'énergie électrique et assume à ce titre une mission de service public ; qu'en tout état de cause en vertu des articles 2224 et 2226 du code civil il est constant d'une part que les actions personnelles et mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer et d'autre part que les actions en responsabilité nées à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé ; qu'en l'espèce et ainsi que l'a relevé le premier juge, il est acquis aux débats que la ligne basse tension a été posée depuis de très nombreuses années, les époux P... reconnaissant que son installation pourrait se situer entre les années 1963 et 1970 ; qu'ils ont acquis leur propriété en 1972 et s'y sont régulièrement rendus pour de nombreux séjours depuis cette date en pouvant ignorer la présence de cette ligne en surplomb de leur propriété ; qu'ils sont dans l'incapacité de rapporter la preuve d'un dommage physique personnellement et réellement subi du fait de la présence de cette ligne et n'invoquent en réalité à l'appui de leurs demandes au titre du préjudice corporel que les conséquences d'une pollution électromagnétique engendrée sur la santé humaine par la ligne très haute tension et moyenne tension ; qu'en considération de ces éléments c'est également à juste titre que le premier juge a constaté la prescription de leur action acquise au titre de la ligne basse tension ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU' aux termes de l'article L.323-8 du code de l'énergie, les actions en indemnité sont prescrites dans un délai de deux ans à compter du jour de la déclaration de mise en service de l'ouvrage lorsque le paiement de l'indemnité incombe à une collectivité publique ; bien qu'il soit constant que les collectivités locales ont confié à la société ENEDIS, venant aux droits d' ERDF, sous le régime de la concession de service public, la gestion et l'exploitation des réseaux publics de distribution d'électricité sur le territoire français, il n'en demeure pas moins qu'elle n'est pas une collectivité publique et qu'ainsi les dispositions de l'article L.323-8 du code susvisé ne lui sont pas applicables ; qu'aux termes de l'article 2227 du code civil, le droit de propriété est imprescriptible ; que sous cette réserve, les actions immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce, force est de constater que la société ERDF n'a commis aucune dépossession ou atteinte au droit de propriété puisqu'il s'agit de la ligne basse tension qui alimente la propriété des requérants en électricité ; que cet article ne saurait donc s'appliquer aux faits objets de la présente procédure ; qu'aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que selon l'article 2226, alinéa 1, du même code, l'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé ; qu'il est acquis aux débats que la ligne basse tension a été posée depuis de nombreuses années, les requérants reconnaissant que son installation pourrait se situer entre les années 1963 et 1970, qu'ils ont acquis leur propriété en 1972 et qu'ils y sont venus régulièrement depuis cette acquisition. Force est de constater qu'ils connaissaient donc l'existence de la ligne basse tension alimentant leur maison depuis leur achat et que leur action est donc prescrite ; qu'en outre, ils ne justifient pas d'un événement ayant entraîné un dommage corporel ; qu'enfin, les risques qu'ils invoquent relevés par la Commission permanente de la CEE ou par l'Office parlementaire des choix scientifiques et techniques ne concernent que les lignes THT et à moyenne tension et non les lignes basse tension, objet de la présente ;

ALORS QUE, premièrement, les juges sont tenus de ne pas dénaturer les conclusions qui les saisissent ; qu'en affirmant que M. et Mme P... n'invoquaient à l'appui de leurs demandes au titre du préjudice corporel que les conséquences liées au passage des lignes à moyenne et très haute tension, quand les exposants se fondaient également sur le passage de la ligne à basse tension (conclusions, p. 17-18), les juges du fond ont dénaturé les conclusions de M. et Mme P..., en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, la question de la prescription ne dépend pas du bien-fondé de l'action ; qu'en déduisant en l'espèce la prescription de l'action en indemnisation des préjudices résultant du passage des lignes électriques à proximité de la propriété de M. et Mme P... de ce que ceux-ci ne démontraient pas la réalité de leurs préjudices, les juges du fond ont violé l'article 122 du code de procédure civile, ensemble les articles 2224 et 2226 du code civil ;

ALORS QUE, troisièmement, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que s'agissant de l'action en responsabilité, le délai de prescription ne court que du jour de la révélation du dommage à la victime ; qu'en l'espèce, M. et Mme P... faisaient valoir que l'origine de leurs dommages corporels ne leur avait été révélée qu'avec la publication le 27 mai 2011 de recommandations officielles par les autorités publiques ; qu'en se bornant à relever que la ligne basse tension a été installée entre 1963 et 1970, que M. et Mme P... ont acquis leur propriété en 1972 et qu'ils ont eu connaissance de l'existence de cette ligne en surplomb de leur propriété, sans vérifier, comme il leur était demandé, à quelle date les dommages invoqués par M. et Mme P... leur avait été révélés dans leur existence et dans leur origine, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

ET ALORS QUE, quatrièmement, l'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé ; qu'en s'attachant à la seule circonstance que la ligne basse tension a été installée entre 1963 et 1970, que M. et Mme P... ont acquis leur propriété en 1972 et qu'ils ont eu connaissance de l'existence de cette ligne en surplomb de leur propriété, sans avoir égard à la date de consolidation des dommages invoqués par M. et Mme P..., les juges du fond ont également privé leur décision de base légale au regard de l'article 2226 du code civil.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-15.973
Date de la décision : 10/04/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Première chambre civile, arrêt n°18-15.973 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 10 avr. 2019, pourvoi n°18-15.973, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.15.973
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