CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 avril 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10238 F
Pourvoi n° C 18-12.885
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. R... B..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 1er mars 2016 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile d'appel de Mamoudzou), dans le litige l'opposant à M. W... T... J..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 mars 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Canas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. B..., de la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat de M. T... J... ;
Sur le rapport de Mme Canas, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. B... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. B...
M. B... fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR constaté qu'il occupe sans droit ni titre une parcelle située à [...], commune de Sada, cadastrée [...] et en conséquence, dit qu'à défaut d'avoir quitté les lieux avant le 1er janvier 2015 à 12h, il pourra être procédé à son expulsion, ainsi qu'à celle de toutes personnes et de tous biens s'y trouvant de leur chef, au vu de la présente décision avec l'assistance de la force publique si nécessaire et condamné M. B... à payer à M. T... J... W... la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « M. B... conteste vainement occuper sans droit ni titre la parcelle pour laquelle M. T... J... W... s'est fait attribuer une AOT pour 10 ans à compter du 20 mars 2007 ; qu'en effet, il résulte du plan cadastral annexé à l'arrêté délivrant l'AOT que M. T... J... W... s'est vu reconnaître un droit d'occupation sur l'intégralité de la parcelle occupée traditionnellement par la famille T..., et dont M. B... fournit un plan établi à la demande de sa mère, Mme T... O..., en janvier 93 par un géomètre assermenté ; qu'à l'évidence, le plan annexé à l'AOT et le plan produit par T... J... W... sont identiques ; que dès lors et ainsi qu'il le reconnaît implicitement en réponse à la sommation interpellative qui lui était faite le 4 octobre 2012, en occupant une partie de la parcelle qui était exploitée traditionnellement par la famille, il occupe de fait sans droit ni titre la parcelle pour laquelle T... J... W... bénéficie d'une AOT ; qu'en sorte que ce dernier est fondé à demander son expulsion ainsi que l'a ordonné le premier juge ; que T... J... W... ne verse aux débats aucun élément d'appréciation qui permette à la Cour d'allouer une quelconque somme au titre du préjudice de jouissance allégué, il n'y a donc pas lieu de faire droit à cette demande ; que succombant partiellement dans leurs prétentions respectives, les parties sont mal fondées à prétendre au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile » :
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « sur la demande d'expulsion ; qu'aux termes de l'article 1725 du code civil « le bailleur n'est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d'ailleurs aucun droit sur la chose louée ; sauf au preneur à les poursuivre en son nom personnel » ;qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'arrêté préfectoral du 20 mars 2007 et de la sommation interpellative du 4 octobre 2012 que M. T... J... W... a reçu l'autorisation d'occuper une parcelle de terrain domanial situé sur la commune de Sada à l'usage exclusif d'activité agricole traditionnelle et que cette parcelle est occupée, de fait, par M. B... qui prétend, sans l'établir, avoir reçu l'autorisation de l'occuper de sa mère qui en serait propriétaire ; que l'occupation illégitime de cette parcelle, fut-elle du domaine public, par M. B... s'apparente à une voie de fait commise au préjudice de M. T... J... W... qui est, en application des dispositions précitées de l'article 1725, fondé à agir ; que dès lors, il sera fait droit à sa demande d'expulsion de la parcelle dans les conditions ci-après précisées afin de permettre aux occupants sans titre de prendre leurs dispositions dans un délai raisonnable ; qu'en revanche, les circonstances de l'espèce ne justifient pas le prononcé d'une astreinte ; que sur les conclusions indemnitaires, qu'il n'est pas contesté que l'occupation prolongée de la parcelle de M. T... J... W... par M. B... cause au demandeur un trouble de jouissance qui sera justement réparé par l'octroi d'une somme de 1 000 euros, faute pour M. T... J... W... d'alléguer et de justifier d'autres préjudices plus circonstanciés » ;
1°) ALORS QUE les litiges nés de l'occupation sans titre du domaine public relèvent de la compétence du juge administratif ; qu'ainsi, en faisant droit à la demande d'expulsion d'un occupant sans droit ni titre du domaine public, quand ce litige relevait exclusivement de la compétence du juge administratif, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
2°) ALORS QUE subsidiairement, le propriétaire ou le gestionnaire d'un fonds relevant du domaine public ne peut agir en expulsion de l'occupant sans droit ni titre que devant le juge administratif ; qu'en faisant droit à la demande d'expulsion formée par M. T... J... W..., titulaire d'une simple autorisation d'occupation temporaire du domaine public, sans préciser si cette autorisation lui avait conféré la gestion de ce dernier, la cour d'appel, qui n'a pas statué par des motifs de nature à s'assurer de la compétence du juge judiciaire, a violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
3°) ALORS QUE encore plus subsidiairement, s'il était considéré que l'arrêt avait implicitement retenu que M. T... J... W..., titulaire d'une simple autorisation d'occupation temporaire du domaine public, s'était vu confier des pouvoirs de gestion, le propriétaire ou le gestionnaire d'un fonds relevant du domaine public ne peut agir en expulsion de l'occupant sans droit ni titre que devant le juge administratif ; qu'en faisant droit à la demande d'expulsion formée par M. T... J... W..., titulaire d'une simple autorisation d'occupation temporaire du domaine public, en considérant implicitement qu'il s'était vu confier la gestion de ce dernier, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III
4°) ALORS QUE, subsidiairement, seul le propriétaire ou le gestionnaire d'un fonds peut agir en expulsion de l'occupant sans droit ni titre ; qu'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public, qui n'en confère pas la gestion à son titulaire, ne lui permet pas de demander l'expulsion d'un occupant sans droit ni titre ; que relevant que M. T... J... W... bénéficiait d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public sur la parcelle occupée par M. B..., la cour d'appel a fait droit à sa demande tendant à le voir expulser de ce fonds ; qu'en considérant ainsi que le seul fait d'être titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public permettait à son titulaire d'agir en expulsion d'un occupant sans droit ni titre, la cour d'appel a violé les articles L. 2122-1 et L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;
5°) ALORS QUE en tout état de cause, seul le propriétaire ou le gestionnaire d'un fonds peut agir en expulsion de l'occupant sans droit ni titre ; qu'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public qui n'en confère pas la gestion à son titulaire, ne lui permet pas de demander l'expulsion d'un occupant sans droit ni titre ; qu'en faisant droit à la demande d'expulsion formée par M. T... J... W..., titulaire d'une simple autorisation d'occupation temporaire du domaine public, sans relever que cette autorisation lui aurait conféré la gestion de ce dernier, la cour d'appel a violé les articles L. 2122-1 et L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;
6°) ALORS QUE subsidiairement qu'aux termes de l'article 1725 du code civil le preneur dispose du pouvoir d'agir, en son nom propre, aux fins de faire cesser les voies de fait portant atteinte à sa jouissance ; que l'article 1725 du code civil n'a trait qu'au contrat de bail et aux pouvoirs du preneur à l'égard de l'occupant sans droit ni titre ; qu'il n'est pas applicable au titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public ; qu'en faisant toutefois application de cette disposition pour accueillir la demande d'expulsion d'un titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public, et considérer par là même qu'il pouvait ainsi mettre fin à la voie de fait affectant sa jouissance prétendument commise par M. B..., la cour d'appel a violé, par fausse application l'article 1725 du code civil;
7°) ALORS QUE subsidiairement à supposer que l'article 1725 soit applicable au titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public, aux termes de l'article 1725 du code civil le preneur dispose du pouvoir d'agir, en son nom propre, aux fins de faire cesser les voies de fait portant atteinte à sa jouissance ; que cependant seul le propriétaire ou le gestionnaire d'un fonds peut agir en expulsion de l'occupant sans droit ni titre ; qu'il en résulte que le titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public ne saurait donc, sur le fondement de l'article 1725 du code civil, agir en expulsion d'un occupant sans droit ni titre ; qu'ainsi en faisant droit à la demande de M. T... J... W... en expulsion de M. B... au regard de sa seule qualité de titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public, la cour d'appel a violé, par fausse application l'article 1725 du code civil ;
8°)ALORS QUE, tout aussi subsidiairement, le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en faisant droit à la demande d'expulsion formée par M. T... J... W..., titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public , sans répondre au moyen de M. B... par lequel il soutenait que l'autorisation d'occupation temporaire accordée à M. T... J... W... avait été acquise en fraude de ses droits, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
9°) ALORS QUE subsidiairement les juges ne sauraient dénaturer les conclusions des parties ; que dans ses conclusions d'appel, M. B... ne soutenait pas qu'il occupait une partie de la parcelle traditionnellement cultivée par sa famille et faisait valoir, au contraire, qu'il occupait un terrain distinct et indépendant de celui sur lequel portait l'autorisation d'occupation temporaire, qui relevait du domaine privé du département de Mayotte ; qu'en retenant que M. B..., en ce qu'il soutenait occuper une partie de la parcelle traditionnellement cultivée par sa famille, reconnaissait implicitement être occupant sans droit ni titre de la parcelle faisant l'objet d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public au bénéfice de M. T... J... W... dès lors que cette autorisation portait sur toute la parcelle traditionnellement cultivée par sa famille, lors même qu'il le contestait, la cour d'appel a dénaturé les écritures d'appel de M. B... et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
10°) ALORS QUE subsidiairement nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique ou l'utiliser dans les limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous ; qu'en accueillant la demande d'expulsion de M. T... J... W..., titulaire d'une autorisation d'occupation du domaine public, formée à l'encontre de M. B..., sans définir les contours exacts du fonds sur lesquels avait été délivrée l'autorisation d'occupation temporaire d'occupation du domaine public de M. T... J... W... ainsi que ceux du fonds exploités par M. B..., la cour d'appel a violé les articles L. 2122-1 et L. 3111-1du code général de la propriété des personnes publiques.