CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 mars 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10181 F
Pourvoi n° B 18-12.401
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme E... J..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 7 juin 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 2), dans le litige l'opposant à M. G... I..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 février 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Reygner, conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme J..., de la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat de M. I... ;
Sur le rapport de Mme Reygner, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme J... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. I... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme J....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Madame J... de sa demande tendant à ce que le divorce soit prononcé aux torts exclusifs de Monsieur I... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « aux termes de l'article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérables le maintien de la vie commune. Selon l'article 245 du code précité, les fautes de l'époux qui a pris l'initiative du divorce n'empêchent pas d'examiner sa demande. Elles peuvent cependant, enlever aux faits qu'il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause de divorce. Ces fautes peuvent aussi être invoquées par l'autre époux à l'appui d'une demande reconventionnelle en divorce. Si les deux demandes sont accueillies, le divorce est prononcé aux torts partagés. Même en l'absence de demande reconventionnelle, le divorce peut être prononcé aux torts partagés des deux époux si les débats font apparaître des torts à la charge de l'un et de l'autre. Selon l'article 246 du même code, si une demande pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute. S'il rejette celle-ci, le juge statue sur la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal. Mme J..., qui demande que le divorce soit prononcé aux torts exclusifs de son époux, invoque des violences commises sur sa personne le 16 février 2013 par son conjoint et des pressions subies de la part de ce dernier, déclarant que celui-ci s'est introduit illégalement dans le domicile conjugal et a entrepris des travaux rendant inaccessible une partie du bien qu'elle occupe. M. I..., qui sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé le divorce pour altération définitive du lien conjugal, conteste les accusations de violence alléguées par son épouse et soutient, tout en reconnaissant avoir effectué des travaux dans le domicile conjugal, bien qui lui est propre et ce à ses frais, que ses entrées dans le logement conjugal ne peuvent en aucun cas constituer des fautes. En l'espèce, il convient de constater que le tribunal correctionnel de Bobigny, par jugement rendu le 14 janvier 2015, devenu définitif, a relaxé M. I... du chef de violences volontaires, à la suite de la plainte qui avait été déposée par Mme J... pour les faits de violence qu'elle invoquait du 16 février 2013. Au surplus, comme le relève le premier juge, les faits allégués, à les supposer même établis, ne peuvent en aucun cas être à l'origine du caractère intolérable de la vie commune alors qu'il n'est pas contesté que les époux ont cessé toute vie commune depuis plus de 20 ans. Par ailleurs, s'il ressort du constat d'huissier de justice du 13 avril 2012 qu'à la date précitée les travaux engagés par l'époux n'étaient pas achevés et rendaient notamment la salle de bain inutilisable, les parties s'opposant sur le point de savoir si l'époux est entré dans les lieux pour réaliser des travaux avec ou sans l'accord de l'épouse, il n'est pas établi que ces faits, postérieurs à l'ordonnance de non-conciliation du 5 décembre 2011 ayant attribué la jouissance du bien à l'épouse pour une durée limitée à un an, rendent intolérables le maintien de la vie commune au sens de l'article 242 du code civil, compte tenu de la séparation de fait intervenue depuis 1995. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté l'épouse de sa demande de divorce aux torts de l'époux » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU' « aux termes de l'article 247-2 du code civil, si, dans le cadre d'une instance introduite pour altération définitive du lien conjugal, le défendeur demande reconventionnellement le divorce pour faute, le demandeur peut invoquer les fautes de son conjoint pour modifier le fondement de sa demande. En l'espèce, par assignation en date du 12 juillet 2013, Monsieur G... I... a introduit l'instance par une demande de divorce pour altération définitive du lien conjugal. Reconventionnellement, Madame E... J... épouse I... demande que le divorce soit prononcé aux torts exclusifs de son époux. Elle lui reproche d'avoir commis des violences sur sa personne le 16 février 2013, alors qu'il s'est introduit dans le domicile accompagné de deux hommes ; de s'être régulièrement introduit au domicile et d'avoir cherché à le vendre en contravention des décisions de Justice ; d'avoir dégradé la salle de bain et rendu le premier étage inaccessible pour contraindre l'épouse à quitter les lieux. En réponse, Monsieur G... I... soutient que le grief de violences, qu'il conteste, n'est invoqué au soutien de la cause que parce que Madame E... J... épouse I... est déçue des conclusions de l'expert sur les conséquences patrimoniales du divorce, et qu'en tout état de cause, il ne peut être le motif de la rupture de la vie commune, 18 ans après la séparation des époux. Il nie toutes violences commises le 16 février 2013, et soutient que les séquelles constatées sont la conséquence de son accident de trajet en 2012, non contesté. Il reconnaît avoir fait effectuer des travaux dans le logement en mars 2010 et octobre 2011, mais nie avoir rendu les lieux inhabitables. Reconventionnellement, il reproche à son épouse de l'avoir exclu du domicile conjugal après le débouté de la cour d'appel, en s'appropriant le pavillon, bien propre de l'époux, et en projetant de louer des chambres chez l'habitant pour augmenter ses revenus. Selon les dispositions de l'article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune. Il n'est pas contesté en l'espèce que les époux ont l'autorisation de résider séparément depuis le 27 septembre 1995, date de la première ordonnance de non conciliation rendue par le juge aux affaires familiales de Bobigny sur requête de Monsieur G... I..., et que malgré le débouté de la cour d'appel en 2002, les époux n'ont pas repris la vie commune, ni aucune forme de collaboration entre époux. Dès lors, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner si les faits de violences du 16 février 2013. Les faits reprochés à l'époux sont suffisamment rapportés, il ne peut qu'être constaté qu'ils n'ont pu à aucun moment être à l'origine du caractère intolérable de la vie commune, ces faits étant particulièrement récents alors que la rupture est largement consommée depuis bientôt 20 ans. Ce constat n'exonère en rien Monsieur G... I... de son comportement fautif, et il devra en répondre dans le cadre de la plainte déposée par Madame E... J... épouse I... et des suites pénales qui y seront éventuellement apportées, mais il convient de constater que ces faits ne suffisent pas à fonder le divorce des époux. S'agissant des dégradations du pavillon constituant le domicile conjugal alléguées par Madame E... J... épouse I..., elle verse au débat un constat d'huissier en date du 13 avril 2012 qui établit qu'à cette date, les travaux engagés à la seule initiative de Monsieur G... I..., tel qu'il le reconnaît, dans le but de vendre, n'étaient pas achevés de sorte que l'escalier était difficilement praticable et la salle de bain inutilisable. Ces faits, postérieurs à l'ordonnance de non conciliation qui attribue la jouissance du domicile conjugal à Madame E... J... épouse I... ont bien un caractère fautif, et sont révélateurs de la cristallisation du conflit des époux sur le devenir de ce pavillon. Toutefois, compte tenu des circonstances de l'espèce déjà rappelées, ces faits ne sont pas à l'origine, mais bien plutôt la conséquence, de cette longue séparation de fait depuis 1995, non traduite en droit. Dès lors, il n'est pas établi qu'ils rendent intolérables le maintien de la vie commune. En conséquence, il y a lieu de débouter Madame E... J... épouse I... de sa demande reconventionnelle de divorce pour faute. Selon les dispositions des articles 237 et 238 du code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque le lien conjugal est définitivement altéré. L'altération définitive du lien conjugal résulte de la cessation de communauté de vie entre les époux, lorsqu'ils vivent séparés depuis deux ans lors de l'assignation en divorce . Il est suffisamment établi en l'espèce que les époux vivent séparés et ont cessé toute collaboration depuis le 27 septembre 1995, soit depuis deux ans au moins à la date de l'assignation. En conséquence, il convient de prononcer le divorce des époux pour altération définitive du lien conjugal » ;
ALORS, de première part QUE le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; qu'après avoir constaté que Monsieur I... n'avait pas achevé les travaux de la salle de bains, rendant cette pièce inutilisable, la Cour d'appel ne pouvait écarter le manquement au devoir de solidarité entre époux, sauf à méconnaître la portée de ses propres constatations en violation de l'article 212 du Code civil ;
ALORS, de seconde part, QU'en écartant toute faute imputable à Monsieur I... sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce dernier n'avait pas empêché Madame J... de jouir paisiblement du bien immobilier en supprimant l'escalier permettant d'accéder au premier étage du logement, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 212 du Code civil ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir fixé la prestation compensatoire due à Madame J... à la somme de 10.000 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le divorce met fin au devoir de secours entre époux mais l'un des conjoints peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation, qui a un caractère forfaitaire, est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. Dans la détermination des besoins et des ressources, le juge a notamment égard à : la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles et les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faut encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles. Cette prestation prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge qui décide des modalités selon lesquelles elle s'exécutera par versement d'une somme en argent, attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit. L'appel interjeté par Mme J... étant total, le prononcé du divorce n'a pas acquis force de chose jugée, de sorte qu'il convient de se placer à la date du présent arrêt pour apprécier la situation des parties. M. I... et Mme J..., qui sont nés respectivement le [...] et le [...] , se sont mariés le [...] , sous le régime légal de la communauté de biens réduite aux acquêts, à défaut de contrat de mariage préalable à leur union, le mariage ayant duré 44 ans et la vie commune 21 ans et demi. M. I..., qui est un ancien exploitant agricole à la retraite, a perçu en 2015, d'après l'avis d'impôt correspondant, une pension de retraite de 1041 euros par mois, à laquelle il faut ajouter le forfait fiscal issu de son activité agricole de 140 euros par mois, il n'est pas démontré que celui-ci bénéficierait de revenus agricoles supplémentaires comme le déclare l'appelante. Mme J..., qui indique dans sa déclaration sur l'honneur être conseillère en vente duty free et avoir des revenus annuels de 21 640 euros (1803 euros par mois), a perçu en 2015, d'après son avis d'impôt correspondant, un revenu mensuel moyen imposable de 1263 euros. M. I... fait valoir qu'il percevait lorsqu'il était en activité des revenus inférieurs à son épouse, étant vérifié que l'avis d'impôt portant sur les revenus de l'année 1995, dernière année de vie commune des époux, fait état pour l'époux d'un revenu mensuel moyen de 1501 euros et pour l'épouse de 2488 euros. S'agissant de ses revenus futurs, Mme J..., âgée aujourd'hui de 66 ans et demi, déclare qu'elle bénéficiera d'une somme mensuelle de 574 euros au titre de sa retraite. Toutefois, la seule pièce qu'elle communique est une estimation indicative établie en octobre 2008 par info retraite faisant état d'un montant de 477 euros par mois pour un âge de départ à 65 ans. Il doit être noté que Mme J... n'allègue pas avoir fait des choix ayant nuit à sa carrière professionnelle dont elle ne dit d'ailleurs rien. Mme J... qui réside dans l'ancien domicile conjugal (bien propre de l'époux) depuis la séparation du couple intervenue en septembre 1995 ne supporte aucune charge locative, ne signalant que des dépenses d'électricité, de gaz, d'internet et de téléphone et la taxe d'habitation. Dans sa déclaration sur l'honneur elle fait état de remboursements au titre de crédits à la consommation à hauteur de 890 euros par mois, tout en communiquant un tableau d'amortissement relatif à un prêt personnel (échéances mensuelles de 602 euros dont la dernière en octobre 2018), et des relevés afférents à trois crédits renouvelables (mention de prélèvements mensuels de 150 euros, 140 euros et 62 euros). M. I... ne fait état d'aucune charge de logement car résidant dans un corps de ferme dont il est propriétaire en indivision avec ses frères et soeurs, et signale des dépenses d'électricité, d'assurance pour l'ancien domicile conjugal occupé par l'épouse et le bien où il réside, de taxe foncière pour les deux biens précités et de la taxe d'habitation pour le bien qu'il occupe. Le patrimoine de M. I... est constitué par l'ancien domicile conjugal situé à Livry Gargan, bien propre de l'intimé, acquis avant le mariage, où réside actuellement l'épouse, la valeur actuelle de ce pavillon étant évaluée à 300.000 euros, et par valeur à 30.000 euros. Mme J... ne dispose pour sa part d'aucun patrimoine. Chacun des époux fait état de problèmes de santé. M. I... déclare ainsi souffrir de problèmes cardiaques, mais se borne à présenter une ordonnance d'un médecin généraliste du 18 octobre 2013. Pour ce qui concerne Mme J..., si celle-ci produit plusieurs pièces de nature médicale, elle ne justifie pas de la qualité actuelle de travailleur handicapé qu'elle invoque, le document présenté (pièce 17bis) attestant seulement que la qualité de travailleur handicapé, classé en catégorie B, lui a été reconnue du 3 octobre 2006 au 3 octobre 2011, et l'intéressée ne précisant pas la suite qui a été réservée à sa demande de compensation de handicap réceptionnée à la date du 31 juillet 2014 par la maison départementale des personnes handicapées. Elle communique un certificat d'un médecin généraliste du 2 mars 2013 signalant qu'elle est suivie pour une affection de longue durée : diabète de type 2 et tachycardie, et elle déclare avoir été victime d'un accident de trajet survenu en janvier 2012 dont elle conserve des séquelles. Il résulte de l'ensemble des éléments précités, une disparité dans les conditions de vie respectives des époux u détriment de Mme J..., consécutive à la dissolution du mariage, caractérisée par l'absence de patrimoine de l'épouse, laquelle devra se reloger à la reprise du bien propre par M. I..., et les droits de celle-ci étant diminués du montant de l'indemnité d'occupation qu'elle devra régler à son conjoint. Mme J... sollicite à titre principal unee prestation compensatoire en usufruit du bien de Livry-Gargan, sans quantifier sa demande. A cet égard, si l'on se réfère à la valeur estimée du bien (300 000 euros selon le notaire) la valeur de l'usufruit serait équivalente à 150 000 euros. Un tel montant pour une prestation compensatoire apparaît totalement excessif au cas d'espèce compte tenu des situations respectives des parties. Il doit être rappelé au surplus que l'attribution forcée d'un bien ne peut être envisagée par le juge qu'à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le débiteur ne pourrait pas opérer le versement de la prestation en numéraire, la charge de la preuve de l'incapacité cour le débiteur d'un règlement en numéraire incombant au demandeur d'une telle prestation ; en l'espèce Mme J... ne rapporte pas cette preuve. Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'époux à verser une prestation compensatoire en capital de 10 000 euros » ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'article 270 du code civil énonce que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Madame E... J... épouse I... sollicite, à titre de prestation compensatoire la somme de 90 000 euros. Elle rappelle que le mariage a" duré plus de quarante ans, et la vie commune plus de 20 ans ; qu'elle a une santé fragile, souffrant de diabète, et qu'elle est reconnue travailleur handicapée à la suite d'un accident de trajet en 2012, que ses droits prévisibles à la retraite se monteront à moins de 600 euros par mois et que contrairement à l'époux, elle ne disposera d'aucun patrimoine à l'issue de la liquidation. Elle soutient qu'il existe donc une disparité manifeste dans la situation des époux. Monsieur G... I..., pour s'opposer à cette demande, fait valoir que les revenus et le patrimoine de la défenderesse ne sont pas exposés d'une manière transparente, et qu'en réalité elle dispose de ressources supérieures à l'époux, de 1216 euros par mois. II indique être endetté auprès d'organismes bancaires et de proches à hauteur de plus de 60 000 euros au total ; que son patrimoine composé du pavillon dans lequel réside l'épouse et d'un quart de la ferme qu'il exploite n'est pas disponible et est au contraire source de charges ; qu'il s'agit de biens propres, sans rapport avec le mariage. Aux termes des dispositions de l'article 271 du code civil, « la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. A cet effet, le juge prend en considération notamment : la durée du mariage ; l'âge et l'état de santé des époux ; leur qualification et leur situation professionnelles ; les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ; le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ; leurs droits existants et prévisibles ; leur situation respective en matière dépensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa ». En l'espèce, il est constant que si le mariage a duré 40 ans, la vie commune dans le mariage a duré plus de 20 ans ; que les époux sont respectivement âgés de 66 et 64 ans. Monsieur G... I... a exercé la profession d'exploitant agricole et justifie percevoir des pensions de retraite pour un montant de 12 906 euros sur l'année 2013, soit 1075 euros par mois environ, auxquelles il faut ajouter le forfait fiscal issu de son activité agricole de 140 euros par mois, soit environ 1200 euros. Madame E... J... épouse I... déclarait en 2011 à l'audience de conciliation un salaire de 1050 euros environ comme vendeuse de duty free majoré d'une faible commission. Elle déclare aux services fiscaux avoir perçu des revenus de 11510 euros sur l'année 2013, soit 959 euros par mois, bien qu'aux termes de sa déclaration sur l'honneur -concernant ses ressources datée du 28 mars (année non précisée), elle mentionne des ressources de 21640 euros, soit 1800 euros par mois, cette baisse de ressources pouvant toutefois s'expliquer par l'accident de trajet subit en 2012. En l'absence de toute autre pièce permettant de justifier des ressources actuelles de l'épouse, il y a lieu de retenir le montant déclaré aux services fiscaux. La différence des revenus courant est donc de 250 euros environ au profit de l'époux. S'agissant des revenus futurs, seuls ceux de l'épouse sont susceptibles de varier lorsqu'elle fera valoir ses droits à la retraite. Toutefois, l'unique pièce qu'elle verse au débat, est insuffisamment précise pour justifier de ces revenus futurs, dans la mesure où ce document ne précise pas sur quels éléments de carrière il est fondé, et ne prend pas en compte les trimestres acquis pour les enfants Il convient de noter que les deux époux supportent un endettement important, de l'ordre de 60 000 euros au total pour l'époux. Pour l'épouse, elle déclare supporter des échéances "mensuelles de crédits d'environ 800 euros-provenant-principalement d'un-crédit de 45 000 euros contracté en 2008 dont Madame E... J... épouse I... ne précise pas l'objet. Dès lors, la comparaison de la situation des époux ne permet pas de constater une disparité manifeste entre eux. De surcroît, Madame E... J... épouse I... ne justifie pas que la différence de ressource d'environ 250 euros a un lien causal avec les choix effectués par le couple pendant la durée du mariage. En effet, elle n'allègue pas avoir fait des choix qui ont préjudicié à sa carrière professionnelle, qu'elle ne décrit d'ailleurs pas. S'agissant du patrimoine des époux, il résulte de l'expertise de maître W... que le patrimoine de Monsieur G... I... est composé du pavillon situé à Livry Gargan constituant le domicile conjugal, qui est un bien propre de l'époux acquis avant le mariage, ainsi que du quart de la ferme qu'il exploite et dont il est propriétaire en indivision avec ses frères et soeurs. La date des effets du divorce étant fixée au 27 septembre 1995, l'expert estime le montant de la récompense due par l'époux à la communauté du fait des travaux d'amélioration du pavillon à 13803 euros et évalue la valeur du pavillon à 300 000 euros. De son coté, Madame E... J... épouse I... ne dispose d'aucun patrimoine. Il en résulte une véritable disparité dans le patrimoine des époux. Or l'épouse devra se reloger à la reprise du pavillon par l'époux, alors que ses droits dans le partage seront diminués du montant de l'indemnité d'occupation due à l'époux. Il en résulte un véritable besoin pour l'épouse, qui justifie de lui attribuer une prestation compensatoire d'un montant de 10 000 euros en capital » ;
ALORS, de première part, QU' en omettant de rechercher, comme elle y était invitée, si Monsieur I... n'avait pas minoré ses revenus déclarés à l'administration fiscale en omettant de déclarer ses revenus professionnels qu'il percevait en espèces et en omettant de spécifier son changement d'adresse pour bénéficier des parts fiscales supplémentaires que lui procurait son épouse et l'enfant resté à charge de cette dernière, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 271 du Code civil ;
ALORS, de deuxième part, QU' en omettant de vérifier, comme elle y était pourtant invitée, si Monsieur I... n'était pas propriétaire, outre le bien immobilier situé à Livry-Gargan, d'un terrain à Senantes sur lequel il a fait édifier un hangar, comme il est établi par la production du permis de construire déposé courant 2010 à son nom propre et dont la construction avait nécessité un apport de fonds de 54.000 euros, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 271 du Code civil ;
ALORS, de troisième part, QUE le juge peut décider que la prestation compensatoire en capital s'exécutera par l'attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit, le jugement opérant cession forcée en faveur du créancier ; qu'en retenant que l'attribution d'un usufruit serait totalement excessive compte tenu des situations respectives des parties aux motifs que la valeur de l'usufruit serait équivalente à 150.000 euros, la Cour d'appel, qui n'a pas envisagé la possibilité d'un usufruit temporaire, a méconnu le sens et la portée de l'article 274 du Code civil ;
ALORS, de quatrième part et en toute hypothèse, QU'en fixant arbitrairement la valeur de l'usufruit à la somme de 150.000 euros, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 274 du Code civil ;