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20/03/2019 | FRANCE | N°17-25.913

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 20 mars 2019, 17-25.913


COMM.

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme MOUILLARD, président



Décision n° 10115 F

Pourvoi n° T 17-25.913







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la Sociét

é Générale, société anonyme, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 16 mars 2017 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant à M. U... N..., dom...

COMM.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 mars 2019

Rejet non spécialement motivé

Mme MOUILLARD, président

Décision n° 10115 F

Pourvoi n° T 17-25.913

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la Société Générale, société anonyme, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 16 mars 2017 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant à M. U... N..., domicilié [...] ,

défendeur à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 29 janvier 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Remeniéras, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Richard de la Tour, premier avocat général, Mme Labat, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de Société Générale, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. N... ;

Sur le rapport de M. Remeniéras, conseiller, l'avis de M. Richard de la Tour, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société Générale aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. N... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la Société Générale.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté la demande d'indemnisation soutenue par Monsieur N..., et, statuant à nouveau, d'AVOIR condamné la Société Générale à payer à Monsieur N... la somme de 410.000 euros à titre de dommages et intérêts, d'AVOIR ordonné la compensation des sommes respectivement et réciproquement dues par la Société Générale et Monsieur N..., puis, y ajoutant, d'AVOIR condamné la Société Générale à payer à Monsieur N... la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, d'AVOIR rejeté la demande de la Société Générale présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et, d'AVOIR condamné la Société Générale aux entiers dépens.

AUX MOTIFS QUE : « Selon l'ancien article 1147 du code civil, applicable à l'espèce, l'acte litigieux ayant été conclu avant le 1er octobre 2016, date de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, « Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ». Le banquier ou l'organisme de crédit est débiteur à l'égard de tout contractant d'un crédit, en sus d'une information objective sur l'opération projetée, d'une obligation de conseil quant à son opportunité. En outre, il résulte d'une jurisprudence constante que la banque ou l'organisme de crédit, outre ces obligations d'information et de conseil, est tenu à un devoir de mise en garde de l'emprunteur et de la caution non avertis. Il consiste à les alerter sur les dangers de l'opération de crédit projetée, au regard de leurs capacités financières et du risque d'endettement né de l'octroi du prêt. Celui qui invoque à son profit le devoir de mise en garde doit justifier d'un risque de surendettement. Si le crédit n'est pas excessif ou consenti à des conditions normales, il n'existe pas de devoir de mise en garde. La caution de l'emprunteur, se prévalant du caractère accessoire de son engagement, peut invoquer la faute commise par l'établissement de crédit envers l'emprunteur pour ne pas avoir alerté la caution sur les risques de non remboursement du crédit mais également de la faute commise par le créancier envers elle pour ne pas l'avoir mis en garde sur les risques du cautionnement compte tenu des ressources et du patrimoine de la caution. Il incombe à la banque d'établir la qualification d'averti de son client pour se dégager de son devoir de mise en garde, à savoir que la caution avait les capacités de mesurer le risque pris en s'engageant. Le devoir de mise en garde opère en considération du savoir économique et financier de l'emprunteur. Si l'emprunteur est averti des choses du crédit, il ne peut faire grief à son cocontractant, hors l'hypothèse d'une rétention par ce dernier d'informations décisives sur sa situation financière ou sur ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles que l'emprunteur ignorait, de lui avoir accordé un prêt sollicité. La qualité de caution non avertie peut ainsi être attribuée au dirigeant inexpérimenté ou non impliqué. Inversement, le dirigeant qui se prévaut de son expérience sera considéré comme averti. En l'espèce, il ressort des éléments versés aux débats : - que la SCI de [...], constituée le 12 novembre 2009 avec un capital de 300 euros, ne disposait le 25 mars 2010, date de l'offre du prêt immobilier litigieux, dit « Casanova », d'un montant total de 410.000 euros, avec un taux d'intérêt de 3,40 % l'an, hors assurance et remboursable sur une durée de 240 mois, comprenant un premier palier de 201 mois par échéances mensuelles, assurance comprise, d'un montant de 2.202,86 euros, puis un second palier de 39 mois avec une mensualité de 4.148,06 euros, que des seules ressources de ses trois associés fondateurs ; - que le prêt était destiné à l'achat d'une maison à usage d'habitation pour le gérant de la SCI, M. H... et sa compagne, Mme A..., tous deux associés de la SCI, M. N..., le troisième associé, s'étant porté caution personne et solidaire des engagements de la SCI au même titre que les deux autres à hauteur de la somme de 520.000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard pour une durée de 264 euros ; - qu'il n'est pas contesté que la SCI ne serait financièrement alimentée que par les ressources propres de ses trois associés ; - que lors de l'élaboration de l'offre de prêt, la banque a recueilli, lors du premier trimestre 2010, les informations suivantes sur les capacités financières et patrimoines des associés M. H..., négociateur immobilier gérant non salarié d'une société de commerce de voitures et de véhicules automobiles légers, percevait, au titre de ses revenus professionnels, 1.057 euros par mois, et disposait d'un patrimoine mobilier évalué à la somme de 41.000 euros, Mme A..., non imposable en 2009 et 2010, était coiffeuse salariée depuis peu et percevait, au titre de ses revenus professionnels, 1.200 euros par mois, au titre de revenus locatifs hors projet, 2,810 euros par mois et disposait d'un patrimoine immobilier évalué à la somme de 611.823 euros, M. N..., retraité, non imposable sur le revenu en 2009, percevait une retraite mensuelle de 2.300 euros par mois, de revenus locatifs hors projet de 1.484 euros par mois, et disposait d'un patrimoine immobilier évalué à la somme de 750.000 euros, Sur le caractère d'emprunteur non averti de la SCI, si son objet statutaire était l'acquisition de biens immobiliers, la propriété, la gestion, l'administration et la disposition de biens dont elle pourrait devenir propriétaire par la suite, par voie d'acquisition, échange, apport ou autrement, tous placements de capitaux sous toutes ses formes, y compris la souscription ou l'acquisition de toutes autres actions et obligations ou parts sociales" et si Mme A... et M. N..., deux des trois associés de la SCI, sont également les associés de la SCI Luna qui a pour objet "la gestion locative de deux autres biens immobiliers situés à Nemours", comme l'a retenu le jugement déféré, la cour relève que ces éléments ne suffisent pas à caractériser, in concret°, la qualité d'emprunteur averti, dès lors qu'il convient d'examiner, dans le cas d'espèce, les connaissances et expériences professionnelles effectives dans le secteur immobilier des trois associés fondateurs et de leur savoir économique et financier, Or, il ressort des éléments versés aux débats que, si le gérant de la SCI, M. H... a été brièvement négociateur immobilier, il n'était ni gérant, ni responsable d'une agence immobilière et a créé par la suite une SARL ayant pour objet le commerce de voitures et véhicules automobiles légers, radiée du registre du commerce et des sociétés le 15 juillet 2011, avant de s'associer avec Mme A..., gérante d'un établissement de restauration traditionnelle, dont la liquidation judiciaire a été prononcée le 25 octobre 2012, parcours professionnels quelque peu erratiques qui démontrent, pour le moins, le caractère non averti de ces associés dans le secteur immobilier. Quant à M. N..., le troisième associé de la SCI de [...], retraité lors de l'octroi du prêt, il n'est pas contestable qu'il est profane en la matière et ne saurait être considéré comme un professionnel du marché et du crédit immobiliers, peu important sa participation à la création, dans les circonstances et dans le contexte sus mentionnés, d'une SCI disposant à sa création d'un capital de 300 euros et la seule perception de revenus locatifs mensuels d'environ 1.500 euros, par le biais de la SCI Luna, étant insuffisante à en faire un professionnel de l'immobilier. Dès lors, la SCI de [...], qui ne disposait pas de la compétence, de l'expérience et des ressources nécessaires ne peut être considérée commune un emprunteur averti dans le domaine immobilier, comme l'a retenu au demeurant le tribunal de grande instance de Fontainebleau, clans son jugement du 23 mars 2016. En conséquence, la banque était tenue à l'égard de l'emprunteur, la SCI de [...] comme envers M. N..., en sa qualité de caution non avertie, d'un devoir de mise en garde. Au regard des ressources limitées de cette SCI, dont le seul projet était précisément l'acquisition d'une maison d'habitation, objet du prêt immobilier, destinée à devenir la résidence de M. H... et de Mme A..., opération qui n'apporterait aucune ressource à la SCI, de l'absence d'autres projets immobiliers ou locatifs et du montant relativement élevé des mensualités de remboursement assurées par les seuls revenus des trois associés, dont l'un était retraité et les deux autres dans une situation professionnelle fragile, la cour retient que le crédit accordé présentait un risque réel de surendettement en ce qu'il n'était manifestement pas adapté aux capacités financières réelles de l'emprunteur et à ses perspectives d'évolution, étant observé que, dès juillet 2012, la SCI a effectivement cessé de rembourser le prêt. Le fait que M. N..., caution de l'opération projetée disposait de sa propre maison d'habitation, évaluée à la somme de 750.000 euros, et percevait par ailleurs des revenus locatifs, ne saurait être retenu, dès lors que son engagement n'est qu'accessoire à la dette principale, pour justifier d'une absence de risque de l'opération projetée par la SCI et de dispenser, en l'espèce, l'établissement de crédit de son devoir de mise en garde de l'emprunteur au regard de ses capacités financières et du risque d'endettement né de l'octroi du prêt et de la caution non avertie qu'était M. N... que la banque aurait dû alerter sur les risques importants de l'opération pour l'emprunteur et partant, pour ses cautions. La cour relève enfin que le tribunal de grande instance de Fontainebleau, par sa décision du 23 mars 2016, a retenu le caractère d'emprunteur non averti de la SCI et la violation par la banque de son devoir de mise en garde à son égard et à l'égard des deux autres cautions, au regard du caractère manifestement excessif du crédit accordé, M. H... et Mme A... ayant interjeté appel pour avoir été déboutés de leur demande d'indemnisation au motif que leur préjudice serait hypothétique. En ce qui concerne le préjudice subi du fait de la violation par la banque de son devoir de mise en garde, il convient de rappeler qu'il s'analyse, pour la caution, en la perte de chance d'avoir pu prendre une décision éclairée et de ne pas s'être contractuellement engagée. Au regard des éléments de la cause, il convient d'évaluer la perte de chance subie par M. N... à la somme de 410.000 euros, étant rappelé que l'indemnisation de la perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée. Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. N... de sa demande d'indemnisation du préjudice par lui subi en raison de la faute de la banque et, statuant à nouveau, de condamner la SA Société Générale à payer M. N... à titre de dommages-intérêts et d'ordonner la compensation entre les sommes respectivement dues par la banque et l'appelant, aux termes de la présente décision » ;

1°) ALORS QUE pour apprécier le caractère disproportionné ou non de l'emprunt souscrit par une société civile immobilière, le juge doit tenir compte des revenus et du patrimoine de ses associés, solidairement tenus, en application de l'article 1853 du code civil, au paiement des dettes sociales ; qu'en l'espèce, la Société Générale rappelait qu'en tenant compte notamment du patrimoine et des revenus de Monsieur N..., les ressources mensuelles totales déclarées par les associés de la SCI emprunteuse s'élevaient au total à 10 266,00 € et leur patrimoine à 1 402 823,00 €, le prêt portant pour sa part sur un capital de 410.000 euros remboursable par 201 mensualités de 2.202,86 € et 39 échéances de 4.148,06 € chacune ; qu'en refusant de tenir compte du patrimoine et des revenus locatifs de Monsieur N..., au motif que son engagement de caution n'était qu'accessoire à la dette principale, cependant qu'elle constatait que Monsieur N... avait la qualité d'associé de la SCI emprunteuse, ce dont il résultait qu'il devait être tenu compte de ses biens et revenus pour apprécier le caractère proportionné ou non du concours consenti à cette dernière, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1857 du même code ;

2°) ALORS en outre QUE la Cour d'appel a elle-même constaté que la SCI emprunteuse devait être « alimentée par les ressources propres de ses trois associés » (arrêt, p. 9, §4 et p. 11, §2) ; qu'en refusant dès lors de tenir compte des revenus locatifs perçus par Monsieur N..., associé de la SCI emprunteuse, pour apprécier le caractère proportionné ou non du prêt consenti à cette dernière, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

3°) ALORS de même QUE qu'en l'espèce, la Société Générale rappelait que les ressources mensuelles totales déclarées par les associés de la SCI emprunteuse s'élevaient au total à 10 266,00 € et leur patrimoine à 1 402 823,00 €, le prêt portant pour sa part sur un capital de 410.000 euros remboursable par 201 mensualités de 2.202,86 € puis 39 échéances de 4.148,06 € chacune ; qu'elle rappelait encore qu'à eux seuls Monsieur H... et Madame A... avaient déclaré percevoir, à titre de revenus locatifs et professionnels, 5067 euros de revenus mensuels et être à la tête d'un patrimoine évalué à 652.823 euros, la SCI devenant pour sa part propriétaire de la maison d'habitation que le prêt devait permettre d'acquérir ; que pour juger que l'emprunt souscrit par la SCI [...] était manifestement disproportionné, la Cour d'appel a retenu qu' « au regard des ressources limitées de cette SCI, dont le seul projet était précisément l'acquisition d'une maison d'habitation, objet du prêt immobilier, destinée à devenir la résidence de M. H... et de Mme A..., opération qui n'apporterait aucune ressource à la SCI, de l'absence d'autres projets immobiliers ou locatifs et du montant relativement élevé des mensualités de remboursement assurées par les seuls revenus des trois associés, dont l'un était retraité et les deux autres dans une situation professionnelle fragile, la cour retient que le crédit accordé présentait un risque réel de surendettement en ce qu'il n'était manifestement pas adapté aux capacité financières réelles de l'emprunteur et à ses perspectives d'évolution » ; qu'en statuant ainsi sans tenir compte du patrimoine et des revenus locatifs de Monsieur H... et de Madame A... dans l'appréciation du caractère disproportionné ou non de l'emprunt souscrit par la SCI dont ils étaient associés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1857 du même code ;

4°) ALORS QUE la qualité d'emprunteur averti, qui impose à la banque de mettre en garde l'emprunteur contre le risque d'endettement excessif auquel il s'expose, s'entend de la capacité de ce dernier à comprendre, au regard de son expérience et de ses facultés intellectuelles propres, la nature et la portée de son engagement ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'emprunt souscrit était un prêt immobilier classique, d'un montant de 410.000€, au taux de 3,40% l'an hors assurance, avec une simple variation de +1/-1 point ; que pour juger que la Société Générale était débitrice d'un devoir de mise en garde au bénéfice de la SCI emprunteuse, la Cour d'appel a relevé que le fait que son représentant avait été un temps négociateur immobilier, qu'il était en outre associé depuis des années d'une société LUNA ayant pour objet « la gestion locative de deux autres biens situés à Nemours », et qu'il s'était par la suite associé dans des sociétés de commerce de véhicules ou de restauration, ne démontrait pas son « caractère averti dans le secteur immobilier » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il lui appartenait de rechercher non pas si le gérant de la SCI emprunteuse pouvait être considéré comme étant un emprunteur « averti dans le secteur immobilier » mais si, compte tenu notamment de son expérience professionnelle et de ses facultés propres, il n'était pas en mesure de comprendre la nature et la portée de l'engagement qu'il prenait pour le compte de la société emprunteuse, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

5°) ALORS de même QUE la qualité de caution avertie ne se confond pas avec celle de caution professionnelle ; qu'elle se déduit non seulement des capacités propres de la caution mais également de sa connaissance de la situation du débiteur cautionné ; que pour juger que la banque était débitrice d'un devoir de mise en garde au bénéfice de Monsieur N..., qui s'était porté caution de la SCI emprunteuse en sa qualité d'associé, la Cour d'appel a relevé que celui-ci ne pouvait être considéré comme un « professionnel du marché et du crédit immobilier », peu important sa participation à la création d'une SCI ayant pour objet la gestion locative, qu'il ne pouvait davantage être considéré comme un « professionnel de l'immobilier » ou comme une « caution avertie dans le secteur immobilier » ou le « crédit immobilier », étant « profane en la matière » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à justifier la qualité de caution non avertie de Monsieur N... et, partant, l'existence d'un devoir de mise en garde à la charge de la Société Générale, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté la demande d'indemnisation soutenue par Monsieur N..., et, statuant à nouveau, d'AVOIR condamné la Société Générale à payer à Monsieur N... la somme de 410.000 euros à titre de dommages et intérêts, d'AVOIR ordonné la compensation des sommes respectivement et réciproquement dues par la Société Générale et Monsieur N..., puis, y ajoutant, d'AVOIR condamné la Société Générale à payer à Monsieur N... la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, d'AVOIR rejeté la demande de la Société Générale présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et, d'AVOIR condamné la Société Générale aux entiers dépens ;

AUX MOTIFS QUE : « En ce qui concerne le préjudice subi du fait de la violation par la banque de son devoir de mise en garde, il convient de rappeler qu'il s'analyse, pour la caution, en la perte de chance d'avoir pu prendre une décision éclairée et de ne pas s'être contractuellement engagée. Au regard des éléments de la cause, il convient d'évaluer la perte de chance subie par M. N... à la somme de 410.000 euros, étant rappelé que l'indemnisation de la perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée. Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. N... de sa demande d'indemnisation du préjudice par lui subi en raison de la faute de la banque et, statuant à nouveau, de condamner la SA Société Générale à payer M. N... à titre de dommages-intérêts et d'ordonner la compensation entre les sommes respectivement dues par la banque et l'appelant, aux termes de la présente décision » ;

1°) ALORS QUE le préjudice supporté par une caution du fait du manquement d'une banque à son obligation de mise en garde consiste dans la perte d'une chance de ne pas contracter ; que pour évaluer ce préjudice, les juges du fond doivent évaluer la chance perdue et donc nécessairement, et premièrement, la charge pécuniaire effectivement supportée par la caution, au regard de la possibilité ou l'impossibilité, pour celle-ci, de se retourner contre le débiteur principal ou ses associés, une fois subrogée dans les droits du prêteur désintéressé ; qu'au soutien de sa demande indemnitaire, Monsieur N... se bornait à indiquer qu'il avait supporté un « préjudice consistant dans la perte d'une chance de ne pas avoir contracté l'engagement de caution en vertu duquel il [était] poursuivi » et, sans autre forme d'explication, demandait à la Cour de réparer le préjudice ainsi subi en condamnant la banque à lui payer la somme de 420.716, 83 euros à titre de dommages et intérêts ; qu'en indemnisant la perte de chance supportée par Monsieur N... du fait du manquement de la Société Générale à son obligation de mise en garde à hauteur de 410.000 euros, correspondant à l'euro près au montant du capital emprunté, sans même analyser, fût-ce en invitant les parties à s'expliquer sur ce point, les chances qu'avait Monsieur N... d'obtenir le remboursement des sommes versées auprès de la débitrice principale ou de ses associées après avoir désintéressé la banque, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction applicable à la cause, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;

2°) ALORS en tout état de cause QU' en statuant comme elle l'a fait, par des motifs qui ne permettent pas de s'assurer que la Cour d'appel aurait effectivement recherché les chances qu'avait Monsieur N... d'obtenir le remboursement des sommes versées après avoir désintéressé le créancier, chances sur lesquelles Monsieur N... ne s'expliquait aucunement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction applicable à la cause, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 17-25.913
Date de la décision : 20/03/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, arrêt n°17-25.913 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles 16


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 20 mar. 2019, pourvoi n°17-25.913, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.25.913
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