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13/03/2019 | FRANCE | N°17-27.693

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 13 mars 2019, 17-27.693


SOC.

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 mars 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10253 F

Pourvoi n° C 17-27.693







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé pa

r Mme L... K..., épouse O..., domiciliée [...] ,

contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2017 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Freudenb...

SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 mars 2019

Rejet non spécialement motivé

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10253 F

Pourvoi n° C 17-27.693

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par Mme L... K..., épouse O..., domiciliée [...] ,

contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2017 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Freudenberg Sealing Technologies, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 5 février 2019, où étaient présents : Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Dumont, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de Mme K..., épouse O..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Freudenberg Sealing Technologies ;

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme K..., épouse O... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour Mme K..., épouse O....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme O..., salariée, de sa demande de condamnation de la société Freudenberg Sealing Technologies, employeur, à lui payer la somme de 15 000 € en réparation de son préjudice d'anxiété ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme O... sollicite la somme de 15 000 € en réparation de son préjudice d'anxiété en suite de l'inscription de la société Procal et de la SAS Freudenberg sur la liste ministérielle visée à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, pour la période de 1960 à 1994 ; que la société Freudenberg soulève la prescription de l'action engagée par Mme O... ; qu'en application de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que cette disposition issue de la loi du 17 juin 2008 a donc réduit le délai de prescription de l'ancien article 2262 du code civil de trente à cinq ans ; que l'article 2222 du même code dispose qu'en cas de réduction de la durée du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, soit à compter du 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; que la prescription quinquennale est applicable à toute action tendant à obtenir la condamnation de l'employeur à des dommages et intérêts en réparation d'un préjudice né d'un manquement de l'employeur à ses obligations ; que Mme O... fait valoir que le point de départ de la prescription doit être fixé au 11 mai 2010, date de l'arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation ayant reconnu pour la première fois le préjudice d'anxiété à l'exposition de l'amiante ; mais attendu que cet arrêt, qui n'est que l'application du principe de responsabilité contractuelle appliqué à la violation de l'obligation de sécurité mise à la charge de l'employeur, n'est pas créateur de droit ; que Mme O... reconnaît d'ailleurs dans ses écritures qu'antérieurement à cet arrêt, le caractère indemnisable du préjudice d'anxiété existait même s'il n'était pas certain ; que s'agissant du préjudice d'anxiété, un salarié bénéficiaire de l'ACAATA, ou ayant travaillé au sein d'une entreprise inscrite au dispositif de l'ACAATA, a connaissance du risque à l'origine de son anxiété à compter de l'arrêté ministériel ayant inscrit l'activité de son employeur sur la liste des établissements permettant la mise en oeuvre de ce régime légal spécifique ; qu'il ne saurait être fait grief à l'employeur de ne pas avoir informé individuellement les salariés de l'entreprise et les anciens salariés de cette inscription au titre du manquement à l'obligation de sécurité, alors que l'arrêté a été régulièrement publié et que la loi ne met pas à la charge de l'employeur une obligation d'information des salariés sur cette inscription ; qu'en l'espèce, la société Freudenberg a été inscrite sur la liste des établissements permettant la mise en oeuvre du dispositif ACAATA le 12 août 2012 ; que le délai de prescription expirait donc le 19 juin 2013 ; que Mme O... disposait donc d'un délai de près de onze ans avant la prescription, ce qui ne saurait, comme elle le soutient, limiter son droit d'accès à une juridiction au point de le rendre ineffectif, alors que l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, invoqué par les appelants, vise le délai de prescription de l'action des salariés atteints d'une maladie en droit suisse dont le point de départ est la date à laquelle les intéressés ont été exposés à la poussière d'amiante rendant dès lors impossible tout recours lors de la déclaration de la maladie ; que Mme O... ayant saisi le conseil de prud'hommes le 23 avril 2015, c'est à bon droit que les premiers juges ont déclaré son action prescrite ; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE la société Freudenberg soulève une fin de non-recevoir de l'action de Mme O... tirée de l'acquisition de la prescription ; qu'il n'est pas contesté que, s'agissant de la mise hors de cause de la responsabilité contractuelle de l'employeur qui se prescrit par cinq ans, et non d'une demande en paiement de salaires, la présente action est concernée par les délais de prescription de droit commun ; que la loi du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile, a substitué à la prescription trentenaire de droit commun, instituée par l'ancien article 2262 du code civil pour toutes les actions tant réelles que personnelles, une prescription de cinq ans de toutes les actions personnelles ou immobilières, prescription qui commence à courir « à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu au aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer », ainsi qu'en dispose l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de cette loi ; que l'article 26 de la loi du 17 juin 2008 relatif à l'application de la loi dans le temps précise que les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi (19 juin 2008), sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; que s'agissant de mettre en jeu l'obligation de sécurité de résultat de l'employeur au titre de l'exposition à l'amiante à raison du préjudice d'anxiété subi par le salarié ainsi exposé, anxiété qui implique la pleine connaissance du risque encouru, ce point de départ ne peut être antérieur au moment où l'intéressé a pris connaissance de la réalité dudit risque ; qu'ainsi, il a été considéré que le point de départ de la prescription de l'action en réparation du préjudice d'anxiété est la date à laquelle l'employeur est inscrit sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'Acaata (Cour de cassation, Chambre sociale, 19 novembre 2014, pourvoi n° 13-19264) ; qu'en l'espèce, le point de départ du délai de la prescription de l'action en réparation du préjudice d'anxiété est le 12 août 2002, date de l'inscription par arrêté de la société Procal, devenue Freudenberg, sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'Acaata ; ce dont la demanderesse aurait dû connaître, celle-ci n'apportant à l'appui de sa requête aucun élément permettant de déterminer et justifier d'un autre fait générateur faisant courir le délai de prescription d'une date plus tardive ; que l'action de Mme O... a été introduite le 23 avril 2015, soit après l'expiration du délai de cinq ans suivant la date de publication de la loi du 17 juin 2008, relative à la prescription (19 juin 2008) ; qu'en conséquence, il y a lieu de dire que l'action en réparation du préjudice d'anxiété de Mme O... est prescrite et que sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice d'anxiété est irrecevable ;

ALORS QUE les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en posant comme point de départ du délai de prescription de l'action en indemnisation du préjudice d'anxiété le jour de l'arrêté d'inscription de l'établissement sur la liste ouvrant droit au bénéfice de l'Allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, non celle de l'arrêt de la Cour de cassation du 11 mai 2010 (n° 09-42241) ayant pour la première fois consacré ce préjudice spécifique, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme O..., salariée, de sa demande de condamnation de la société Freudenberg Sealing Technologies, employeur, à lui payer la somme de 5 000 € au titre du défaut de remise de l'attestation d'exposition à l'amiante ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme O... sollicite la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information par l'employeur de l'existence d'un risque sanitaire lié à l'exposition à l'amiante lors de son départ de l'entreprise ; mais attendu qu'à défaut de toute obligation légale, aucun manquement ne saurait être imputé à l'employeur étant rappelé que l'arrêté ministériel ayant inscrit l'entreprise sur la liste des établissements ouvrant droit au régime de l'ACAATA a été régulièrement publié ; que l'obligation de délivrer une attestation d'exposition a été créée par le décret n° 96-98 du 7 février 1996, publié le 8 février 1996 ; que l'article 3 dudit décret, abrogé le 1er juillet 2006, disposait que le chef d'établissement est tenu d'établir pour chaque poste ou situation de travail exposant les travailleurs à l'inhalation de poussières d'amiante une notice destinée à les informer des risques auxquels ce travail peut les exposer et des dispositions prises pour les éviter ; que cette notice est transmise pour avis au médecin du travail ; que l'employeur informe ensuite le salarié, dans les meilleurs délais, des risques ainsi évalués ; qu'aux termes de l'article 16 du même décret, une attestation d'exposition est remplie par l'employeur et le médecin du travail, dans les conditions fixées par arrêté des ministres chargés du travail et de l'agriculture, et remise par l'employeur au salarié à son départ de l'établissement ; que Mme O... ayant quitté l'entreprise le 10 juin 1975, l'obligation de délivrance d'une attestation d'exposition n'existait pas ; qu'il ne pesait par ailleurs aucune obligation sur l'employeur d'information sur les risques liés à l'exposition de l'amiante dans le décret de 1977, aucune faute ne peut dès lors être imputée à la société Freudenberg ; que Mme O... ne justifie en outre d'aucun préjudice lié à l'absence de remise de cette attestation, les premiers juges ayant par ailleurs à juste titre relevé que cette demande était prescrite ; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE le décret n° 96-98 du 7 février 1996 relatif à la protection des travailleurs contre les risques liés à l'inhalation de poussières d'amiante dispose en son article 16 qu'« une attestation d'exposition est remplie par l'employeur et le médecin du travail, dans les conditions fixées par arrêté des ministres chargés du travail et de l'agriculture, et remise par l'employeur au salarié à son départ de l'établissement » ; que s'agissant de mettre en jeu l'obligation d'information par l'employeur au moyen de la remise d'une attestation d'exposition à l'amiante, la prescription ne pourrait courir qu'à compter du moment où l'obligation serait due et non réalisée ; qu'en l'espèce, Mme O... a quitté la société Freudenberg le 10 juin 1975, date à laquelle le décret n° 96-98 du 7 février 1996 n'était par définition pas publié et encore moins applicable ; que l'obligation n'existant pas pour l'employeur au moment du départ à la retraite, un délai de prescription ne saurait dès lors courir pour un droit n'existant pas ; qu'en conséquence, il y a lieu de dire que l'action en réparation du préjudice lié à la non-remise de l'attestation d'exposition à l'amiante de Mme O... n'est pas prescrite et que sa demande de dommages-intérêts en réparation est donc recevable ; qu'au fond, il convient de constater que le décret n° 96-98 du 7 février 1996 prévoit un dispositif de remise d'attestation applicable à sa publication, qu'il ne crée pas une obligation à l'employeur de recenser les personnes parties à la retraite et qu'il ne prévoit pas la remise d'une telle attestation à ces mêmes retraités ; que la société Freudenberg n'ayant commis dès lors aucune faute quant à la remise d'une attestation d'exposition à l'amiante à Mme O..., celle-ci sera déboutée de sa demande en dommages-intérêts ;

ALORS QUE l'obligation de sécurité et son corollaire, l'obligation d'information du salarié sur les risques auxquels le travail l'a exposé, n'est pas soumise à quelque condition de forme que ce soit ; elle commence avec la naissance du risque, dure aussi longtemps que lui et sa violation porte nécessairement préjudice, puisque le salarié non informé du danger, a perdu une chance d'en éviter les conséquences sur sa santé ; qu'en déboutant la salariée de sa demande indemnitaire fondée sur l'absence d'information sur les risques liés à l'exposition à l'amiante aux motifs inopérants qu'à la date du départ de l'établissement, aucune règle formelle ne l'imposait, la cour d'appel a violé les articles L 4121-1, L 4121-2 et L 4141-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 17-27.693
Date de la décision : 13/03/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre sociale, arrêt n°17-27.693 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 13 mar. 2019, pourvoi n°17-27.693, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.27.693
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