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06/03/2019 | FRANCE | N°17-11.099

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 06 mars 2019, 17-11.099


SOC.



FB





COUR DE CASSATION

______________________





Audience publique du 6 mars 2019









Rejet non spécialement motivé





M. CHAUVET, conseiller doyen

faisant fonction de président







Décision n° 10215 F



Pourvoi n° R 17-11.099



Aide juridictionnelle totale en défense

au profit de Mme Q....

Admission du bureau d'aide juridictionnelle

près la Cour de cassation

en date du 6 avril

2017.







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E



_________________________



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________



LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :



Vu le pourvoi formé par...

SOC.

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 6 mars 2019

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVET, conseiller doyen

faisant fonction de président

Décision n° 10215 F

Pourvoi n° R 17-11.099

Aide juridictionnelle totale en défense

au profit de Mme Q....

Admission du bureau d'aide juridictionnelle

près la Cour de cassation

en date du 6 avril 2017.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par l'Association départementale d'aide aux personnes âgées et aux handicapés (ADAPAH), dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2016 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme P... Q..., domiciliée [...] ,

2°/ à M. E... N..., domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 29 janvier 2019, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Richard, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de l'Association départementale d'aide aux personnes âgées et aux handicapés, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de Mme Q... ;

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'Association d'aide aux personnes âgées et aux handicapés aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'Association d'aide aux personnes âgées et aux handicapés à payer à la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour l'Association d'aide aux personnes âgées et aux handicapés.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir requalifié le licenciement de Madame Q... en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné l'ADAPAH à lui régler les sommes de 820,50 euros et 82,05 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire et congés payés y afférents, 1 969,20 euros et 196,92 euros, à titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, 935,37 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la somme de totale de 700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et d'avoir condamné également l'ADAPAH à payer à Maître N..., en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 1 500 euros ;

Aux motifs propres que s'agissant de son licenciement c'est d'abord avec pertinence que Madame Q... fait valoir, contre l'opinion des premiers juges, que l'ADAPAH échoue à prouver avec certitude que la DRH qui a signé la lettre de licenciement détenait régulièrement le pouvoir d'exercer celui de notifier une sanction disciplinaire, ce qui suffit à priver ledit licenciement de cause réelle sérieuse ; qu'en effet le conseil de prud'hommes s'est livré à une incomplète analyse des statuts de l'ADAPAH pour considérer comme suffisant à établir la régularité de la délégation de pouvoir consentie à la DRH la circonstance que le président investi de tous les pouvoirs de représentation de l'association avait valablement usé de ceux-ci ; qu'ainsi l'appelante produit certes aux débats le relevé des décisions du bureau du 13 août 2013 dont il s'évince qu'avec l'accord de celui-ci, le président avait délégué à Madame F..., responsable du personnel – et c'est elle qui a signé la lettre de licenciement – l'exercice du pouvoir disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement ; que ces actes sont conformes aux articles 8-2 et 8-3 des statuts dans les rapports entre le bureau et le président ; qu'en revanche, ainsi que le soulève l'intimée manque la preuve que cette procédure, dans le respect de l'article 8-1 de ces mêmes statuts, avait été autorisée par le conseil d'administration ; qu'aux termes de cet article il est disposé « l'association est administrée par un conseil d'administration » puis « le conseil d'administration peut déléguer tout ou partie de ses pouvoirs au bureau » et l'article 8-2 poursuit en stipulant que le bureau « est chargé de préparer les décisions du conseil d'administration et d'exécuter ses décisions » et qu'il veille au fonctionnement de l'association « en application des décisions du conseil d'administration » ; que l'article 8-3 octroie un pouvoir de délégation au président dans 1'exercice de sa mission qui est d'assurer la régularité du fonctionnement de 1'association mais avec « l'accord du bureau » ; qu'il s'évince de cette hiérarchie statutaire du contrôle de pouvoir de délégation que l'exercice de celui-ci par le bureau, puis par le président doit au préalable être issu d'une délégation donnée par le conseil d'administration ; qu'il ne résulte d'aucune des pièces produites aux débats que l'exercice du pouvoir disciplinaire, non expressément exclu de la mission générale du conseil d'administration et donc relevant de ce dernier, avait été délégué au bureau avant que ce dernier n'autorise le président à le déléguer au DRH ; que cette lacune prive de fondement statutaire le pouvoir du DRH de signer la lettre de licenciement ;

Alors, de première part, qu'en l'absence de dispositions statutaires contraires attribuant cette compétence à un autre organe, il entre dans les attributions du président de mettre en oeuvre la procédure de licenciement d'un salarié ; qu'en l'occurrence les termes clairs et précis de l'article 8-3 des statuts subordonnant la délégation par le président de l'ADAPAH de ce pouvoir au seul accord du bureau, la Cour d'appel ne pouvait affirmer que cet accord était lui-même subordonné à l'autorisation du conseil d'administration, sans dénaturer lesdits statuts et violer l'article 1134 du code civil ;

Et aux motifs qu'en outre pour le surplus les premiers juges ont suffisamment fait apparaître que l'ADAPAH était défaillante pour établir suffisamment – ainsi qu'elle en supporte exclusivement la charge – la réalité et l'imputabilité à Madame Q... des faits qualifiés de faute grave, dans les termes de la lettre de licenciement qui fixent les limites du litige, ni même qu'ils auraient été de la nature de ceux empêchant la poursuite de la relation contractuelle fût-ce pendant la durée limitée du préavis, étant ajouté que si un doute demeure il doit profiter à la salariée ; qu'il échet d'emblée de relever que l'appelante n'émet pas de moyens pour critiquer la décision des premiers juges ayant écarté comme insuffisamment établis, et en tout état de cause de trop faible gravité pour justifier sans disproportion la sanction la plus élevée dans l'échelle disciplinaire, les griefs afférents au non-respect des horaires ainsi qu'au prétendu comportement « agressif » et « autoritaire » qualifié d'insubordination ; que ce n'est que sur les faits de « fraude » dans le cadre du plan d'aide concernant Monsieur W..., que l'appelante reproche aux premiers juges de s'être mépris en considérant qu'elle avait antérieurement connu la pratique incriminée sans la sanctionner et que cette tolérance privait à cet égard de fondement la mise en oeuvre du pouvoir disciplinaire ; que sur ce point la lettre de licenciement est ainsi libellée : « Fraude concernant les heures réalisées dans le cadre du plan d'aide de Monsieur W... Le 3 juin 2013, accompagnée de Madame Conseil, votre responsable de secteur, je me suis rendue au domicile [...] . Monsieur W... était absent de son domicile. Or, nous avions constaté avec le système de télégestion mobile que vous aviez pointé au domicile de votre client à 12h48. Nous nous sommes dons présentées au domicile [...] . Madame H... nous a reçues. Nous avons constaté à notre arrivée, que vous étiez en train de réaliser le nettoyage des sanitaires, au domicile de Madame H.... Vous réalisiez donc les tâches prévues au plan d'aide de Monsieur W... B..., au domicile de Madame H..., amie de celui-ci. Vous avez cautionné le comportement frauduleux de votre client. Lors de l'entretien, nous avons insisté sur votre charte de déontologie de l'intervenante à domicile et sur votre comportement fautif. Nous vous avons rappelé la relation de confiance qui vous lie à votre employeur dans le cadre de vos interventions au domicile de personnes dépendantes, fragilisées par l'âge, la maladie ou le handicap. Nous vous avons indiqué que nous avions été informées de cette supercherie par des salariés qui étaient intervenus en remplacement et qui dès le début de leur intervention étaient venus porter ces faits à notre connaissance. Ces salariés ont été surpris de constater la supercherie de Monsieur W.... Selon leurs propos, cette fraude était cautionnée par la titulaire du dossier, en l'occurrence vous-même. Après renseignement pris auprès du responsable de secteur précédent, Madame Y... et de l'assistante de secteur, Madame K... qui s'occupaient de la gestion du secteur avant l'arrivée de Madame Conseil et le retour de Mademoiselle C..., celles-ci confirment qu'à aucun moment, vous n'avez porté ces faits à leur connaissance. Elles ne vous ont jamais autorisé à effectuer les heures au domicile d'une personne autre que celui du bénéficiaire du plan d'aide. Cette pratique est interdite au sein de l'association. D'ailleurs le comportement des salariés remplaçants atteste du fait que cette pratique n'est pas autorisée car ils sont venus immédiatement nous prévenir. Vous avez argumenté le fait que vous étiez naïve et que vous agissiez en accord avec votre responsable de secteur. Cette version des faits n'emporte pas notre approbation. Nous avons conformément à nos engagements, questionné les personnels administratifs gérant le secteur précédemment. Ceux-ci démentent formellement vos propos. Quant à votre naïveté, nous n'y croyons pas du tout. En conséquence, nous conservons l'appréciation de la gravité des faits reprochés. » ; que pour répondre aux motifs du jugement, même en produisant nouvellement la documentation technique du système de télégestion, ainsi que des attestations d'autres salariés décrivant comment eux – et non l'intimée – utilisaient ces moyens techniques, l'appelante finit surtout par soutenir qu'elle ne peut contrôler toute l'activité de chaque salariée, compte tenu de leur nombre et de la multiplicité des interventions, ce qui n'est pas exempt d'une insuffisance dans l'exercice du pouvoir de direction privant de fondement certain l'exercice de son corollaire que constitue le pouvoir disciplinaire ; qu'au surplus la durée des faits relevée par le jugement ainsi que la circonstance que ce ne soit qu'à l'occasion d'un deuxième remplacement que l'employeur aurait découvert les faits fait douter de l'ignorance alléguée par celui-ci alors que les responsables de secteur doivent vérifier les conditions d'exécution de leur mission par les salariées intervenant au domicile des personnes aidées ; qu'enfin compte tenu de la durée d'embauche de Madame Q... et de l'absence de sanctions antérieures, pour ce seul fait la sanction choisie s'avère disproportionnée, alors que notamment une mise à pied aurait été dans un premier temps de nature à attirer l'attention de la salariée sur son manquement et à en prévenir le renouvellement ; que cette analyse commande donc de confirmer le jugement sur le licenciement sans cause réelle sérieuse, et la condamnation subséquente de l'appelante au paiement des indemnités de rupture et salaire de la mise à pied conservatoire ;

Alors, de deuxième part, que le fait pour un salarié effectuant un travail au domicile d'une personne bénéficiaire d'aides sociales à cet effet, d'accepter de faire ce travail au domicile d'un tiers, en dissimulant ce fait à l'égard de son employeur par une utilisation dévoyée du système de surveillance, susceptible de caractériser un acte de complicité du délit prévu et réprimé par l'article 441-6 du code pénal, constitue une faute grave, sans que le fait que l'employeur, compte tenu de la durée de ce comportement ait pu ou aurait pu en avoir connaissance s'il avait exercé une surveillance plus étroite sur son salarié, puisse retirer à ces faits ce caractère ; qu'en statuant dès lors par les motifs inopérants déduits de ce que la surveillance exercée par l'employeur aurait été insuffisante et qu'il existait un doute quant à l'ignorance alléguée de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1234-1, L.1234-4 et L.1234-9 du code du travail ;

Alors, de troisième part, que de tels faits conservent leur caractère de faute grave, nonobstant l'ancienneté ou le comportement antérieur du salarié ; qu'en statuant à nouveau par de tels motifs inopérants la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1234-1, L.1234-4 et L.1234-9 du code du travail ;

Alors, de quatrième part, qu'en statuant de la sorte, sans s'expliquer sur la matérialité même du fait reproché à Madame Q... consistant, alors qu'elle devait effectuer un travail au domicile d'une personne déterminée, bénéficiaire d'aides sociales à cet effet, d'accepter de faire ce travail au domicile d'un tiers, en dissimulant ce fait à l'égard de son employeur par une utilisation dévoyée du système de surveillance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1234-1, L.1234-4 et L.1234-9 du code du travail ;

Alors, de cinquième part, qu'en statuant de la sorte sur la possible connaissance de ce comportement par l'employeur, la cour d'appel s'est déterminée par un motif hypothétique et a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1234-1, L.1234-4 et L.1234-9 du code du travail ;

Alors, de sixième part, que la cour d'appel qui rappelle que l'employeur a mis en place un système de télégestion, ne pouvait lui reprocher l'insuffisance de la surveillance ainsi exercée sur ses salariés, sans rechercher si cette surveillance n'avait pas été mise en échec par l'utilisation dévoyée qui en avait été faite par Madame Q..., sans que cette insuffisance puisse dès lors être imputée à l'employeur, victime du comportement de sa salariée ; qu'à cet égard encore la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1234-1, L.1234-4 et L.1234-9 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 17-11.099
Date de la décision : 06/03/2019
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre sociale, arrêt n°17-11.099 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 06 mar. 2019, pourvoi n°17-11.099, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.11.099
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