CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 février 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10107 F
Pourvoi n° Y 16-23.568
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme P... X..., épouse E... , domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 9 juin 2016 par la cour d'appel d'Amiens (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à M. R... E... , domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 15 janvier 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Alain Bénabent , avocat de Mme X..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. E... ;
Sur le rapport de Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. E... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir prononcé le divorce aux torts partagés des époux ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QUE « M. E... ne conteste aucunement mener une relation adultère avec Mme N..., ces faits étant constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage imputables à l'époux rendant intolérable le maintien de la vie commune » ; en conséquence, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs, de Mme X..., les torts du mari dans le divorce doivent être retenus ; dans son arrêt du 22 septembre 2010, alors qu'elle était saisie de demandes relatives au devoir de secours, (
) et dans l'arrêt du 1er juin 2011, toujours saisie de demandes relatives au devoir de secours (
) la cour ne s'éatnt aucunement prononcée quant au mérite des pièces de l'époux du chef d'une demande en divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil, la motivation de premier juge selon laquelle « il résulte du procès-verbal de constat dressé le 27 octobre 2009 par la SCP A...-J..., huissier de justice à Beauvais, que les effets personnels de L... G... ont été constatés au domicile de l'épouse, tels que des courriels adressés au nom de M. G..., avis d'imposition, un carnet de chèque au même nom avec une adresse située à Gournay en Bray, un rasoir électrique masculin et des vêtements et chaussures dans le dressing. Il a été constaté par ailleurs la présence d'un homme d'une soixantaine d'années qui a quitté brusquement l'habitation par une fenêtre située à l'arrière de l'habitation, lorsque l'huissier a expliqué l'objet de sa visite à l'épouse. Les explications de l'épouse quant au comportement de l'homme présent à son domicile apparaissent comme peu convaincantes. Les attestations versées ne sont pas faites par des témoins directs de la scène. Par ailleurs il importe peu de connaître l'identité de cet homme seule la nature de la relation qu'il entretient avec l'épouse étant nécessaire. Enfin, l'existence d'un concubinage est superfétatoire. La seule démonstration d'une relation amoureuse ou sexuelle de l'épouse avec un tiers suffit à démontrer la violation de l'obligation de fidélité. La présence d'objets personnels masculins au domicile de l'épouse, ainsi que le comportement de l'homme constaté par huissier de justice en 2009, suffisent à caractériser la nature des relations extra-conjugales de l'épouse, constituant une violation grave des obligations du mariage », n'est donc nullement en contradiction avec une décision antérieure de la cour du même chef ; que cette motivation
apparaît tout à fait pertinente quant à l'existence d'une relation de l'épouse pour le moins injurieuse à l'égard de l'époux, ces faits étant constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage imputables à l'épouse rendant intolérable le maintien de la vie commune, et ce nonobstant le temps écoulé entre la séparation des époux et la date du procès-verbal de la SCP A...-J..., Mme X... s'étant, face à son époux tout au long de la procédure les opposant depuis 1990, constamment prévalue de son très grand attachement à l'institution du mariage et à son statut d'épouse, si bien qu'elle ne saurait à présent exciper du temps écoulé depuis la séparation des époux pour justifier ce comportement fautif au regard des obligations du mariage ;
ALORS QUE ne rend pas intolérable le maintien de la vie commune la faute commise par un époux après plusieurs années de séparation légale ; qu'en jugeant que la relation de l'épouse avec un tiers, établie par un constat d'huissier en 2009, avait rendu intolérable le maintien de la vie commune, tout en ayant relevé que les époux étaient en procédure de divorce depuis 1990, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé l'article 242 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. E... à verser à l'exposante une prestation en capital de 170 880 euros dont il pourra s'acquitter par mensualités de 1 780 euros pendant huit ans ;
AUX MOTIFS QUE « les époux ont sensiblement le même âge soit 70 ans et 72 ans, Mme P... X... étant née le [...] et M. R... E... le [...] ; Mme X... se prévaut de difficultés de santé à raison en particulier d'une infection du rachis cervical, d'un thyroïdite, d'une opération des yeux et d'un rhizarthrose, sans pour autant démontrer, un état de santé ou des circonstances de son âge ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins au vu des certificats et examens médicaux et en particulier celui du 25 janvier 2006, qui indique seulement "Son état de santé ne lui permet aucune activité professionnelle l'exposant aux efforts physiques mobilisant la charnière lombo-sacrée", ce qui ne lui interdisait pas tout emploi, du certificat du 29 avril 2009 concernant un oedème de la cheville droite , le certificat du 22 décembre 2009 étant relatif à une "hyperfixation intense de la cheville droite et du tiers inférieur du tibia évoquant un processus inflammatoire important... peu évocateur d 'algodystrophie du membre inférieur droit", de simples semelles orthopédiques étant prescrites en 2014, le déplacement en fauteuil roulant constaté par le médecin généraliste le 29 octobre et jusqu'au 24 décembre 2009 étant à la seule initiative de la patiente la visite d'un huissier ayant eu lieu à ses dires au praticien deux jours avant le 29 octobre 2009, du certificat du 22 octobre 2010 relatif à une gonalgie droite soignée par antalgiques, du certificat du 5 novembre 2012 en faveur d'une thyroïdite chronique avec nodules nécessitant selon le certificat du 19 novembre 2012 essentiellement une surveillance, les documents relatifs à l'opération en ophtalmologie du 25 juin 2013 ne permettant pas de connaître la nature de l'affection de Mme X... et le certificat du rhumatologue du 5 mai 2014 prescrivant une arthroinfiltration pour rhizarthrose sévère ne caractérisant pas d'invalidité, outre un certificat médical du 6 janvier 2016 d'un angiologue relatif à des injections sclérosantes ; de son côté l'époux ne fait pas état de problèmes de santé ; le mariage célébré le 28 décembre 1978 aura duré 37 ans, dont une douzaine d'années de vie commune dans le mariage, et par ailleurs les époux ont connu une période de concubinage avant le mariage, qu'il n'y a pas lieu de prendre ici en compte ; aucun enfant n'est issu de leur union ; les époux ont fait établir avant le mariage un contrat de séparation de biens, établi par Maître F... , notaire à Versailles, le 8 novembre 1978 et il doit être rappelé que l'article 3 de ce contrat de mariage après rappel de ce que conformément aux dispositions de l'article 214 du code civil les époux contribuent aux charges du mariage en proportion de leurs revenus et gains respectifs un alinéa 2 ainsi libellé : ‘'à titre principal, néanmoins ces charges incomberont au mari. Il sera obligé de fournir à son épouse tout ce qui sera nécessaire pour les besoins de la vie selon ses facultés et son état. L'épouse s'acquittera de sa contribution en la prélevant sur ses ressources et par son activité au foyer ou sa collaboration à la profession du mari", ce qui démontre assez l'accord des époux pour que l'épouse, qui était secrétaire de profession alors que l'époux était directeur de société, n'exerce pas d'activité professionnelle après le mariage, ce qui a obéré pour l'épouse l'acquisition de droits à pension pendant la vie commune et sa carrière ayant été interrompue entraînant l'obsolescence de sa modeste qualification, a également contribué à limiter ses possibilités de retrouver un emploi et donc d'acquérir de nouveaux droits à la retraite après le départ de son époux même si, âgée d'une petite quarantaine d'années, elle est était encore en âge de reprendre une formation qualifiante afin de pouvoir plus facilement retrouver un emploi ; les deux époux ont chacun fait valoir leurs droits à la retraite ; au vu des pièces régulièrement communiquées, l'épouse perçoit des pensions de retraite pour environ 500 euros par mois et il n'est pas démontré qu'elle ne s'acquitte pas seule de ses charges courantes, étant observé que si elle doit quitter l'ancien domicile conjugal elle devra se reloger ; Mme X... aux termes de moyens développés dans le dispositif de ses conclusions reproche à M. E... de ne pas avoir communiqué les déclarations de succession de sa mère, son père, son père adoptif, les pièces justificatives du quantum de sa dette à l'égard de la BNP Paribas, les relevés lisibles et complets de tous ses comptes bancaires pour la période du 1er janvier 2012 au 2 janvier 2014 et notamment ceux de son compte n° [...] ouvert au Crédit Agricole Alpes Provence, les tableaux d'amortissements afférents aux emprunts dont il se prévaut, les justificatifs de ses placements, l'estimation de la propriété appartenant à la SCI des Drailles, son avis d'imposition complet au titre des revenus de 2012, la déclaration fiscale complète souscrite par sa compagne, Mme N..., en 2013, y compris la partie afférente à la déclaration d'ISF, la déclaration de revenus fonciers de Mme N... souscrite en 2013, l'avis d'imposition complet de Mme N... au titre de 2013, les pièces justificatives de ses revenus et de ceux de sa compagne, Mme N..., en ce comprises les déclarations de revenus et d'ISF et les avis d'imposition, au titre de 2014, et ce afin de dissimuler sa situation financière et patrimoniale ainsi que celle de sa compagne, et demande à la cour d'en tirer les conséquences ; cependant il y a lieu de rappeler : d'une part que la cour se situant à la date de l'arrêt et dans un avenir prévisible, il importe relativement peu que la cour ne dispose pas de pièces anciennes, relatives à la situation financière respective des époux, vieilles de plusieurs années tel un avis d'imposition complet de 2012, d'autre part que Mme N... est un tiers à la présente procédure et qu'il ne saurait être exigé de celle-ci qu'elle communique même par le biais de son concubin des justificatifs de ses propres ressources, impositions et de son patrimoine, devant en revanche être dit qu'il est constant que, grâce à ce concubinage reconnu, l'époux, qui perçoit des pensions de retraite pour environ 4.215 euros par mois ne supporte actuellement que très peu de charges de la vie courante et est logé via la SCI dont il ne détient qu'une part et qu'au vu de l'ancienneté de cette union libre que le dit concubinage apparaît suffisamment stable pour que dans un avenir prévisible M. E... ne supporte encore que très peu de charges de la vie courante et soit toujours logé ; qu'enfin si M. E... ne justifie pas des déclarations de succession de ses parents légitimes ou adoptif, de ses comptes bancaires ou de ses tableaux d'amortissement d'emprunts ce qui doit être considéré, il fait justement valoir que la perception des sommes provenant desdites successions est antérieure à la liquidation de sa société pour laquelle il était caution et qu'il a réglé une partie de ses dettes depuis le rapport de maître Q...; étant rappelé que la prestation compensatoire présente un caractère forfaitaire, n'a pas pour objet de parvenir à la parité des fortunes des époux et ne doit pas faire obstacle au régime matrimonial librement choisi les époux qui en l'espèce s'il prévoyait que les charges du mariage incombaient au mari était un contrat de séparation de biens ; cependant, outre la disparité de revenus entre les époux, la cour constate qu'il existe une disparité de patrimoines puisque selon le rapport de Maître Q..., le patrimoine de M. E... comprend essentiellement l'ancien domicile conjugal d'une valeur d'environ 300.000 euros (acheté le 6 novembre 1984 à l'aide de deniers personnels pour 680.000 francs et deniers d'emprunt pour 300.000 francs), celui-ci devant entre 45.000 euros et 65.000 euros à Mme X... outre des dettes d'environ 60.000 euros à l'époque de l'établissement du rapport, qui ont depuis été pour une large part réglées alors que le patrimoine de Mme X... comprend essentiellement une parcelle de terrain attenante au bien propre de son époux et un pré d'une valeur d'environ 8.000 euros au vu de sa déclaration sur l'honneur du 27 novembre 2013, étant observé que si elle réclame 65.000 euros à son époux, dont 20.000 euros contestés par celui-ci, ces sommes ont fait l'objet de reconnaissances de dettes à sa fille et à une amie ; au vu de ces éléments, s'il résulte de la rupture du mariage une disparité dans les conditions de vie respectives des époux au détriment de Mme X..., les demandes de Mme X... apparaissant toutefois très excessives tant dans leur quantum que dans leurs modalités : tant sa demande d'attribution d'un droit viager d'usage et d'habitation, qui comme l'attribution de biens en propriété toutes deux prévues au 2° de l'article 274 du code civil, alors que l'époux dispose de pensions de retraite d'un montant mensuel très largement suffisant au vu de ses faibles charges pour s'acquitter d'un capital d'un montant adapté à l'espèce, par versement mensuel pendant 8 ans, que sa demande de pension viagère alors qu'elle n'en remplit pas les conditions tant au vu de son état de santé que de son âge dont il est insuffisamment démontré que l'un ou l'autre ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, et enfin sa demande de voir dire que la prestation compensatoire sera nette de tous droits n'apparaît pas suffisamment précise pour qu'il y soit fait droit autrement qu'en disant que le paiement de la prestation compensatoire s'effectue aux frais du débiteur, tout autre avantage apparaissant excessif » ;
1°/ ALORS QU' à titre exceptionnel, le juge peut, par décision spécialement motivée, lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère ; que, pour juger que Mme E... ne remplissait pas les conditions pour pouvoir prétendre au versement d'une prestation compensatoire sous la forme d'une rente viagère, la cour d'appel a retenu qu'il était insuffisamment démontré que son état de santé ou son âge ne lui permettait pas de subvenir à ses besoins ; qu'en statuant ainsi, lorsqu'elle avait constaté que Mme E..., née le [...] , était âgée de 70 ans, ce qui est objectivement de nature à l'empêcher de subvenir à ses besoins par une activité rémunératrice, la cour d'appel a violé l'article 276 du code civil ;
2°/ ALORS QUE la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu'en retenant, pour limiter le montant de la prestation compensatoire et en échelonner le règlement, que si M. E... ne justifiait pas des déclarations de successions de ses parents légitimes ou adoptif, de ses comptes bancaires ou de ses tableaux d'amortissement d'emprunts, il faisait justement valoir que la perception des sommes provenant desdites successions était antérieure à la liquidation de sa société pour laquelle il était caution et qu'il avait réglé « une partie de ses dettes depuis le rapport de maître Q... », mais sans fournir la moindre indication chiffrée sur les différentes sommes en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 271 du code civil ;
3°/ ALORS QUE le juge doit fixer le montant de la prestation compensatoire en tenant compte, notamment, de la situation de concubinage du débiteur au titre de l'incidence qu'elle est susceptible d'avoir sur ses ressources et donc sur l'appréciation de la disparité que la rupture du mariage est susceptible de créer dans les conditions de vie respectives des ex-époux ; qu'en retenant, pour limiter le montant de la prestation compensatoire et en échelonner le règlement, que Mme N... étant un tiers à la procédure, il ne saurait être exigé de justificatifs de ses ressources, tout en concédant que, grâce à ce concubinage, l'époux ne supportait que très peu de charges et était logé gratuitement, mais sans rechercher, outre l'absence de charges, quelle était l'incidence de cette situation de concubinage sur les ressources de M. E... et donc sur la disparité que la rupture du mariage créait dans les conditions de vie respectives des époux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 271 du code civil.