CIV. 2
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 janvier 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme G..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10013 F
Pourvoi n° F 17-24.683
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Jean-claude X..., domicilié [...] , tant en son nom personnel et agissant en qualité de mandataire de 135 médecins actionnaires de la société Eukaria,
contre l'arrêt rendu le 29 juin 2017 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile A), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Paul Y..., domicilié [...] ,
2°/ à M. Yves Z..., domicilié [...] ,
3°/ à la société A..., Carboni, I...et associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , pris en qualité de mandataire ad'hoc de la société Eukaria,
4°/ à M. Eric A..., domicilié [...] , tant en son nom personnel et pris en qualité de mandataire ad'hoc de la société Eukaria,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 novembre 2018, où étaient présents : Mme G..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. B..., conseiller rapporteur, Mme Maunand, conseiller, Mme Rosette, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. X..., de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de M. B..., conseiller, l'avis de M. C..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Eric A..., tant en son nom personnel, qu'en qualité de mandataire ad hoc de la société Eukaria et de la société A..., Carboni, I...et associés, pris en qualité de mandataire ad hoc de la société Eukaria ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; le condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la déclaration d'appel reçue le 18 septembre 2017 en ce qu'elle émane de 139 médecins actionnaires représentés par M. Jean-Claude X... et dit que la procédure d'appel se poursuivrait entre ce dernier, M. Paul Albert Y... ainsi que M. Eric A... et la Selarl A...-H...-I...;
AUX MOTIFS QUE c'est par une requête unique déposée par voie électronique le 29 novembre 2016 que M. Y... a déféré à la cour les deux ordonnances successives rendues par le conseiller de la mise en état les 25 octobre 2016 et 15 novembre 2016 ; que la requête en déféré de l'ordonnance préparatoire du 25 octobre 2016 est par conséquent irrecevable comme n'ayant pas été présentée dans le délai de 15 jours de la date de l'ordonnance, ainsi que l'exige l'article 916 du code de procédure civile ; (
) que sur la recevabilité des conclusions de déféré déposées par Maître Éric A... à titre personnel et la Selarl A...-H...-I..., Maître Éric A... et la Selarl A...-H...-I...n'ont certes pas conclu devant le conseiller de la mise en état sur l'incident de nullité de la déclaration d'appel formé par M. Y..., mais aucune disposition n'interdit à une partie, qui y a intérêt, de conclure pour la première fois devant la cour au soutien du déféré formé par une autre partie ; qu'au motif qu'ils n'auraient pas eux-mêmes déféré l'ordonnance à la cour dans le délai de 15 jours prévu par l'article 916 du code de procédure civile, leurs conclusions d'appui ne sauraient par conséquent être déclarées irrecevables ; que sur la régularité de la déclaration d'appel, trois des 139 médecins mandants (Jean Didier D..., Michel E... et Jean-Jacques F...) sont décédés antérieurement à la régularisation de la déclaration d'appel du 18 septembre 2015 ; que ces décès ont mis fin de plein droit aux mandats d'agir en justice que ces trois médecins avaient consentis à M. X... ; que force est dès lors de constater qu'au jour de la déclaration d'appel ce dernier ne disposait plus d'aucun pouvoir pour exercer un recours en leur nom, de sorte que l'acte d'appel est frappé à leur égard d'une nullité de fond, qui n'a pas pu être couverte par la reprise d'instance des héritiers aux termes de nouveaux pouvoirs délivrés le 10 septembre 2016 ; que l'ordonnance déférée qui a annulé la déclaration d'appel formée au nom et pour le compte de ces trois médecins préalablement décédés sera par conséquent confirmée ; que M. X... verse au dossier l'ensemble des mandats initiaux donnés par 139 médecins actionnaires ; que ces mandats, tous identiques et tous datés du 15 mai 2011, sont rédigés en ces termes :
« La société Eukaria dont Mr/Mme.... est actionnaire a été mise en liquidation judiciaire.
Chacun des médecins actionnaires a décidé de poursuivre les anciens dirigeants de la société et le mandataire judiciaire en responsabilité civile et pénale.
C'est dans ce contexte qu'ils ont mandaté M. X... en qualité de mandataire pour les représenter devant les juridictions civile et pénale compétentes afin d'obtenir réparation du préjudice subi.
Ainsi il a été expressément convenu et arrêté ce qui suit :
Article 1
Mr/Mme.... confie à M. X... la mission d'agir en son nom et pour son compte conformément à l'article R. 225 ' 167 du code de commerce disposant que : « Les actionnaires qui, sur le fondement des dispositions des articles L 225-251 et L.225- 256, entendent demander aux administrateurs, au directeur général ou aux membres du directoire la réparation du préjudice qu'ils ont subi personnellement en raison de mêmes faits peuvent donner à un ou plusieurs d'entre eux le mandat d'agir en leur nom devant les juridictions civiles, sous les conditions suivantes :
Le mandat est écrit et mentionne expressément qu'il donne au ou aux mandataire le pouvoir d'accomplir au nom du mandant tous les actes de procédure ; il précise, s'il y a lieu, qu'il emporte le pouvoir d'exercer les voies de recours ;
La demande en justice indique les noms, prénoms et adresse de chacun des mandants ainsi que le nombre des actions qu'ils détiennent. Elle précise le montant de la réparation réclamée pour chacun d'eux » ;
Article 2
M. X... accepte par la présente d'accomplir le mandat qui lui est confié » ; qu'il est de principe que le mandat de représentation en justice n'emporte pas mandat d'exercer les voies de recours contre le jugement, le mandataire devant justifier d'un pouvoir spécial pour interjeter appel ; que conformément à ce principe de procédure l'article R. 225-167 du code de commerce, qui est reproduit intégralement dans les mandats litigieux, décide que le mandat d'agir en justice en réparation de son préjudice personnel donné par un actionnaire à un autre actionnaire doit préciser, s'il y a lieu, qu'il emporte le pouvoir d'exercer les voies de recours ; qu'ainsi, le pouvoir donné au mandataire de relever appel du jugement rendu sur l'action en réparation du préjudice personnel subi par les actionnaires doit-il résulter spécialement et expressément du mandat « ad litem » ; que tel n'est certainement pas le cas en l'espèce, alors que les 139 médecins actionnaires se bornent à mandater M. X... « pour les représenter devant les juridictions civile et pénale compétentes afin d'obtenir réparation du préjudice subi » sans évoquer en aucune façon l'éventualité de l'exercice des voies de recours, de sorte qu'il ne peut être sérieusement soutenu qu'un tel mandat emporterait implicitement celui d'interjeter appel et donc d'introduire une nouvelle instance, l'indication que mission est donnée au mandataire d'agir « conformément à l'article R. 225-167 du code de commerce » ne traduisant pas, à défaut de mention plus explicite, la volonté claire et certaine des mandants d'autoriser dès l'origine l'exercice des voies de recours ; qu'en l'absence de toute volonté exprimée de confier le soin au mandataire de mener l'ensemble des procédures jusqu'à leur terme, la cour estime par conséquent que M. X... ne disposait pas du pouvoir de former appel du jugement rendu le 2 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Lyon au nom et pour le compte de 139 médecins actionnaires, ce qui entache d'une nullité de fond la déclaration d'appel du 18 septembre 2015, laquelle nullité n'a pas pu être couverte par les nouveaux mandats délivrés en septembre et octobre 2016 postérieurement à l'expiration du délai d'appel ; que par voie de réformation de l'ordonnance déférée sur ce point, l'acte d'appel sera par conséquent annulé en ce qu'il émane de 139 médecins actionnaires représentés par M. X... ;
1°) ALORS QUE les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ont autorité de chose jugée au principal ; que l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état rejette la demande d'annulation de la déclaration d'appel a autorité de chose jugée et ne peut, dès lors qu'elle n'a pas été régulièrement été déférée à la cour d'appel, être remise en cause ; qu'en l'espèce, par son ordonnance du 25 octobre 2016, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de M. Y... tendant à l'annulation de la déclaration d'appel de M. X... faite au nom de 139 médecins actionnaires de la société Eukaria ; que le conseiller de la mise en état a jugé que M. X... justifiait d'un mandat lui permettant d'interjeter appel au nom de ces médecins, pour en déduire que la déclaration d'appel faite en leurs noms était valable ; que l'arrêt attaqué, après avoir constaté que le déféré de l'ordonnance du 25 octobre 2016 avait été formé hors délai et était ainsi irrecevable, a néanmoins statué sur la régularité de la déclaration d'appel et a jugé que le mandat donné par les 139 médecins à M. X... ne permettait pas au mandataire d'interjeter appel en leurs noms, pour en déduire la nullité de la déclaration d'appel concernant ces 139 médecins ; qu'en statuant ainsi, tandis que la question de la validité de la déclaration d'appel avait été tranchée par l'ordonnance du 25 octobre 2016, qui n'avait pas été régulièrement frappée de déféré, la cour d'appel a violé l'autorité de chose jugée attachée à cette décision et violé les articles 914 et 916 du code de procédure civile, en leur rédaction applicable en l'espèce, ensemble les articles 480 du même code et 1355 du code civil ;
2°) ALORS QUE, après dessaisissement du conseiller de la mise en état, les parties ne sont plus recevables à soulever les exceptions de procédure et incidents relevant de sa compétence exclusive, à moins qu'ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement à son dessaisissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. A... et la Selarl A...-H...-I...n'avaient pas saisi le conseiller de la mise en état d'une demande d'annulation de la déclaration d'appel faite par M. X... au nom des 139 médecins actionnaires de la société Eukaria ; que par son ordonnance du 25 octobre 2016, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de M. Y... tendant à l'annulation de la déclaration d'appel de M. X... faite au nom de 139 médecins actionnaires de la société Eukaria ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors prononcer l'annulation de la déclaration d'appel pour défaut de mandat régulier de M. X... sur le fondement des conclusions de M. A... et de la Selarl A...-H...-I..., qui n'avaient pas conclu devant le conseiller de la mise en état et n'avaient pas déféré son ordonnance à la cour d'appel ; qu'en prononçant néanmoins la nullité de la déclaration d'appel faite par M. X... au nom des 139 médecins actionnaires de la société Eukaria, la cour d'appel a violé les articles 914 et 916 du code de procédure civile, en leur rédaction applicable en l'espèce, ensemble les articles 480 du même code et 1355 du code civil.