LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 386 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que dans un litige opposant la société Marbi à la commune de Cernay (la commune), un conseiller de la mise en état a ordonné un sursis à statuer jusqu'à ce qu'intervienne la décision de la Cour de cassation sur les pourvois formés par les parties contre l'arrêt tranchant pour partie le principal et les renvoyant devant le conseiller de la mise en état pour qu'il soit conclu sur les dommages-intérêts ; que les pourvois ayant été rejetés par un arrêt du 17 avril 2013, la société Marbi a conclu au fond le 14 avril 2014 ; que l'affaire, d'abord radiée, a ensuite été retirée du rôle ; que le 15 mars 2016, la société Marbi a déposé des conclusions au fond de reprise d'instance ; que le conseiller de la mise en état a enjoint à la commune de conclure pour le 13 septembre 2016 ; que le 12 septembre 2016, la commune a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident de péremption ;
Attendu que, pour constater la péremption de l'instance, l'arrêt retient que le nouveau délai de péremption, qui a couru à compter du 14 avril 2014, n'a pas été interrompu par les conclusions du 15 mars 2016 qui, étant identiques aux précédentes, n'étaient pas de nature à faire progresser l'affaire ou à lui donner une impulsion nouvelle ou encore à faire avancer le litige vers sa conclusion ;
Qu'en statuant ainsi, tout en relevant que la commune avait reçu injonction du conseiller de la mise en état de conclure pour le 13 septembre 2016, ce dont il résultait qu'il avait été mis fin à la suspension de l'instance par la réinscription de l'affaire au rôle telle que demandée par la société Marbi dans ses conclusions au fond et en reprise d'instance du 15 mars 2016, manifestant par là même sa volonté de voir progresser l'affaire et peu important que ces conclusions soient la réitération au fond des précédentes, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne la commune de Cernay aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande, la condamne à payer à la société Marbi la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ohl et Vexliard, avocat aux Conseils, pour la société Marbi
En ce que l'arrêt attaqué, déclarant non fondé et rejetant le déféré formé par la société Marbi, a, par confirmation de l'ordonnance du conseiller de la mise en état, constaté la péremption de l'instance opposant la société Marbi à la commune de Cernay enregistrée sous le numéro 16/897 sur le registre des affaires de la cour d'appel ;
Aux motifs qu'il y a lieu de relever, s'agissant des faits de la cause que par ordonnance du 25 juin 2012, le conseiller de la mise en état, à la demande conjointe des parties sur ce point, a ordonné qu'il soit sursis à statuer jusqu'au prononcé de l'arrêt à intervenir de la Cour de cassation saisie d'un pourvoi à l'encontre de l'arrêt déjà rendu par la cour d'appel de Metz le 19 octobre 2011, avec cette conséquence qu'aucune péremption n'est encourue à ce niveau de la procédure, compte tenu de ce que le délai de deux ans a été suspendu jusqu'au prononcé de l'arrêt de rejet de la Cour de cassation en date du 17 avril 2013 et qu'en application de l'article 392 alinéa 2 du code de procédure civile c'est bien un nouveau délai de péremption qui a commencé à courir à partir de la décision de la Cour de cassation ; ce délai n'a pas été ensuite suspendu par l'ordonnance de radiation rendue le 14 avril 2014 dans les circonstances particulières suivantes de conclusions de reprise d'instance et au fond de la Sarl Marbi envoyées par voie électronique à la cour d'appel de Metz, via le RPVA, le 14 avril 2014 à 12h30, alors que l'audience de la mise en état devait avoir lieu le même jour à 14 heures et que par suite ce message n'a pu être traité par le greffe et intégré dans WinCA et porté à la connaissance du conseiller de la mise en état ; pour autant, il y a lieu de constater qu'aucune démarche n'a été entreprise par la société Marbi pour faire rapporter le cas échéant une ordonnance prononcée à la suite de la tardiveté de l'envoi de ses écritures ; au contraire la société Marbi a repris l'instance au moyen des conclusions de reprise d'instance et au fond du 15 mars 2016 intervenues dans ces conditions un mois avant l'expiration du délai de péremption ; ainsi ce qui est à présent en litige est le point de savoir si le nouveau délai de péremption qui a commencé à courir à partir de cette date et de ces conclusions du 14 avril 2014 a été ou non valablement interrompu par les nouvelles conclusions de reprise d'instance valant conclusions au fond et surtout quelle est la valeur interruptive de ces conclusions émises le 15 mars 2016 au regard de l'article 386 du code de procédure civile et de la définition donnée par la jurisprudence aux diligences requises par ce texte ; dans ce contexte il n'est pas contesté (ce point peut être vérifié aisément par l'examen des conclusions du 14 avril 2014 et du 15 mars 2016 figurant au dossier de pièces des parties) que les conclusions du 15 mars 2016 sont la reprise exacte de celles du 14 avril 2014 et que dans les deux cas le bordereau de pièces annexées à ces conclusions porte la même date du 22 juin 2009 et fait mention des mêmes pièces numérotées 1 à 15 ; de cette identité de ces deux jeux d'écritures il se déduit que les écritures identiques du 15 mars 2016 n'étaient pas de nature par rapport à celles prises le 14 avril 2014, à faire progresser l'affaire ou à lui donner une impulsion nouvelle ou encore à faire avancer le litige vers sa conclusion ;
il est exact que la commune de Cernay s'est abstenue, alors qu'un délai lui avait été imparti pour ce faire pour le 13 septembre 2016, de répondre tant aux conclusions du 14 avril 2014 qu'à celles du 15 mars 2016, date à laquelle elle a précisément introduit sa requête aux fins de voir constater la péremption ; toutefois il était possible à la Sarl Marbi de faire avancer la procédure et de la mener à son terme, notamment, afin de contraindre la partie adverse à répondre à ses écritures et, à défaut d'établissement d'un calendrier de procédure, de saisir le conseiller de la mise en état d'une demande en vue d'obtenir le prononcé d'une ordonnance de clôture et le renvoi à une audience de plaidoirie ; la péremption est par conséquent encourue à la date du 14 avril 2016 et doit être constatée sans pouvoir être corrigée par le dépôt de nouvelles pièces le 18 avril 2016, soit après l'expiration du délai de péremption puis de nouvelles conclusions le 22 avril 2016 ;
1°/ Alors qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir pourtant constaté que les conclusions d'appel déposées le 14 avril 2014 au nom de la Sarl Marbi n'ayant pas été traitées à temps par le greffe et n'ayant pas été portées à la connaissance du conseiller de la mise en état lors de l'audience de mise en état du même jour, celui-ci avait radié l'affaire par ordonnance du 14 avril 2014, d'où il s'évinçait que les conclusions d'appel du 15 mars 2016, qui sollicitaient expressément, dans le délai de péremption de l'instance, la reprise de l'instance radiée par erreur étaient bien de nature à donner à l'affaire une impulsion processuelle, constituant ainsi une diligence au sens de l'article 386 du code de procédure civile, la cour d'appel, en décidant le contraire, a violé les dispositions de ce texte ;
2°/ Et alors qu'en retenant que les conclusions déposées le 15 mars 2016 n'étaient pas de nature, par rapport à celles identiques du 14 avril 2014, à faire progresser l'affaire quand il résultait de ses propres constatations qu'à la suite du dépôt des conclusions de reprise d'instance et au fond de la société Marbi le 15 mars 2016, dans le délai de péremption, l'affaire radiée par erreur avait été rétablie au rôle de la cour d'appel et la commune de Cernay s'était vu impartir un délai pour conclure en réponse au 13 septembre 2016, ce dont il résultait que lesdites conclusions de reprise d'instance avaient fait progresser l'affaire et constituaient une diligence interruptive de péremption, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a derechef violé l'article 386 du code de procédure civile.