CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 novembre 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10735 F
Pourvoi n° G 17-26.479
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ la société Institut de management et de marketing sup de co Caraïbes (12M Sup de co), société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ M. Alain X..., domicilié [...] , agissant en qualité d'administrateur judiciaire de la société Institut de management et de marketing sup de co Caraïbes,
3°/ M. Jean-Marie Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 15 mai 2017 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige les opposant à Mme Myriam Z..., domiciliée [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 octobre 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme A... , conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Institut de management et de marketing sup de co Caraïbes, de M. X..., ès qualités, et de M. Y..., de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de Mme Z... ;
Sur le rapport de Mme A... , conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Institut de management et de marketing sup de co Caraïbes, M. X..., ès qualités et M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-huit, et signé par lui et par Mme Pecquenard, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Institut de management et de marketing sup de co Caraïbes, M. X..., ès qualités, et M. Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de Mme Z... à verser à la Sarl I2M Sup de Co Caraïbes et à M. Y... la somme de 3.000 € chacun à titre de dommages et intérêts en réparation de la totalité de leur préjudice, et de les avoir en conséquence déboutés du surplus de leurs demandes ;
AUX MOTIFS QU' en ce qui concerne l'appréciation du préjudice subi et son indemnisation, il convient tout d'abord de relever que nonobstant des mentions quelque peu ambiguës sur les conséquences du défaut de comparution des défendeurs, le juge des référés a expressément rappelé les dispositions de l'article 472 du code de procédure civile et a vérifié les pièces produites par la Sci Le Trophée à savoir le bail commercial, l'absence de clause permettant de donner congé avant le 1er octobre 2010, la mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 avril 2009 et l'engagement de M. Y... en qualité de caution personnelle et solidaire de l'entreprise dont il est le gérant avant de juger qu'il devait effectivement faire droit aux demandes ; qu'en outre, la signification de l'ordonnance de référé, dans des conditions non critiquées, a permis aux défendeurs de faire appel le 4 février 2010 afin de faire valoir tous les moyens dont ils disposaient tant en ce qui concerne une éventuelle irrégularité des actes d'assignation qu'en ce qui concerne leur obligation à paiement ; que si l'examen du dossier en appel n'est pas parvenu à son terme, c'est uniquement en application des règles de procédure devant la cour d'appel à savoir que tout d'abord, l'affaire a été radiée du rôle par application de l'article 526 du code de procédure civile, et par une ordonnance du 24 mars 2011, à défaut par les appelants d'avoir exécuté l'ordonnance de référé sans démontrer que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que les appelants seraient dans l'impossibilité d'exécuter la décision ; que l'ordonnance indique notamment que « nul document comptable ne prouve une situation compromise de la Sarl et qu'il apparaît au contraire que M. Y... est dans la pleine capacité financière d'honorer la dette en qualité de caution personnelle et solidaire » ; que, quand bien même la validité des assignations, le principe de la dette, le montant et/ou l'engagement solidaire de M. Y... aurait été contesté, il appartenait aux appelants de se conformer aux règles de la procédure en appel afin de faire juger ces différents points ; que certes, ils ont sollicité ensuite du premier président de la cour d'appel de Fort-de-France la suspension de l'exécution provisoire assortissant de plein droit l'ordonnance de référé du 22 novembre 2009 mais par ordonnance de référé du 5 mai 2011, le premier président a considéré que si la réassignation des défendeurs aurait pu être ordonnée par le juge de référés, compte tenu du délai entre l'assignation du 12 mai 2015, délivrée en application de l'article 859 du code de procédure civile, et l'audience du 15 mai 2015, les deux conditions cumulatives, imposées par l'article 524 du code de procédure civile n'étaient pas réunie, car ni la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes ni M. Y... ne démontraient que l'exécution serait susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou que les requérants se trouveraient dans l'impossibilité d'exécuter la décision ; que la demande de suspension a donc été rejetée ; que l'ordonnance du 5 mai 2011 a fait l'objet, le 22 février 2012, d'un arrêt de cassation partielle, seulement en ce qu'il a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formée au profit de M. Y... et la cause et les parties ont été renvoyées, sur ce point, devant le premier président de la cour d'appel de Basse-Terre ; que la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formée par la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes a donc été définitivement rejetée, ainsi que l'a rappelé le premier président de la cour d'appel de Basse-Terre dans son ordonnance de référé du 18 juillet 2012, statuant sur le renvoi de la Cour de cassation ; qu'à l'égard de M. Y..., la même ordonnance a considéré que la première condition de l'article 524 du code de procédure civile, à savoir la violation du principe du contradictoire, était remplie, en raison des modalités de délivrance de l'assignation mais la demande d'arrêt de l'exécution provisoire a été rejetée, au motif, après examen des pièces produites, que M. Y... ne démontrait pas que le règlement de la somme de 22.000 € entraînerait pour lui des conséquences manifestement excessives, pas plus qu'il ne démontrait que le règlement de la dette pouvait présenter un caractère irréversible en raison de la situation financière de la Sci Le Trophée ; que ce n'est finalement qu'au mois de septembre 2012 que la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes et M. Y... ont demandé la réinscription de l'affaire au rôle, en justifiant du paiement de la somme de 22.000 € mais entre temps, une autre procédure avait opposé les parties, en ce qui concerne la résiliation du bail commercial par acquisition de la clause résolutoire, et avait donné lieu à un arrêt du 2 décembre 2011, accordant notamment une provision de 100.000 € sur les loyers impayés, ordonnant l'expulsion de la locataire, et fixant une indemnité d'occupation, de sorte que les demandes de la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes et de M. Y... ont été déclarées irrecevables en vertu de l'autorité de la chose jugée ; que certes, l'arrêt du 2 décembre 2011 a, à son tour, fait l'objet d'une cassation partielle et de nouvelles procédures ont continué à opposer les parties, dont la dernière en date, au moins en ce qui concerne les pièces produites, est un arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France du 1er mars 2016 déclarant notamment nulles et de nul effet les saisies-attribution pratiquées par la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes au préjudice de la Sci Le Trophée, observant en particulier qu'il appartenait à la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes de démontrer que les saisies contestées ne portaient que sur les sommes versées en vertu de l'arrêt cassé ; que l'arrêt a considéré que la créance de restitution invoqué par la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes à hauteur de 285.943,42 € n'était pas vérifiable au vu des pièces qu'elle produisait ; qu'en toute hypothèse, ainsi qu'il a déjà été indiqué ci-dessus, le préjudice subi ne peut être que celui en lien avec la faute reprochée lors de la délivrance des assignations du 12 mai 2009 et l'enchevêtrement judiciaire, qui s'était produit ultérieurement, a pour cause principale le fait que l'ordonnance du 27 novembre 2009, frappée d'appel dès le 4 février 2010, n'a finalement été exécutée que plus de deux ans plus tard, après avoir tenté en vain d'en arrêter l'exécution provisoire, de sorte que la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes et M. Y... n'ont pu solliciter utilement la remise au rôle qu'au mois de septembre 2012, alors que d'autres procédures avaient été diligentées par ailleurs ; qu'en conséquence, le préjudice à réparer est strictement celui de n'avoir pu comparaître en première instance, à l'audience du 15 mai 2009, puis à celle du 11 septembre 2009, sur réouverture des débats, et d'avoir été privé de ce seul degré de juridiction de sorte que la somme de 3.000 € apparaît constituer une juste indemnisation pour la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes et que la même somme de 3.000 € constitue également une juste réparation par M. Y..., étant rappelé que la décision du 27 novembre 2009 n'était qu'une ordonnance de référé, accordant une provision à concurrence des loyers et charges impayés du mois de janvier au mois de mai 2009 ; qu'il n'est en revanche imputable qu'à la Sarl Institut de Management et de Marketing Supérieur de Commerce Caraïbes et à M. Y... de n'avoir pu faire valoir leurs moyens éventuels devant la cour d'appel, sur l'appel par eux diligenté à l'encontre de cette ordonnance, de sorte que ce qu'ils qualifient de « perte de chance d'obtenir un procès équitable » n'est que partiellement imputable à la faute de Mme Z... et que les préjudices financiers et moraux par eux chiffrés sont très largement disproportionnés et étrangers aux conditions de délivrance des assignations du 12 mai 2009, d'autant plus que les nombreuses autres procédures ont pu leur conférer la possibilité de débattre des engagements résultant du bail commercial et de la caution consentie ; que le jugement du 5 février 2015 sera donc infirmé en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts accordés à M. Y... ; que la Sarl I2M Sup de Co Caraïbes et M. Y... seront donc déboutés du surplus de leurs demandes ;
ALORS QUE, le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit ; que les dommages et intérêts alloués à la victime doivent réparer le préjudice subi par cette dernière, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; que dans leurs conclusions d'appel, la société I2M Sup de Co et M. Y... faisaient valoir que l'ordonnance du 27 novembre 2009, rendue sans qu'ils aient pu comparaître devant le juge des référés ni faire valoir leurs moyens de défense par la faute de Me Z... avait ouvert « la voie à des procédures judiciaires longues, multiples et onéreuses (leur) causant par-là même une préjudice moral » et les contraignant « pour défendre leurs droits et intérêts » à « mobiliser des fonds importants », de sorte que leur préjudice financier et moral comprenait « les frais d'avocats en Guadeloupe et Martinique (audiences et déplacements), - les frais des honoraires des avocats aux Conseils, - les saisies sur comptes bancaires irrégulières, - le passage régulier des huissiers de justice dans la société (saisie-vente), - la multiplication des procédures judiciaires, - la mise en difficulté financière de toute la famille Y... et de leurs enfants » (cf. conclusions d'appel p.15 à 17) ; que la cour d'appel a elle-même retenu que le préjudice subi était « celui en lien avec la faute reprochée lors de la délivrance des assignations du 12 mai 2009 et que l'enchevêtrement judiciaire qui s'est produit ultérieurement a(vait) pour cause principale le fait que l'ordonnance du 27 novembre 2009, frappée d'appel dès le 4 février 2010, n'a finalement été exécutée que plus de deux ans plus tard, après avoir tenté en vain d'en arrêter l'exécution provisoire, de sorte que la société I2M Sup de Co Caraïbes et M. Y... n'ont pu solliciter utilement la remise au rôle qu'au mois de septembre 2012, alors que d'autres procédures avaient été diligentées ailleurs » (cf. arrêt p.6) ; qu'en décidant cependant que « le préjudice à réparer est strictement celui de n'avoir pu comparaître en première instance, à l'audience du 15 mai 2009, puis à celle du 11 septembre 2009, sur réouverture des débats, et d'avoir été privé de ce seul degré de juridiction, de sorte que la somme de 3.000 € » constituait une juste indemnisation pour la société I2M Sup de Co et pour M. Y..., et que « les préjudices financiers et moraux par eux chiffrés sont très largement disproportionnés et étrangers aux conditions de délivrance des assignations du 12 mai 2009 » (cf. arrêt p.6), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice