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28/11/2018 | FRANCE | N°17-17685

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 novembre 2018, 17-17685


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble la convention collective du personnel des organismes de la sécurité sociale et des allocations familiales du 8 février 1957 et le protocole du 14 mai 1992 ;

Attendu que le principe d'égalité de traitement ne fait pas obstacle à ce que les salariés embauchés postérieurement à l'entrée en vigueur d'un nouveau barème conventionnel soient appelés dans l'avenir à avoir une évolution de carrière plus rapide dès lors qu'ils n

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble la convention collective du personnel des organismes de la sécurité sociale et des allocations familiales du 8 février 1957 et le protocole du 14 mai 1992 ;

Attendu que le principe d'égalité de traitement ne fait pas obstacle à ce que les salariés embauchés postérieurement à l'entrée en vigueur d'un nouveau barème conventionnel soient appelés dans l'avenir à avoir une évolution de carrière plus rapide dès lors qu'ils ne bénéficient à aucun moment d'une classification ou d'une rémunération plus élevée que celle des salariés embauchés antérieurement à l'entrée en vigueur du nouveau barème et placés dans une situation identique ou similaire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé le 1er février 1979 par la caisse d'allocation familiales du Vaucluse, promu et engagé par l'URSSAF du Vaucluse le 1er octobre 1984 en qualité d'agent de contrôle stagiaire et exerçant en dernier lieu les fonctions d'inspecteur du recouvrement auprès de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur, a saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaire en application des articles 23 et 32 de la convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale et de demandes de dommages-intérêts pour violation du principe d'égalité de traitement ;

Attendu que pour dire que le salarié a été victime d'une différence de traitement en ce que l'URSSAF lui a refusé le bénéfice de l'article 32 de la convention collective du personnel des organismes de la sécurité sociale et des allocations familiales et lui accorder une somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient qu'au regard du principe "à travail égal, salaire égal", la seule circonstance que des salariés appartenant à la même entreprise et à la même catégorie professionnelle et exerçant les mêmes fonctions aient été promus avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ne saurait suffire à justifier une différence de traitement ;

Qu'en statuant ainsi, sans constater que des salariés promus après l'entrée en vigueur du nouveau barème conventionnel et placés dans une situation identique ou similaire avaient bénéficié d'une classification ou d'une rémunération supérieures à celles de M. Y..., la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur à payer à M. Y... la somme de 3000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation du principe "à travail égal, salaire égal", l'arrêt rendu le 7 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Provence-Alpes-Côte d'Azur

Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'AVOIR condamné l'URSSAF Provence Alpes Côte d'Azur aux dépens et à payer à M. Y... la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « sur l'application de l'article 32 de la convention collective du 08/02/1957 ; sur le rappel de salaire au titre de la période non prescrite et la régularisation postérieure : Les articles 29 et suivants de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale, dans leur rédaction du 8 février 1957 applicable en la cause, instituaient un double système d'avancement, à l'ancienneté et au choix. L'article 29 disposait : "Il est institué dans chaque catégorie d'emploi un tableau d'avancement comportant la échelons de 4 % du salaire d'embauche de l'emploi considéré. L'avancement du personnel à l'intérieur des catégories d'emploi s'effectue par le double système de l'ancienneté et du choix sans pouvoir dépasser 40 % du salaire d'embauche de l'emploi considéré. L'avancement à l'ancienneté est fixé au maximum à 40 % du salaire d'embauche. Il s'acquiert par échelon de 4 % tous les deux ans. L'avancement au choix s'effectue par échelons de 4 % du salaire d'embauche. Lorsque le salaire d'embauche est inférieur au minimum fixé par les accords de salaires visés par l'article 19 ci-dessus, les majorations de choix et d'ancienneté se calculent sur ledit minimum, dans la limite toutefois, pour chaque emploi, du salaire d'embauche majoré de l'avancement maximal de 40 % appliqué à ce dernier salaire." L'article 32 de la convention collective indiquait en outre : "Les agents diplômés au titre de l'une des options du Cours des Cadres de l'Ecole Nationale organisé par la FNOSS et l'UNCAF obtiennent un échelon de choix de 4 % à effet du premier jour du premier mois qui suit la fin des épreuves de l'examen. Si malgré leur inscription au tableau de promotion dans les conditions prévues à l'article 34 ci-après, les agents diplômés du Cours des Cadres n'ont pas obtenu effectivement leur promotion après deux ans de présence soit au sein de même organisme, soit après mutation dans un autre organisme, il leur est attribué un nouvel échelon de choix de 4 %. En cas de dépassement du plafond d'avancement tel qu'il est prévu à l'article 29, le surplus sera attribué sous la forme d'une prime provisoire." L'article 33 ajoutait : "Toute promotion dans une catégorie ou un échelon d'emploi intervient en principe dans l'ordre du tableau de promotion sur lequel figure les agents que leurs notes et les appréciations de leurs chefs de service destinent à une catégorie ou un échelon supérieur. Toutefois lorsqu'il s'agit de promotion dans la catégorie des cadres, les agents doivent avoir satisfait aux conditions exigées par le Règlement intérieur type. En cas de promotion dans une catégorie ou un échelon d'emploi supérieur, les échelons d'avancement à l'ancienneté sont maintenus, étant entendu qu'ils doivent être calculés sur la base du nouveau salaire de titularisation. Par contre, les échelons au choix sont supprimés. En tout état de cause, la nouvelle rémunération doit être supérieure d'au moins 5 % à l'ancienne. En conséquence, tout agent pour lequel le changement de catégorie ou d'échelon d'emploi n'aboutit pas à un règlement effectif de 5 % obtiendra le bénéfice d'un ou plusieurs échelons au choix."
Reçu à l'examen final de la formation des cadres le 23 mai 1984, M. Y... a été engagé par l'Urssaf de Vaucluse, en qualité d'agent de contrôle stagiaire, le 1er octobre 1984. Classé au coefficient 229 (échelon d'ancienneté : 12 % ; échelon de choix : 0 %), suite à son agrément le 27 novembre 1985, c'est par une exacte application des dispositions alors en vigueur qu'il a conservé le bénéfice de ses échelons d'ancienneté, tandis que l'échelon de choix de 4 % prévu par l'article 32 de la convention collective lui a été supprimé. Sa demande de rappel de salaire présentée sur ce fondement, pour la période non prescrite du 1er mai 2007 au 30 avril 2012, et celle aux fins de régularisation des bulletins de paie pour la période postérieure, ne sont donc pas justifiées. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la demande indemnitaire : Au regard du principe "à travail égal, salaire égal", la seule circonstance que des salariés appartenant à la même entreprise et la même catégorie professionnelle et exerçant les mêmes fonctions aient été promus avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ne saurait suffire à justifier une différence de traitement. En l'espèce, il résulte des éléments fournis par M. Y... que plusieurs inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf Provence-Alpes-Côte d'Azur, promus postérieurement au protocole d'accord du 14 mai 1992 entré en vigueur le 1er janvier 1993, ont bénéficié du maintien des "échelons cours de cadres". Alors qu'il lui appartient de justifier cette différence de traitement au regard de l'avantage considéré par des raisons objectives et pertinentes, l'Urssaf fait valoir, successivement et de manière inopérante, que "la comparaison de la situation de l'appelant à la date de rupture conventionnelle de son contrat de travail avec celles de Mesdames Laurence A... et Myriam B... et Monsieur Laurent C... à cette même date, montre que l'appelant ne justifie aucunement qu'il a subsisté quelque inégalité de traitement", ce dont elle veut pour preuve un tableau comparatif établi à la date du 21 décembre 2015, et que "le déroulement de carrière de l'appelant est distinct de ceux des salariés auxquels il se compare." À supposer la demande bien fondée dans son principe, elle observe subsidiairement que M. Y... ayant atteint le seuil de 40 % au mois de décembre 2000, aucun échelon conventionnel ou supplémentaire ne pouvait plus lui être attribué, de sorte qu'il n'a subi aucun préjudice au cours de la période non prescrite. L'appelant ne pouvant se voir allouer la somme qu'il réclame à ce titre, correspondant, selon son tableau versé aux débats, à la perte totale de salaires et congés payés, augmentée des intérêts légaux, qu'il aurait subie au cours de la période couverte par la prescription, son préjudice résultant de l'atteinte au principe d'égalité de traitement sera réparé par une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts. Le jugement sera ainsi réformé de ce chef » ;

1) ALORS QUE les versions successives d'un même texte conventionnel peuvent attacher des conséquences différentes à la réussite à un examen et à une promotion sans que les salariés relevant d'une de ces versions, selon la date à laquelle ils ont réussi leur examen ou ont été promus, puissent se plaindre d'une différence de traitement avec les salariés auxquels est applicable une autre version du texte conventionnel ; que le principe d'égalité n'a donc pas vocation à s'appliquer entre, d'une part, les salariés relevant de la version des articles 32 et 33 de la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale antérieure au protocole d'accord de 1992, et prévoyant la suppression des échelons de choix dès la première promotion suivant le succès à un examen et, d'autre part, les salariés relevant de la version postérieure des mêmes textes, lue par la jurisprudence comme prévoyant le maintien de ces échelons ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé le principe d'égalité de traitement, ensemble les textes conventionnels susvisés ;

2) ALORS en tout état de cause QU'un salarié ne peut, en invoquant une inégalité de traitement, solliciter le paiement d'un rappel de salaire sur le fondement d'un texte non rétroactif qui n'était pas encore en vigueur le jour où est survenant l'événement qui aurait pu commander son application ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a justement retenu que les règles d'avancement du salarié étaient régies, au jour de son succès à l'examen de l'école des cadres et de sa promotion suivante, par les articles 29 à 37 de la convention collective des personnels des organismes de sécurité sociale dans leur rédaction antérieure au protocole d'accord du 14 mai 1992 applicable au 1er janvier 1993 (arrêt page 13) ; qu'il ressort encore de ses constatations (arrêt page 14, § 5), qu'en invoquant une inégalité de traitement, le salarié sollicitait le paiement de la totalité des salaires et congés payés, augmentée des intérêts légaux, auxquels il aurait selon lui eu droit si le protocole d'accord du 14 mai 1992 lui avait été appliqué ; que la cour d'appel aurait dû en déduire que ce texte ne présentant aucun caractère rétroactif, la demande du salarié était infondée ; qu'en jugeant cependant qu'il y avait lieu d'accorder une somme de 3000 euros au salarié, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement, ensemble les textes conventionnels susvisés ;

3) ALORS QU'en accordant des sommes pour une période dont elle a elle-même constaté qu'elle était « couverte par la prescription » (arrêt page 14, § 5), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 3245-1 du code du travail et 2224 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-17685
Date de la décision : 28/11/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 07 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 nov. 2018, pourvoi n°17-17685


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.17685
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