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24/10/2018 | FRANCE | N°17-18096

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 octobre 2018, 17-18096


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., engagée à compter du 28 août 1995 par l'association Centre de formation des apprentis de l'industrie de l'Oise (CFAI de l'Oise) en qualité d'animatrice de formation, a été promue dans les fonctions de conseiller placement en recrutement à effet au 1er janvier 2007 ; que par voie d'avenant du 31 janvier 2008, la durée hebdomadaire de travail a été réduite à 23 heures 72, tandis qu

'à compter de la même date, la salariée a été engagée par l'Association formation...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., engagée à compter du 28 août 1995 par l'association Centre de formation des apprentis de l'industrie de l'Oise (CFAI de l'Oise) en qualité d'animatrice de formation, a été promue dans les fonctions de conseiller placement en recrutement à effet au 1er janvier 2007 ; que par voie d'avenant du 31 janvier 2008, la durée hebdomadaire de travail a été réduite à 23 heures 72, tandis qu'à compter de la même date, la salariée a été engagée par l'Association formation professionnelle de l'industrie de l'Oise (AFPI de l'Oise) dans les mêmes fonctions de conseiller placement en recrutement, mais pour une durée hebdomadaire de travail de 12 heures 78 ; qu'ayant été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives tant à l'exécution qu'à la rupture de ses contrats de travail ; qu'un arrêt devenu irrévocable a conféré à la salariée le statut de cadre à compter du 1er janvier 2009 et a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'invoquant les conclusions d'une expertise judiciaire, la salariée a formé, sur le fondement du principe d'égalité de traitement, des demandes de rappel de salaire ;

Attendu que pour faire droit aux demandes de nature salariales, l'arrêt retient qu'au sein des associations, les cadres exerçant les mêmes fonctions que celles de l'intéressée ne bénéficient pas de la même rémunération ni des mêmes conditions d'exercice de leurs fonctions, certains travaillant sur la base d'un horaire hebdomadaire fixe et d'autres dans le cadre d'une durée de travail calculée en forfait jours, que l'hypothèse numéro trois de l'expert permet de retenir l'existence d'un salaire moyen, que la salariée aurait pu, en passant cadre dès le 1er janvier 2009, avoir une rémunération s'inscrivant dans la moyenne des salaires pratiqués pour des postes équivalents, que cette méthode retenue par l'expert permet d'effacer les disparités salariales en raison du non respect de la politique de classification, qu'au vu des pratiques de rémunération des associations, pour permettre à la salariée de rétablir équitablement le salaire qu'elle aurait dû percevoir si son employeur avait appliqué le statut à compter du 1er janvier 2009, l'hypothèse numéro trois proposée par l'expert sera retenue et les employeurs seront condamnés à verser un rappel de salaire sur cette base ;

Qu'en se déterminant par des tels motifs, ne permettant pas à la Cour de cassation de s'assurer que les salariés auxquels l'intéressée se comparait se trouvaient dans une situation identique à la sienne, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour l'association Centre de formation des apprentis de l'industrie de l'Oise et l'Association formation professionnelle de l'industrie de l'Oise

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné l'Association Professionnelle de l'Industrie de l'Oise (AFPI) à verser à Madame Laura Y... les sommes de 1.686,15 euros de rappel de salaire sur classification pour les années 2009 et 2010, outre 168,61 euros de congés payés y afférents, 3.184,65 euros d'indemnité compensatrice de préavis, outre 318,46 euros de congés payés y afférents, 2.445 euros d'indemnité de licenciement, déduction faite des sommes perçues à ce titre par la salariée, et 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement illégitime, D'AVOIR condamné le Centre de Formation des Apprentis de l'Oise (CFAI) à verser à la salariée les sommes de 3.131,41 euros de rappel de salaire sur classification pour les années 2009 et 2010, outre 313,14 euros de congés payés y afférents, 5.917,32 euros d'indemnité compensatrice de préavis, outre 591,73 euros de congés payés y afférents, 4.542 euros d'indemnité de licenciement, déduction faite des sommes perçues à ce titre par la salariée, et 35.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement illégitime, et D'AVOIR, en conséquence, ordonné au Centre de Formation Professionnelle de l'Industrie de l'Oise et à l'Association de Formation Professionnelle de l'Oise de rembourser à l'organisme concerné le montant des indemnités chômage versées à Madame Y... depuis son licenciement dans la limite de 3 mois de prestations et à la salariée les frais d'expertise dont elle a réalisé l'avance;

AUX MOTIFS QUE « Par arrêt en date du 3 septembre 2014 la cour d'appel de céans a dit que Madame Y... relevait du statut de cadre à partir du 1er janvier 2009 et, dans le cadre d'une mesure d'expertise, a confié à Monsieur B... le soin de calculer pour la période considérée soit entre le 1er janvier 2009 et le 8 novembre 2010, avec compte séparé pour chaque employeur, le montant du rappel de rémunération auquel peut prétendre Madame Y...; que dans le cadre de son rapport d'expertise, Monsieur B... a proposé trois hypothèses : 1ère hypothèse : la salariée perçoit le minimum conventionnel pour un cadre en ère forfait jours; 2ème hypothèse : la salariée est augmentée comme la dernière salariée étant passée cadre; 3ème hypothèse : la salariée perçoit le revenu moyen des conseillers recrutement placement corrigés des minima conventionnels; 4ème hypothèse : la salariée est rémunérée selon un statut de cadre horaire avec un coefficient de 100 et dans ces conditions son salaire ayant été supérieur au minima de la convention collective, aucune revalorisation de salaire n'est à effectuer; que l'expert observe que des divergences demeurent entre les parties sur les points suivants : le décompte du temps de travail de Madame Y... doit-il se faire en heures ou en jours la convention collective prévoyant ces deux possibilités ? - la prime de progrès doit-elle être considérée comme un élément permanent de rémunération ? - le salaire de Madame Y... au 1er janvier 2009 doit-il se baser sur le minimum conventionnel ou sur un autre montant ? L'expert conclut en indiquant que selon son avis l'hypothèse n° 4, formulée à la demande des employeurs, ne peut être retenue car l'usage constaté est un statut cadre avec décompte du temps de travail en jours; qu'il indique que si la Cour ne peut se positionner que sur la classification de Madame Y..., il convient de retenir l'hypothèse n° 1 et dans le cas où la prime de progrès est considérée comme un élément de rémunération permanente le rappel de salaire total serait de 612,59 euros (4.035,57 euros si la prime de progrès n'est pas reconnue comme un élément permanent de rémunération); qu'il précise que si la Cour peut se positionner sur la classification et la rémunération de Madame Y..., il conviendra de retenir soit l'hypothèse n° 2 sur la base d'une augmentation comparable soit l'hypothèse n° 3 à partir de la moyenne des rémunérations; que la salariée sollicite que le calcul du rappel de salaire s'effectue en application de l'hypothèse n° 3 proposée par l'expert (prise en compte du salaire moyen pratiqué), considérant que ce mode de calcul est le plus équitable et objectif, constatant que les salaires des nouveaux embauchés au même poste sont supérieurs au montant minima de la convention collective et invoquant la règle "à travail égal salaire égal"; que les employeurs demandent que soit retenue l'hypothèse n° 4 proposée par l'expert considérant que la fixation d'un salaire sur la base d'un salaire moyen reviendrait à enlever à l'employeur son pouvoir de fixation des salaires qui découle de son pouvoir de direction, observant que chaque salarié perçoit une rémunération différente, que Madame Y... ne peut prétendre à la même expérience ni à la même formation que ses collègues et qu'en conséquence elle ne peut se prévaloir du principe à travail égal salaire égal puisqu'elle ne peut être comparée à des salariés qui ont convenu individuellement avec leur employeur d'une durée de travail calculée en forfait jours et qui ne sont pas soumis aux mêmes conditions d'emploi qu'elle; que les employeurs sollicitent que la prime d'incitation aux progrès soit intégrée dans la rémunération de base en ce que cette prime, calculée à partir du salaire de base en fonction de l'atteinte des objectifs, a été généralisée à l'ensemble des collaborateurs par décision unilatérale de l'employeur du 31 mai 2007, qu'elle a été payée chaque année sans discontinuité et qu'elle constitue un élément permanent de la rémunération; que, sur la prime d'incitation aux progrès : aux termes de l'article 23 de la convention collective applicable les appointements minima garantis comprennent les éléments permanents de la rémunération, y compris les avantages en nature; qu'ils ne comprennent pas les libéralités à caractère aléatoire, bénévole ou temporaire; qu'en l'espèce, il résulte des éléments produits que la prime d'incitation aux progrès est versée aux salariés selon quatre critères : la réalisation des objectifs, la rémunération de base, la présence durant la période de référence des objectifs, la présence au dernier jour du mois de versement de la prime; que cette prime est payée les 31 janvier, 31 mars et 30 septembre chaque année; qu'elle a été généralisée à l'ensemble des salariés par décision unilatérale de l'employeur du 31 mai 2007 et est versée depuis 2007 sans discontinuité; qu'en conséquence, cette prime étant due au terme d'un engagement unilatéral de l'employeur, son paiement étant déclenché en fonction de critères définis à l'ensemble du personnel, ayant été régulièrement versée depuis 2007, présente le caractère permanent visé à l'article 23 précité et ne constitue pas une libéralité; qu'il sera par conséquent jugé que cette prime doit être intégrée dans la rémunération de base; que, sur le rappel de salaire : il y a lieu de constater qu'au sein des associations, les cadres exerçant les mêmes fonctions que celles de Madame Y... ne bénéficient pas de la même rémunération ni des mêmes conditions d'exercice de leurs fonctions, certains travaillant ainsi sur la base d'un horaire hebdomadaire fixe et d'autres dans le cadre d'une durée de travail calculée en forfait jours; qu'il sera également constaté que les salaires des salariés nouvellement embauchés sont supérieurs au minima de la convention collective; que l'hypothèse n° 3 proposée par l'expert permet de retenir l'existence d'un salaire moyen; que Madame Y... aurait en effet pu, en passant cadre dès le 1er janvier 2009, avoir une rémunération s'inscrivant dans la moyenne des salaires pratiqués pour des postes équivalents; que cette méthode de calcul retenue par l'expert permet d'effacer les disparités salariales en raison notamment du non-respect de la politique de classification; qu'en conséquence, au vu des pratiques de rémunération des associations, pour permettre à la salariée de rétablir équitablement le salaire qu'elle aurait dû percevoir si son employeur avait appliqué le statut de cadre à compter du 1er janvier 2009, l'hypothèse n° 3 proposée par l'expert sera retenue et les employeurs condamnés à verser à Madame Y... un rappel de salaire sur cette base; que, sur les indemnités de rupture du contrat de travail: au titre de l'hypothèse n° 3 précédemment retenue, la prime d'incitation aux progrès étant un élément permanent de rémunération, l'expert a fixé le salaire de base de Madame Y... à la somme de 3.032,99 euros dont 1.061,55 euros au titre de son emploi à l'AFPI et 1.971,44 euros au titre de son emploi au CFAI; que cette somme n'est pas utilement contestée par les parties; qu'il a été précédemment jugé par la cour d'appel dans son arrêt du 3 septembre 2014 que l'employeur ne pouvait se prévaloir de la survenance d'un état d'inaptitude auquel il avait contribué par son comportement fautif et qu'en conséquence le licenciement de la salariée est nécessairement privé de cause réelle et sérieuse; que la salariée licenciée illégitimement pour inaptitude peut prétendre aux indemnités de rupture ainsi qu'à des dommages et intérêts, calculés, selon son ancienneté et l'effectif de l'entreprise, sur le fondement en l'espèce de l'article L.1235-3 du code du travail; qu'il y a lieu de constater que les employeurs ne contestent pas spécifiquement l'attribution à la salariée d'une indemnité de préavis; qu'en application de l'article 27 de la convention collective applicable la durée du préavis pour les cadres ayant plus de deux années de présence dans l'entreprise est d'une durée de trois mois; que le montant de l'indemnité de licenciement conventionnelle sera fixé en application de l'article 29 de la convention collective applicable; qu'il sera déduit des sommes dues les sommes déjà perçues à ce titre par la salariée; que les droits de la salariée au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de licenciement, non utilement contestés dans leur quantum, seront précisés au dispositif de l'arrêt; que, justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, Madame Y... peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail; qu'en considération de sa situation particulière et eu égard notamment à son âge, à l'ancienneté de ses services, à sa formation et à ses capacités à retrouver un nouvel emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer la réparation qui lui est due à la somme qui sera indiquée au dispositif de l'arrêt; que la salariée ayant plus de deux ans d'ancienneté et l'entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, il convient de faire application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail et d'ordonner aux employeurs de rembourser à l'antenne Pôle Emploi concernée les indemnités de chômage versées à l'intéressée depuis son licenciement dans la limite de trois mois de prestations; que, sur la remise de l'attestation Pôle Emploi: il sera ordonné la remise par les employeurs de l'attestation Pôle Emploi conforme au présent arrêt, sans que le prononcé d'une astreinte soit nécessaire à ce stade de la procédure; que, sur les frais d'expertise, les frais irrépétibles et les dépens: il convient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la salariée et d'allouer à celle-ci, pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel, une indemnité dont le montant sera précisé ci-après; que le Centre de Formation Professionnelle de l'Industrie de l'Oise et l'Association de Formation Professionnelle de l'Oise, parties succombantes, seront condamnés aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'aux frais d'expertise dont l'avance a été réalisée par Madame Y... » (arrêt pages 5 à 9);

1°) ALORS QUE la différence de traitement résultant d'un accord collectif est présumée justifiéeobjectivement; qu'en l'espèce, les employeurs faisaient valoir que l'accord national du 5 février 2009 sur le barème des appointements minimaux garantis des ingénieurs et cadres à partir de l'année 2009, attaché à la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, prévoit quatre barèmes d'appointements minimaux, distinguant les cadres au forfait en heures sur l'année (de 1.607 à 1.767 heures), les cadres ayant un horaire hebdomadaire équivalent à la durée légale du travail, les cadres au forfait en heures sur l'année (de 1.767 à 1.927 heures) et les cadres au forfait en jours sur l'année, de sorte que la situation de Mme Y... qui était soumise à une durée du travail horaire de 36,5 heures par semaine, n'était objectivement pas égale à celle des salariés au forfait en heures ou en jours, qui ne se trouvaient pas dans la même situation contractuelle qu'elle; qu'en il est constant que, au sein des associations, les cadres exerçant les mêmes fonctions que Mme Y..., ne bénéficiaient pas de la même rémunération ni des mêmes conditions d'exercice de leurs fonctions, certains étant sur un horaire hebdomadaire fixe et d'autres au forfait-jour; qu'après avoir elle-même constaté que les cadres exerçant les mêmes fonctions que Mme Y... ne bénéficiaient pas des mêmes conditions d'exercice de leurs fonctions car certains étaient sur un horaire hebdomadaire fixe et d'autres au forfait-jour, la cour d'appel ne pouvait affirmer que la rémunération de Mme Y... devait s'inscrire dans la moyenne des salaires pratiqués pour des postes équivalentssans rechercher ni vérifier si la différence de salaires des autres salariés du panel retenu par l'expert au terme de l'hypothèse n° 3 n'était pas justifiée objectivement par leurs conditions d'emploi respectives, ces derniers étant soumis à des conventions de forfait en heures ou en jours sur l'année, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 2261-22, L.2271-1 et L.3221-2 à 5 du code du travail, ensemble le principe à travail égal - salaire égal.

2°) ALORS QUE l'employeur est tenu d'assurer une égalité de rémunération entre les salariés de l'entreprise effectuant un même travail ou un travail de valeur égale, c'est-à-dire pour des travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse, ce que les juges doivent examiner in concreto; qu'en l'espèce, après avoir elle-même constaté qu'au sein des associations, les cadres exerçant les mêmes fonctions que Mme Y... ne bénéficiaient ni de la même rémunération ni des mêmes conditions d'exercice de leurs fonctions, certains travaillant sur la base d'un horaire hebdomadaire fixe et d'autres en forfait-jours, la cour d'appel ne pouvait condamner les employeurs sur la base de « l'hypothèse n° 3 proposée par l'expert » au prétexte qu'elle « permet de retenir l'existence d'un salaire moyenpratiqué pour des postes équivalents » et que Mme Y... aurait « pu, en passant cadre dès le 1er janvier 2009, avoir une rémunération s'inscrivant dans la moyenne des salaires pratiqués pour des postes équivalents » et que « cette méthode de calcul retenue par l'expert permet d'effacer les disparités salariales en raison notamment du non-respect de la politique de classification », sans se livrer à une analyse comparée et in concreto de la situation, des fonctions et des responsabilités de l'intéressée avec celles des autres cadres salariés, sans expliquer le critère abstrait retenu de « la moyenne des salaires » et, sans même constater que les fonctions des « postes équivalents » correspondaient à un travail de valeur égal, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.2261-22, L.2271-1 et L.3221-2 à 5 du code du travail, ensemble le principe à travail égal - salaire égal ;

3°) ALORS QU'il est interdit au juge de statuer par une motivation générale, abstraite et hypothétique; qu'en l'espèce, méconnait ce principe la cour d'appel qui est saisie d'une demande de rappel de salaires sur le fondement du principe « à travail égal, salaire égal » et qui octroie de manière abstraite à la salariée un montant de rémunération « s'inscrivant dans la moyenne des salaires pratiqués pour des postes équivalents » au prétexte que Madame Y... « aurait en effet pu » avoir une telle rémunération dès le 1er janvier 2009 et qu'ainsi, elle la rétablit « équitablement (dans) le salaire qu'elle aurait dû percevoir si son employeur avait appliqué le statut de cadre », retenant ainsi « l'hypothèse n° 3 proposée par l'expert », car, en statuant par ces motifs généraux, abstraits et hypothétiques, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile;

4°) ALORS QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, ce qui exclut l'équité, qui n'est pas source de droit; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui accorde à la salariée un rappel de salaire en retenant « l'hypothèse n° 3 proposée par l'expert (qui) permet de retenir l'existence d'un salaire moyen » au prétexte que « au vu des pratiques de rémunération des associations (elle) permettr(a) à la salariée de rétablir équitablement le salaire qu'elle aurait dû percevoir si son employeur avait appliqué le statut de cadre à compter du 1er janvier 2009 », la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile et les articles L. 2261-22, L. 2271-1 et L.3221-2 à 5 du code du travail, ensemble le principe à travail égal - salaire égal ;

5°) ALORS, en toute hypothèse, QUE les qualités professionnelles ou la différence de qualité de travail constituent des motifs objectifs justifiant des disparités salariales entre deux salariés occupant le même emploi, ainsi que des augmentations de salaires plus importantes ou une progression plus rapide dans la grille indiciaire pour le salarié plus méritant, ce qui ressort du pouvoir de direction de l'employeur; que méconnait son office la cour d'appel qui a retenu l'hypothèse n° 3 préconisée par l'expert car elle s'inscrivait dans la moyenne des salaires pour des postes équivalents, après avoir elle-même constaté que « les cadres exerçant les mêmes fonctions que celles de Mme Y... ne bénéficient pas
des mêmes conditions d'exercice », sans constater que le panel des salariés retenu par l'expert visait des postes, des fonctions et des responsabilités « de valeur égale » et sans vérifier si les différences d'exercice (horaires hebdomadaires/forfait-jours) étaient objectivement différenciées par l'accord collectif applicable, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.2261-22, L.2271-1 et L.3221-2 à 5 du code du travail, ensemble le principe à travail égal - salaire égal ;

6°) ALORS, aussi, QUE l'ancienneté du salarié, son expérience professionnelle acquise dans la fonction ou au service d'un précédent employeur et les diplômes acquis au cours de formations qualifiantes peuvent justifier une différence de salaire dès lors qu'ils sont en relation avec les exigences du poste et les responsabilités effectivement exercées ; qu'en l'espèce, les employeurs faisaient valoir d'une part, que la disparité de traitement entre Mme Y... et de Mmes C... et D... et M. E... était justifiée, non seulement par leur ancienneté dans l'entreprise et leurs diplômes, mais encore par leur expérience dans la fonction et en qualité de cadre de l'association (cf. conclusions d'appel p. 11), que d'autre part, la différence de salaire avec Mmes F..., G... et H... et M. I... s'expliquait par leurs expériences professionnelles acquises au service de précédents employeurs (ibid.); qu'en allouant dès lors, de manière générale et abstraite, à Mme Y..., la moyenne des rémunérations des salariés des associations AFPI et CFAI occupant les mêmes fonctions qu'elle, sans vérifier ni constater si l'ancienneté, les diplômes et l'expérience des salariés ne justifiaient pas la disparité de traitement constatée et, ainsi, leur exclusion du panel des salariés retenus par l'expert dans son hypothèse n° 3, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 2261-22, L. 2271-1 et L.3221-2 à 5 du code du travail, ensemble le principe à travail égal - salaire égal ;

7°) ALORS, subsidiairement, QUE les employeurs relevaient que le rapport de l'expert excluait d'autorité, et sans justification particulière, Mme C... du panel des salariés retenus par l'expert dans son hypothèse n° 3, quand que la situation de cette salariée, comparable à celle de Mme Y... justifiait qu'elle y soit incluse (cf. conclusions d'appel p. 10); qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions de nature à avoir une influence sur la détermination du montant du salaire moyen des salariés retenus dans l'hypothèse n° 3, donc sur la solution du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-18096
Date de la décision : 24/10/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 15 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 oct. 2018, pourvoi n°17-18096


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.18096
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