LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Caen, 18 novembre 2016), que le 6 mars 2012 a été conclu au sein de la société Areva NC, un accord d'entreprise mettant en place, en faveur de salariés affectés à des travaux pénibles, une possibilité de cessation anticipée d'activité jusqu'à l'obtention d'une retraite à taux plein auprès du régime général de la sécurité sociale compensée par l'octroi, pendant la durée d'anticipation, d'une pension financée par l'employeur ; que M. X..., né le [...] , a adhéré à ce dispositif et conclu un avenant à son contrat de travail le 15 mai 2012 prévoyant une fin de période d'anticipation au 1er juin 2019 ; que le 15 octobre 2012, un avenant n° 1 à l'accord du 6 mars 2012 était conclu par les partenaires sociaux consécutivement à l'entrée en vigueur du décret du 2 juillet 2012 permettant aux salariés de liquider leur retraite à taux plein dès 60 ans ; que l'employeur estimant que le salarié se trouvait en mesure de liquider sa pension au 1er juin 2017, ce dernier ainsi que le syndicat SPEA CFDT Basse - Normandie ont saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le salarié était en droit de bénéficier de la prise en charge de sa cessation anticipée d'activité jusqu'au 31 mai 2019, et de le condamner à régler au syndicat une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 1.3.2.1 de l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, la durée d'anticipation conventionnelle, entendue comme la période pendant laquelle un salarié peut devancer son départ en retraite en bénéficiant d'un maintien de salaire versé par l'employeur, s'achève à la date à laquelle le salarié peut légalement bénéficier d'une retraite à taux plein ; que les salariés concernés par cette stipulation sont donc tenus, dès qu'ils remplissent les conditions légales pour bénéficier d'une retraite à taux plein, d'en solliciter la liquidation auprès de l'organisme dispensateur et de sortir du dispositif conventionnel organisé par la société Areva NC ; qu'au cas présent, en constatant que Monsieur X... pouvait liquider une retraite à taux plein le 1er juin 2017, tout en refusant d'en tirer pour conséquence que, à compter de cette date, il ne pourrait plus bénéficier du dispositif conventionnel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations, et a violé l'article 1.3.2.1 de l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, ensemble l'article L. 2254-1 du code du travail ;
2°/ qu'aux termes de l'article 3A de l'avenant n° 1 du 15 octobre 2012 à l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, la durée d'anticipation s'achève à la date à laquelle le salarié peut légalement bénéficier d'une retraite à taux plein ; que les salariés concernés par cette stipulation sont donc tenus, dès qu'ils remplissent les conditions légales pour bénéficier d'une retraite à taux plein, d'en solliciter la liquidation auprès de l'organisme dispensateur et de sortir du dispositif conventionnel organisé par la société Areva NC ; qu'au cas présent, en constatant que M. X... pouvait liquider une retraite à taux plein le 1er juin 2017, tout en refusant d'en tirer pour conséquence que, à compter de cette date, il ne pourrait plus bénéficier du dispositif conventionnel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations et a violé l'article 3A de l'avenant n° 1 du 15 octobre 2012 à l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, ensemble l'article L. 2254-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, constatant que l'avenant au contrat de travail, signé par les parties le 15 mai 2012, prévoyait la possibilité pour le salarié , dans l'hypothèse où les conditions légales du taux plein étaient obtenues plus tôt, soit de liquider sa pension de retraite à la date d'obtention du taux plein soit de demeurer en cessation d'activité jusqu'épuisement de la durée d'anticipation, a exactement décidé que le salarié était en droit de bénéficier de la prise en charge de sa cessation d'activité jusqu'au 31 mai 2019 ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Areva NC aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Areva NC à payer à M. X... et au syndicat SPEA CFDT Basse-Normandie la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen en ayant délibéré en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions de l'article 456 du code de procédure civile, en son audience publique du dix octobre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Areva NC.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que Monsieur X... est en droit de bénéficier de la prise en charge de sa cessation anticipée d'activité jusqu'au 31 mai 2019, et D'AVOIR condamné la société AREVA NC à régler au syndicat SPEA CFDT Basse-Normandie la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « le 19 septembre 2011, M. X... a signé avec son employeur, la SA Areva NC, un avenant à son contrat de travail pour bénéficier d'un départ en congé fin de carrière suivi d'une entrée dans le dispositif conventionnel de gestion des fins de carrière ; il y était mentionné que le choix opéré par le salarié avait pour effet de maintenir son départ en congé de fin de carrière à la date initialement prévue, la date étant celle où il pourrait prétendre liquider une pension de retraite sécurité sociale à taux plein, cet engagement constituant une condition substantielle de l'avenant. Ainsi, son contrat de travail était suspendu du 15 mars 2012 au 31 mai 2012 au titre du congé d'épargne fin de carrière puis à compter du 1er juin 2012, au titre du nouveau dispositif conventionnel, sa situation dans ce nouveau dispositif conventionnel (indemnisation, durée, couverture sociale, obligations professionnelles, indemnité de départ à la retraite...) devant être fixée par le biais d'un nouvel avenant et il était mentionné qu'il devrait notifier son départ à la retraite à l'Etablissement dont il dépendait au moins 2 mois avant la date à laquelle il pourrait prétendre liquider une pension de retraite de sa sécurité sociale à taux plein. Les partenaires sociaux, dont le syndicat CFDT, signaient le 6 mars 2012 un « accord relatif au dispositif de cessation anticipée d'activité applicable au sein de la SA Areva NC, compte anticipation fin de carrière » ; pour entrer dans le dispositif, il était mentionné que le salarié devait s'engager à partir à la retraite, au plus tôt, à la date à laquelle il sera en mesure de liquider sa pension de retraite du régime général de Sécurité sociale à taux plein (âge légal d'ouverture du droit et nombre de trimestres requis ou dispositions spécifiques concernant les salariés pouvant bénéficier notamment d'une retraite anticipée pour « carrière longue » ou pour « incapacité », et au plus tard, à l'âge auquel il sera en mesure de liquider sa pension de retraite du régime général de la sécurité sociales à taux plein sans condition de trimestres, cet engagement étant une condition substantielle de l'entrée dans le dispositif. En application de cet accord, la SA Areva NC et M. X... signaient le 15 mai 2012 un nouvel avenant de suspension du contrat de travail pour cessation anticipée d'activité, accord cumul option 1. Il y était mentionné que : - la date de décompte de sa durée d'anticipation était fixée au 1er juin 2019, à cette date, il serait en mesure de liquider sa pension de retraite à taux plein selon les dispositions légales et/ou conventionnelles applicables au sein de la société (article 1) - compte tenu de cette date de décompte, son entrée dans le dispositif issu de l'accord du 6 8 mars (2012) aurait dû être fixée au 1er juin 2012 - toutefois, compte tenu du maintien de sa date d'entrée à la même date que celle prévue théoriquement par l'ancien dispositif, son contrat de travail est suspendu du 1er juin 2012 au 31 mai 2019 au titre de la durée d'anticipation garantie de l'ancien dispositif et de la période conventionnelle prise en charge par la société - cette suspension du contrat de travail est définitive et entraîne dispense de présence et d'activité professionnelle dans la société jusqu'à son départ à la retraite - son entrée en cessation anticipée d'activité est subordonnée à son engagement de partir à la retraite le 1er juin 2019, date à laquelle il serait en mesure de liquider sa pension de retraite du régime général de Sécurité sociale à taux plein
- si les conditions légales du taux plein sont obtenues plus tôt que la date mentionnée à l'article 1 ci-dessus, il aurait la possibilité de choisir entre l'une des deux options suivantes :
- demeurer en cessation d'activité jusqu'à épuisement de son anticipation
- ou liquider sa pension de retraite à la date d'obtention du taux plein, selon les conditions légales. Enfin, le 15 octobre 2012, les partenaires sociaux signaient l'avenant n°1 à l'accord du 6 mars 2012 destiné à adapter cet accord au décret n°2012-847 du 2 juillet 2012 qui a élargi des conditions d'accès au dispositif de départ anticipé pour carrières longues, permettant à davantage de salariés de liquider leur retraite à taux plein du régime général dès 60 ans, les parties étant conscientes de la nécessité de prendre en compte ce changement important et soudain et de prévoir les modalités de compensation adaptées pour les périodes d'anticipation de manière exhaustive. En conséquence, il était prévu, article 4, que le salarié aurait la possibilité de choisir entre l'une des deux options suivantes, lors de son départ en cessation anticipée d'activité : - demeurer en cessation anticipée d'activité jusqu'à épuisement des durées d'anticipation - ou liquider sa pension de retraite à la date d'obtention du taux plein. Il ressort de ces accords et avenants que M. X... peut obtenir le taux plein de sa retraite du régime général de la Sécurité sociale au 1er juin 2017, entrant dans la catégorie des carrières longues définies par le décret du 2 juillet 2012 pré-cité ; néanmoins, l'avenant n°1 qui a intégré cette nouvelle définition de carrière et autorisé les salariés à bénéficier d'un départ à la retraite anticipé dans ce cas, laisse tout de même au salarié la possibilité de demeurer en cessation anticipée d'activité jusqu'à épuisement des durées d'anticipation s'il ne souhaite pas liquider sa pension de retraite dès la date d'obtention du taux plein ; en effet, cette durée d'anticipation prévue à l'avenant du 6 mars 2012 ne peut s'entendre de la conditions légale d'obtention du taux plein de la retraite du régime général de la Sécurité sociale, sinon l'option mentionnée à l'article 4 n'aurait aucune application ; dès lors, même si M. X... pourrait liquider sa pension de retraite au 1er juin 2017, il peut cependant choisir de rester dans le dispositif de cessation anticipée d'activité jusqu'au 31 mai 2019 et dès lors, il est en droit de bénéficier de la prise en charge de sa cessation d'activité jusqu'au 31 mai 2019. Le syndicat SPEA CFDT Basse Normandie affirme que son intervention aux côtés de M. X... est parfaitement justifiée et réclame la condamnation de la SA Areva NC à lui verser des « dommages et intérêts pour non-respect des dispositions issues des accords collectifs » ; le syndicat CFDT est l'un des syndicats signataires des accords avec la SA Areva NC ayant négocié le dispositif dont le salarié demande application, il apparaît dès lors qu'il justifie d'un préjudice à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'aux termes de l'article 1.3.2.1 de l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, la durée d'anticipation conventionnelle, entendue comme la période pendant laquelle un salarié peut devancer son départ en retraite en bénéficiant d'un maintien de salaire versé par l'employeur, s'achève à la date à laquelle le salarié peut légalement bénéficier d'une retraite à taux plein ; que les salariés concernés par cette stipulation sont donc tenus, dès qu'ils remplissent les conditions légales pour bénéficier d'une retraite à taux plein, d'en solliciter la liquidation auprès de l'organisme dispensateur et de sortir du dispositif conventionnel organisé par la société AREVA NC ; qu'au cas présent, en constatant que Monsieur X... pouvait liquider une retraite à taux plein le 1er juin 2017, tout en refusant d'en tirer pour conséquence que, à compter de cette date, il ne pourrait plus bénéficier du dispositif conventionnel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations, et a violé l'article 1.3.2.1 de l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, ensemble l'article L. 2254-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'aux termes de l'article 3A de l'avenant n°1 du 15 octobre 2012 à l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, la durée d'anticipation s'achève à la date à laquelle le salarié peut légalement bénéficier d'une retraite à taux plein ; que les salariés concernés par cette stipulation sont donc tenus, dès qu'ils remplissent les conditions légales pour bénéficier d'une retraite à taux plein, d'en solliciter la liquidation auprès de l'organisme dispensateur et de sortir du dispositif conventionnel organisé par la société AREVA NC ; qu'au cas présent, en constatant que Monsieur X... pouvait liquider une retraite à taux plein le 1er juin 2017, tout en refusant d'en tirer pour conséquence que, à compter de cette date, il ne pourrait plus bénéficier du dispositif conventionnel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations et a violé l'article 3A de l'avenant n°1 du 15 octobre 2012 à l'accord d'entreprise du 6 mars 2012, ensemble l'article L. 2254-1 du code du travail.