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10/10/2018 | FRANCE | N°16-29071

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 octobre 2018, 16-29071


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'accord collectif du personnel navigant Régional, compagnie aérienne européenne, du 21 mai 2002 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 21 mai 2002, a été conclue au sein de la société Régional compagnie aérienne européenne, devenue Hop! Régional, aux droits de laquelle vient la société Hop!, une convention d'entreprise du personnel navigant technique ; qu'estimant que l'employeur ne respectait pas l'une des dispositions de cette convention, le Syndicat national de

s pilotes de ligne France Alpa a saisi un tribunal de grande instance ;

Attendu ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'accord collectif du personnel navigant Régional, compagnie aérienne européenne, du 21 mai 2002 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 21 mai 2002, a été conclue au sein de la société Régional compagnie aérienne européenne, devenue Hop! Régional, aux droits de laquelle vient la société Hop!, une convention d'entreprise du personnel navigant technique ; qu'estimant que l'employeur ne respectait pas l'une des dispositions de cette convention, le Syndicat national des pilotes de ligne France Alpa a saisi un tribunal de grande instance ;

Attendu que pour condamner la société Hop! à régulariser le paiement de la majoration des heures de nuit aux pilotes personnels navigant techniques percevant un complément de rémunération jusqu'à hauteur du salaire mensuel minimum garanti (SMMG), à procéder mensuellement au paiement de la majoration des heures de nuit, et à verser des dommages-intérêts au syndicat, l'arrêt retient que le personnel concerné a droit à une majoration de la rémunération des heures de nuit effectuées au même titre que les heures complémentaires et supplémentaires, que si par ailleurs l'accord prévoit, pour le déclenchement du droit au SMMG, en son article III-4-1-1 la prise en compte des majorations pour heures de nuit, il n'est édicté par l'accord collectif aucune restriction à la perception au titre des rémunérations des majorations pour les heures de vol de nuit prévues par ailleurs en son article III-5.4., que dès lors, l'employeur ne saurait, sans méconnaître les termes de l'accord d'entreprise du 21 mai 2012, limiter la rémunération des heures de nuit à la seule hypothèse où l'activité du pilote au cours du mois est supérieure à l'Activité Mensuelle de Référence (AMR) pour en exclure les pilotes dont la rémunération a dû être complétée pour atteindre le SMMG, qu'en application de l'accord d'entreprise de 2002, l'employeur doit donc, pour chaque heure de nuit effectuée, d'une part, décompter l'heure majorée pour le calcul du déclenchement éventuel de l'AMR, d'autre part, procéder en tout état de cause au paiement de la majoration d'un 256ème du SMMG ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les majorations de salaire pour heures de nuit n'étaient pas déjà intégrées par l'employeur dans le calcul du salaire mensuel minimum garanti versé au personnel navigant technique dont l'activité mensuelle est inférieure à 63 unités d'heures de vol dans le mois considéré, ce dont il aurait résulté qu'elles étaient déjà rémunérées et ne donnaient pas droit au paiement de majorations supplémentaires pour heures de nuit, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Hop! venant aux droits de la société Hop Régional à régulariser le paiement de la majoration des heures de nuit aux pilotes personnels navigants techniques concernés à compter du 30 juillet 2010, dans le délai de 6 mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai sous astreinte de 300 euros par jour de retard, procéder mensuellement au paiement de la majoration des heures de nuit aux pilotes personnels navigants techniques qui effectuent des heures de nuit dans le délai de trois mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, et verser la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts au Syndicat national des pilotes de ligne France Alpa, l'arrêt rendu le 4 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne le Syndicat national des pilotes de ligne France Alpa aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Goasguen, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du dix octobre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Hop!

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les majorations d'heures effectuées la nuit, au sens de l'article III-2 de l'accord collectif du 21 mai 2002, devaient être rémunérées conformément à l'article III-5.4 dudit accord, d'AVOIR condamné la société HOP ! Régional, devenue la société HOP !, à régulariser le paiement de la majoration des heures de nuit aux pilotes personnels navigant techniques concernés à compter du 30 juillet 2010, dans le délai de 6 mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai sous astreinte de 300 € par jour de retard, d'AVOIR condamné la société HOP ! Régional à procéder mensuellement au paiement de la majoration des heures de nuit aux pilotes personnels navigants techniques qui effectuent des heures de nuit dans le délai de trois mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai, sous astreinte de 300 € par jour de retard, et d'AVOIR condamné la société HOP ! Régional à verser la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts au le syndicat national des pilotes de ligne France ALPA ;

AUX MOTIFS QUE « sur l'interprétation de l'accord d'entreprise du 21 mai 2012. L'accord collectif qui doit faire l'objet d'une interprétation littérale, prévoit au titre « principe de rémunération » en son article III-5.4 une majoration des heures de nuit, lesquelles sont les heures de vol effectuées dans la tranche horaire précisée par ailleurs à l'article III.2 (21h-6h ou 23h-6h selon la période de l'année) la majoration étant calculée selon la formule suivante SMMG - salaire mensuel minimum garanti - /256 - Il s'agit donc sans ambiguïté d'une majoration de la rémunération des heures de nuit effectuées au même titre que les heures complémentaires et supplémentaires. Si par ailleurs l'accord prévoit, pour le déclenchement du droit au SMMG, en son article III-4-1-1 la prise en compte des majorations pour heures de nuit, il n'est édicté par l'accord collectif aucune restriction à la perception au titre des rémunérations des majorations pour les heures de vol de nuit prévues par ailleurs en son article III-5.4. Dès lors, Hop ! ne saurait, sans méconnaître les termes de l'accord d'entreprise du 21 mai 2012, limiter la rémunération des heures de nuit à la seule hypothèse où l'activité du pilote au cours du mois est supérieure à l'Activité Mensuelle de Référence pour en exclure les pilotes dont la rémunération a dû être complétée pour atteindre le SMMG. En application de l'accord d'entreprise de 2002, Hop ! doit donc, pour chaque heure de nuit effectuée, d'une part, décompter l'heure majorée pour le calcul du déclenchement éventuel de l'AMR, d'autre part, procéder en tout état de cause au paiement de la majoration d'un 256ième du SMMG » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « Sur l'accord collectif. L'accord collectif du personnel navigant régional litigieux en date du 21 mai 2002 précise que le décompte d'activité du personnel navigant sol ou vol est effectué et exprimé en unités horaire vol (UHV) ; que l'UHV est définie comme étant égale 1/63ème du salaire mensuel minimum garanti jusqu'à l'activité mensuelle de référence ; que celle-ci est définie comme étant égale à 63 UHV. Or, dans le chapitre 5, traitant du système de rémunération, l'article III-5.4 stipule que la majoration des heures de vol effectuées de nuit est calculée selon la formule suivante : salaire mensuel minimum garanti / 256. Et l'article III-4-1-1 relatif aux règles de rémunération précise que lorsque la somme des rémunérations versées au titre des heures de vol en fonction, des majorations pour heures de nuit, des mises en place, des compléments des activités journalières de référence, des heures d'équivalence attribuées aux représentants du personnel, des heures d'équivalence attribuées à toutes les formes de stage est inférieure au salaire mensuel minimum garanti, elle est complétée à hauteur de celui-ci. Il convient donc de constater que la majoration des heures de nuit est calculée en appliquant un coefficient à une rémunération que constitue le salaire mensuel minimum garanti ; qu'il est traité de la majoration pour heure de nuit au titre du système de rémunération et non du calcul temps d'activité ; que l'article III-4-1 mentionne bien la somme des rémunérations versées notamment au titre des majorations pour heure de nuit. En conséquence, s'agissant non pas d'une majoration du temps de travail mais du salaire, les majorations des heures de nuit doivent être rémunérées, cette manière de procéder étant en outre conforme à l'article L3122-39 du Code du travail qui impose une contrepartie au travail de nuit compte tenu de sa pénibilité. L'article L3245-1 du Code du travail dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. L'assignation ayant été délivrée le 30 juillet 2013, la société HOP ! Régional devra d'une part régulariser le paiement de la majoration des heures de nuit aux pilotes personnels navigant techniques concernés à compter du 30 juillet 2010 dans le délai de 6 mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai sous astreinte de 300 par jour de retard et d'autre part, procéder mensuellement au paiement de la majoration des heures de nuit aux pilotes personnels navigants techniques qui effectuent des heures de nuit dans le délai de trois mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai, sous astreinte de 300 € par jour de retard » ;

1) ALORS QU‘il appartient au juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en l'espèce l'objet du litige opposant la société HOP ! au Syndicat SNPL ALPA portait sur le point de savoir si le personnel navigant technique (PNT) percevant un complément de rémunération pour atteindre le salaire mensuel minimum garanti (SMMG) - lorsque son activité au cours du mois est inférieure à l'activité mensuelle de référence de 63 unités heures de vol (UHV) – est rempli de ses droits en matière de majoration des heures de travail de nuit ; que la société HOP ! soutenait qu'en application de l'accord d'entreprise du 21 mai 2002 le personnel navigant technique percevant le « salaire mensuel minimum garanti » (SMMG) était bien rempli de ses droits en matière de majoration des heures de nuit dans la mesure où, selon l'article III-4-1-1 de l'accord d'entreprise, le complément de rémunération versé au pilote pour atteindre le SMMG était calculé une fois pris en compte l'ensemble des éléments de rémunération dus à l'intéressé, dont notamment « les majorations pour heures de nuit » ; que le syndicat SNPL ALPA soutenait de son côté que le salaire mensuel minimum garanti n'incluait pas le paiement des majorations pour heures de nuit, de sorte que le personnel navigant technique avait droit, en plus du SMMG, au paiement de majorations supplémentaires pour heures de nuit ; que la cour d'appel n'a pas tranché ce litige ; qu'elle s'est en effet bornée à retenir, ce qui n'était pas contesté, que le personnel navigant avait droit à « [une] majoration de la rémunération des heures de nuit effectuées au même titre que les heures complémentaires et supplémentaires », sans vérifier si le salaire mensuel minimum garanti (SMMG) versé au personnel dont l'activité mensuelle est inférieure à 63 unités heures de vol incluait ou non le paiement des majorations pour travail de nuit et si, en conséquence, ce personnel avait droit au paiement de majorations supplémentaires pour heures de nuit ou si, à l'inverse, ces dernières étaient déjà payées par le biais du SMMG ; qu'en statuant ainsi, sans trancher le litige qui opposait les parties, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE pour la même raison, en se bornant à retenir que « HOP ! ne saurait, sans méconnaître les termes de l'accord d'entreprise du 21 mai 2002, limiter la rémunération des heures de nuit à la seule hypothèse où l'activité du pilote au cours du mois est supérieure à l'Activité Mensuelle de Référence pour en exclure les pilotes dont la rémunération a dû être complétée pour atteindre le SMMG », sans vérifier si les majorations de salaire pour heures de nuit n'étaient pas déjà intégrées dans le calcul du salaire mensuel minimum garanti (SMMG), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles III-4-1-1 et III-5-4 de l'accord collectif du personnel navigant (ACPN) du 21 mai 2002 ;

3) ALORS, ET A TITRE SUBSIDIAIRE, QU'à supposer, pour les besoins de la discussion, que la cour d'appel ait implicitement jugé que le salaire mensuel minimum garanti (SMMG), accordé au personnel dont l'activité mensuelle est inférieure à 63 unités heures de vol, n'incluait pas déjà le paiement des majorations pour heures de nuit, en statuant ainsi elle a violé les articles III-4-1-1 et III-5-4 de l'accord collectif du personnel navigant (ACPN) du 21 mai 2002 ;

4) ALORS, ET A TITRE SUBSIDIAIRE, QU'à supposer encore que la cour d'appel ait implicitement jugé que le salaire mensuel minimum garanti (SMMG), accordé au personnel dont l'activité mensuelle est inférieure à 63 unités heures de vol, n'incluait pas déjà le paiement des majorations pour heures de nuit, en statuant de la sorte sans tenir compte, ni s'expliquer sur les constatations du rapport d'expertise de Monsieur Z... versé aux débats par la société HOP ! qui confirmaient que le personnel percevant le SMMG était rempli de ses droits en matière de majoration des heures de nuit, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5) ALORS ENFIN QU'en se fondant sur les dispositions de l'article L. 3122-39 du code du travail pour justifier sa décision, cependant, comme le soutenait en appel la société HOP !, que selon l'article L. 6325-1 du code des transports « les articles L.3121-33, L.3122-29 à L. 3122-45, L. 3131-1 et L.3131-2 du code du travail ne s'appliquent pas au personnel navigant de l'aviation civile », de sorte que ce texte du code du travail n'était pas applicable au litige, la cour d'appel a violé l'article L. 6325-1 du code des transports.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-29071
Date de la décision : 10/10/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 04 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 oct. 2018, pourvoi n°16-29071


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.29071
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