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12/09/2018 | FRANCE | N°16-28407

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 septembre 2018, 16-28407


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les articles 7 à 7.7 de la convention collective nationale étendue des entreprises de propreté du 26 juillet 2011, ensemble l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 29 septembre 2011 en qualité d'agent de service par la Société française de gestion hospitalière (SFGH), par contrat à durée indétermi

née à temps partiel de 54,17 heures, puis dans le cadre d'un contrat à durée indétermin...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les articles 7 à 7.7 de la convention collective nationale étendue des entreprises de propreté du 26 juillet 2011, ensemble l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 29 septembre 2011 en qualité d'agent de service par la Société française de gestion hospitalière (SFGH), par contrat à durée indéterminée à temps partiel de 54,17 heures, puis dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel de 124,04 heures selon avenant du 16 mars 2012 ; que, le 21 juin 2013, la société SFGH, devenue la société Elior services propreté et santé (ci-après la société Elior SPS), a indiqué à la salariée que le marché du nettoyage de la maison médicale [...] était repris à compter du 1er juillet 2013 par la société Aviva services à laquelle étaient transférées les heures correspondantes de son contrat de travail, soit 54,16 heures ; que la société Elior SPS a transmis à la salariée un avenant avec prise d'effet au 1er juillet 2013, prévoyant la réduction de la durée contractuelle de travail de 124,04 heures à 69,88 heures, que la salariée a refusé de signer ; qu'elle a été ensuite placée en arrêt maladie à compter du 3 août 2013 jusqu'au 1er mai 2014, puis jusqu'au début de l'année 2015 ; que, le 8 janvier 2015, la salariée a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de la société Elior SPS à lui verser, au titre du contrat de travail du 16 mars 2012, diverses sommes à titre de rappel de salaire sur la base d'un horaire de 124,04 heures mensuelles, et de congés payés afférents ainsi que des dommages-intérêts ; que, le 15 juin 2015, la société Elior SPS a proposé à la salariée une augmentation de ses heures de travail qu'elle a acceptée, un avenant étant signé en ce sens le 25 août 2015 ;

Attendu que pour débouter la salariée de toutes ses demandes, l'arrêt énonce que la société Elior SPS a bien informé la salariée de la perte du marché par lettre recommandée du 21 juin 2013 et a ainsi respecté les dispositions du code du travail et de l'article 7 de la convention nationale des entreprises de propreté en informant également la société Aviva services le 21 juin 2013 par lettre recommandée, qu'en l'espèce la salariée n'a pas signé l'avenant que lui a envoyé la société Elior SPS lui signifiant le transfert d'une partie de ses heures de travail, qu'il résulte de la pièce 9 transmise par la société Elior SPS qu'elle a même expressément refusé ce transfert, considérant qu'il s'agissait d'une modification irrégulière de son contrat de travail alors même qu'elle continuait de se présenter à la maison médicale [...] à [...] de 6 heures à 8 heures 30 tous les jours mais sans y travailler, qu'elle a de plus reçu de la part de la Société française de gestion hospitalière les documents de rupture du contrat pour les heures de travail au titre du chantier repris par la société Aviva services, que la société Elior SPS n'est plus son employeur concernant le contrat de la maison [...] situé à [...], et qu'elle ne peut donc rien lui demander au titre d'un chantier qui a régulièrement été repris par une autre société avec laquelle elle a refusé de signer un nouveau contrat suite au transfert effectué, que c'est par son seul fait que la salariée n'a plus eu les heures de travail ayant fait l'objet d'une reprise du marché par la société Aviva services ;

Attendu, cependant, que sauf application éventuelle de l'article L. 1244-1 du code du travail, le changement d'employeur prévu et organisé par voie conventionnelle suppose l'accord exprès du salarié, qui ne peut résulter de la seule poursuite de son contrat de travail sous une autre direction ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle constatait, d'une part, que le transfert s'inscrivait dans le cadre d'un dispositif conventionnel, de sorte que la salariée devait donner son accord au changement d'employeur et, d'autre part, que la salariée n'avait pas signé l'avenant au contrat réduisant ses horaires qui lui avait été adressé par la société Elior SPS et qu'elle avait refusé de signer avec la société Aviva services un nouveau contrat de travail suite au transfert d'une partie de ses heures de travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société Elior services propreté et santé aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Elior services propreté et santé à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme A... X... de toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE l'article L.1224-1 du code du travail dispose que : « Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise » ; que cependant l'article 7 de la convention collective propreté stipule qu'à l'occasion d'un changement de prestataires pour des travaux effectués dans les mêmes locaux à la suite de la cessation du contrat commercial, le transfert des contrats de travail est de plein droit et s'impose aux salariés, l'entreprise entrante devant établir un avenant au contrat de travail pour mentionner le changement d'employeur dans lequel elle reprendra l'ensemble des clauses attachées à celui-ci, le salarié bénéficiera du maintien de sa rémunération mensuelle brute correspondant au nombre d'heures habituellement effectuées sur le marché repris ; que l'article 7-4 de la convention collective précise même que : « à l'exception d'une modification substantielle de celui-ci par l'entreprise entrante, le salarié qui refuse son transfert dans les conditions stipulées par le présent accord sera considéré comme ayant rompu de son fait son contrat de travail. Cette rupture ne sera pas imputable à l'employeur et n'entraînera donc pour lui aucune obligation de verser des indemnités de préavis et de licenciement » ; que la société Elior SPS a bien informé Mme X... de la perte du marché par lettre recommandée du 21 juin 2013 et a ainsi respecté les dispositions du code du travail et de l'article 7 de la convention nationale des entreprises de propreté en informant également la société Aviva Services le 21 juin 2013 par courrier recommandé ; qu'en l'espèce Mme X... n'a pas signé l'avenant que lui a envoyé la société Elior SPS lui signifiant le transfert d'une partie de ses heures de travail, qu'il résulte de la pièce 9 transmise par la société Elior SPS qu'elle a même expressément refusé ce transfert, considérant qu'il s'agissait d'une modification irrégulière de son contrat de travail alors même qu'elle continuait de se présenter à la maison médicale [...] à [...] de 6 heures à 8 heures 30 tous les jours mais sans y travailler ; qu'elle a de plus reçu de la part de la Société Française de Gestion Hospitalière les documents de rupture du contrat pour les heures de travail au titre du chantier repris par la société Aviva Services ; qu'ainsi, la société Elior SPS n'est plus son employeur concernant le contrat de la maison [...] situé à [...], et qu'elle ne peut donc rien lui demander au titre d'un chantier qui a régulièrement été repris par une autre société avec laquelle elle a refusé de signer un nouveau contrat suite au transfert effectué ; que c'est par son seul fait que Mme X... n'a plus eu les heures de travail ayant fait l'objet d'une reprise du marché par la société Aviva Services ; que le jugement rendu par le conseil de prud'hommes sera donc infirmé sur ce point ; que Mme X... sollicite le versement de dommages-intérêts au titre d'une indemnité de reclassement et pour le fait qu'elle n'a pas pu bénéficier de juillet 2013 à avril 2015 de possibilité de travailler à temps plein ; que dans la mesure où Mme X... est considérée comme ayant rompu le contrat de travail de son propre fait, elle a ainsi causé son propre préjudice dont elle ne peut demander la réparation à la société Elior SPS, que par ailleurs cette dernière n'était tenue à aucune obligation de reclassement la concernant, aucun licenciement n'ayant été prononcé à son encontre, qu'elle sera en conséquence déboutée de sa demande ;

ALORS, D'UNE PART, QUE dans ses conclusions d'appel (p. 3 à 5 et p. 7, alinéas 4 à 7), Mme X... faisait valoir que l'article L.1224-1 du code du travail ne pouvait pas trouver application en l'espèce, dans la mesure où la société Elior Services Propreté et Santé n'était pas en mesure de justifier du transfert d'une entité économique autonome dans le cadre de la perte d'un marché, indiquant sur ce point « qu'aucun élément d'actifs corporels ou incorporels n'a été transféré au nouveau prestataire en charge de la prestation de nettoyage » ; qu'en affirmant que la société Elior Services Propreté et Santé avait respecté les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 4), sans répondre aux conclusions de la salariée faisant valoir que les conditions de mise en oeuvre du texte n'étaient pas réunies, faute de transfert d'une entité économique autonome, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE lorsque les conditions de l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ne sont pas réunies, le transfert du salarié d'une entreprise à une autre constitue une modification du contrat qui ne peut intervenir sans l'accord express du salarié, lequel ne peut résulter de la seule poursuite du contrat de travail ; que dans ces conditions, dès lors que le transfert du contrat de travail s'inscrit dans le cadre d'un dispositif conventionnel, en l'occurrence selon la cour d'appel l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, et non en vertu de l'article L. 1224-1 du code du travail, le changement d'employeur ne pouvait être effectué en l'absence d'accord du salarié ; que dans ses conclusions d'appel (p. 9, alinéa 13), Mme X... rappelait qu'elle avait exprimé, comme elle en avait le droit, son refus de voir transférer son contrat de travail au sein de la société Aviva Services ; qu'en considérant que l'accord de Mme X... n'était pas requis dans le cadre des dispositions des articles 7 à 7.7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, la cour d'appel a violé ces textes par fausse application ;

ALORS, ENFIN, QU' en toute hypothèse, en considérant que le contrat de travail de Mme X... s'était trouvé transféré de plein droit à la société Aviva Services, tout en constatant que ce transfert nécessitait la signature d'un avenant (arrêt attaqué, p. 2, alinéas 5 et 6), ce dont il résultait nécessairement que le transfert litigieux s'accompagnait d'une modification du contrat de travail qui ne pouvait être imposé à la salariée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 1221-1 et L. 1224-1 du code du travail, les articles 7 à 7.7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable en la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-28407
Date de la décision : 12/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 27 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 sep. 2018, pourvoi n°16-28407


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.28407
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