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12/09/2018 | FRANCE | N°16-25327

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 septembre 2018, 16-25327


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., a été engagé en 1992 en qualité de marin sur le navire [...] ; qu'à compter de l'année 2000, il est demeuré sur le même navire mais employé par la société le Thon du Nord ; qu'après une tentative de conciliation infructueuse menée par l'administration des affaires maritimes, il a saisi un tribunal d'instance de diverses demandes à l'encontre de son employeur ;

Sur le moyen unique pris en ses cinq premières branches :

Attendu que l'employeur fait

grief à l'arrêt de dire recevables les demandes du salarié comme étant non prescrit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., a été engagé en 1992 en qualité de marin sur le navire [...] ; qu'à compter de l'année 2000, il est demeuré sur le même navire mais employé par la société le Thon du Nord ; qu'après une tentative de conciliation infructueuse menée par l'administration des affaires maritimes, il a saisi un tribunal d'instance de diverses demandes à l'encontre de son employeur ;

Sur le moyen unique pris en ses cinq premières branches :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire recevables les demandes du salarié comme étant non prescrites et de le condamner à verser diverses sommes, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 130 du code du travail maritime et l'article 11 du décret n° 59-1337 du 20 novembre 1959 modifiant le titre VII du code du travail maritime disposent que « toutes actions ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé » ; que l'article L. 5542-49 du code des transports vise la même durée de prescription s'agissant des « actions ayant trait aux différends liés à l'embarquement » ; qu'en considérant que « la prescription annale, successivement prévue par les articles 130 du code du travail maritime, 11 du décret 59-1337 du 20 novembre 1959, et L. 5542-9 du code des transports ne concerne que les obligations nées pendant le voyage telles que les frais de nourriture », ce qui n'était toutefois prévu par aucun de ces textes, la cour d'appel a violé les articles 130 du code du travail maritime, 11 du décret 59-1337 du 20 novembre 1959, et L. 5542-9 du code des transports, ensemble les articles 32 de la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, et 16 du décret n° 2015-219 du 27 février 2015 relatif à la résolution des litiges individuels entre les marins et leurs employeurs ;

2°/ qu'en toute matière, le juge est tenu de respecter la contradiction ; qu'en retenant que la prescription annale « ne concerne(rait) que les obligations nées pendant le voyage telles que les frais de nourriture », ce qui n'était nullement soutenu par Monsieur X..., la cour d'appel, qui n'a pas soumis la circonscription matérielle de la prescription qu'elle a ainsi retenue au débat contradictoire des parties, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ que l'autorité de chose jugée s'étend aux motifs qui constituent le soutien nécessaire du dispositif ; que le décret n° 59-1337 du 20 novembre 1959 modifiant le titre VII du code du travail maritime et relatif aux litiges entre armateurs et marins, précisait, dans son article 1, que « l'article VII du code du travail maritime est remplacé par les dispositions réglementaires suivantes », parmi lesquelles l'article 11, précisant que « toutes actions ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé », ainsi que le prévoyait déjà l'article 130 du code du travail maritime ; que, par un arrêt du 27 novembre 2006 (n° 296018), le Conseil d'Etat a considéré que le pouvoir réglementaire ne pouvait abroger les dispositions de l'article 130 du code du travail maritime, s'agissant de dispositions législatives prévoyant une règle de prescription ; que le Conseil d'Etat en a déduit que « le décret du 20 novembre 1959 n'a pu légalement, par son article 1er, second alinéa, abroger l'article 130 du code du travail maritime, inclus dans le titre VII de ce code et que les dispositions de l'article 11 du décret, qui prévoient elles-mêmes une telle règle, sont, par suite, entachées d'illégalité » ; qu'ainsi, dès lors que le remplacement de l'article 130 du code du travail maritime par l'article 11 du décret du 20 novembre 1959 était illégal, l'article 130 code du travail maritime était, à nouveau, applicable ; que, pour retenir que l'arrêt du Conseil d'Etat n'avait pas eu pour effet de remettre en vigueur l'article 130 du code maritime, la cour d'appel a considéré que, dans le dispositif de son arrêt, le juge administratif ne s'était pas prononcé sur la légalité de l'article 1 du décret ; qu'en statuant ainsi, quand l'illégalité de l'article 1, retenue par le Conseil d'Etat dans ses motifs, constituait le soutien nécessaire de son dispositif, la cour d'appel a méconnu l'autorité de chose jugée attachée à la décision du juge administratif, et a violé le principe de séparation des pouvoirs, ensemble la loi des 16-24 août 1790 ;

4°/ que toute déclaration d'illégalité d'un texte réglementaire par le juge administratif, fût-elle décidée à l'occasion d'une autre instance, s'impose au juge civil qui ne peut plus faire application d'un texte illégal ; qu'en retenant également que juge administratif s'était contenté de déclarer l'article 11 illégal sans procéder à son annulation qui « seule, aurait pu justifier le rétablissement de l'article 130 du code de travail maritime », la cour d'appel, qui s'est méprise sur la portée d'une déclaration d'illégalité prononcée par le juge administratif, a méconnu l'autorité de chose jugée de la décision du juge administratif, et a violé le principe de séparation des pouvoirs, ensemble la loi des 16-24 août 1790 ;

5°/ qu'en s'abstenant de rechercher si la prescription annale n'était pas susceptible de résulter, ainsi que l'avait soutenu l'exposante, non seulement de l'article L. 5542-49 du code des transports, mais également de l'article 16 du décret 2015-219 du 27 février 2015, ayant procédé à l'abrogation de l'article 11 du décret du 20 février 1959 en précisant qu'antérieurement à son entrée en vigueur, ledit article 11 demeurait applicable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 5542-49, ensemble de l'article 16 du décret 2015-219 du 27 février 2015 ;

Mais attendu que, la cour d'appel qui, dans le respect du principe de la chose jugée par la juridiction administrative et, sans méconnaître le principe de la contradiction, a exactement décidé que la prescription annale successivement prévue par les articles 130 du code du travail maritime, 11 du décret n° 59-1337 du 20 novembre 1959 et L. 5542-49 du code des transports ne concernait que les obligations nées pendant le voyage excluant ainsi les actions se rapportant à la requalification des contrats de travail, celles liées à la rupture du contrat de travail et en paiement de salaires, a, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inutile, légalement justifié sa décision ;

Mais sur le moyen unique pris en sa sixième branche ;

Vu les articles L. 1235-2 et L. 1235-5 du code du travail en leur version applicable au litige ;

Attendu que pour condamner l'employeur à verser au salarié une certaine somme pour licenciement irrégulier alors qu'il avait considéré que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le salarié n'a pas été convoqué à un entretien préalable à son licenciement ;

Qu'en statuant ainsi, sans préciser si l'entreprise employait habituellement plus ou moins de onze salariés, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société le Thon du Nord à verser à M. X..., la somme de 1 607,74 euros à titre d'indemnité pour licenciement irrégulier, l'arrêt rendu le 31 août 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Le Thon du Nord

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré les demandes de Monsieur X... recevables car non prescrites et ordonné à l'exposante de remettre à Monsieur X... les bulletins de paie des saisons de pêche 2004 à 2009, d'AVOIR requalifié le contrat de travail conclu le 20 avril 2000 en contrat à durée indéterminée, d'AVOIR condamné l'exposante à payer à Monsieur X... les sommes de 1.607,74 euros à titre d'indemnité de requalification, 1.607,74 euros à tire d'indemnité pour licenciement irrégulier, 1.607,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 160,77 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférents, 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE « sur l'irrecevabilité des demandes de M. X... soulevée par la société : - sur la prescription annale : Pour soutenir que les demandes indemnitaires de M. X... sont prescrites, la société fait valoir que : - l'article 130 du code du travail maritime qui prévoit que « toutes actions ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé », n'a pas été abrogé contrairement à ce qui est noté sur le site Legifrance, mais a été remplacé par l'article 11 du décret n° 59-1337 du 20 novembre 1959 qui prévoyait lui aussi une prescription annale en ces termes « toutes actions ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé », - si, par un arrêt rendu le 27 novembre 2006, le Conseil d'Etat déclarait illégal l'article 11 du décret numéro 59-1337 du 20 novembre 1959, et indiquait que « le décret du 20 novembre 1959 n'a pu légalement, par son article 1er, second alinéa, abroger l'article 130 du code du travail maritime » l'article 130 du code du travail maritime redevenait donc applicable, - les dispositions de l'article 130 du code du travail maritime et de l'article 11 du décret numéro 59-1337 du 20 novembre 1959 étaient reprises en des ternies quasiment identiques dans le code des transports, entré en vigueur le I er décembre 2010, sous l'article L. 5542-49 dudit code qui ne sera abrogé que par la loi n° 2013-619 du 14 juin 2013;- ainsi, l'action engagée le 22 juin 2012, date de la convocation par le greffe du tribunal d'instance, par M. X... au titre des campagnes de pêche entre 2002 et 2009 est donc prescrite conformément aux dispositions de l'article L. 5542-49 du code des transports, étant précisé que : - cet article n'a été abrogé que par la loi du 14 juin 2013, postérieurement à l'action engagée par M. X... restaient régies par l'article L. 5542-49 du code des transports fixant une prescription annale, - selon l'article 16 du décret n°2015-219 du 27 février 2015, l'article 11 du décret n°59-1337 du 20 novembre 1959 prévoyant la prescription annale est bien applicable au présent litige, - il importe peu que le code des transports soit entré en vigueur après les faits de la présente instance puisqu'il s'est substitué à l'article 130 du code du travail maritime applicable lors de l'introduction de l'action devant le tribunal d'instance, - il importe peu qu'il ait été abrogé par la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 qui précise que les actions en justice engagées avant l'entrée en vigueur de la loi du 14 juin 2013 demeurent régies par l'article L. 5542-49 du code des transports fixant une prescription annale. Aussi, la société soutient que la prescription annale doit donc s'appliquer et notamment sur le fondement de l'article 11 du décret du 20 novembre 1959, réhabilité par l'article 16 du décret du 27 février 2015 et en application de l'article L. 5542-49 du code des transports. Cependant, la prescription annale, successivement prévue par les articles 130 du code du travail maritime, 11 du décret n° 59-1337 du 20 novembre 1959 et L. 5542-49 du code des transports ne concerne que les obligations nées pendant le voyage telles que les frais de nourriture. En outre : - l'article 130 du code du travail maritime, qui disposait que toute action ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé, a été abrogé par l'article 1 er du décret n° 59-1337 du 20 novembre 1959. Il en résulte que l'article 130 n'était plus applicable depuis l'entrée en vigueur du décret précité. Par décision n° 296018 du 27 novembre 2006, le Conseil d'Etat a déclaré que l'article 11 du décret d 59-1337 du 20 novembre 1959 était illégal. Cette décision qui, dans son dispositif ne s'est pas prononcée sur la légalité de l'article 1er du même texte, n'a donc pas eu pour effet de remettre en vigueur l'article 130 du code du travail maritime. En outre, cette décision, si elle a retenue l'illégalité de l'article 11 précité, n'en a pas prononcé l'annulation qui, seule, aurait pu justifier le rétablissement des dispositions de l'article 130 du code du travail maritime. En conséquence, la prescription annale n'étant pas applicable, seule la prescription trentenaire a régi les actions de nature contractuelle jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008. En l'espèce, l'action de M. X... a été introduite avant l'expiration du délai de la prescription quinquennale expirant le 17 juin 2013.
Sur la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée :
L'action indemnitaire exercée sur le fondement de l'article LI245-2 du code du travail était soumise à la prescription trentenaire de l'ancien article 2262 du code civil. Ce délai a été ramené à cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, en application des dispositions de l'article 2224 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008. En cas de réduction de la durée du délai de prescription, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Il s'ensuit que l'action en requalification engagée par X... et celle en paiement d'une indemnité de requalification ne sont pas prescrites. Le contrat d'engagement maritime à durée déterminée est un contrat écrit qui doit notamment mentionner cette durée. En l'absence d'un tel écrit, le contrat est réputé à durée indéterminée. Sur la relation contractuelle : M. X... produit plusieurs contrats de travail : - un contrat d'engagement maritime conclu le 20 avril 2000, la mention d'une durée indéterminée ayant été biffée ; un contrat de travail pour travailleur étranger pour un emploi saisonnier pour une durée de six mois à compter du 1 er mars 2000 , visé par l'office des migrations internationales ; un contrat de travail pour travailleur étranger pour un emploi saisonnier pour une durée de six mois à compter du 1 er mars 2001, visé par l'office des migrations internationales ; A compter de 2002, M. X... a été embauché par l'armateur par contrat à durée indéterminée. Il produit : un contrat d'engagement maritime du 25 mars 2002 ; un contrat d'engagement maritime du 17 mars 2003 à effet au 1er avril 2003 ; un contrat d'engagement maritime du 17 mars 2004 à effet au même jour. M. X... fait valoir que les quelques contrats à durée déterminée produits aux débats ne contiennent pas de motif précis de recours et une longue période de travail, de 2005 à 2008, n'est couverte par aucun contrat écrit. Il suffit de constater que le contrat de travail conclu le 20 avril 2000 qui porte mention de l'exclusion de sa durée indéterminée ne comporte pas l'indication de sa durée. En outre, le détail des services du marin fait état d'un engagement du marin par l'armateur chaque année depuis 1992 et pendant les mois de septembre et octobre 2000 et 2001. Or, force est de constater l'absence de contrat écrit couvrant ces périodes. En conséquence, il convient de requalifier les contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée. En application des dispositions de l'article L. 122-3-13 du code du travail alors applicable, devenu l'article L. 1245-2, il convient d'allouer à M. X... une indemnité égale à un mois de salaire, sur la base du SMIC, soit 1607,74 euros. Sur les demandes liées à la rupture du contrat ; L'employeur a cessé de fournir du travail et de verser un salaire au salarié à l'expiration d'un contrat de travail à durée déterminée qui a été requalifié. Il a ainsi mis fin aux relations de travail au seul motif de l'arrivée du terme d'un contrat improprement qualifié par lui de contrat de travail à durée déterminée. Cette rupture est donc à son initiative et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse en l'absence de motif précis énoncé dans une lettre de licenciement. - sur l'indemnité de préavis et l'indemnité de congés payés afférents : L'indemnité de préavis et l'indemnité de congés payés afférents, fussent-elles dues à la suite d'une requalification de contrats en contrat à durée indéterminée, ont un caractère de salaire, ce dont il résulte que l'action en paiement de ces indemnités est soumise à la prescription quinquennale, de sorte que l'article 26-II de la loi du 17 juin 2008 n'est pas applicable. La rupture contractuelle étant intervenue le 30 juin 2009, ces demandes n'étaient prescrites qu'à compter 30 juin 2014. M. X... justifie chez le même armateur d'une ancienneté de service continu lui permettant de prétendre en application de l'article 10210 du code du travail maritime alors applicable à une indemnité de préavis égale à un mois de salaire, soit la somme de 1 607,74 euros, outre à la somme de 160,77 euros au titre des congés payés afférents ; sur l'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement. Les dommages intérêts alloués à un salarié en cas de violation par l'employeur de la procédure de licenciement constituent une créance à caractère indemnitaire qui ne se trouvait dès lors pas soumise à la prescription quinquennale de l'article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ou de celle prévue à l'ancien article L.l 10-4 du code de commerce. En application des dispositions de l'article 102-10 du code du travail maritime, alors applicable, les dispositions des anciens articles L 122-14 à L 122-14-5 du code du travail sont applicables aux marins. Le salarié n'a pas été convoqué à un entretien préalable à son licenciement ; Il convient en conséquence de fixer le montant de l'indemnité due pour non-respect de la procédure de licenciement à la somme de 1607,74 euros. - Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : L'action du salarié en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse était soumise à la prescription trentenaire de l'ancien article 2262 du code civil. Ce délai a été ramené à cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, en application des dispositions de l'article 2224 du code civil issu de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008. Il résulte de l'article 26 de la loi précitée qu'en cas de réduction de la durée du délai de prescription, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Par conséquent, l'action engagée le 15 juin 2012 par M. X... en dommages-intérêts pour rupture abusive en juin 2009 n'est pas prescrite. M. X... ne justifie pas de sa situation professionnelle postérieurement à la rupture. Le licenciement sans cause réelle et sérieuse justifie, compte tenu de son ancienneté au sein de l'entreprise (17 années) et de son âge au moment de la rupture (44 ans), de lui allouer une somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts » ;

1. ALORS QUE l'article 130 du code du travail maritime et l'article 11 du décret n°59-1337 du 20 novembre 1959 modifiant le titre VII du code du travail maritime disposent que « toutes actions ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé » ; que l'article L. 5542-49 du code des transports vise la même durée de prescription s'agissant des « actions ayant trait aux différends liés à l'embarquement » ; qu'en considérant que « la prescription annale, successivement prévue par les articles 130 du code du travail maritime, 11 du décret 59-1337 du 20 novembre 1959, et L. 5542-9 du code des transports ne concerne que les obligations nées pendant le voyage telles que les frais de nourriture », ce qui n'était toutefois prévu par aucun de ces textes, la cour d'appel a violé les articles 130 du code du travail maritime, 11 du décret 59-1337 du 20 novembre 1959, et L. 5542-9 du code des transports, ensemble les articles 32 de la loi n°2013-619 du 16 juillet 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, et 16 du décret n°2015-219 du 27 février 2015 relatif à la résolution des litiges individuels entre les marins et leurs employeurs ;

2. ET ALORS QU'en toute matière, le juge est tenu de respecter la contradiction ; qu'en retenant que la prescription annale « ne concerne(rait) que les obligations nées pendant le voyage telles que les frais de nourriture », ce qui n'était nullement soutenu par Monsieur X..., la cour d'appel, qui n'a pas soumis la circonscription matérielle de la prescription qu'elle a ainsi retenue au débat contradictoire des parties, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3. ET ALORS QUE l'autorité de chose jugée s'étend aux motifs qui constituent le soutien nécessaire du dispositif ; que le décret n°59-1337 du 20 novembre 1959 modifiant le titre VII du code du travail maritime et relatif aux litiges entre armateurs et marins, précisait, dans son article 1, que « l'article VII du code du travail maritime est remplacé par les dispositions réglementaires suivantes », parmi lesquelles l'article 11, précisant que « toutes actions ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé », ainsi que le prévoyait déjà l'article 130 du code du travail maritime ; que, par un arrêt du 27 novembre 2006 (n° 296018), le Conseil d'Etat a considéré que le pouvoir réglementaire ne pouvait abroger les dispositions de l'article 130 du code du travail maritime, s'agissant de dispositions législatives prévoyant une règle de prescription ; que le Conseil d'Etat en a déduit que « le décret du 20 novembre 1959 n'a pu légalement, par son article 1er, second alinéa, abroger l'article 130 du code du travail maritime, inclus dans le titre VII de ce code et que les dispositions de l'article 11 du décret, qui prévoient elles-mêmes une telle règle, sont, par suite, entachées d'illégalité » ; qu'ainsi, dès lors que le remplacement de l'article 130 du code du travail maritime par l'article 11 du décret du 20 novembre 1959 était illégal, l'article 130 code du travail maritime était, à nouveau, applicable ; que, pour retenir que l'arrêt du Conseil d'Etat n'avait pas eu pour effet de remettre en vigueur l'article 130 du code maritime, la cour d'appel a considéré que, dans le dispositif de son arrêt, le juge administratif ne s'était pas prononcé sur la légalité de l'article 1 du décret ; qu'en statuant ainsi, quand l'illégalité de l'article 1, retenue par le Conseil d'Etat dans ses motifs, constituait le soutien nécessaire de son dispositif, la cour d'appel a méconnu l'autorité de chose jugée attachée à la décision du juge administratif, et a violé le principe de séparation des pouvoirs, ensemble la loi des 16-24 août 1790 ;

4. ET ALORS QUE toute déclaration d'illégalité d'un texte réglementaire par le juge administratif, fût-elle décidée à l'occasion d'une autre instance, s'impose au juge civil qui ne peut plus faire application d'un texte illégal ; qu'en retenant également que juge administratif s'était contenté de déclarer l'article 11 illégal sans procéder à son annulation qui « seule, aurait pu justifier le rétablissement de l'article 130 du code de travail maritime », la cour d'appel, qui s'est méprise sur la portée d'une déclaration d'illégalité prononcée par le juge administratif, a méconnu l'autorité de chose jugée de la décision du juge administratif, et a violé le principe de séparation des pouvoirs, ensemble la loi des 16-24 août 1790 ;

5. ET ALORS QU'en s'abstenant de rechercher si la prescription annale n'était pas susceptible de résulter, ainsi que l'avait soutenu l'exposante, non seulement de l'article L. 5542-49 du code des transports, mais également de l'article 16 du décret 2015-219 du 27 février 2015, ayant procédé à l'abrogation de l'article 11 du décret du 20 février 1959 en précisant qu'antérieurement à son entrée en vigueur, ledit article 11 demeurait applicable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 5542-49, ensemble de l'article 16 du décret 2015-219 du 27 février 2015 ;

6. ET ALORS subsidiairement QUE l'indemnité pour irrégularité de la procédure ne se cumule pas avec celle accordée pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; qu'en allouant à Monsieur X... l'une et l'autre, la cour d'appel a violé les articles L. 1235-2 et L. 1235-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-25327
Date de la décision : 12/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 31 août 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 sep. 2018, pourvoi n°16-25327


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.25327
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