CIV. 2
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 juillet 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10534 F
Pourvoi n° S 17-23.198
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Nathalie A... Z... , domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 15 juin 2017 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Paris, dont le siège est [...] ,
2°/ à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 juin 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme B... , conseiller référendaire rapporteur, M. Cadiot, conseiller, Mme Szirek, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Richard, avocat de Mme A... Z... , de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de la Caisse nationale d'assurance maladie travailleurs salariés, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris ;
Sur le rapport de Mme B... , conseiller référendaire, l'avis de Mme Y..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme A... Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour Mme A... Z... .
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, comme prescrite, l'action en responsabilité engagée par Madame Nathalie A... Z... à l'encontre de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, et d'avoir déclaré irrecevables et en tout cas mal fondées, ses demandes à l'encontre de la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris ;
AUX MOTIFS QUE, à titre préliminaire, il convient de relever que, à l'audience, la Cour a soulevé d'emblée la question de la compétence du Tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines et celle de la Cour d'appel de céans, au regard des demandes formulées par Mme A... Z... ; que celle-ci répond qu'elle demeure dans les Yvelines, que le TASS78 n'a pas soulevé son incompétence ; que le conseil de la CNAMTS n'a présenté aucune observation sur ce point ; que le conseil de la CPAM75 a répliqué que l'action de Mme A... Z... étant fondée sur l'article 1382 du Code civil, c'est le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris qui était compétent ; que la Cour, soulignant, d'une part, que la question posée par Mme Z... étant celle de la responsabilité de la CPAM75 dans le refus qui lui a été opposé à son droit d'exercer en libéral en secteur II, et, d'autre part, que Mme A... Z... a dirigé sa demande initiale exclusivement à l'encontre de la CPAM75, il n'appartenait pas au TASS78 d'appeler en la cause la CNAMTS et c'est le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris qui était normalement compétent pour statuer ;
1°) ALORS QUE le juge ne peut, sauf exception, relever d'office son incompétence territoriale ; qu'en relevant néanmoins d'office l'incompétence territoriale du Tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines, bien qu'elle n'y ait pas été autorisée, la Cour d'appel a violé l'article 93 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement, le juge qui se déclare territorialement incompétent, désigne la juridiction qu'il estime compétente et ne peut, dès lors, statuer sur les demandes dont il a été saisi ; qu'en se prononçant néanmoins sur la recevabilité et le bien-fondé des demandes formées par Madame A... Z... , après avoir pourtant décidé que le litige ne relevait pas de la compétence du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles, mais de celle du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, la Cour d'appel a violé l'article 96 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, et en tout cas non fondée, la demande de Madame Nathalie A... Z... , tendant à voir condamner la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris à lui payer la somme de 195.045 euros à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE, s'agissant de la demande de Mme A... Z... proprement dite, la Cour ne peut que constater qu'elle a été, d'emblée, mal dirigée ; qu'en effet, Mme A... Z... a attrait en responsabilité la CPAM75 alors que celle-ci n'a pris aucune décision la concernant, outre qu'il aurait appartenu à Mme A... Z... de démontrer que la CPAM75 a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, ce qu'elle ne fait en aucune manière ; qu'il est à cet égard symptomatique que, dans les pièces qu'elle produit, Mme A... Z... ne soumette à l'attention de la Cour aucune décision de la CPAM75 ou de la CNAMTS, aucun avis de leur part, aucun courrier d'aucune sorte ; que la Cour doit, en outre, relever que la décision qui a privé - certes indûment puisque le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris va, par jugement du 20 octobre 2011, infirmer cette décision - Mme A... Z... du droit d'exercer libéralement en secteur 2 a été prise, non pas par la CNAM75, mais par la CNAMTS ; que la CPAM75 n'a d'ailleurs aucune compétence pour prendre une telle décision ; qu'elle s'est contentée d'informer Mme A... Z... , par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 30 juillet 2009, que "les Services de la Caisse Nationale de l'Assurance Maladie, après examen de (son) dossier, (venaient) d'émettre un avis défavorable à (sa) demande de secteur II" (souligné par la cour) ; que la Cour note ici que l'argument du conseil de la CPAM75 que celle-ci n'avait jamais informé Mme A... Z... est au demeurant inepte puisque c'est précisément l'information donnée, au travers de cette lettre, par la CPAM75 qui est à l'origine du litige ; que les termes de cette lettre sont dépourvus de toute ambiguïté ; qu'ils indiquent clairement que la décision est celle de la caisse nationale et non de la caisse primaire; que la confusion vient, peut-être, d'une double circonstance : la voie de recours mentionnée dans cette lettre est la saisine de la commission de recours amiable de la caisse primaire, dans le délai de deux mois ; la convention nationale des médecins, dans son article 4-3, dispose que l'équivalence des titres pour pouvoir exercer "est reconnue par la caisse primaire d'assurance maladie du lieu d'implantation du cabinet principal du médecin conformément aux décisions de la Caisse nationale d'assurance maladie" ; qu'en d'autres termes, une caisse primaire d'assurance maladie se trouve dans un cas de compétence liée : elle ne peut que suivre la décision de la CNAMTS ; qu'au demeurant Mme A... Z... a exercé un recours contre la décision de la commission de recours amiable de la CPAM et elle a d'ailleurs finalement obtenu gain de cause contre la CNAMTS, à savoir le droit d'exercer en secteur II (droit qu'elle n'a, finalement, jamais exercé au demeurant) ; que Mme A... Z... n'était ainsi aucunement fondée à intenter une quelconque action à l'encontre de la CPAM75, sauf à démontrer une erreur manifeste d'appréciation de la commission de recours amiable de cette caisse, erreur qui lui aurait causé un préjudice, ce qu'elle ne fait en aucune manière : elle invoque l'obligation de transmettre une demande mal adressée à l'autorité compétente et le fait que la CPAM75 ne l'ait pas informée de la saisine d'une autorité incompétente ; que la CPAM75 n'avait pas à informer Mme A... Z... de quoi que ce soit puisque précisément Mme A... Z... a régulièrement saisi la commission de recours amiable de la caisse puis, la décision de refus étant confirmée, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris ; que la CPAM75 n'a ce faisant commis aucune faute d'aucune sorte ; que l'action engagée par Mme A... Z... à l'encontre de la CPAM75 est donc irrecevable et elle devrait en tout état de cause en être déboutée, que quoi qu'il en soit, encore une fois, la décision de refus initiale a été prise par la CNAMTS et non par la CPAM ; que pour les raisons expliquées ci-dessus, Mme A... Z... le savait depuis la réception de la lettre du 30 juillet 2009; qu'elle n'a saisi le TASS78 d'une action en responsabilité qu'à l'encontre de la CPAM75; que c'est le TASS78 qui, à tort, appelé en la cause la CNAMTS, par jugement avant dire droit en date du 15 janvier 2016 ;
1°) ALORS QUE la cour d'appel, qui décide que la demande dont elle est saisie est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant ensuite, au fond, sur le bien-fondé de la demande ; qu'en déclarant néanmoins la demande de dommages-intérêts formée par Madame A... Z... infondée, après l'avoir déclarée irrecevable, la Cour d'appel a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article 562 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement, la décision d'autoriser ou non un médecin à exercer son activité à titre libéral dans le secteur à honoraires différents relève de la compétence de la caisse primaire d'assurance maladie, alors même que celle-ci se prononce au vu de l'avis émis par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés ; qu'en décidant néanmoins que la décision illicite de refuser au Docteur A... Z... le droit d'exercer son activité libérale dans le secteur à honoraires différents avait été prise par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, et non par la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris, de sorte que le Docteur A... Z... n'était pas fondée à rechercher la responsabilité de cette dernière au titre de cette décision, bien que celle-ci ait été prise par la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris au vu de l'avis émis par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, la Cour d'appel a violé l'article 4.3, d, de la Convention nationale des médecins généralistes et des médecins spécialistes du 12 janvier 2005, approuvé par arrêté interministériel du 3 février 2005 et reconduite par le règlement arbitral organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie, transmis le 9 avril 2010 et approuvé par arrêté interministériel du 3 mai 2010, ensemble l'article 1382 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(également subsidiaire)IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, comme prescrite, l'action en responsabilité exercée par Madame Nathalie A... Z... à l'encontre de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés ;
AUX MOTIFS QUE Mme A... Z... n'a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles d'une action en responsabilité qu'à l'encontre de la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris ; que c'est le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles qui, à tort, a appelé en la cause la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, par jugement avant-dire droit en date du 15 janvier 2016 ; qu'à cette date, une éventuelle action en responsabilité de Madame A... Z... à l'encontre de la décision de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés est nécessairement prescrite, puisque la décision date de 2009, soit de plus de cinq ans, ce que le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles a d'ailleurs décidé ;
ALORS QUE les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer ; qu'en conséquence, le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité court à compter de la date de la décision judiciaire ayant constaté l'existence du dommage ; qu'en décidant néanmoins que le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité exercée par Madame A... Z... à l'encontre de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés avait commencé à courir en 2009, soit à la date de la décision prise à son encontre, bien que le dommage ne soit apparu qu'à l'occasion du prononcé du jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris du 20 octobre 2011, constatant l'illicéité de la décision, la Cour d'appel a violé l'article 2224 du Code civil.