CIV. 1
JT
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 juillet 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10469 F
Pourvoi n° M 17-23.009
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 13 juin 2017 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Marie-Angèle Z..., domiciliée [...] ,
2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 juin 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme A..., conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme Z... ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales
Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'avoir dit que le préjudice de Madame Z... résulte d'un accident médical non fautif survenu lors de l'intervention du 14 juin 2010, d'avoir fixé le montant des différents préjudices et d'avoir condamné l'ONIAM à verser à l'intéressée la somme de 28 657,28 euros à titre d'indemnisation, outre 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que la CRCI, dans son avis du 16 mai 2012, a estimé que la demande d'indemnisation de Madame Z... était recevable, relevant l'existence d'un acte médical non fautif dont les conséquences ont eu des conséquences anormales et la condition relative au caractère de gravité du dommage étant remplie, compte tenu de l'arrêt de travail retenu par l'expert ; qu'elle a conclu qu'il appartenait à l'ONIAM de faire une offre d'indemnisation à Madame Z... ; que l'ONIAM, qui a refusé de faire cette offre à Madame Z..., discute l'existence d'un accident médical en lien de causalité avec des conséquences anormales et soutient que ces conséquences anormales n'ont pas atteint le seuil de gravité requis ; qu'il est établi que, le 23 mars 2010, Madame Z..., dans le cadre de son activité professionnelle tenant à l'encadrement de personnes handicapées dans une station de sports d'hiver, a chuté en descendant d'un véhicule ; qu'elle a subi un traumatisme du poignet gauche nécessitant le port d'une attelle et des exercices de rééducation ; que la persistance de douleurs a justifié un arthroscanner, qui a mis en évidence l'existence d'un kyste arthrosynovial ; que le 14 juin 2010, le docteur X... a procédé à l'ablation de ce kyste ; que l'expert mandaté par la CRCI, le docteur Y..., indique que : Madame Z... a présenté, suite à l'opération, des troubles neurologiques dorsaux sur la main, autant dans le territoire du radial que du cubital, que les signes irritatifs présentés par Madame Z... ont été validés par un éléctromyogramme, notamment concernant les troubles cubitaux, la raideur, pré-existante à l'intervention, s'est aggravée en post-opératoire, cette raideur résultait du port, avant la chirurgie, d'une attelle ayant enraidi partiellement le poignet, concernant les troubles neurologiques, l'état initial de la patiente ne la prédisposait pas à cette pathologie, dans la littérature sur le kyste synovial, on retrouve, dans 0,8 % des cas, des troubles neurologiques par irritation des branches sensitives dorsales, qui ont, souvent, pour origine des variations anatomiques atypiques, la pathologie présentée par Madame Z..., autant radiale que cubitale, peut être expliquée par l'existence d'anastomoses atypiques entre les réseaux radial et cubital, cette complication n'est pas due à une faute du chirurgien, mais à un événement anormal indésirable qui a généré les troubles neurologiques déplorés ; que l'expert Y... conclut que l'acte chirurgical a été réalisée selon les règles de l'art et que la survenance de la complication est en lien de causalité avec la chirurgie pratiquée ; que concernant l'origine des troubles de Madame Z..., l'expert a utilisé le terme « certainement » du fait d'une particularité anatomique, uniquement, suspectée, en l'absence de vérification de celle-ci ; néanmoins, outre que le docteur Y... a rappelé que ce type d'atteinte neurologique était décrite dans la littérature sur le kyste synovial, il a souligné, de façon particulièrement claire, que Madame Z... ne présentait aucun état antérieur susceptible d'expliquer les troubles neurologues déplorés, que la raideur pré-opératoire n'était due qu'au port d'une attelle suite à l'accident professionnel de traumatisme du poignet, et non en lien avec le kyste synovial, et que les troubles neurologiques avaient été médicalement objectivés ; que dans ces conditions, il est rapporté la preuve de l'existence d'un acte médical non fautif en lien de causalité avec les conséquences anormales subies par Madame Z... ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges qu'il est constant que dans les suites de l'intervention chirurgicale, Madame Z... a présenté des troubles neurologiques dorsaux sur la main ; rappelant que Madame Z... présentait des signes irritatifs dans le territoire du nerf radial et cubital, validés par un électromyogramme, l'expert désigné par la CRCI indique qu'en faisant la synthèse de la littérature sur les kystes synoviales, il apparaît que dans environ 0,8 % des cas, on retrouvait des troubles neurologiques par irritation des branches sensitives dorsales qui ont souvent des variations anatomiques spécifiques, ce qui pouvait expliquer la pathologie autant radiale que cubitale ; qu'il ajoute que « cette pathologie est due certainement à des anastomoses atypiques entre les réseaux radial et cubital », cette complication n'étant pas due à une faute médicale, mais un événement indésirable ayant généré ces troubles neurologiques ; que sans ignorer que l'existence d'une anomalie anatomique n'a pas pu être vérifiée et que différents médecins ont relevé une disproportion entre les lésions anatomiques et la gêne fonctionnelle, il ressort toutefois du rapport d'expertise du Docteur Y... que : l'état initial de Madame Z... ne la prédisposait pas à cette pathologie neurologique, les signes irritatifs sur le territoire des nerfs radial et cubital ont été objectivés par un électromyogramme réalisé dans les suites de l'intervention chirurgicale, l'existence de trouble neurologique par irritation des branches sensitives dorsales est documentée dans la littérature médicale, lors de l'intervention chirurgicale, Madame Z... a indiqué avoir senti une forte décharge électrique partant de la main jusqu'à l'aisselle, sans que le chirurgien n'ait pu en expliquer la cause, aucune autre hypothèse médicale n'a été avancée par expliquer les troubles neurologiques ; que nonobstant les contestations de l'ONIAM, l'expertise du Docteur Y..., suffisamment argumentée et documentée, met ainsi en évidence la réalisation, en dehors de toute faute du chirurgien, d'un risque accidentel directement et certainement provoqué par l'acte médical ;
Alors d'une part que ne donnent lieu à indemnisation au titre de la solidarité nationale que les préjudices directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soin ; qu'ayant constaté que l'expert avait émis l'hypothèse que les troubles neurologiques trouvaient leur origine dans la présence du kyste synovial associé à une anomalie anatomique « suspecte », la cour d'appel, qui ne pouvait retenir pour établi de manière certaine le lien de causalité entre le dommage et l'acte médical sans se prononcer sur cette anomalie ou mentionner des éléments permettant d'en exclure l'existence ou les effets, a statué par des motifs qui, pour se limiter à la constatation que les troubles étaient apparus dans les suites de l'opération alors que l'état initial de la patiente n'était pas en mesure d'expliquer cette apparition, sont inopérants à établir une imputabilité certaine à l'acte médical, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1142-1 II du code de la santé publique ;
Alors d'autre part que l'exigence d'une imputabilité certaine à un acte de diagnostic, de prévention ou de soins des dommages constatés à la suite d'une intervention médicale, condition de leur indemnisation au titre de la solidarité nationale, implique la preuve du caractère direct et certain d'un lien de causalité ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que les troubles étaient apparus dans les suites de l'opération et que l'état initial de la patiente n'était pas en mesure d'expliquer cette apparition, la cour d'appel a présumé l'imputabilité certaine des troubles à l'acte médical sans exiger la preuve d'une cause certaine et a méconnu l'article L.1142-1 II du code de la santé publique.