CIV.3
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 juillet 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10389 F
Pourvoi n° U 17-24.074
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Marie-Françoise X..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 23 mai 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre A), dans le litige l'opposant à M. Gérard Y..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 5 juin 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Leduc et Vigand, avocat de Mme X..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ; la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Leduc et Vigand, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Mme X... à verser à M. Y... la somme principale de 150.000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE M. Y... est bien fondé en sa demande d'indemnisation de son préjudice pour n'avoir pu jouir du bien à son gré depuis 2004, s'étant, en effet, trouvé dans une situation l'empêchant d'en disposer ou de l'exploiter à sa guise sachant qu'il était engagé dans les liens du compromis ; qu'il n'a pu jouir du prix y prévu pendant de nombreuses années en raison du comportement de Mme X..., laquelle s'est d'abord abstenue de respecter ses engagements initiaux, et a, ensuite, tenté d'y échapper par des moyens qui ont été pénalement sanctionnés aux termes d'une procédure correctionnelle qui a perduré jusqu'en mars 2013, la seule initiative qu'elle a prise pour réitérer la vente ayant consisté à délivrer une assignation à M. Y... pour une cession au prix de 352.690,80 € ; qu'à ce titre, Mme X... devra donc lui verser, toutes causes confondues, la somme de 150.000 € à titre de dommages et intérêts ;
1/ ALORS QUE méconnaît les termes du litige le juge qui indemnise un chef de préjudice dont la réparation n'a pas été demandée ; que la cour d'appel ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ; que selon le dispositif des dernières écritures de M. Gérard Y..., celui-ci avait exclusivement sollicité la réparation d'un préjudice résidant dans la perte d'une chance de réaliser un gain financier en plaçant la somme correspondant au prix qui devait lui être versé (dispositif des dernières écritures de M. X..., p.14, al. 4) ; qu'en condamnant Mme X... à verser à M. Y... une indemnité de 150.000 € à titre de dommages et intérêts « toutes causes confondues », destinée à réparer notamment un préjudice né d'une supposée privation de jouissance du bien vendu (cf. arrêt p.4, antépénultième alinéa : « pour n'avoir pu jouir du bien à son gré depuis 2004 (
) »), qui n'était pourtant nullement invoqué, la cour d'appel a violé les articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE, au surplus, le principe de la réparation intégrale du dommage s'oppose à ce que le même préjudice soit indemnisé deux fois ; que le préjudice résultant pour un vendeur de la situation d'incertitude prolongée dans laquelle il s'est trouvé du fait de la non-réitération de la vente dans le délai initialement convenu réside, selon l'issue finale de la vente, soit dans l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de disposer du bien du fait de l'immobilisation de celui-ci, soit dans l'impossibilité de jouir plus tôt de la somme devant lui être versée au titre du prix de vente ; qu'en allouant à M. Y... une somme de 150.000 € à titre de dommages et intérêts « toutes causes confondues », destinée à compenser tout à la fois le préjudice résultant d'une privation de jouissance du bien vendu et celui résultant d'une privation de jouissance du prix de ce même bien, la cour d'appel a alloué cumulativement la réparation de deux préjudices qui ne pouvaient être qu'alternatifs et, ce faisant, procédé à une double indemnisation du même préjudice, en violation du principe de la réparation intégrale du dommage et des articles 1147 et 1149 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3/ ALORS QUE, enfin, modifie l'objet du litige le juge qui alloue la réparation d'un préjudice certain quand seule était demandée l'indemnisation d'une perte de chance de réaliser un gain ; qu'en l'espèce, il résulte tant du dispositif des dernières écritures de M. Gérard Y..., que des motifs qui en tant que de besoin viennent en éclairer le sens, que seule était sollicitée l'indemnisation de la perte d'une chance de tirer des revenus financiers du placement du produit de la vente litigieuse (dernières écritures de M. Gérard Y..., dispositif p.14, § 4 et motif p.13, 1er §, in fine) ; qu'en allouant à M. Y... une somme de 150.000 € à titre de dommages et intérêts, destinée notamment à couvrir une privation de jouissance du prix convenu, et donc un préjudice considéré comme certain, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 4 du code de procédure civile.