CIV. 2
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 juillet 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller
doyen faisant fonction de président
Décision n° 10496 F
Pourvoi n° J 17-18.614
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Patrice Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 20 février 2017 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant au Fonds de garantie des victimes de terrorisme et d'autres infractions, dont le siège est [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 juin 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller référendaire rapporteur, M. Besson, conseiller, Mme Mainardi, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. Y..., de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat du Fonds de garantie des victimes de terrorisme et d'autres infractions ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller référendaire, l'avis de M. Grignon A..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à la seule somme de 122 940 euros le préjudice dû au titre de la tierce personne avant consolidation ;
Aux motifs que M. Y... réclame à titre principal la somme de 175 588 euros pour l'indemnisation de ses besoins en tierce personne active et en tierce personne de surveillance jusqu'à la date de consolidation ; que le tribunal a fixé ce poste à la somme de 62 712 euros en excluant la nécessité d'une tierce personne de surveillance et en retenant que l'expert indique que M. Y... a des besoins en tierce personne non spécialisée pour les actes de la vie courante (toilette, habillage, transferts de la position allongée à la position debout, ménage repassage, courses, déplacement) entre le 25 mars 2011 et le 7 juin 2011 puis à compter du 17 juin 2011 jusqu'au 8 août 2013 pendant 4 heures tous les jours, samedi et dimanche et jours fériés inclus ; que sur la base de 869 jours et en retenant un cout horaire de 18 euros eu égard au tarif habituellement pratiqué en Guadeloupe compte tenu du handicap lourd de la victime, celle-ci peut prétendre à la somme 62 568 euros au titre de la tierce personne active (869 jours x 4 heures x 18 euros) ; que la nécessité d'une tierce personne de surveillance et de sécurité au domicile familial préconisée par l'expert pour ces mêmes périodes soit pendant 869 jours à raison de 8 heures par jour en plus des 4 heures d'aide non spécialisée n'apparaît pas justifiée médicalement par l'expert ou par des notions de respect de sécurité ou de dignité de la personne ; que d'ailleurs le jugement souligne qu'un système de télésurveillance ou de télé assistance est de nature à permettre d'assurer cette sécurité ; que le jugement est donc confirmé sur le rejet de la demande de la tierce personne de surveillance ;
Alors que l'assistance tierce personne doit être évaluée en fonction des besoins de la victime sans que soit exclu le recours à l'assistance d'un service prestataire dès lors que la victime ne peut être contrainte à être employeur avec toutes les sujétions que cela implique ; qu'en l'espèce, M. Y... versait aux débats deux devis d'organismes prestataires agrées par le conseil général, fixant le coût horaire de la tierce personne à 20,34 euros pour le premier et 20,90 euros pour le deuxième ; qu'en refusant de prendre en compte le taux horaire de l'assistance tierce personne par des organismes prestataires au profit exclusivement d'un employé salarié pour calculer le préjudice à ce titre avant consolidation, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu article 1240 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à la seule somme de 203 678 euros le préjudice au titre de la tierce personne échue après consolidation ;
Aux motifs que le premier juge a débouté dans son jugement du 18 décembre 2015 la victime de ses demandes à ce titre après avoir constaté que nonobstant l'injonction qui lui a été faite de produire un document établi par la MDPH de nature à lever toute incertitude quant à l'inéligibilité à la perception de la prestation de compensation du handicap, M. Y... ne produit aucun document ; qu'en cause d'appel la victime réclame à titre principal pour l'indemnisation de la tierce personne échue la somme de 145 578,40 euros et pour la tierce personne capitalisée la somme de 2 418 680,39 euros ; que l'expert conclut qu'à compter de la consolidation fixée au 9 août 2013 M. Y... a la nécessité d'avoir une aide active humaine non spécialisée 4 heures par jour tous les jours, samedis, dimanches et jours fériés compris pour les actes de la vie courante susvisés et une aide humaine de surveillance et de sécurité de 8 heures tous les jours samedi et dimanche, jours fériés inclus ; qu'au-delà de la quantification de l'expert à laquelle la cour n'est pas liée, il importe de rechercher dans le rapport de l'expert les éléments permettant d'évaluer les besoins de la victime en tierce personne ; que force est de constater que la nécessité en tierce personne de surveillance et de sécurité pendant 8 heures chaque jour à compter de la date de consolidation de la victime qui est âgée de 34 ans, n'est justifiée par l'expert, ni médicalement au regard des séquelles et de l'état fonctionnel de la victime, ni au regard de notions de respect de sécurité ou de dignité de la personne ; que M. Y... est donc débouté de sa demande d'indemnisation au titre de ses besoins en tierce personne de sécurité et de surveillance ; qu'en revanche la nécessité d'une tierce personne non spécialisée d'une durée limitée à 4 heures par jour samedi et dimanche , jours férié inclus est justifiée par l'état séquellaire de la victime ;
que sur la base de 18 euros de l'heure, il sera alloué entre le 9 août 2013 date de la consolidation et le présent arrêt soit pour une période de 3 ans et 6 mois 11 jours ou 1288 jours la somme de 92736 euros (1288 jours x 4 heures x 18 euros = 92736 euros ) ; qu'à compter du présent arrêt et alors que la victime n'est pas tenue, préalablement à la saisine de la CIVI, de solliciter la prestation de compensation du handicap, qui ne peut être considéré comme une indemnité à recevoir, selon l'arrêt de la cour de cassation en date du 4 février 2016 au sens de l'article 706-9 du code de procédure pénale, il convient de calculer l'indemnité revenant à la victime sur la base annuelle de 26 280 euros (365 jours X 4 heures X 18 euros) ; que compte tenu de l'âge de la victime au jour de l'arrêt il convient de capitaliser le coût annuel de la tierce personne en multipliant la somme de 26 280 euros par l'euro de la rente viager pour un homme de 37 ans selon le barème de capitalisation 2016 applicable soit 26 280 euros X 32,828 et d'allouer à M. Y... un capital de 862 719,84 euros ; que revient à M. Y... au titre de l'assistance à personne après consolidation la somme de 955 455,84 euros (92 736 euros + 862 719,84 euros) ; que la décision de la cour en date du 18 décembre 2015 ayant rejeté la demande de M. Y... au titre de la tierce personne capitalisée après consolidation est donc infirmée ;
Alors que l'assistance tierce personne doit être évaluée en fonction des besoins de la victime sans que soit exclu le recours à l'assistance d'un service prestataire dès lors que la victime ne peut être contrainte à être employeur avec toutes les sujétions que cela implique ; qu'en l'espèce, M. Y... versait aux débats deux devis d'organismes prestataires agrées par le conseil général, fixant le coût horaire de la tierce personne à 20,34 euros pour le premier et 20,90 euros pour le deuxième ; qu'en refusant de prendre en compte le taux horaire de l'assistance tierce personne par des organismes prestataires au profit exclusivement d'un employé salarié pour calculer le préjudice à ce titre après consolidation, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu article 1240 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 30 000 euros l'indemnité au titre de l'incidence professionnelle ;
Aux motifs que le tribunal a fixé ce poste à la somme de 20 000 euros au regard de la proposition du fonds de garantie après avoir constaté que M. Y... ne justifie d'aucune activité professionnelle ; que la victime critique la décision et réclame à ce titre la somme de 120 000 euros en faisant valoir qu'il est exclu du marché de l'emploi en Guadeloupe et que sa dévalorisation est totale en raison de son lourd handicap tandis que le fonds de garantie conclut à la confirmation de la décision ; qu'il doit être tenu compte que la victime qui était maçon ne peut plus exercer aucun métier du bâtiment et que l'expert souligne qu'il ne pourra exercer aucune profession compte tenu de son handicap alors qu'il est âgé de 34 ans au jour de la consolidation ; que pour tenir compte de la dévalorisation de la victime sur le marché du travail et de sa perte de chance de retrouver une activité professionnelle en raison de son handicap mais aussi de bénéficier d'une retraite, étant précisé que ce poste n'indemnise pas une perte de revenus mais les conséquences périphériques du handicap dans la sphère professionnelle, il convient d'allouer à la victime une indemnité de 30 000 euros ;
Alors qu'en se bornant à affirmer que M. Y... avait perdu une chance de retrouver une activité professionnelle, sans rechercher, comme elle y était invitée si M. Y... avait été totalement exclu du marché de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 devenu article 1240 du code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à la seule somme de 171 500 euros le déficit fonctionnel permanent ;
Aux motifs que le tribunal a fixé ce poste à la somme de 20 000 euros au regard de la proposition du fonds de garantie après avoir constaté que M. Y... ne justifie d'aucune activité ; que M. Y... critique la décision qui a retenu un taux de 49 % alors que l'expert judiciaire a fixé à 55 % le taux de déficit fonctionnel permanent de la victime en additionnant le taux de 40 % pour les atteintes physiques et 15 % pour les atteintes psychologiques ; qu'il doit être admis que les conclusions de l'expert sur l'évaluation du taux de déficit fonctionnel permanent de la victime ne lie pas la juridiction ; que la cour trouve dans le rapport d'expertise, au-delà de la quantification de l'expert, les éléments pour évaluer le déficit fonctionnel permanent de M. Y... comme le propose le docteur B... à la somme de 49 % en tenant compte des déficits de la flexion extension du bras droit et du déficit sensitif du membre supérieur droit et de la main gauche ainsi que du déficit du membre inférieur gauche avec gêne à la marche autonome nécessitant béquilles et prothèses pour la marche mais aussi de l'état dépressif avec syndrome psycho traumatique constaté pas l'expert judiciaire ; que la cour retient comme valeur du point pour un homme de 34 ans 3500 euros ; que revient à la victime la somme de 171 500 euros ;
Alors que si les juges du fond ne sont pas liés par l'avis des experts, ils sont tenus, lorsqu'ils décident d'écarter celui-ci en totalité ou en partie d'énoncer les motifs qui ont entraîné leur conviction ; qu'en se bornant à affirmer qu'elle n'était pas liée par l'avis des conclusions de l'expert, sans énoncer aucun motif ayant entrainé sa conviction, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.