CIV.3
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 juillet 2018
Rejet non spécialement motivé
M. Chauvin,
Décision n° 10382 F
Pourvoi n° A 17-17.387
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ Mme M... K... , domiciliée [...] ,
2°/ M. Sandro Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 5 janvier 2017 par la cour d'appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à M. Michel Z...,
2°/ à Mme Paola Z...,
tous deux domiciliés [...] ,
3°/ à M. Serge A...,
4°/ à Mme Marie-Rose B..., épouse A...,
tous deux domiciliés [...] ,
5°/ à M. Arthur C...,
6°/ à Mme Elisabeth D..., épouse C...,
tous deux domiciliés [...] ,
7°/ à M. Franz E..., domicilié [...] ,
8°/ à Mme Erika F..., épouse E..., domiciliée [...] ,
9°/ à M. Charles G...,
10°/ à Mme Annick H..., épouse G...,
tous deux domiciliés [...] ,
11°/ à Mme Joëlle I..., domiciliée [...] ,
12°/ à Mme Françoise N... X..., domiciliée [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 5 juin 2018, où étaient présents : M. Chauvin, , M. J..., conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Marc Lévis, avocat de Mme K... et M. Y..., de Me L..., avocat de M. et Mme Z..., de M. A..., de Mme B..., de M. et Mme C..., de M. E..., de Mme I..., et de Mme N... X... ;
Sur le rapport de M. J..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme K... et M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour Mme K... et M. Y...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la mission d'expertise à la hauteur des plantations qui ne doivent pas, selon le cahier des charges, excéder 4 mètres de hauteur sur les parcelles du lotissement, conformément au cahier des charges ;
AUX MOTIFS QUE Madame K... et Monsieur Y... sollicitent une expertise in futurum, fondée sur les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile, aux termes desquelles, « s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé » ; que Madame K... et Monsieur Y... ont obtenu cette expertise à leurs frais avancés, devant le juge de première instance en affirmant le non-respect par leurs différents voisins du cahier des charges du lotissement en ses contraintes, ce que la mesure d'instruction permettra d'établir, contraintes qui touchent à :
- la situation des constructions avec nécessaire respect d'un angle préférentiel d'implantation sur le terrain,
- le respect d'un pourcentage de surface bâtie par rapport à la superficie de la parcelle,
- un recul de trois mètres des bâtiments implantés par rapport à la limite séparative,
- l'emplacement des portails et des entrées de circulation sur certaines parcelles,
- la hauteur des plantations ;
qu'il a été rappelé ci-dessus que ce nouveau litige s'inscrit dans un contentieux de voisinage ancien, sur lequel sont intervenues plusieurs décisions de justice tant au fond qu'au stade de l'exécution ; qu'en particulier, a été rendu entre les parties, un arrêt du 2 juin 2009, relatif au non-respect du cahier des charges par Monsieur Y... et Madame K..., lorsqu'ils ont édifié leur immeuble ; que cette décision qui ne concernait cependant pas les plantations et leur hauteur, mais uniquement les constructions, énonce que l'article 14 du cahier des charges intitulé « mode d'établissement des constructions, servitude non aedificandi, plantations » ne pouvait cesser de s'appliquer au terme de dix années par référence à l'article L. 315-2-1 du code de l'urbanisme, devenu L. 442-9 dudit code, et revêtait un caractère contractuel, de sorte qu'il restait en vigueur ; qu'un débat s'est ensuite instauré sur l'existence d'une prescription qui pourrait atteindre les demandes envisagées, à présent sur le fond dans une instance future, par Monsieur Y... et Madame K..., condamnés à démolir partie de leurs constructions, afin que les mêmes sanctions puissent être appliquées, pour les mêmes causes à leurs différents voisins qu'il ne revient pas au juge des référés de se prononcer sur l'existence ou non de cette prescription, et sur sa durée de 5 ans ou de 30 ans selon que prévaut le caractère contractuel personnel ou contractuel réel des stipulations du cahier des charges, puisque l'article 14 vise dans son intitulé une « servitude non aedificandi » mais d'envisager le caractère légitime de la demande à cet égard et de ne pas encourager la persistance d'un litige tout en exposant Monsieur Y... et Madame K... à des dépenses expertales et procédurales inutiles ; qu'or, concernant les critiques formulées sur les constructions voisines, le délai écoulé depuis leur construction, soit plus de 30 ans et donc à fortiori plus de 5 ans, ne permet pas d'admettre sérieusement la recevabilité de la demande ; que les certificats de conformité versés aux débats, alors que ce point de départ de la prescription n'est pas discuté et que l'assignation en référé a été délivrée le 3 juin 2015, sont tous antérieurs au 3 juin 1985 puisque :
- du 12 décembre 1983 pour l'immeuble A...,
- du 19 mai 1976 pour l'immeuble Z...,
- du 9 novembre 1973 pour l'immeuble I...,
- du 23 mars 1983 pour l'immeuble X...,
- du 20 août 1979 pour l'immeuble C....
que d'autres demandes ont été dirigées contre les époux E..., régulièrement assignés le 12 juillet 2016 devant la Cour d'appel et qui n'ont pas conclu après avoir constitué avocat le 13 octobre 2016 ; que leur construction ne serait pas davantage conforme et elle est plus récente puisque le permis de construire a été demandé le 9 août 1989, de sorte que la prescription si elle était trentenaire peut se discuter, mais les copropriétaires avaient en quelque sorte appuyé les écarts au cahier des charges par un document commun produit à l'appui du permis sollicité et signé en particulier par le propriétaire du lot n° 7, Madame K... ; qu'à ce stade, ne peut être considérée comme légitime et recevable, que la demande de Madame K... et Monsieur Y..., se référant à la hauteur des plantations, car la limite en hauteur de 4 mètres, en raison du caractère vivant des végétaux, et indépendamment de la date de leur plantation, peut être franchie régulièrement à défaut d'élagage ; qu'il sera donc fait droit à cette demande d'expertise, avec extension de la mission, comme sollicité par les appelants, aux parcelles K... et Y... (arrêt, p. 7 à 9) ;
1°) ALORS QUE s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ; qu'en l'espèce, Madame K... et Monsieur Y... sollicitaient une expertise judicaire aux fins d'établir la non-conformité aux stipulations du cahier des charges du lotissement de différentes constructions édifiées par les intimés sur leur lot, à savoir l'abri de jardin et le portail des consorts A..., édifiés après l'année 1998, l'emplacement de l'entrée du lot des consorts Z... et de Madame N... X..., l'emplacement du portail et de la clôture de Madame I..., ainsi que l'emplacement des portails des consorts G... et C... ; qu'en se fondant, pour débouter Madame K... et M. Y... de leur demande d'expertise en ce qu'elle portait sur les constructions, sur la date des certificats de conformité qui concernaient les seuls immeubles d'habitation mais non les constructions, postérieures à ceux-ci, qui faisaient l'objet de la demande de Madame K... et Monsieur Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du code de procédure civile ;
2°) ALORS, au demeurant, QUE pour débouter Madame K... et Monsieur Y... de leur demande d'expertise portant sur la conformité au cahier des charges du lotissement des constructions édifiées par les intimés, la cour d'appel ne pouvait se borner à statuer au regard de certificats de conformité sans s'assurer que ceux-ci concernaient bien les constructions en litige ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 145 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE dans leurs conclusions, Madame K... et Monsieur Y... faisaient valoir, pièces à l'appui, que les époux A... ne pouvaient se prévaloir de la prescription dès lors qu'ils avaient reconnu l'irrégularité de l'emplacement de leur ancien abri de jardin, qu'ils s'étaient d'ailleurs engagés à démolir, qu'ils avaient déposé une déclaration de travaux en date du 30 janvier 2007, mais n'avaient toutefois pas procédé à la démolition, leur nouvelle construction ne respectant pas davantage le cahier des charges du lotissement (conclusions d'appel des exposants, p. 8 et 9) ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter Madame K... et Monsieur Y... de leur demande d'expertise portant sur la conformité au cahier des charges du lotissement des constructions voisines, que le délai écoulé depuis le certificat de conformité relatif au lot des époux A..., soit plus de trente ans, ne permettait pas d'admettre sérieusement la recevabilité de la demande, sans répondre à ce chef déterminant de leurs conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'en retenant, pour débouter Madame K... et Monsieur Y... de leur demande d'expertise portant sur la conformité au cahier des charges du lotissement des constructions édifiées par les intimés, que la construction des époux E... était plus récente que celles des autres copropriétaires assignés mais que les copropriétaires avaient en quelque sorte appuyé les écarts au cahier des charges par un document commun produit à l'appui du permis de construire sollicité, et signé en particulier par Madame K..., la cour d'appel a statué par un motif impropre à caractériser l'absence de motif légitime d'obtenir une expertise sur le point litigieux ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du code de procédure civile ;
5°) ALORS au demeurant, QUE dans leurs conclusions d'appel, Mme K... et Monsieur Y... faisaient valoir que si les consorts E... avaient cru pouvoir solliciter l'accord des copropriétaires colotis pour pouvoir déroger au cahier des charges, ils n'avaient pu recueillir que seize signatures sur les vingt-deux requises (conclusions d'appel, p. 8, § 4 à 7) ; qu'en jugeant que par le document produit, « les copropriétaires avaient en quelque sorte appuyé les écarts au cahier des charges » (arrêt, p. 9, § 1), sans répondre au chef déterminant des conclusions des exposants, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°) ALORS, en tout état de cause, QUE le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'il résulte du document commun signé par certains colotis que seul a été autorisé, par seize colotis, un dépassement de la densité de la construction des époux E... (pièce n° 15 a selon bordereau annexé aux conclusions d'appel des exposants) ; qu'en jugeant que par ce document, « les copropriétaires avaient en quelque sorte appuyé les écarts au cahier des charges » (arrêt, p. 9, § 1), la cour d'appel l'a dénaturé, en méconnaissance du principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause.