CIV. 3
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10381 F
Pourvoi n° Y 17-23.871
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Sinvie, société civile immobilière, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 22 juin 2017 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile - 2e chambre, section A), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Catherine X..., veuve Y..., domiciliée [...] ,
2°/ à Mme Myriam Y..., divorcée Z..., domiciliée [...] ,
3°/ à M. Serge Y..., domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 29 mai 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme A..., conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la SCI Sinvie, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat des consorts Y... ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller, l'avis de M. B..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI Sinvie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Sinvie ; la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros aux consorts Y... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la SCI Sinvie
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris de ces chefs, ordonné à la S.C.I. SINVIE de procéder au rétablissement de la servitude d'eau au profit des consorts Y... et débouté la S.C.I. SINVIE de ses demandes,
Aux motifs propres que
« 2. Sur la servitude et son exercice :
Par des motifs pertinents que la Cour adopte, le Tribunal relevant :
- d'une part, que le droit d'arrosage énoncé par l'acte dressé par Me C..., notaire à [...], le 19 août 1855 est expressément cité par l'acte de partage de la succession de M. Joseph Y... du 13 septembre 1956 "pour l'arrosage de la propriété" précisant qu'"il existe toujours" et qu'il est donné par la société L'Isloise de Distillation, puis dans l'acte de partage successoral du 30 avril 2010, entre les héritiers de M. René Y... et encore dans l'acte de vente consorts Y... à SCI Domaine de la Vigne du 30 avril 2010,
- d'autre part, que l'acte de vente Société L'Isloise de Distillerie à SCI Sinvie du 11 septembre 1991, qui se réfère à l'acte dressé par Me C..., notaire à [...] le 19 août 1855, rappelle l'existence de la servitude d'eau prévue "pour l'arrosage de la campagne (...) qui est la propriété de M. Y... D..., mais seulement pendant 6 mois de chaque année, du 1er avril au 1er octobre",
a justement retenu que les consorts Y... démontrent disposer d'un titre fondant la servitude d'arrosage accordée leur fonds, dans des termes qui s'accordent avec ceux du titre de propriété de la SCI Sinvie.
Contrairement à ce que soutient la SCI Sinvie, l'affectation aux seules activités agricole ou industrielle du droit d'arrosage en cause, ne peut se déduire de la concession de la roue consentie par la révérende chambre apostolique de Carpentras et ne résulte d'aucune disposition contractuelle, étant observé que si l'acte de vente E... à F... du 19 août 1855 mentionne in fine "l'irrigation desdits jardins et tènement" conservés par M. et Mme E... à l'exclusion d'autres propriétés, il indique spécialement que le droit litigieux est affecté à l'arrosage de leur "campagne" sans autre précision.
3. Sur l'extinction de la servitude :
L'acte du 11 septembre 1991 déjà cité, par lequel la SCI Sinvie a acquis l'immeuble constituant le fonds servant auprès de la société L'Isloise de Distillation, rappelle en termes clairs que lorsqu'elle a elle-même acquis l'immeuble le 31 décembre 1935, la venderesse "s'est engagée à supporter la servitude d'eau réservée au profit de la propriété de M. Y... D... telle qu'elle est établie et devra se conformer à ce sujet à toutes les prescriptions contenues dans l'acte de vente (...) reçu par Me C..., notaire à [...] le 19 août 1855" (page 4) et précise que le nouveau propriétaire (la SCI Sinvie) s'oblige à faire son affaire personnelle de l'exécution des charges et prescriptions mentionnées à l'acte et à prendre l'immeuble dans l'état où il se trouve.
Ainsi, tandis qu'il ne peut être tiré aucune conséquence des photographies - non datées - produites par l'appelante, montrant un immeuble ancien muni de deux roues, dont l'une seulement est envahie par la végétation, ni du courrier du 12 juin 1992 par lequel le gérant de l'appelante se dit "amusé" du droit d'arrosage alors réclamé par M. René Y..., la SCI Sinvie ne peut se prévaloir de la ruine du bien acquis, non relevée par son titre, et de l'impossibilité d'exécuter la servitude qui en serait résultée, tandis que l'impossibilité liée à la division des fonds n'est pas autrement justifiée.
Par ailleurs, sauf à considérer les attestations de Frédéric G..., établie en termes imprécis, et de Caroline H..., dont l'identité n'est pas vérifiable, dépourvues de valeur probante, le Tribunal a justement relevé que selon les témoignages suffisants de MM. I... J... et Philippe K... et de Mmes Régine L... et Sophie K..., non remis en cause par les seules observations adverses, l'arrosage du jardin Y... a été alimenté par l'eau en provenance de la SCI Sinvie, au moyen d'un robinet placé sur le "mur mitoyen des deux propriétés", ou "mur de la distillerie" jusqu'en 2012.
Enfin, la prétendue inutilité de la servitude, non démontrée par les pièces produites, ne vaut pas impossibilité d'en user.
Ainsi, les conditions des articles 704, 706 et 703 n'étant pas réunies et tandis que le rétablissement d'une servitude supprimée par le propriétaire du fonds servant et les frais qui en résultent ne peuvent en aucun cas incomber au propriétaire du fonds dominant, c'est à bon droit que le tribunal écartant les moyens tirés de l'extinction de la servitude pour non usage pendant 30 ans et de l'impossibilité définitive d'en user, a accueilli la demande des consorts Y... tendant au rétablissement de la servitude pour l'exercer pendant 6 mois, du 1er avril au 1er octobre, et ce, à compter du 1er avril 2016, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard » ;
Et aux motifs réputés adoptés du jugement entrepris que
« Sur la preuve de l'existence de la servitude d'eau :
L'article 691 du Code civil dispose que les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes ne peuvent s'établir que par titre.
En l'espèce, les droits de propriété des consorts Y... résultent de l'acte de partage dressé par Maître M... notaire à [...] en date du 30 avril 2010.
Aux termes de cet acte, il est précisé expressément au titre du rappel de servitudes l'existence d'un droit d'arrosage au profit de la propriété Y... déjà consigné dans un acte reçu par Maître M..., notaire à [...] en date du 27 février 2007, par lequel "Monsieur Joseph Y... est subrogé dans les droits de Monsieur N..., relatif à l'exercice d'un droit d'eau pour l'arrosage de la propriété vendue, sur la roue appartenant à l'hoirie de Monsieur Robert F..., dépendant d'un immeuble actuellement occupé par Messieurs Q... Frères. Lesquels droits résultent d'un acte de vente passé devant Maître C... notaire à [...] le 19 août 1855... Les copartageants précisent à ce sujet que ce droit existe toujours, qu'il est donné par la Société L'Isloise de Distillation propriétaire de l'immeuble grevé de cette servitude...".
Par acte du 30 avril 2010 également dressé par Maître M... notaire à [...], Madame X... veuve Y..., Madame Myriam Y... et Monsieur Serge Y... ont vendu à la SCI Domaine de la Vigne une parcelle de terrain sise [...] à [...], cadastrée [...] , [...], [...].
Il est rappelé dans cet acte la servitude d'arrosage mentionnée dans l'acte du 27 février 2007, mais pour l'exclure de la vente : "précision est ici faite que le droit d'eau dont il est parlé ci-dessus n'est pas vendu avec le bien objet des présentes, il reste attaché à la propriété des consorts Y... (parcelles bâties 641 et 642)".
Cet acte prévoit de surcroît dans ses conditions particulières l'engagement de la SCI Domaine de la Vigne d'amener l'eau aux terrains restant la propriété des vendeurs "pour l'arrosage de la distillerie (droit d'eau existant)".
Par acte notarié dressé par Maître N... notaire, en date du 11 septembre 1991, la S.C.I. SINVIE a acquis de la société L'ISLOISE DE DISTILLATION un ensemble immobilier bâti avec terrain lieudit [...] n° [...] cadastré section [...] .
Dans le rappel des servitudes, il est mentionné que "la société L'Isloise de Distillation devra supporter la servitude d'eau réservée au profit de la propriété de Monsieur Y... D... telle qu'elle est établie et devra se conformer à ce sujet à toutes les prescriptions contenues dans l'acte de vente ci-dessus énoncé reçu par Maître C... notaire le 19 août 1955".
S'agissant des conditions de servitude, il est précisé qu'il s'agit d'un droit à perpétuité de prendre l'eau mais "seulement pendant 6 mois chaque année du 1er avril au 1er octobre".
Mention de ce droit d'arrosage est faite dans l'acte dressé par Maître C... notaire le 19 août 1955 portant vente de Pierre E... à René F... de même que dans l'acte de partage du 13 septembre 1956, dressé par Maître O... notaire, puisque cet acte indique : "il est attribué au lot de Monsieur René Y..., à l'exclusion de celui de Madame P..., le droit d'arrosage dû par la société L'Isloise de Distillation".
Aux termes de cet acte s'il est rappelé que la concession de la roue a été accordée par la Révérende Chambre Apostolique de Carpentras, confirmée par ordonnances royales du 145 avril 1818 et du 15 février 18345, il est également précisé que Monsieur et Madame E... se réservent le droit de prendre de l'eau "1° un volume d'eau... et de le dériver dans leur jardin à l'aide d'un conduit souterrain... 2° Et un autre volume d'eau pour l'arrosage de leurs campagnes... 4° ... à perpétuité... ne pourront se servir des dits volumes que pour l'irrigation desdits jardins et tènements...".
Il résulte de l'acte de partage du 13 septembre 1956 que l'immeuble attribué à Joseph Y... bénéficie d'un droit d'eau pour l'arrosage de la propriété dans les termes de l'acte de vente du 19 août 1855, ce droit étant alors qualifié d'actuel, pour l'arrosage de sa propriété sans autre restriction.
Ainsi, le droit d'arrosage est conçu au travers des actes en termes généraux liés à l'arrosage d'une campagne, de jardins, d'une propriété.
Il ne peut donc pas être considéré que la servitude d'eau soit limitée à un usage agricole ou industriel.
En conséquence les consorts Y... rapportent bien la preuve de la servitude invoquée en justifiant d'un titre de servitude d'arrosage et de son origine de propriété en concordance avec le titre de propriété de la SCI SINVIE.
3/ Sur l'effectivité de la servitude :
Il résulte de la combinaison des articles 704 et 706 du Code civil que le non usage pendant trente ans est une cause d'extinction de la servitude et également de l'article 703 que lorsque l'usage est devenu définitivement impossible la servitude doit cesser.
En l'espèce, la preuve est rapportée par les consorts Y... de l'utilisation effective de cette servitude jusqu'en 2012.
Ainsi l'attestation de témoignage de Monsieur J... I... établit que Monsieur René Y... arrosait son jardin avec l'eau provenant de la SCI SINVIE, grâce à un robinet fixé sur le mur mitoyen des deux propriétés, constat effectué dans les années 2000.
L'attestation de Madame L... Régine justifie clairement de la réalité de l'usage de la servitude d'eau en 2011 à partir d'un robinet sur le mur de la distillerie et de la coupure d'eau.
Madame Sophie K..., petite fille de Monsieur Y..., justifie de ce que l'arrosage du jardin de Monsieur Y... se faisait bien au moyen de l'eau provenant de la distillerie depuis les années 1970 à 2012.
Ce même constat est fait par le témoignage de Monsieur K..., pour la période de 1990 à 2012.
(...) (motifs désavoués par la Cour d'appel).
Ainsi, l'usage effectif de la servitude écarte toute éventualité d'extinction par prescription de cette dernière, de même que cet usage écarte l'argument lié à l'impossibilité de son exercice.
Le moyen tiré de l'extinction de la servitude en raison du non-usage pendant trente ans sera donc écarté de même que celui tendant à la disparition de la servitude en raison de l'impossibilité définitive d'en user.
Dès lors, c'est à tort que la SCI SINVIE a mis fin à l'exercice par la consorts Y... du droit d'arrosage dont ils disposent sur le fondement d'un titre légitime.
4/ Sur les conditions d'exercice de la servitude
L'article 1134 rappelle que le contrat fait la Loi des parties.
La constitution conventionnelle de servitude et la transmission conventionnelle des droits et obligations qui y sont attachés ont pour conséquence nécessaire le respect des modalités de la convention.
En l'espèce, il s'agit d'un droit d'eau servant à l'arrosage des terrains appartenant aux consorts Y..., et donc des jardins.
Il est rappelé dans l'acte de vente passé entre la Société L'Isloise de Distillation et la SCI SINVIE, dressé par Maître N... le 11 septembre 1991, que le droit d'arrosage était limité sur une période de 6 mois de l'année du 1er avril au 1er octobre.
Il sera donc fait droit à la demande de rétablissement de la servitude d'arrosage dans les conditions fixées par les parties.
5/ Sur le rétablissement de la servitude sous astreinte :
Il résulte de l'article L. 132-2 du Code des procédures civiles d'exécution que l'obligation de faire peut être assortie d'une astreinte.
Le rétablissement de la servitude sera donc ordonnée sous astreinte provisoire, dans les termes du dispositif ci-après » ;
1°) Alors que l'acte notarié en date du 11 septembre 1991 par lequel la société SINVIE a acquis de la société L'ISLOISE DE DISTILLATION le fonds servant rappelle qu'aux termes d'un acte de vente par les époux E... à M. F..., reçu par Me C... le 19 août 1855, les vendeurs « s'étaient réservé le droit à perpétuité de prendre à l'auge droite de la roue existant alors (...) un volume d'eau (...) pour l'arrosage de la campagne que M. et Mme E... possédaient au même quartier et qui est la propriété de M. Y... D..., mais seulement pendant six mois de chaque année du premier avril au premier octobre » ; que l'acte du 19 août 1855 précisait en outre que « La concession de la roue » « hydraulique placée dans (la) [...], donnant aujourd'hui le mouvement aux machines qui y ont été attelées par le fermier de cette propriété et l'arrosage tant à cette même propriété qu'à celle restant aux vendeurs » « a été accordée par la Révérende Chambre Apostolique de Carpentras, elle a été renouvelée et confirmée par deux ordonnances Royales, l'une en date du quinze avril mil huit cent dix-huit, l'autre en date du quinze février mil huit cent quarante cinq » ; que de ces précisions et de l'emploi des motifs "campagne" et "fermier" il résulte sans ambiguïté que la servitude d'eau avait été instituée avec pour objet exclusif de permettre l'arrosage et l'irrigation des terres cultivées à usage agricole et qu'elle n'était pas destinée à permettre l'arrosage de simples jardins ; qu'en retenant néanmoins que, « Contrairement à ce que soutient la SCI Sinvie, l'affectation aux seules activités agricole ou industrielle du droit d'arrosage en cause, (...) ne résulte d'aucune disposition contractuelle », la Cour d'appel a dénaturé l'acte d'acquisition de la société SINVIE, en date du 11 septembre 1991, et l'acte constitutif de la servitude, en date du 19 août 1855, auquel il se réfère et a ainsi violé le principe selon lequel il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause, ensemble les dispositions de l'article 1134 ancien du Code civil ;
2°) Alors que, du fait de la vente, par les consorts Y..., de plusieurs des parcelles issues d'une division du fonds dominant à la S.C.I. DOMAINE DE LA VIGNE, promoteur immobilier, et de la construction réalisée par celle-ci sur ces parcelles, celles conservées par les consorts Y... sont désormais distantes de plusieurs centaines de mètres de la roue à auge attachée à l'immeuble de la société SINVIE et séparées de cet immeuble par une résidence de 26 logements ; que la société SINVIE en déduisait devant les juges du fond que cette situation de fait, dont les consorts Y... portent seuls la responsabilité, rend matériellement impossible l'exercice de la servitude, dès lors éteinte ; que la Cour d'appel, qui a laissé ces conclusions sans réponse, a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) Alors que, faute d'avoir recherché, comme cela le lui était demandé, si du fait de la vente, par les consorts Y..., de plusieurs des parcelles issues d'une division du fonds dominant à la S.C.I. DOMAINE DE LA VIGNE, promoteur immobilier, et de la construction réalisée par celle-ci sur ces parcelles, celles conservées par les consorts Y... ne sont pas désormais distantes de plusieurs centaines de mètres de la roue à auge attachée à l'immeuble de la société SINVIE et séparées de cet immeuble par une résidence de 26 logements et si, dès lors, cette situation de fait, dont les consorts Y... portent seuls la responsabilité, ne rend pas matériellement impossible l'exercice de la servitude, dès lors éteinte, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 703 du Code civil ;
4°) Alors que la Cour d'appel, qui a considéré certains seulement des éléments de preuve produits par la société SINVIE au soutien de son moyen pris de l'impossibilité matérielle d'exercice de la servitude, et de surcroît chacun pris isolément, sans rechercher si, comme le soutenait la société SINVIE, l'état de ruine de la roue lors de l'acquisition survenue en 1991, rendant impossible dès ce moment l'usage de la servitude et provoquant par suite son extinction, ne résultait pas des photographies corroborées par les termes de la lettre adressée le 12 juin 1992 à M. René Y... et par l'absence de toute réaction de celui-ci, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 703 du Code civil ;
5°) Alors que, en tout état de cause, la Cour d'appel, faute d'avoir recherché, comme le lui demandait la société SINVIE, si l'état de ruine de la roue attesté par ces photographies ne rendait pas actuellement impossible l'usage de la servitude, dès lors éteinte, a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 703 du Code civil ;
6°) Alors que celui auquel est due une servitude a droit de faire tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la conserver, mais ces ouvrages sont à ses frais et non à ceux du propriétaire du fonds assujetti, à moins que le titre d'établissement de la servitude ne dise le contraire ; que la société SINVIE faisait valoir en appel que l'acte du 19 août 1855 stipule un « droit de prendre à l'auge droite de la roue (existant) un volume d'eau de neuf centimètres carrés pour l'arrosage de leur campagne » au moyen de conduites construites et entretenues aux frais des propriétaires du fonds dominant ; qu'elle en déduisait qu'il n'incombait pas au propriétaire du fonds servant c'est-à-dire à elle-même de faire quelques travaux que ce fût pour permettre aux consorts Y... de prendre de l'eau, mais à ceux-ci, s'il souhaitaient bénéficier de cette servitude, de faire le nécessaire pour venir chercher l'eau à l'auge droite de la roue ; que la Cour d'appel, qui a laissé ces conclusions sans réponse, a derechef méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
7°) Alors que, partant et faute d'avoir recherché s'il n'incombait pas aux seuls propriétaires du fonds dominant c'est-à-dire aux consorts Y... de faire le nécessaire pour venir chercher l'eau à l'auge droite de la roue, conformément aux stipulations de l'acte constitutif de la servitude litigieuse, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 697 et 698 du Code civil ;
8°) Alors que, du fait de la vente, par les consorts Y..., de plusieurs des parcelles issues d'une division du fonds dominant à la S.C.I. DOMAINE DE LA VIGNE, promoteur immobilier, et de la construction réalisée par celle-ci sur ces parcelles, celles conservées par les consorts Y... sont désormais distantes de plusieurs centaines de mètres de la roue à auge attachée à l'immeuble de la société SINVIE et séparées de cet immeuble par une résidence de 26 logements ; que la société SINVIE en déduisait devant les juges du fond qu'il incombe aux seuls consorts Y... d'établir les installations rendues nécessaires à l'exercice de la servitude en raison de ce nouvel état de fait dont ils sont seuls responsables ; que la Cour d'appel, qui a laissé ces conclusions sans réponse, a derechef méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
9°) et enfin, alors que, faute d'avoir recherché, comme cela le lui était demandé, si du fait de la vente, par les consorts Y..., de plusieurs des parcelles issues d'une division du fonds dominant à la S.C.I. DOMAINE DE LA VIGNE, promoteur immobilier, et de la construction réalisée par celle-ci sur ces parcelles, celles conservées par les consorts Y... ne sont pas désormais distantes de plusieurs centaines de mètres de la roue à auge attachée à l'immeuble de la société SINVIE et séparées de cet immeuble par une résidence de 26 logements et si, dès lors, il n'appartient pas aux seuls consorts Y..., responsables de cette situation de fait, d'établir et d'entretenir les installations de ce fait rendues nécessaires à l'exercice de la servitude, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 697 et 698 du Code civil.