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28/06/2018 | FRANCE | N°17-22.363

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 28 juin 2018, 17-22.363


CIV.3

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 juin 2018




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10356 F

Pourvoi n° J 17-22.363





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ M. X... Y..., domicilié [...]

,

2°/ l'EARL de la Basse Rivière, exploitation à responsabillité limitée, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 29 juin 2017 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile...

CIV.3

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 juin 2018

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVIN, président

Décision n° 10356 F

Pourvoi n° J 17-22.363

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ M. X... Y..., domicilié [...] ,

2°/ l'EARL de la Basse Rivière, exploitation à responsabillité limitée, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 29 juin 2017 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile (expropriations)), dans le litige les opposant :

1°/ à la société RTE EDF transport, société anonyme, dont le siège est Tour Initiale 1, terrasse Bellini, TSA 41000, 92919 Paris-La Défense,

2°/ au commissaire du gouvernement, direction départementale des finances publiques du Calvados, domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 29 mai 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. Y... et de l'EARL de la Basse Rivière, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société RTE EDF transport ;

Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, l'avis de M. A..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... et l'EARL de la Basse Rivière aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... et de l'EARL de la Basse Rivière ; les condamne à payer la somme globale de 1 500 euros à la société RTE EDF transport ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. Y... et l'EARL de la Basse Rivière

L'arrêt du 29 juin 2017 encourt la censure ;

EN CE QU' il a débouté M. Y... et l'EARL DE LA BASSE RIVIÈRE de leur demande d'indemnisation du préjudice d'exploitation ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article L. 323-7 du code de l'énergie permet aux "propriétaires, titulaires de droits réels" ou à "leurs ayants droit" de saisir le juge de l'expropriation pour lui demander, à défaut d'accord amiable, de fixer une indemnité lorsque l'institution d'une servitude prévue à l'article L323-4 leur occasionne "un préjudice direct matériel et certain" ; que ceux-ci peuvent démontrer que leur préjudice est la conséquence directe .et certaine de l'institution de la servitude en établissant l'existence de présomptions graves précises fiables et concordantes en ce sens ; qu'en l'espèce, l'expert commis par la cour a noté, au cours des différentes mesures effectuées en février et mars 2016, un champ magnétique maximal de 0,065mTesla (très inférieur au seuil de 100mTesla fixé par la recommandation du parlement européen 1999/519 et par l'article 12 bis de l'arrêté du 17/5/2001 fixant les conditions techniques auxquelles doivent satisfaire les distributions d'énergie électrique), des valeurs en tension de pas, tension de contact et tension neutre -terre très inférieurs à 500mVet des champs électriques au maximum de 7,31volts/m très en-deçà de 5kV/m (seuil fixé par les textes visés cidessus) ; qu'il est constant que la ligne litigieuse n'était pas chargée au moment des mesures à ses valeurs maximales, néanmoins ces valeurs correspondant au transit moyen observé au cours des années 2015 et 2016 ; que l'expert indique que, au surplus, bien que ne faisant pas partie de sa mission, les mesures de champ magnétique "pourraient effectivement être "interpolées techniquement, à un transit des lignes de l'ordre de trois fois le courant de transit communiqué lors de mesures" ; qu'en retenant cette hypothèse, le champ magnétique interpolé resterait très inférieur à la norme indiquée ; qu'en conséquence, l'expertise ne permet pas de retenir l'existence de champs magnétiques ou de courants électriques en rapport avec la ligne litigieuse susceptibles d'avoir généré les préjudices dont se plaignent M. Y... et l'EARL de la basse rivière ; qu'il n'existe pas d'autres éléments constituant des présomptions graves précises fiables et concordantes permettant de considérer que leur préjudice serait la conséquence directe et certaine de l'institution de la servitude ; qu'en conséquence, M. Y... et l'EAR.L de la basse rivière seront déboutés de leur demande au titre du préjudice d'exploitation » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « vu l'article 9 du code de procédure civile, vu l'article L 323-7 du code de l'énergie, vu l'article 20 du décret n° 1970-492 du 11 juin 1970, il résulte de ces dispositions que les servitudes liées à la traversée des propriétés privées par des lignes électriques, qui entraînent un préjudice direct, matériel et certain, ouvrent droit à une indemnité au profit des propriétaires, des titulaires de droits réels ou de leurs ayants droit, ainsi que des exploitants de ces fonds. Toutes ces personnes doivent établir que leur préjudice est la conséquence directe et certaine d'une telle servitude, qui doit, en l'absence de preuve scientifique, résulter de présomptions graves, précises, fiables et concordantes ; que l'application de ce régime de responsabilité exclut celui prévu à l'article 1384 aliéna 1er du code civil instituant une présomption de responsabilité, ce qui impliquerait que l'exploitant des lignes électriques justifient qu'elles ne créent pas de dommages ; que pour établir la responsabilité de l'exploitant des lignes électriques, en raison de phénomènes électromagnétiques parasites affectant la santé des animaux d'élevage, il doit être établi au préalable par ceux qui réclament réparation, que les animaux de leur exploitation sont victimes de pathologies à des taux anormalement élevés, que des causes sanitaires liées aux pratiques d'élevage ou de soins n'en sont pas la cause, et que leurs installations électriques ne présentent pas de défauts susceptibles de générer ou de propager des courants d'origine électrique perturbateurs, avant que puisse être examinée la responsabilité de l'exploitant d'une ligne THT au titre de la propagation de ses courants électromagnétiques ; que selon le rapport d'expertise de M. E... , qui a permis de réunir et de confronter des informations documentées auprès de l'éleveur, des vétérinaires qui interviennent dans l'exploitation, les docteurs B... et C..., ainsi que du docteur D..., directeur du groupement de défense sanitaire (GDS) du Calvados auquel l'exploitation a adhéré en 2008, il existe trois pathologies prédominantes et plus importantes relativement à d'autres élevages laitiers comparables dans le même secteur géographique ; qu'elles concernent la mortalité des veaux, les mammites et des troubles de la fertilité ; qu'à cet égard le taux de réforme des vaches laitières apparaît particulièrement élevé : sur les 42 vaches laitières achetées au cours des trois dernières années (2010/2013) il en reste 22 en production ; qu'il doit aussi être relevé que la mortalité des veaux (pathologies pulmonaires et entérites) s'est améliorée avec leur délocalisation intervenue en 2012, et que l'expert avait relevé que leur nurserie était humide ; qu'en tout état de cause il n'a pas été contesté lors des débats que les mammites pouvaient avoir pour origine, même si la cause n'est pas la plus fréquente, des perturbations liées à des courants électromagnétiques (voir en ce sens le document établi conjointement par le ministère de l'agriculture et de la pêche, EDF, l'assemblée permanente des chambres d'agriculture et GROUPAMA, intitulé « Mieux connaître les risques des courants électriques parasites dans les exploitations d'élevage ») ; que concernant les conditions d'hygiène, d'alimentation et de suivi médical mises en oeuvre, l'expert M. E... met en évidence que le suivi médical assuré par l'éleveur sur son cheptel est constant, sans restriction, et que le cheptel est indemne de maladies réglementées soumises à prophylaxie ; que les intervenants vétérinaires qui suivent l'exploitation témoignent de pratiques au-dessus de la moyenne ; que la nature des pathologies rencontrées (mammites et problèmes respiratoires) sont communes, malgré leur fréquence ; que les docteurs B... et C... ont pu relever que les germes n'étaient pas spécialement agressifs et qu'il n'y avait pas de résistance aux antibiotiques ; qu'à cet égard l'expert souligne que la récidive des mammites, malgré l'application de traitement anti-infectieux, est moins classique, et que cela signe une fragilité ainsi qu'une sensibilité anormales des vaches ; qu'ainsi l'expert démontre qu'il existe un ou des facteurs fragilisant dans l'élevage, mais qu'aucun germe infectieux spécifique n'a été identifié pouvant jouer ce rôle ; que l'expert livre le même constat en concluant à une fragilité spécifique des veaux plus élevée que la moyenne départementale, malgré une absence d'identification de germes infectieux (pneumopathie, entérites) particulièrement résistants aux traitements. Pour l'infertilité où l'intervalle vêlage/vêlage est plus important, il relève qu'aucun agent spécifique causal n'a été mis en évidence ; que par ailleurs, l'expert a pu relever que l'entretien des locaux et l'hygiène témoignent de pratiques d'un bon niveau et au-dessus de la moyenne observable dans le secteur géographique, ce que les témoignages des vétérinaires intervenant et du GDS confirment dans la durée, sans que l'installation d'un robot de traite en 2012 ne soit venue modifier ce constat ; qu'enfin, l'alimentation donnée aux animaux apparaît classique selon les constatations de l'expert, qui a constaté un apport raisonné de concentrés permettant d'éviter de surcharger les animaux en énergie et de prévenir certaines pathologies ; que dans ces conditions il y a lieu de considérer qu'il n'existe aucune cause sanitaire due aux pratiques d'élevage et de soins apportés par l'éleveur, en lien avec l'hygiène, l'alimentation ou encore le suivi médical, qui soit à l'origine de la survenance des pathologies animales relevées ; que s'agissant de la conformité de l'installation électrique de l'exploitation agricole, le rapport d'expertise de la société SOCOTEC identifie trois sources de problèmes susceptibles de favoriser le développement ou le déplacement de courants électriques parasites, qui touchent les bâtiments d'élevage : – le défaut d'isolement du robot de traite installé en 2012 qui constitue une source de courants de fuite à la terre, – l'existence de deux prises de terre (habitation et exploitation), au lieu d'une seule, ce qui est susceptible de favoriser quand ils existent la circulation de courants parasites transités par le sol (effet point d'entrée/point de sortie – des valeurs différentes ont d'ailleurs été relevées 1 mA et 12 mA), – les structures métalliques de surface accessibles et dédiées au confinement du bétail (barrières, portails,...), ainsi qu'à son alimentation (mangeoires) ne sont pas connectées au circuit de terre (également pour la structure métallique au sol de l'ancienne salle de traite), voire aussi pour les sols lorsqu'il existe un ferraillage non connecté, ce qui au total ne rend donc pas équipotentiel une partie importante de l'environnement en contact avec le bétail, et peut en outre induire un champ magnétique dès lors qu'il existe des boucles métalliques fermées importantes ; que dans la mesure où ces défauts se situent au plus près des animaux atteints des pathologies précédemment évoquées et qu'ils peuvent favoriser la circulation de courants électromagnétiques, il y a lieu de considérer que l'exploitation de M. Y... et de EARL de la Basse Rivière ne présente pas une situation de conformité permettant d'écarter toute cause interne aux dommage ; que dans ces conditions M. Y... et l'EARL de la Basse Rivière doivent être déboutés de toutes leurs prétentions, la juridiction n'étant pas fondée à leur enjoindre de réaliser des travaux de mise en conformité ; que par ailleurs, il est important de relever que les mesures de champs réalisées par la société SOCOTEC n'ont pas permis de mesurer l'existence d'un champ d'induction magnétique dans les bâtiments d'exploitation pouvant être lié à la ligne THT, étant donné qu'au cours de ces mesures (17 heures 15/17 heures 43 le 18 avril 2013) il n'y avait pas de courant circulant dans les deux liaisons de la ligne THT (même si elle était restée sous tension). Quant au faible niveau de champ magnétique relevé dans ce créneau horaire de mesures, il n'était pas davantage dû au réseau électrique de l'exploitation qui était coupé, l'expert évoquant l'existence d'une autre source d'influence électromagnétique qui est d'origine indéterminée » ;

ALORS QUE, premièrement, les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction ordonnées par le juge sauf pour celui-ci à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus, sans avoir égard aux règles gouvernant la charge de la preuve ; qu'en s'abstenant de s'interroger en l'espèce, comme il lui était demandé (conclusions du 18 avril 2017, p. 9 et 13), sur le point de savoir si l'abstention répétée de la société RTE EDF TRANSORT à délivrer du courant à très haute tension dans la ligne litigieuse, tant lors de la première mesure d'instruction que lors de celle ensuite ordonnée en raison de l'absence de conclusions probantes de la première, n'était pas de nature à faire la preuve des nuisances provoquées sur la production laitière et bovine de l'EARL DE LA BASSE RIVIÈRE par le passage de cette ligne sur son exploitation agricole, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 11 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, lorsque l'institution d'une servitude légale au profit d'un concessionnaire de transport d'électricité entraîne pour le propriétaire du terrain qui la supporte un préjudice direct, matériel et certain, elle lui ouvre droit à indemnité ; qu'en l'espèce, M. Y... et l'EARL DE LA BASSE RIVIÈRE soutenaient que le passage d'un courant à 400.000 volts sur la ligne à très haute tension traversant leur exploitation agricole provoquait des champs électriques et magnétiques qui perturbaient leur cheptel et étaient à l'origine d'une perte importante de production laitière et bovine ; que ces demandes ont donné lieu à deux mesures d'instruction successives destinées à relever les niveaux d'exposition électrique et magnétique sur l'exploitation agricole ; que toutefois, tant lors de la première que de la seconde mesure d'instruction, il a été constaté par les juges que la ligne n'était pas chargée en courant, et en tout cas pas à ses valeurs maximales, de sorte qu'il n'a pas été possible de vérifier quel pouvait être le niveau des champs électriques et magnétiques générés par le passage de ce courant électrique à très haute tension ; qu'en se fondant néanmoins sur ces expertises pour cette raison que les valeurs observées correspondaient au transit annuel moyen, les juges du fond n'ont pas recherché comme il leur était demandé quels pouvaient être les effets de cette ligne à très haute tension lors du passage d'un courant à 400.000 volts ; qu'en se statuant de la sorte, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 323-7 du code de l'énergie ;

ET ALORS QUE, troisièmement, dans son arrêt du 22 septembre 2015, la cour d'appel a ordonné une nouvelle mesure d'instruction pour cette raison que les mesures effectuées par la société SOCOTEC l'avaient été en l'absence de courant à très haute tension dans la ligne litigieuse ; qu'en s'appuyant ensuite sur une expertise réalisée à son tour en l'absence de charge de la ligne à ses valeurs maximales, les juges du fond ont encore privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 323-7 du code de l'énergie.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 17-22.363
Date de la décision : 28/06/2018
Sens de l'arrêt : Rejet

Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 28 jui. 2018, pourvoi n°17-22.363, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.22.363
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