CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 27 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10430 F
Pourvoi n° G 17-22.776
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. B... Y... , domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 12 juin 2017 par la cour d'appel de Chambéry (3e chambre), dans le litige l'opposant à Mme Dalila X..., épouse Y..., domiciliée [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 mai 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. Y...
IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir accordé à Mme X... une prestation compensatoire de 50 000 € en capital, à la charge de M. Y...
AUX MOTIFS QUE, sur la prestation compensatoire : le divorce met fin au devoir de secours, mais l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; que cette prestation est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que dans la détermination des besoins et des ressources, le juge prend en considération notamment : - l'âge et l'état de santé des époux, - la durée du mariage, - les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps déjà consacré ou qu'il faudra encore y consacrer, ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, - leur qualification et leur situation professionnelles, - leur situation respective en matière de pension de retraite, - leur patrimoine estimé ou prévisible tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, - leurs droits existants et prévisibles ; que selon l'article 274 du code civil, la prestation compensatoire prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ; qu'il convenait en premier lieu de rechercher l'existence objective d'une disparité actuelle ou dans un futur proche entre les deux ex-époux et d'analyser ensuite les causes de cette disparité pour apprécier le bien-fondé de la demande de prestation compensatoire et dans l'affirmative les sommes ou compensations pouvant être allouées pour y remédier ; que le droit à prestation compensatoire, du fait de l'appel total diligenté par Mme Dalila X... devait s'apprécier à la date à laquelle le divorce acquiert force de chose jugée, soit au cas d'espèce à compter du présent arrêt et être analysé au vu des seules et dernières pièces produites par les parties ; qu'en l'espèce, Mme Dalila X... était âgée de 48 ans et Mr B... Y... de 51 ans, que le mariage avait duré 19 ans dont 13 ans de vie maritale effective, que le couple avait deux enfants qui étaient toujours à charge ; qu'il était constant que Mme Dalila X... avait cessé toute activité professionnelle à la naissance de son premier enfant, soit en janvier 1999 et n'avait exercé aucune activité professionnelle jusqu'à la séparation du couple ; que ce choix, contrairement à ce que soutenait Mr B... Y... , était bien un choix de couple, dès lors que les revenus dégagés par l'activité du mari étaient suffisants pour financer l'intégralité des dépenses du ménage tout en permettant à Mme Dalila X... de se consacrer à l'éducation des enfants et à la tenue de son foyer, compte tenu de l'activité prenante du mari ; qu'en effet, de par son activité de chef concierge dans un établissement hôtelier de grand luxe sur [...] et malgré son indéniable implication dans la vie familiale, Mr B... Y... qui avait nécessairement des horaires d'une grande amplitude et qui devait répondre aux nombreuses sollicitations des clients de l'établissement, se trouvait ainsi de fait déchargé de l'ensemble des tâches et contraintes matérielles de son foyer, pour se consacrer pleinement à son activité professionnelle à la satisfaction de la clientèle et de la direction de l'établissement, ce qui était le cas puisqu'il occupait toujours cet emploi ; qu'en n'ayant aucune activité professionnelle pendant la vie maritale, Mme Dalila X... avait non seulement permis la valorisation de l'activité de son mari au sein des [...] mais avait également et surtout sacrifié partie de ses droits à retraite ; que Mr B... Y... qui était toujours chef concierge dans le même établissement hôtelier perçoit un revenu net moyen mensuel imposable de 3.279,98 euros (dernière fiche de salaire de septembre 2016), en ce compris les avantages en nature ; qu'il ne pouvait valablement soutenir que les pourboires ne seraient que de 350,00 euros par mois, ce qui apparaissait peu compatible avec la fonction exercée au sein d'un établissement de grand luxe, tel que les [...] à [...], que même si aucun élément chiffré n'était versé aux débats sur la réalité de cette rémunération complémentaire, il n'était pas illogique de dire que la rémunération en pourboires était de nature à augmenter de manière significative la rémunération de base de l'intéressé ; qu'en ce qui concernait Mme Dalila X..., celle-ci était gérante d'une agence immobilière dont elle détenait la totalité des parts sociales ; que cette agence immobilière située à [...], soit à proximité de la station de [...], avait nécessairement vocation à se développer compte tenu de l'activité immobilière de la région où étaient situées ces deux communes et qui étaient connues internationalement pour leurs activités touristiques et de loisirs tant estivales qu'hivernales ; que Mme Dalila X... ne produisait que le bilan simplifié de sa société pour l'année 2014, soit pour un chiffre d'affaire de 64.098,00 euros, en très nette progression cependant par rapport à l'année 2013, puisque celui-ci n'était que de 43.657,00 euros ; qu'il n'était justifié d'aucun autre document comptable postérieurement à cette date, qu'au regard de l'objet de cette société et de son emplacement, l'activité ne pouvait être que progressive pour les exercices à venir et permettre ainsi à Mme Dalila X... d'augmenter de façon régulière ses revenus et ce d'autant plus que l'exploitation de l'agence par Mme Dalila X... était encore relativement récente (l'achat des parts étant d'octobre 2013) ; que la production des seules fiches de paie du premier trimestre 2015, faisant état d'un revenu net moyen mensuel imposable de 1176,96 euros, ne permettait pas en effet de connaître effectivement la réalité de l'activité dégagée par la Sarl la C... immobilier compte tenu de ce qui avait été rappelé ci-dessus ; qu'en ce qui concernait le patrimoine immobilier des époux, il était constant que le bien immobilier commun avait été vendu en 2014 au prix de 810.000,00 euros, qu'une fois la totalité des crédits payés, chaque époux devra recevoir une somme de 317.450,00 euros, chacun ayant déjà perçu la somme de 175.000,00 euros, le solde soit 284.900,00 euros étant actuellement séquestré dans l'attente de la liquidation ; qu'en l'absence de projet liquidatif versé aux débats, Mr B... Y... indiquant cependant dans ses écritures qu'il aurait effectué d'importants travaux et financé la quasi-totalité du bien commun par son salaire, la cour ne disposait pas en l'état d'élément pour s'assurer que le solde du prix séquestré sera effectivement réparti de manière égalitaire entre les deux époux, ou si une récompense sera éventuellement revendiquée par le mari diminuant ainsi d'autant la part revenant à l'épouse ; qu'il était justifié également que Mr B... Y... avait perçu à ce jour de la succession de son père, une somme globale de 42.804,00 euros et qu'il détenait au titre de ses avoirs personnels en 2015, un capital global de 461,29 euros ; Mme Dalila X... ayant perçu quant à elle une commission d'un peu plus de 20.000,00 euros sur la vente du bien commun et disposant selon ses propres déclarations d'aucun avoir en compte, à l'exception de ceux provenant de la vente du bien commun ; que la contribution alimentaire versée pour l'entretien et l'éducation des enfants, si elle ne peut être prise en compte dans les revenus du parent bénéficiaire, doit néanmoins être retenue au titre des charges du parent qui la verse ; que la contribution alimentaire pour Nassim et qui était à la charge de Mr B... Y... , avait été supprimée par le jugement déféré, Mr B... Y... n'ayant à sa charge que la contribution pour Younès, soit 350,00 euros par mois, qu'il faisait cependant état dans ses charges d'une dépense mensuelle complémentaire de 1.150,00 euros, dont 105,800 euros d'abonnement à Canal Plus, qui ne pouvait être considérée comme une dépense obligatoire destinée aux enfants ; que pour les autres charges fixes, Mr B... Y... ne pouvait inclure dans ses charges le remboursement opéré au titre d'un contrôle fiscal, qui ne correspondait nullement à une charge fixe obligatoire ; que le premier juge avait constaté l'accord des parties pour que Mr B... Y... prenne en charge intégralement les frais de scolarité de Nassim et les frais de mutuelle des deux enfants, que ces dépenses étaient donc à prendre en compte au titre des charges supportées par Mr B... Y... (soit 423,00 euros par mois) ; que de son côté Mme Dalila X... assumait également le quotidien de Nassim du fait de la résidence alternée ; que dès lors il existait bien une disparité dans les conditions de vie des époux, au détriment de Mme Dalila X..., du fait de la rupture du lien conjugal justifiant le paiement par Mr B... Y... d'une prestation compensatoire en capital de 50.000,00 euros ;
1°) ALORS QUE le fait que l'épouse n'ait pas exercé d'activité professionnelle pendant le mariage ne peut, s'il s'est agi d'un choix personnel, être pris en compte pour l'appréciation de la disparité créée par la rupture du lien conjugal ; qu'en jugeant que le fait que Mme X... n'ait pas exercé d'activité professionnelle pendant le mariage procédait d'un choix de couple et non d'un choix personnel de l'épouse, au motif inopérant que les revenus professionnels de l'époux suffisaient pour financer l'intégralité des dépenses du ménage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;
2°) ALORS QUE le fait que l'époux ait une activité professionnelle prenante n'implique pas forcément que la décision de l'épouse de n'exercer aucun emploi procède d'un choix de couple ; qu'en ayant déduit de la circonstance que M. Y... avait une activité professionnelle prenante le fait que Mme X... avait cessé toute activité professionnelle pour se consacrer entièrement à son foyer et avait déchargé son époux de toute tâche et contrainte y afférentes, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
3°) ALORS QUE le fait qu'un époux travaille seul et a une activité professionnelle n'induit pas qu'il est déchargé des tâches et contraintes du foyer ; qu'en ayant jugé que Mme X... avait cessé toute activité professionnelle lors de son mariage, afin de décharger son mari de toute tâche et toute contrainte au sein de la famille, sans rechercher s'il ne résultait pas de nombreuses attestations (pièces 16 à 21 et pièce n° 27) que M. Y... emmenait et allait chercher régulièrement ses enfants à l'école, se consacrait à leurs activités et assurait nombre de tâches ménagères, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;
4°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent appuyer leur décision sur une motivation hypothétique ; qu'en ayant supposé que les pourboires perçus par M. Y... seraient supérieurs à 350 € et augmenteraient de manière significative sa rémunération, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent modifier les termes du litige ; qu'en énonçant qu'aucun document comptable relatif à l'agence immobilière de Mme X... n'était versé postérieurement au bilan simplifié de l'année 2014, quand le bilan au 31 octobre 2016 était produit (pièce adverse n° 13) et démontrait que, comme le soutenait l'exposant, le chiffre d'affaires de l'entreprise avait bien progressé, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
6°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; qu'en ayant jugé qu'aucune pièce comptable relative à la situation de la société C... n'était produite postérieurement au bilan de l'année 2014, la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces de Mme A... qui mentionnait, en pièce n° 13, le bilan de l'entreprise au 31 octobre 2016, en violation de l'article 1134 ancien du code civil ;
7°) ALORS QUE chaque époux doit établir sa situation patrimoniale, notamment ses revenus, au moment du divorce ; qu'en retenant une disparité de situation au détriment de Mme X..., après avoir pourtant constaté que celle-ci n'avait produit aucun document comptable postérieur à l'année 2014 et qu'il ne lui était pas possible de connaître effectivement la réalité de l'activité dégagée par la société C..., la cour d'appel a violé les articles 270, 271 et 1315 ancien du code civil ;
8°) ALORS QUE les dépenses d'un époux exposées au titre de l'entretien des enfants constituent une charge de celui-ci ; qu'en ayant pris en considération les seuls frais de mutuelle et de scolarité acquittés par M. Y..., sans prendre en compte d'autres frais incontestables (frais de transport des enfants, leurs frais d'hébergement leur permettant de pratiquer le football américain, leurs abonnements téléphoniques et leur argent de poche), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil.